Un très important rappel à l'ordre du Vatican
Publié : mar. 10 juil. 2007 17:50
Aujourd'hui, 10 juillet 2007, la Congrégation pour la doctrine de la foi du Vatican (l'ex-Saint Office) vient de publier une très importante déclaration qui remet les pendules à l'heure en matière d'oecuménisme. En voici la traduction française que je reproduis ci-dessous en italiques:
CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI
RÉPONSES À DES QUESTIONS CONCERNANT CERTAINS ASPECTS
Introduction
Avec la Constitution Dogmatique Lumen gentium et les Décrets sur l’œcuménisme (Unitatis redintegratio) et les Églises orientales catholiques (Orientalium Ecclesiarum), le Concile Vatican II a contribué de manière décisive au renouveau de l’ecclésiologie catholique. Les Souverains Pontifes ont eux aussi voulu offrir sur ce point des approfondissements et surtout des orientations pratiques : Paul VI avec l’Encyclique Ecclesiam suam (1964) et Jean-Paul II avec l’Encyclique Ut unum sint (1995).
Les recherches ultérieures des théologiens, pour toujours mieux élucider les divers aspects de l’ecclésiologie, ont permis l’essor d’une ample littérature sur ce sujet. Il s’agit là de thèmes certainement féconds, mais qui ont aussi exigé des précisions et des explications, notamment dans la Déclaration Mysterium Ecclesiae (1973), la Lettre aux Évêques de l’Église Catholique Communionis notio (1992) et la Déclaration Dominus Iesus (2000), toutes publiées par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.
La richesse de la thématique et la nouveauté de nombreuses thèses ne cessent de provoquer la réflexion théologique ; elles donnent lieu à des études parfois non exemptes d’erreurs et d’ambiguïtés qui ont été attentivement examinées par la Congrégation. À la lumière de l’ensemble de la doctrine catholique sur l’Église, la Congrégation se propose de préciser ici la signification authentique de certaines expressions ecclésiologiques du Magistère, pour que le débat théologique ne soit pas faussé par des confusions ou des malentendus.
QUESTIONS
Première question : Le Concile Œcuménique Vatican II a-t-il changé la doctrine antérieure sur l’Église ?
Réponse. Le Concile n’a pas voulu changer et n’a de fait pas changé la doctrine en question, mais a bien plutôt entendu la développer, la formuler de manière plus adéquate et en approfondir l’intelligence.
Jean XXIII l’avait très clairement affirmé au début du Concile 1. Paul VI le confirma ensuite 2 ; il s’exprimait ainsi en promulguant la Constitution Lumen gentium : " Le meilleur commentaire que l’on puisse en faire, semble-t-il, est de dire que vraiment cette promulgation ne change en rien la doctrine traditionnelle. Ce que veut le Christ, nous le voulons aussi. Ce qui était, demeure. Ce que l’Église a enseigné pendant des siècles, nous l’enseignons également. Ce qui était jusqu’ici simplement vécu se trouve maintenant exprimé ; ce qui était incertain est éclairci ; ce qui était médité, discuté et en partie controversé, parvient aujourd’hui à une formulation sereine 3. " À plusieurs reprises, les Évêques ont manifesté et adopté le même point de vue 4.
Seconde question. Comment doit être comprise l’affirmation selon laquelle l’Église du Christ subsiste dans l’Église Catholique ?
Réponse. Le Christ " a établi sur la terre " une Église unique et l’institua comme " assemblée visible et communauté spirituelle 5 " : depuis son origine, elle n’a cessé d’exister au cours de l’histoire et toujours elle existera, et c’est en elle seule que demeurent à jamais tous les éléments institués par le Christ lui-même 6. " C’est là l’unique Église du Christ, que nous confessons dans le symbole une, sainte, catholique et apostolique […]. Cette Église, constituée et organisée en ce monde comme une société, subsiste dans l’Église catholique gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques en communion avec lui 7. "
Dans le numéro 8 de la Constitution Dogmatique Lumen gentium, ‘subsister’ signifie la perpétuelle continuité historique et la permanence de tous les éléments institués par le Christ dans l’Église catholique 8, dans laquelle on trouve concrètement l’Église du Christ sur cette terre.
Selon la doctrine catholique, s’il est correct d’affirmer que l’Église du Christ est présente et agissante dans les Églises et les Communautés ecclésiales qui ne sont pas encore en pleine communion avec l’Église catholique, grâce aux éléments de sanctification et de vérité qu’on y trouve 9, le verbe ‘subsister’ ne peut être exclusivement attribué qu’à la seule Église catholique, étant donné qu’il se réfère à la note d’unité professée dans les symboles de la foi (‘Je crois en l’Église, une’) ; et cette Église une ‘subsiste’ dans l’Église catholique 10.
Troisième question. Pourquoi utilise-t-on l’expression ‘subsiste dans’, et non pas tout simplement le verbe ‘est’ ?
Réponse. L’usage de cette expression, qui indique la pleine identité de l’Église du Christ avec l’Église catholique, ne change en rien la doctrine sur l’Église, mais a pour raison d’être de signifier plus clairement qu’en dehors de ses structures, on trouve " de nombreux éléments de sanctification et de vérité ", " qui, appartenant proprement par don de Dieu à l’Église du Christ, appellent par eux-mêmes l’unité catholique 11. "
" En conséquence, ces Églises et Communautés séparées, bien que nous les croyions victimes de déficiences, ne sont nullement dépourvues de signification et de valeur dans le mystère du salut. L’Esprit du Christ, en effet, ne refuse pas de se servir d’elles comme de moyens de salut dont la force dérive de la plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l’Église catholique 12. "
Quatrième question. Pourquoi le Concile Œcuménique Vatican II attribue-t-il le nom " d’Église " aux Églises orientales séparées de la pleine communion avec l’Église catholique ?
Réponse. Le Concile a voulu assumer l’usage traditionnel de ce nom. " Puisque ces Églises, bien que séparées, ont de vrais sacrements, surtout en vertu de la succession apostolique : le Sacerdoce et l’Eucharistie, qui les unissent intimement à nous 13 ", elles méritent le titre d’" Églises particulières et locales 14 ", et sont appelées Églises sœurs des Églises particulières catholiques 15.
" Ainsi donc, par la célébration de l’Eucharistie du Seigneur en chaque Église particulière, l’Église de Dieu s’édifie et grandit 16. " Cependant, étant donné que la communion avec l’Église catholique, dont le Chef visible est l’Évêque de Rome et Successeur de Pierre, n’est pas un complément extérieur à l’Église particulière, mais un de ses principes constitutifs internes, la condition d’Église particulière dont jouissent ces vénérables Communautés chrétiennes souffre d’une déficience 17.
