Cher Antoine,
Ce qui montre à Katherine que même un concile peut être imprécis et que des grands Saints et docteurs n'ont pas manqué d'en retravailler des canons dont l'imprécision générait d'autres hérésies
Là, vous êtes sans doute conscient d'enfoncer des portes ouvertes… ou alors, je ne sais pas pourquoi vous avez dit cela.
Mais sans me mêler de votre dialogue avec JLP (je n'y comprends pas grand-chose à la première lecture), je voudrais donner ici quelques bribes de réponse à votre message précédent. Si j'ai mal compris qc. vous me le dites. J'ai tant peur d'un dialogue de sourds !!!
Je ne suis ni théologienne, ni philosophe et je ne peux m'exprimer que dans un langage simple et concret. Il y a peut-être des lecteurs de ce Forum qui sont simples comme moi et me comprendront, et les savants condescendront peut-être à se mettre à mon niveau.
La racine du mot grec "peirasmos" veut dire : expérience. (La Toute-sainte s'appelle "apeirogamos", mot ayant la même racine : celle qui n'a pas d'expérience du mariage.)
Le mot grec "peirasmos" a bien deux sens (dictionnaire à l'appui) : "épreuve" et "tentation".
"Tentation" et "épreuve" ont un sens proche en ce que toutes les deux sont des "expériences" : des sortes de test que nous subissons.
C'est en cela qu'elles sont proches.
L'une testerait, à mon sens, plutôt la solidité de nos vertus, l'autre plutôt la force de notre foi.
Peut-être en effet, il s'agit d'"épreuve" dans le Notre Père et non de "tentation", mais j'attends une réponse patristique sur la question.
Je ne comprends pas ce que vous dites de la finalité, Antoine.
Une tentation est faite pour faire chuter, l'épreuve pour vaincre.
???? ?????
On peut succomber aux deux : à la tentation en y cédant pour faire le mal (cf. trahison de Judas tenté par sa cupidité), à l'épreuve en devenant hostile à Dieu, en perdant la foi ou en désespérant pour se suicider, par exemple (cf. désespoir de Judas ne croyant pas à un pardon possible).
On peut aussi triompher des deux :
1. les saints ascètes qui ont triomphé des tentations, ont acquis les vertus, l'impassibilité : c'était pour leur bien qu'ils les ont affrontés
2. les épreuves des saints n'ont pas entamé leur foi (voir le cas de Job le Très-éprouvé), elles n'ont fait que l'augmenter : c'était aussi pour leur bien qu'ils ont subi les épreuves.
Ce qui différencie "tentation" et "épreuve" est, à mon sens,
1. que la première n'est qu'une "tentative" de nous faire commettre le mal, mais que nous avons la liberté de la repousser ou non,
2. alors que"l'épreuve" est un événement malheureux, un "mal" qui nous arrive réellement de l'extérieur, dont nous sommes souvent, directement ou indirectement, responsables, mais que le plus souvent, nous n'avons pas le pouvoir d'écarter. Mais nous pouvons soit la surmonter, la supporter sans dommage pour notre foi, soit nous laisser vaincre par elle.
Les pères disent que nous ne devons pas appeler l'épreuve qui nous arrive un vrai "mal", mais seulement le mal que nous faisons librement en cédant à la tentation.
Mais communément, une épreuve est conçue quand-même comme une chose mauvais qui nous arrive.
N'est-ce pas la leçon finale du Bon Larron, premier habitant du paradis, cloué sur sa croix par ses péchés à n'en pas douter, impuissant à changer quoi que ce soit de sa vie extérieure, mais tourné avec confiance vers son Seigneur, à la fois reconnaissant son péché et totalement certain de l'existence du royaume et confiant en la miséricorde divine.
Il n'y aurait donc que cela à faire : se tourner vers Dieu, impuissant à avoir pu changer non seulement le cours de sa vie, résultat en partie de ses péchés, mais également sa nature de pécheur. Ce n'est donc pas purifié, parfait, ni saint que cet homme se présente devant Dieu, mais tout souillé de ses péchés et il est sauvé, comme tous les pécheurs de l'évangile !