Par ailleurs, la plénitude de la catholicité propre à l’Église, gouvernée par le Successeur de Pierre et les Évêques en communion avec lui, est entravée dans sa pleine réalisation historique par la division des chrétiens 18.
Cinquième question. Pourquoi les textes du Concile et du Magistère postérieur n’attribuent-ils pas le titre " d’Église " aux Communautés chrétiennes nées de la Réforme du XVIe siècle ?
Réponse. Parce que, selon la doctrine catholique, ces Communautés n’ont pas la succession apostolique dans le sacrement de l’ordre. Il leur manque dès lors un élément essentiel constitutif de l’Église. Ces Communautés ecclésiales, qui n’ont pas conservé l’authentique et intégrale réalité du Mystère eucharistique 19, surtout par la suite de l’absence de sacerdoce ministériel, ne peuvent être appelées " Églises " au sens propre 20 selon la doctrine catholique.
Au cours d’une audience accordée au soussigné Cardinal Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Sa Sainteté le Pape Benoît XVI a ratifié et confirmé ces Réponses adoptées par la session ordinaire de cette Congrégation, et en a ordonné la publication.
Rome, au siège de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le 29 juin 2007, en la solennité des saints Pierre et Paul, Apôtres.
William Cardinal Levada
Préfet
+ Angelo Amato, S.D.B.
Archevêque titulaire de Sila
Secrétaire
_______________________
1 JEAN XXIII, Discours (11 octobre 1962) : " Le Concile [...] veut transmettre dans son intégrité, sans l’affaiblir ni l’altérer, la doctrine catholique. [...] Ce qui est nécessaire aujourd’hui, c’est l’adhésion de tous, dans un amour renouvelé, dans la paix et la sérénité, à toute la doctrine chrétienne. [...] Il faut que, répondant au vif désir de tous ceux qui sont sincèrement attachés à tout ce qui est chrétien, catholique et apostolique, cette doctrine soit plus largement et hautement connue, que les âmes soient plus profondément imprégnées d’elle, transformées par elle. Il faut que cette doctrine certaine et immuable, qui doit être respectée fidèlement, soit approfondie et présentée de la façon qui répond aux exigences de notre époque. En effet, autre est le dépôt lui-même de la foi, c’est-à-dire les vérités contenues dans notre vénérable doctrine, et autre est la forme sous laquelle ces vérités sont énoncées, en leur conservant toutefois le même sens et la même portée " : AAS 54 [1962] 791-792 ; La Documentation Catholique 59 [1962] 1382-1383.
2 Cf. PAUL VI, Discours (29 septembre 1963) : AAS 55 [1963] 847-852.
3 PAUL VI, Discours (21 novembre 1964) : AAS 56 [1964] 1009-1010 ; La Documentation Catholique 61 [1964] 1539.
4 Le Concile a voulu exprimer l’identité de l’Église du Christ avec l’Église Catholique. C’est ce qu’on retrouve dans les discussions concernant le Décret Unitatis redintegratio. Le schéma du Décret fut proposé en session plénière le 23 septembre 1964 avec une Relatio (Act Syn III/II 296-344). Aux modi envoyés par les évêques dans les mois suivants, le Secrétariat pour l’Unité des Chrétiens répondit le 10 novembre 1964 (Act Syn III/VII 11-49). De l’Expensio modorum on citera ici quatre textes concernant la première réponse du présent document.
A) [in Nr. 1 (Prooemium) Schema Decreti : Act Syn III/II 296, 3-6]
"Pag. 5, lin. 3-6: Videtur etiam Ecclesiam catholicam inter illas Communiones comprehendi, quod falsum esset.
R(espondetur): Hic tantum factum, prout ab omnibus conspicitur, describendum est. Postea clare affirmatur solam Ecclesiam catholicam esse veram Ecclesiam Christi" (Act Syn III/VII 12).
B) [in Caput I in genere: Act Syn III/II 297-301]
"4 – Expressius dicatur unam solam esse veram Ecclesiam Christi; hanc esse Catholicam Apostolicam Romanam; omnes debere inquirere, ut eam cognoscant et ingrediantur ad salutem obtinendam...
R(espondetur): In toto textu sufficienter effertur, quod postulatur. Ex altera parte non est tacendum etiam in aliis communitatibus christianis inveniri veritates revelatas et elementa ecclesialia" (Act Syn III/VII 15). Cf. aussi ibidem n. 5.
C) [in Caput I in genere: Act Syn III/II 296s]
"5 – Clarius dicendum esset veram Ecclesiam esse solam Ecclesiam catholicam romanam...
R(espondetur): Textus supponit doctrinam in constitutione ‘De Ecclesia’ expositam, ut pag. 5, lin. 24-25 affirmatur" (Act Syn III/VII 15). La commission qui devait évaluer les amendements au Décret Unitatis redintegratio, exprime donc clairement l’identité de l’Église du Christ avec l’Église catholique, ainsi que son unicité, considérant que cette doctrine est fondée sur la Constitution Lumen gentium.
D) [in Nr. 2 Schema Decreti: Act Syn III/II 297s]
"Pag. 6, lin. 1-24: Clarius exprimatur unicitas Ecclesiae. Non sufficit inculcare, ut in textu fit, unitatem Ecclesiae.
R(espondetur): a) Ex toto textu clare apparet identificatio Ecclesiae Christi cum Ecclesia catholica, quamvis, ut oportet, efferantur elementa ecclesialia aliarum communitatum".
Pag. 7, lin. 5: "Ecclesia a successoribus Apostolorum cum Petri successore capite gubernata (cf. novum textum ad pag. 6, lin. 33-34) explicite dicitur ‘unicus Dei grex’ et lin. 13 ‘una et unica Dei Ecclesia’" (Act Syn III/VII).
Ces deux expressions se trouvent dans le Décr. Unitatis redintegratio, nn. 2.5 et 3.1.
5 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. Dogm. Lumen gentium, n. 8.1.
6 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, DÉCR. UNITATIS REDINTEGRATIO, NN. 3.2 ; 3.4 ; 3.5 ; 4.6.
7 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. Dogm. Lumen gentium, n. 8.2.
8 Cf. CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Mysterium Ecclesiae, n. 1.1 : AAS 65 [1973] 397 ; Décl. Dominus Iesus, n. 16.3 : AAS 92 [2000-II] 757-758 ; À propos du livre ‘Église: charisme et pouvoir’ du P. Leonardo Boff : AAS 77 [1985] 758-759.
9 Cf. JEAN-PAUL II, Encycl. Ut unum sint, n. 11.3 : AAS 87 [1995-II] 928.
10 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. Dogm. Lumen Gentium, n. 8.2.
11 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. Dogm. Lumen Gentium, n. 8.2.
12 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 3.4.
13 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 15.3 ; CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Lettre Communionis notio, n. 17.2 : AAS 85 [1993-II] 848.
14 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 14.1.
15 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 14.1 ; JEAN-PAUL II, Encycl. Ut unum sint, nn. 56s : AAS 87 [1995-II] 954s.
16 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 15.1.
17 Cf. CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Lettre Communionis notio, n. 17.3 : AAS 85 [1993-II] 849.
18 Cf. Ibidem.
19 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 22.3.
20 Cf. CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Iesus, n. 17.2 : AAS 92 [2000-II] 758.
[01035-03.01] [Texte original: Latin]
Ce rappel du Vatican, qui souligne que le but de l'oecuménisme est l'union des Eglises chrétiennes autour de la Papauté, contraste heureusement avec les discours de plus en plus équivoques et fallacieux des porte-parole "autorisés" (par eux-mêmes) de l'Orthodoxie en Europe occidentale quant à ces questions. Il y a fort à parier qu'entre celui qui s'assume tel qu'il est et celui qui est obsédé à l'idée de ne pas faire de vagues, beaucoup de gens feront vite leur choix et que le contraste entre ces deux attitudes accélèrera le mouvement de passage à l'Eglise catholique romaine de francophones convertis à l'Orthodoxie et épuisés par les années de persécution subies de la part de certains éléments phylétistes du clergé ainsi que par le vide du discours ecclésiastique officiel. Car le syncrétisme adogmatique qui ressort de plus en plus du discours orthodoxe officiel en Europe occidental n'est qu'une manifestation parmi d'autres d'une haine de soi-même qui se manifeste aussi par l'hostilité à l'égard des pays d'accueil, la haine à l'encontre des convertis, la démolition progressive de la liturgie et de l'administration des saints mystères (tel prêtre décidant de faire intervenir une chorale protestante dans le cadre d'une célébration de la divine Liturgie, tel autre décidant d'administrer le baptême suivi de la communion, mais sans chrismation, sans que ces dérives suscitent la moindre réaction de la part de l'autorité épiscopale), la négation de la tradition hésychaste, etc., etc.
D'un point de vue orthodoxe, ou simplement chrétien, ou encore plus simplement logique, on ne peut certes qu'être frappé par une déficience visible dans la prise de position du Vatican à l'égard de l'Eglise orthodoxe et des Eglises vieilles-orientales ("nestorienne" et "monophysites") regroupées sous le terme d' "Églises orientales séparées de la pleine communion avec l’Église catholique" dans la quatrième question de la déclaration ci-dessus. En effet, si le Vatican reconnaît que notre eucharistie et notre sacerdoce sont valides, je ne vois pas ce que la communion avec le pape de Rome ou sa reconnaissance pourraient nous apporter de plus - même en me plaçant dans la logique vaticane. Si j'ai le Corps et le Sang du Christ, que peut m'apporter de plus un homme?
On notera en outre que l'affirmation selon laquelle "la communion avec l’Église catholique, dont le Chef visible est l’Évêque de Rome et Successeur de Pierre, n’est pas un complément extérieur à l’Église particulière, mais un de ses principes constitutifs internes" ne trouve bien sûr aucun fondement dans la Tradition écrite ou non écrite, bref, dans le dépôt reçu de Notre Seigneur Jésus-Christ et conservé fidèlement jusqu'à ce jour dans l'Eglise orthodoxe, mais comme cette affirmation est la raison d'être de l'Eglise catholique romaine, il est bien normal de la retrouver telle quelle. Il est toutefois de notre devoir de rappeler cum grano salis qu'il s'agit d'une affirmation gratuite.
Enfin, il est significatif que ce document ne mentionne comme pierre d'achoppement entre la Papauté et l'Eglise orthodoxe que la question papale, qui n'est bien sûr qu'un point relativement secondaire par rapport à des questions fondamentales comme le Filioque, les conceptions différentes de la vie spirituelle et même de la prière, la grâce créée, les énergies divines, la déification, le purgatoire, l'eschatologie, etc., etc. En toute bonne foi, je ne peux plus mentionner les divergences dans l'administration des saints mystères, puisque j'ai pu constater qu' il était maintenant possible qu'un prêtre décidât de son propre chef de rompre le lien entre le baptême et le sceau de l'Esprit-Saint - ce qui revient à dire qu'il pourrait à terme ne plus avoir de pratique orthodoxe en la matière, avec toutes les conséquences que cela entraînera.
Toutefois, le silence de la Congrégation pour la doctrine de la foi sur les points de divergence autres que la question papale, points de divergence qui font que nous sommes tout de même en présence de deux spiritualités incompatibles, est en ligne avec les déclarations antérieures de Benoît XVI, à l'époque où il était encore le cardinal Ratzinger, et qui faisait de la soumission au Vatican, sans adoption des "dogmes du deuxième millénaire", la seule condition de la "réunion" des orthodoxes. Il est possible aussi que de telles omissions arrangent certains de ses interlocuteurs orthodoxes beaucoup plus préoccupés de diplomatie et de géopolitique que de vie religieuse.
Sous les réserves que je viens de faire et que je devais faire, je pense que nous devons saluer ce texte pour sa grande franchise. Nous savons bien sûr que l'indication que le but de l'oecuménisme est la réunion des chrétiens autour du Pape ne suscitera aucun retour en arrière de la part des orthodoxes oecuménistes qui continueront à nier l'évidence pourtant rappelée par le cardinal Levada. Nous pouvons aussi prévoir que l'affirmation par le Vatican qu'il constitue la seule véritable Eglise ne suscitera aucun rappel de la part des orthodoxes que c'est l'Eglise orthodoxe voulue et fondée par le Christ qui constitue l'Eglise une, sainte, catholique-conciliaire et apostolique du Credo. C'est dommage, car, contrairement aux prétentions du Vatican, les nôtres peuvent être étayées par n'importe quelle analyse objective et dépassionnée de la situation, et en particulier de l'Histoire ecclésiastique, ne serait-ce que par l'étude de la question "qui s'est séparé de qui?". C'est d'ailleurs cette simple analyse dépassionnée du problème de la division et de la réunion des chrétiens qui avait conduit l'abbé Guettée à entrer dans le sein de l'Eglise orthodoxe en 1861. Il est malheureux qu'une démarche comme celle de l'archiprêtre Wladimir Guettée serait aujourd'hui incompréhensible pour la grande majorité des "autorités" de l'Eglise orthodoxe en Europe occidentale.