C'est faux. D'abord, le bon larron a, de plus, reconnu que ses souffrances sur la croix faisaient partie de l'expiation de ses péchés, qu'il les subissaient avec justice et cette humble acceptation était un signe de son repentir sincère. Or, le repentir lave les péchés.
L'autre en'était pas justifié parce qu'il se révoltait.
Les pères disent que si nous étions capablse d'un repentir vraiment profond, nous pourrions, en une heure, nous purifier de tous nos péchés, qui demandent autrement une lutte de plusieurs années. Au bon larron, un instant a suffi.
S'il n'avait pas été purifié par sa souffrance suivie du repentir, sa demande "souviens-Toi de moi…" aurait été d'une insolence orgueilleuse, alors qu'elle est l'assurance (la fameuse "parrhesia") de ceux qui ont la pureté.
Quoi qu'il en soit je préfère cette interprétation à ces poncifs théologiques pseudo consolateurs qui prétendent que Dieu permet le mal pour notre bien.
Ces "poncifs théologiques" sont issus pourtant de l'Écriture et des pères qui ont consigné une réalité pratique, que la pensée abstraite n'a pas à contester.
Le mal qui nous arrive est plutôt en partie le produit de nos erreurs dans notre histoire personnelle, en partie celui des erreurs de nos ancêtres dont nous subissons les conséquences, en partie celui des caprices de la nature incontrôlable voire imprévisible malgré les efforts humains dans ce sens.
Et l'action du diable, prince de ce monde, n'est pas négligeable non plus.
Dieu ne permet rien du tout pour notre bien mais plutôt Il laisse l'homme libre de ses actes et de ses conséquences et ne vient à son aide que spirituellement pour l'aider à traverser ce désert en lui permettant d'être uni au plus près de ses capacités. Quant à son intervention en ce monde j'ai du mal à y croire malgré tous les récits édifiants qui le prétendent et qui font dire aux peuples les plus guerriers comme aux saintes personnes dont on fait un récit édifiant de la vie dans tous les synaxaires, que Dieu est avec eux.
Dieu ne permet rien du tout pour notre bien ?????? Que voulez-vous dire, Antoine ? Alors toute la littérature ascétique qui décrit de telles expériences est à jeter à la poubelle ??? Ce serait des mythes ? Des racontars, et non des récits réels ?
Et la sainte Écruiture, l'histoire de Job ? À la poubelle ?
Certes, la mal est entré dans le monde par suite du péché d'Adam, et l'homme est libre de choisir entre le bien et le mal. Quand les pères disent que Dieu permet telle ou telle chose, ils veulent dire que
1. Dieu ne VEUT pas le mal,
2. Il pourrait nous épargner certaines épreuves et tentations
3. Il LAISSE le mal agir dans le monde jusqu'à une certaine limite (c'est cela, sa Permission) pour des raisons qui Lui sont connues. Dans la vie chrétienne, ces maux (qu'ils se présentent sous forme de tentations ou d'épreuves) peuvent être une occasion d'actes de foi ou de vertu, et c'est en ce sens que le bien, notre bien, peut en être la conséquence.
Quant à son intervention en ce monde j'ai du mal à y croire…
Ce que vous dites là me fait frissonner, Antoine. N'avez-vous jamais senti, observé les interventions de Dieu dans votre propre vie ? Ou croyez-vous que les vies des saints mentent ?
De toute façon, il ne faut jamais oublier que toutes ces expressions : Dieu "permet", "intervient" , etc. véhiculent de pauvres conceptions humaines des actions divines : elles appartiennent à la théologie cataphatique et ne peuvent exprimer ce que Dieu fait réellement, puisque la langue humaine est trop infirme pour le dire, que nous ne sommes pas à même de concevoir quelle est l'action de Dieu.
Comme disait saint Athanase, un Dieu compréhensible ne serait plus Dieu.
Pour cette raison, j'arrête… pour ne pas parler constamment de ce qui nous dépasse.