De toute façon, c'est ici le lieu de rappeler que les monastères de la sainte Montagne de l'Athos ont déjà répondu d'avance, dans le cadre de leur Déclaration du 30 décembre 2006, à la déclaration vaticane du 10 juillet 2007.
Rappelons les deux passages topiques de la Déclaration du 30 décembre 2006 (cf. viewtopic.php?t=2149 ).
En premier lieu celui-ci:
Deux passages qui rappellent de manière éloquente que l'Orthodoxie est l'Eglise fondée par le Christ et qu'en elle repose le seul espoir de réunion des chrétiens, et deux passages qui me semblent représenter la réponse à la déclaration vaticane de ce jour. Il sera sans doute inutile d'espérer une autre réponse de la part de nos hiérarchies engagées dans leur diplomatie.
M'attendant aux diverses menaces que ne manqueront pas de provoquer les libres propos que je me suis permis d'écrire ici, je préviens d'avance, et en toute charité, ceux qui regrettent que l'Orthodoxie n'ait pas connu l'Inquisition et qui se donnent tant de peine à mettre en place une sorte d'Inquisition médiatique et verbale sanctionnant les infractions à la langue de coton d'un discours ecclésial convenu et sans racines spirituelles, que je suis adulte, indépendant, jouissant de la liberté des enfants de Dieu et que j'ai passé depuis longtemps l'âge de me prosterner devant telle ou telle tyrannie ecclésiastique, qu'elle soit à Rome ou ailleurs. Je ne crois pas être le seul dans cette situation sur le présent forum.
Ceci étant rappelé, nous devons être reconnaissants à la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi d'avoir rappelé ces quelques évidences. Nous avons eu trop souvent sur ce forum la visite de romano-catholiques venus faire du prosélytisme mielleux en se basant sur la théorie de la bipulmonarité ou sur quelque autre faribole syncrétiste. Nous avons eu de nombreuses visites - surtout sur l'ancien forum - de personnes qui n'avaient rejoint l'Eglise orthodoxe que parce qu'elle leur semblait encore plus moderniste que l'Eglise catholique romaine reprise en main par Jean-Paul II et qui voulaient en quelque sorte trouver une justification à leur choix de s'asseoir entre deux chaises. Chacun de nos rappels de la tradition orthodoxe dans ce domaine, et de la conscience qu'a l'Orthodoxie d'être l'Eglise voulue et fondée par le Christ, ne serait-ce que nos citations de la déclaration sur l'oecuménisme des évêques du patriarcat de Moscou (2000), nous a valus des bordées d'injures et l'habituelle variante religieuse de la reductio ad hitlerum, degré zéro de la controverse, qu'est l'accusation d'intégrisme. Je ne m'étalerais même pas sur le cas extraordinaire que fut l'écumeur des forums, alors simple catéchumène de l'Eglise romaine, qui se gaussait de nous sur le forum catholique traditionaliste en disant que nous ne représentions que nous-mêmes, mais qui n'était pas gêné par le fait que nous avions dû trois fois l'exclure de notre forum sous divers pseudonymes. Il est pour le moins inconséquent de se moquer d'un cercle de gens dans lequel on entre pourtant par la fenêtre chaque fois que l'on en est chassé par la porte. (Il est vrai que ce grand apologète du cardinal Stepinac porte maintenant l'inconséquence jusqu'à poster sur tel autre forum ses messages à la gloire de l'Eglise romaine "seule Eglise authentique" en illustrant son "avatar" d'une icône de saint Sylvain de l'Athos, c'est-à-dire un de nos saints récemment canonisés: c'est montrer à quel point, pour ces gens-là, l'Orthodoxie n'est, au mieux, qu'un exotisme esthétisant, au pire, qu'un supplétif dans leur petite guerre contre le protestantisme.)
De même qu'il est complètement inconséquent de reprocher aux autres d'être fermes dans leurs convictions quand on appartient soi-même à une Eglise qui vient de réaffirmer qu'elle se considère comme la seule véritable Eglise.
Et après tout, pour reprendre une belle formule de notre frère Bernard Le Caro, il y eut un temps où les catholiques romains et les orthodoxes préféraient être séparés dans la vérité qu'unis dans l'erreur. Et, de fait, une telle "unité" paradoxale vaut mieux que l'union sans Dieu ou contre Dieu que l'on nous prépare. Il est possible que le rappel à l'ordre de la Congrégation pour la doctrine de la foi du 10 juillet 2007 marque le retour à cette "unité" paradoxale et à la primauté de la recherche de la vérité sur l'exaltation de l'erreur.
Au confusionnisme entretenu par certains de nos visiteurs, nous pourrons désormais opposer ces fortes paroles de la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi.
J'espère ainsi qu'ils oseront se regarder dans un miroir, et qu'ils n'auront plus l'effronterie de nous traiter de fanatiques ou d'intégristes parce que nous tenons, à propos de notre Eglise, le même discours qu'eux à propos de la leur.
La seule différence étant que nous, nous pouvons prouver ce que nous affirmons.
Différence qui, je l'espère, ne devrait pas suffire à faire de nous des fanatiques...
CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI
RÉPONSES À DES QUESTIONS CONCERNANT CERTAINS ASPECTS
Introduction
Avec la Constitution Dogmatique Lumen gentium et les Décrets sur l’œcuménisme (Unitatis redintegratio) et les Églises orientales catholiques (Orientalium Ecclesiarum), le Concile Vatican II a contribué de manière décisive au renouveau de l’ecclésiologie catholique. Les Souverains Pontifes ont eux aussi voulu offrir sur ce point des approfondissements et surtout des orientations pratiques : Paul VI avec l’Encyclique Ecclesiam suam (1964) et Jean-Paul II avec l’Encyclique Ut unum sint (1995).
Les recherches ultérieures des théologiens, pour toujours mieux élucider les divers aspects de l’ecclésiologie, ont permis l’essor d’une ample littérature sur ce sujet. Il s’agit là de thèmes certainement féconds, mais qui ont aussi exigé des précisions et des explications, notamment dans la Déclaration Mysterium Ecclesiae (1973), la Lettre aux Évêques de l’Église Catholique Communionis notio (1992) et la Déclaration Dominus Iesus (2000), toutes publiées par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.
La richesse de la thématique et la nouveauté de nombreuses thèses ne cessent de provoquer la réflexion théologique ; elles donnent lieu à des études parfois non exemptes d’erreurs et d’ambiguïtés qui ont été attentivement examinées par la Congrégation. À la lumière de l’ensemble de la doctrine catholique sur l’Église, la Congrégation se propose de préciser ici la signification authentique de certaines expressions ecclésiologiques du Magistère, pour que le débat théologique ne soit pas faussé par des confusions ou des malentendus.
QUESTIONS
Première question : Le Concile Œcuménique Vatican II a-t-il changé la doctrine antérieure sur l’Église ?
Réponse. Le Concile n’a pas voulu changer et n’a de fait pas changé la doctrine en question, mais a bien plutôt entendu la développer, la formuler de manière plus adéquate et en approfondir l’intelligence.
Jean XXIII l’avait très clairement affirmé au début du Concile 1. Paul VI le confirma ensuite 2 ; il s’exprimait ainsi en promulguant la Constitution Lumen gentium : " Le meilleur commentaire que l’on puisse en faire, semble-t-il, est de dire que vraiment cette promulgation ne change en rien la doctrine traditionnelle. Ce que veut le Christ, nous le voulons aussi. Ce qui était, demeure. Ce que l’Église a enseigné pendant des siècles, nous l’enseignons également. Ce qui était jusqu’ici simplement vécu se trouve maintenant exprimé ; ce qui était incertain est éclairci ; ce qui était médité, discuté et en partie controversé, parvient aujourd’hui à une formulation sereine 3. " À plusieurs reprises, les Évêques ont manifesté et adopté le même point de vue 4.
Seconde question. Comment doit être comprise l’affirmation selon laquelle l’Église du Christ subsiste dans l’Église Catholique ?
Réponse. Le Christ " a établi sur la terre " une Église unique et l’institua comme " assemblée visible et communauté spirituelle 5 " : depuis son origine, elle n’a cessé d’exister au cours de l’histoire et toujours elle existera, et c’est en elle seule que demeurent à jamais tous les éléments institués par le Christ lui-même 6. " C’est là l’unique Église du Christ, que nous confessons dans le symbole une, sainte, catholique et apostolique […]. Cette Église, constituée et organisée en ce monde comme une société, subsiste dans l’Église catholique gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques en communion avec lui 7. "
Dans le numéro 8 de la Constitution Dogmatique Lumen gentium, ‘subsister’ signifie la perpétuelle continuité historique et la permanence de tous les éléments institués par le Christ dans l’Église catholique 8, dans laquelle on trouve concrètement l’Église du Christ sur cette terre.
Selon la doctrine catholique, s’il est correct d’affirmer que l’Église du Christ est présente et agissante dans les Églises et les Communautés ecclésiales qui ne sont pas encore en pleine communion avec l’Église catholique, grâce aux éléments de sanctification et de vérité qu’on y trouve 9, le verbe ‘subsister’ ne peut être exclusivement attribué qu’à la seule Église catholique, étant donné qu’il se réfère à la note d’unité professée dans les symboles de la foi (‘Je crois en l’Église, une’) ; et cette Église une ‘subsiste’ dans l’Église catholique 10.
Troisième question. Pourquoi utilise-t-on l’expression ‘subsiste dans’, et non pas tout simplement le verbe ‘est’ ?
Réponse. L’usage de cette expression, qui indique la pleine identité de l’Église du Christ avec l’Église catholique, ne change en rien la doctrine sur l’Église, mais a pour raison d’être de signifier plus clairement qu’en dehors de ses structures, on trouve " de nombreux éléments de sanctification et de vérité ", " qui, appartenant proprement par don de Dieu à l’Église du Christ, appellent par eux-mêmes l’unité catholique 11. "
" En conséquence, ces Églises et Communautés séparées, bien que nous les croyions victimes de déficiences, ne sont nullement dépourvues de signification et de valeur dans le mystère du salut. L’Esprit du Christ, en effet, ne refuse pas de se servir d’elles comme de moyens de salut dont la force dérive de la plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l’Église catholique 12. "
Quatrième question. Pourquoi le Concile Œcuménique Vatican II attribue-t-il le nom " d’Église " aux Églises orientales séparées de la pleine communion avec l’Église catholique ?
Réponse. Le Concile a voulu assumer l’usage traditionnel de ce nom. " Puisque ces Églises, bien que séparées, ont de vrais sacrements, surtout en vertu de la succession apostolique : le Sacerdoce et l’Eucharistie, qui les unissent intimement à nous 13 ", elles méritent le titre d’" Églises particulières et locales 14 ", et sont appelées Églises sœurs des Églises particulières catholiques 15.
" Ainsi donc, par la célébration de l’Eucharistie du Seigneur en chaque Église particulière, l’Église de Dieu s’édifie et grandit 16. " Cependant, étant donné que la communion avec l’Église catholique, dont le Chef visible est l’Évêque de Rome et Successeur de Pierre, n’est pas un complément extérieur à l’Église particulière, mais un de ses principes constitutifs internes, la condition d’Église particulière dont jouissent ces vénérables Communautés chrétiennes souffre d’une déficience 17.
Par ailleurs, la plénitude de la catholicité propre à l’Église, gouvernée par le Successeur de Pierre et les Évêques en communion avec lui, est entravée dans sa pleine réalisation historique par la division des chrétiens 18.
Cinquième question. Pourquoi les textes du Concile et du Magistère postérieur n’attribuent-ils pas le titre " d’Église " aux Communautés chrétiennes nées de la Réforme du XVIe siècle ?
Réponse. Parce que, selon la doctrine catholique, ces Communautés n’ont pas la succession apostolique dans le sacrement de l’ordre. Il leur manque dès lors un élément essentiel constitutif de l’Église. Ces Communautés ecclésiales, qui n’ont pas conservé l’authentique et intégrale réalité du Mystère eucharistique 19, surtout par la suite de l’absence de sacerdoce ministériel, ne peuvent être appelées " Églises " au sens propre 20 selon la doctrine catholique.
Au cours d’une audience accordée au soussigné Cardinal Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Sa Sainteté le Pape Benoît XVI a ratifié et confirmé ces Réponses adoptées par la session ordinaire de cette Congrégation, et en a ordonné la publication.
Rome, au siège de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le 29 juin 2007, en la solennité des saints Pierre et Paul, Apôtres.
William Cardinal Levada
Préfet
+ Angelo Amato, S.D.B.
Archevêque titulaire de Sila
Secrétaire
_______________________
1 JEAN XXIII, Discours (11 octobre 1962) : " Le Concile [...] veut transmettre dans son intégrité, sans l’affaiblir ni l’altérer, la doctrine catholique. [...] Ce qui est nécessaire aujourd’hui, c’est l’adhésion de tous, dans un amour renouvelé, dans la paix et la sérénité, à toute la doctrine chrétienne. [...] Il faut que, répondant au vif désir de tous ceux qui sont sincèrement attachés à tout ce qui est chrétien, catholique et apostolique, cette doctrine soit plus largement et hautement connue, que les âmes soient plus profondément imprégnées d’elle, transformées par elle. Il faut que cette doctrine certaine et immuable, qui doit être respectée fidèlement, soit approfondie et présentée de la façon qui répond aux exigences de notre époque. En effet, autre est le dépôt lui-même de la foi, c’est-à-dire les vérités contenues dans notre vénérable doctrine, et autre est la forme sous laquelle ces vérités sont énoncées, en leur conservant toutefois le même sens et la même portée " : AAS 54 [1962] 791-792 ; La Documentation Catholique 59 [1962] 1382-1383.
2 Cf. PAUL VI, Discours (29 septembre 1963) : AAS 55 [1963] 847-852.
3 PAUL VI, Discours (21 novembre 1964) : AAS 56 [1964] 1009-1010 ; La Documentation Catholique 61 [1964] 1539.
4 Le Concile a voulu exprimer l’identité de l’Église du Christ avec l’Église Catholique. C’est ce qu’on retrouve dans les discussions concernant le Décret Unitatis redintegratio. Le schéma du Décret fut proposé en session plénière le 23 septembre 1964 avec une Relatio (Act Syn III/II 296-344). Aux modi envoyés par les évêques dans les mois suivants, le Secrétariat pour l’Unité des Chrétiens répondit le 10 novembre 1964 (Act Syn III/VII 11-49). De l’Expensio modorum on citera ici quatre textes concernant la première réponse du présent document.
A) [in Nr. 1 (Prooemium) Schema Decreti : Act Syn III/II 296, 3-6]
"Pag. 5, lin. 3-6: Videtur etiam Ecclesiam catholicam inter illas Communiones comprehendi, quod falsum esset.
R(espondetur): Hic tantum factum, prout ab omnibus conspicitur, describendum est. Postea clare affirmatur solam Ecclesiam catholicam esse veram Ecclesiam Christi" (Act Syn III/VII 12).
B) [in Caput I in genere: Act Syn III/II 297-301]
"4 – Expressius dicatur unam solam esse veram Ecclesiam Christi; hanc esse Catholicam Apostolicam Romanam; omnes debere inquirere, ut eam cognoscant et ingrediantur ad salutem obtinendam...
R(espondetur): In toto textu sufficienter effertur, quod postulatur. Ex altera parte non est tacendum etiam in aliis communitatibus christianis inveniri veritates revelatas et elementa ecclesialia" (Act Syn III/VII 15). Cf. aussi ibidem n. 5.
C) [in Caput I in genere: Act Syn III/II 296s]
"5 – Clarius dicendum esset veram Ecclesiam esse solam Ecclesiam catholicam romanam...
R(espondetur): Textus supponit doctrinam in constitutione ‘De Ecclesia’ expositam, ut pag. 5, lin. 24-25 affirmatur" (Act Syn III/VII 15). La commission qui devait évaluer les amendements au Décret Unitatis redintegratio, exprime donc clairement l’identité de l’Église du Christ avec l’Église catholique, ainsi que son unicité, considérant que cette doctrine est fondée sur la Constitution Lumen gentium.
D) [in Nr. 2 Schema Decreti: Act Syn III/II 297s]
"Pag. 6, lin. 1-24: Clarius exprimatur unicitas Ecclesiae. Non sufficit inculcare, ut in textu fit, unitatem Ecclesiae.
R(espondetur): a) Ex toto textu clare apparet identificatio Ecclesiae Christi cum Ecclesia catholica, quamvis, ut oportet, efferantur elementa ecclesialia aliarum communitatum".
Pag. 7, lin. 5: "Ecclesia a successoribus Apostolorum cum Petri successore capite gubernata (cf. novum textum ad pag. 6, lin. 33-34) explicite dicitur ‘unicus Dei grex’ et lin. 13 ‘una et unica Dei Ecclesia’" (Act Syn III/VII).
Ces deux expressions se trouvent dans le Décr. Unitatis redintegratio, nn. 2.5 et 3.1.
5 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. Dogm. Lumen gentium, n. 8.1.
6 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, DÉCR. UNITATIS REDINTEGRATIO, NN. 3.2 ; 3.4 ; 3.5 ; 4.6.
7 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. Dogm. Lumen gentium, n. 8.2.
8 Cf. CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Mysterium Ecclesiae, n. 1.1 : AAS 65 [1973] 397 ; Décl. Dominus Iesus, n. 16.3 : AAS 92 [2000-II] 757-758 ; À propos du livre ‘Église: charisme et pouvoir’ du P. Leonardo Boff : AAS 77 [1985] 758-759.
9 Cf. JEAN-PAUL II, Encycl. Ut unum sint, n. 11.3 : AAS 87 [1995-II] 928.
10 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. Dogm. Lumen Gentium, n. 8.2.
11 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Const. Dogm. Lumen Gentium, n. 8.2.
12 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 3.4.
13 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 15.3 ; CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Lettre Communionis notio, n. 17.2 : AAS 85 [1993-II] 848.
14 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 14.1.
15 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 14.1 ; JEAN-PAUL II, Encycl. Ut unum sint, nn. 56s : AAS 87 [1995-II] 954s.
16 CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 15.1.
17 Cf. CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Lettre Communionis notio, n. 17.3 : AAS 85 [1993-II] 849.
18 Cf. Ibidem.
19 Cf. CONCILE ŒCUMÉNIQUE VATICAN II, Décr. Unitatis redintegratio, n. 22.3.
20 Cf. CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, Décl. Dominus Iesus, n. 17.2 : AAS 92 [2000-II] 758.
[01035-03.01] [Texte original: Latin]
Ce rappel du Vatican, qui souligne que le but de l'oecuménisme est l'union des Eglises chrétiennes autour de la Papauté, contraste heureusement avec les discours de plus en plus équivoques et fallacieux des porte-parole "autorisés" (par eux-mêmes) de l'Orthodoxie en Europe occidentale quant à ces questions. Il y a fort à parier qu'entre celui qui s'assume tel qu'il est et celui qui est obsédé à l'idée de ne pas faire de vagues, beaucoup de gens feront vite leur choix et que le contraste entre ces deux attitudes accélèrera le mouvement de passage à l'Eglise catholique romaine de francophones convertis à l'Orthodoxie et épuisés par les années de persécution subies de la part de certains éléments phylétistes du clergé ainsi que par le vide du discours ecclésiastique officiel. Car le syncrétisme adogmatique qui ressort de plus en plus du discours orthodoxe officiel en Europe occidental n'est qu'une manifestation parmi d'autres d'une haine de soi-même qui se manifeste aussi par l'hostilité à l'égard des pays d'accueil, la haine à l'encontre des convertis, la démolition progressive de la liturgie et de l'administration des saints mystères (tel prêtre décidant de faire intervenir une chorale protestante dans le cadre d'une célébration de la divine Liturgie, tel autre décidant d'administrer le baptême suivi de la communion, mais sans chrismation, sans que ces dérives suscitent la moindre réaction de la part de l'autorité épiscopale), la négation de la tradition hésychaste, etc., etc.
D'un point de vue orthodoxe, ou simplement chrétien, ou encore plus simplement logique, on ne peut certes qu'être frappé par une déficience visible dans la prise de position du Vatican à l'égard de l'Eglise orthodoxe et des Eglises vieilles-orientales ("nestorienne" et "monophysites") regroupées sous le terme d' "Églises orientales séparées de la pleine communion avec l’Église catholique" dans la quatrième question de la déclaration ci-dessus. En effet, si le Vatican reconnaît que notre eucharistie et notre sacerdoce sont valides, je ne vois pas ce que la communion avec le pape de Rome ou sa reconnaissance pourraient nous apporter de plus - même en me plaçant dans la logique vaticane. Si j'ai le Corps et le Sang du Christ, que peut m'apporter de plus un homme?
On notera en outre que l'affirmation selon laquelle "la communion avec l’Église catholique, dont le Chef visible est l’Évêque de Rome et Successeur de Pierre, n’est pas un complément extérieur à l’Église particulière, mais un de ses principes constitutifs internes" ne trouve bien sûr aucun fondement dans la Tradition écrite ou non écrite, bref, dans le dépôt reçu de Notre Seigneur Jésus-Christ et conservé fidèlement jusqu'à ce jour dans l'Eglise orthodoxe, mais comme cette affirmation est la raison d'être de l'Eglise catholique romaine, il est bien normal de la retrouver telle quelle. Il est toutefois de notre devoir de rappeler cum grano salis qu'il s'agit d'une affirmation gratuite.
Enfin, il est significatif que ce document ne mentionne comme pierre d'achoppement entre la Papauté et l'Eglise orthodoxe que la question papale, qui n'est bien sûr qu'un point relativement secondaire par rapport à des questions fondamentales comme le Filioque, les conceptions différentes de la vie spirituelle et même de la prière, la grâce créée, les énergies divines, la déification, le purgatoire, l'eschatologie, etc., etc. En toute bonne foi, je ne peux plus mentionner les divergences dans l'administration des saints mystères, puisque j'ai pu constater qu' il était maintenant possible qu'un prêtre décidât de son propre chef de rompre le lien entre le baptême et le sceau de l'Esprit-Saint - ce qui revient à dire qu'il pourrait à terme ne plus avoir de pratique orthodoxe en la matière, avec toutes les conséquences que cela entraînera.
Toutefois, le silence de la Congrégation pour la doctrine de la foi sur les points de divergence autres que la question papale, points de divergence qui font que nous sommes tout de même en présence de deux spiritualités incompatibles, est en ligne avec les déclarations antérieures de Benoît XVI, à l'époque où il était encore le cardinal Ratzinger, et qui faisait de la soumission au Vatican, sans adoption des "dogmes du deuxième millénaire", la seule condition de la "réunion" des orthodoxes. Il est possible aussi que de telles omissions arrangent certains de ses interlocuteurs orthodoxes beaucoup plus préoccupés de diplomatie et de géopolitique que de vie religieuse.
Sous les réserves que je viens de faire et que je devais faire, je pense que nous devons saluer ce texte pour sa grande franchise. Nous savons bien sûr que l'indication que le but de l'oecuménisme est la réunion des chrétiens autour du Pape ne suscitera aucun retour en arrière de la part des orthodoxes oecuménistes qui continueront à nier l'évidence pourtant rappelée par le cardinal Levada. Nous pouvons aussi prévoir que l'affirmation par le Vatican qu'il constitue la seule véritable Eglise ne suscitera aucun rappel de la part des orthodoxes que c'est l'Eglise orthodoxe voulue et fondée par le Christ qui constitue l'Eglise une, sainte, catholique-conciliaire et apostolique du Credo. C'est dommage, car, contrairement aux prétentions du Vatican, les nôtres peuvent être étayées par n'importe quelle analyse objective et dépassionnée de la situation, et en particulier de l'Histoire ecclésiastique, ne serait-ce que par l'étude de la question "qui s'est séparé de qui?". C'est d'ailleurs cette simple analyse dépassionnée du problème de la division et de la réunion des chrétiens qui avait conduit l'abbé Guettée à entrer dans le sein de l'Eglise orthodoxe en 1861. Il est malheureux qu'une démarche comme celle de l'archiprêtre Wladimir Guettée serait aujourd'hui incompréhensible pour la grande majorité des "autorités" de l'Eglise orthodoxe en Europe occidentale.
De toute façon, c'est ici le lieu de rappeler que les monastères de la sainte Montagne de l'Athos ont déjà répondu d'avance, dans le cadre de leur Déclaration du 30 décembre 2006, à la déclaration vaticane du 10 juillet 2007.
Rappelons les deux passages topiques de la Déclaration du 30 décembre 2006 (cf. viewtopic.php?t=2149 ).
En premier lieu celui-ci:
qui fut ainsi traduit par notre frère Jean-Louis Palierne:Σκόπιμον είναι η Ορθοδοξία να μη χρεώνεται αμαρτίες αλλότριες και επιπλέον να μη δίδεται η εντύπωσις στους εξ αντιδράσεως προς τις εκτροπές του Δυτικού Χριστιανισμού αποχριστιανισθέντες Ευρωπαίους ότι η Ορθοδοξία ταυτίζεται με αυτόν, αποτυγχάνοντας να μαρτυρείται ως η μόνη αυθεντική Πίστις στον Χριστό και ως η ελπίδα των λαών της Ευρώπης.
En second lieu celui-ci:Il faut souhaiter que l’Orthodoxie ne se charge pas des péchés d’autrui et plus encore qu’elle ne donne pas aux Européens qui ont abandonné le christianisme par réaction aux errances du christianisme occidental, l’impression que l’Orthodoxie lui est identique en oubliant de témoigner qu’elle est la seule Foi authentique en Christ et l’espoir des peuples de l’Europe.
qui fut ainsi traduit par M. Palierne:Υπό την έννοια αυτή οι φιλόφρονες εκδηλώσεις, όπως αυτές των επισκέψεων του Πάπα στο Φανάρι και του Αρχιεπισκόπου Αθηνών στο Βατικανό, χωρίς την προϋπόθεσι της ενότητος στην Πίστι, επιτυγχάνουν αφ’ ενός μεν να δημιουργήσουν ψευδείς εντυπώσεις ενότητος και να απομακρύνουν τον ετερόδοξο κόσμο από του να προσβλέπη στην Ορθοδοξία ως προς την αληθινή Εκκλησία, και αφ’ ετέρου να αμβλύνουν το δογματικό αισθητήριο πολλών Ορθοδόξων· επί πλέον δε να εξωθήσουν μερικούς από τους πιστούς και ευλαβείς Ορθοδόξους, που ανησυχούν για όσα ακαίρως και παρά τους Ιερούς Κανόνες γίνονται, σε αποκοπή τους από το σώμα της Εκκλησίας και την δημιουργία νέων σχισμάτων.
Si nous les comprenons dans cette perspective, les manifestations de courtoisie telles que la visite du Pape au Phanar et celle de l’Archevêque d’Athènes au Vatican, ignorant les exigences d’une unité dans la foi, ne peuvent aboutir d’une part qu' à créer des impressions trompeuses d’unité et à qu'à éloigner le monde catholique de la tentation de considérer l’Orthodoxie comme l’Église véritable, et d’autre part qu' à émousser la sensibilité dogmatique de nombreux orthodoxes ; pis encore qu'à écarter de l’Orthodoxie certains fidèles pieux, qui s’inquiètent de voir combien tout ceci se trouve à l’opposé de ce que prescrivent les saints Canons, qu'à les inciter à se séparer du corps de l’Église et qu' à favoriser l’apparition possible de nouveaux schismes.
Deux passages qui rappellent de manière éloquente que l'Orthodoxie est l'Eglise fondée par le Christ et qu'en elle repose le seul espoir de réunion des chrétiens, et deux passages qui me semblent représenter la réponse à la déclaration vaticane de ce jour. Il sera sans doute inutile d'espérer une autre réponse de la part de nos hiérarchies engagées dans leur diplomatie.
M'attendant aux diverses menaces que ne manqueront pas de provoquer les libres propos que je me suis permis d'écrire ici, je préviens d'avance, et en toute charité, ceux qui regrettent que l'Orthodoxie n'ait pas connu l'Inquisition et qui se donnent tant de peine à mettre en place une sorte d'Inquisition médiatique et verbale sanctionnant les infractions à la langue de coton d'un discours ecclésial convenu et sans racines spirituelles, que je suis adulte, indépendant, jouissant de la liberté des enfants de Dieu et que j'ai passé depuis longtemps l'âge de me prosterner devant telle ou telle tyrannie ecclésiastique, qu'elle soit à Rome ou ailleurs. Je ne crois pas être le seul dans cette situation sur le présent forum.
Ceci étant rappelé, nous devons être reconnaissants à la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi d'avoir rappelé ces quelques évidences. Nous avons eu trop souvent sur ce forum la visite de romano-catholiques venus faire du prosélytisme mielleux en se basant sur la théorie de la bipulmonarité ou sur quelque autre faribole syncrétiste. Nous avons eu de nombreuses visites - surtout sur l'ancien forum - de personnes qui n'avaient rejoint l'Eglise orthodoxe que parce qu'elle leur semblait encore plus moderniste que l'Eglise catholique romaine reprise en main par Jean-Paul II et qui voulaient en quelque sorte trouver une justification à leur choix de s'asseoir entre deux chaises. Chacun de nos rappels de la tradition orthodoxe dans ce domaine, et de la conscience qu'a l'Orthodoxie d'être l'Eglise voulue et fondée par le Christ, ne serait-ce que nos citations de la déclaration sur l'oecuménisme des évêques du patriarcat de Moscou (2000), nous a valus des bordées d'injures et l'habituelle variante religieuse de la reductio ad hitlerum, degré zéro de la controverse, qu'est l'accusation d'intégrisme. Je ne m'étalerais même pas sur le cas extraordinaire que fut l'écumeur des forums, alors simple catéchumène de l'Eglise romaine, qui se gaussait de nous sur le forum catholique traditionaliste en disant que nous ne représentions que nous-mêmes, mais qui n'était pas gêné par le fait que nous avions dû trois fois l'exclure de notre forum sous divers pseudonymes. Il est pour le moins inconséquent de se moquer d'un cercle de gens dans lequel on entre pourtant par la fenêtre chaque fois que l'on en est chassé par la porte. (Il est vrai que ce grand apologète du cardinal Stepinac porte maintenant l'inconséquence jusqu'à poster sur tel autre forum ses messages à la gloire de l'Eglise romaine "seule Eglise authentique" en illustrant son "avatar" d'une icône de saint Sylvain de l'Athos, c'est-à-dire un de nos saints récemment canonisés: c'est montrer à quel point, pour ces gens-là, l'Orthodoxie n'est, au mieux, qu'un exotisme esthétisant, au pire, qu'un supplétif dans leur petite guerre contre le protestantisme.)
De même qu'il est complètement inconséquent de reprocher aux autres d'être fermes dans leurs convictions quand on appartient soi-même à une Eglise qui vient de réaffirmer qu'elle se considère comme la seule véritable Eglise.
Et après tout, pour reprendre une belle formule de notre frère Bernard Le Caro, il y eut un temps où les catholiques romains et les orthodoxes préféraient être séparés dans la vérité qu'unis dans l'erreur. Et, de fait, une telle "unité" paradoxale vaut mieux que l'union sans Dieu ou contre Dieu que l'on nous prépare. Il est possible que le rappel à l'ordre de la Congrégation pour la doctrine de la foi du 10 juillet 2007 marque le retour à cette "unité" paradoxale et à la primauté de la recherche de la vérité sur l'exaltation de l'erreur.
Au confusionnisme entretenu par certains de nos visiteurs, nous pourrons désormais opposer ces fortes paroles de la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi.
J'espère ainsi qu'ils oseront se regarder dans un miroir, et qu'ils n'auront plus l'effronterie de nous traiter de fanatiques ou d'intégristes parce que nous tenons, à propos de notre Eglise, le même discours qu'eux à propos de la leur.
La seule différence étant que nous, nous pouvons prouver ce que nous affirmons.
Différence qui, je l'espère, ne devrait pas suffire à faire de nous des fanatiques...