saint Théodore Studite à propos de l'Orthodoxie

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Claude le Liseur
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saint Théodore Studite à propos de l'Orthodoxie

Message par Claude le Liseur »

Tirée de la deuxième controverse de saint Théodore Studite (+ 11 novembre 826) contre les adversaires des saintes icônes, traduite par Jean-Louis Palierne (L'image incarnée, L'Âge d'Homme, Lausanne 1999, p. 66):

"La parole de vérité est en quelque sorte simple et inébranlable par nature: elle n'est soumise ni à divergence d'opinion, ni à évolution dans le temps, car en tout temps elle sert et glorifie la même chose, sans admettre ni concession ni adjonction. Par contre les fables du mensonge sont multiples, passant d'une chose à l'autre. Tour à tour honorant et méprisant, elles ne se fixent jamais, soumises à l'épreuve de l'altération et du changement. "

Je pense que ces paroles sont du plus haut intérêt parce qu'elles montrent à quelle point la notion de "développement des dogmes" du cardinal Newman est étrangère à l'esprit de l'Orthodoxie.
Invité

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La notion de «développement des dogmes» est étrangère à la pensée de Théodore Studite vers l'an 800, c'est clair dans son texte. Mais ce même homme, s'il vivait de nos jours, trouverait peut-être que le développement des dogmes entendu dans le sens d'un approfondissement, n'a rien d'incompatible avec la Révélation ? Peut-être que lui aussi se rallierait à Newman ? Le développement d'un dogme ne contredit pas la vérité fondamentale étudiée, il permet d'en dévoiler d'autres aspects jusque-là inexplorés ou ignorés. Est-ce qu'il ne faut pas corriger l'angle de vue ?

Antan
Antoine
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Message par Antoine »

Antan a écrit :Le développement des dogmes entendu dans le sens d'un approfondissement, n'a rien d'incompatible avec la Révélation .[...]
Le développement d'un dogme ne contredit pas la vérité fondamentale étudiée, il permet d'en dévoiler d'autres aspects jusque-là inexplorés ou ignorés.
Donnez-nous quelques exemples de dogmes dont "l'approfondisement "après leur formulation en concile oecuménique aurait "dévoilé d'autres aspects jusque-là inexplorés ou ignorés".
Il convient bien sûr de se référer aux conciles du premier millénaire et non pas aux conciles du patriarcat hérétique de Rome.
En revanche si vous pouvez nous montrer que les pseudos dogmes formulés par ce patriarcat après sa séparation d'avec l'Eglise ne sont pas en contradiction avec "la vérité fondamentale" nous serons très curieux de lire sous "votre plume" comment l'Eglise se trompe depuis 2000 ans , soit sur la Révélation dont elle a le dépôt soit de par le fait que cette Révélation ne serait que partielle et se complèterait dans "l'approfondissement" et les "développements" ultérieurs à la formulation même de cette Révélation.
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

C’est dans leur union avec Dieu, le Père, le Fils et le saint Esprit, que les ascètes et Pères de l’Église ont trouvé le charisme qui leur a permis d’expliciter la Révélation en réponse aux spéculations de leurs contemporains tourmentés qui parfois sont tentés (j’emploie à dessein le mot “tenter”) de rajouter un élément parasite pour résoudre leurs problèmes. Nous le voyons encore de nos jours. L’étude approfondie de l’histoire des dogmes, l’analyse linguistique de la sémiologie, la recherche des sources et des influences, la mise en situation dans un cadre historique ne sont pas de bonnes méthodes pour acquérir la connaissance des saints Mystères.

C’est ce qui explique l’échec de l’enseignement académique pour “l’amélioration” de la vie de l’Église. L’enseignement de type académique, ou si vous préférez, de type universitaire, ne permet pas d’acquérir la vraie foi (et ne permet donc pas de former le clergé). Ce n’est pas en assurant au clergé une formation de type universitaire (d’ailleurs de plus en plus faible) que l’Église lui permettra de répondre aux besoins spirituels de ses fidèles et un “approfondissement” du dogme qui se fonderait sur la pseudo-science de type universitaire ne peut être qu’un obscurcissement. Saint Séraphin de Sarov révélait à ses contemporains la splendeur de la Lumière incréée. Or ce siècle croyait être celui des Lumières. Le père Justin Popovitch, méprisé par la science académique de son époque (encore qu’il savait très bien l’utiliser) a révélé à ses contemporains que c’est le Dieu-homme qui est le crtère suprême et la mesure de tout, par opposition à la vanité de l’homme-dieu des idéologies et des pseudo-sciences.

L’un et l’autre, et aussi une pléïade d’autres de nos Pères, n’avaient qu’un seul et même angle de vue : que Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu. Aucun approfondissement scientifique, si laborieux et si fouillé soit-il, ne pourra rien y ajouter. Dieu Lui-même a déposé dans la Révélation tout ce qui est nécessaire à notre salut. L’Église nous transmet fidèlement ce donné de la Révélation, sans addition ni soustraction. Nous ne pouvons qu’expliciter ce donné.
Jean-Louis Palierne
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Antoine
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Message par Antoine »

On peut dire qu'un dogme dans sa formulation révèle le mystère mais ne saurait épuiser ce même mystère ; il est la limite de la théologie cataphatique.
Au-delà pour appréhender ce même mystère l'insuffisance des mots fait place à une théologie apophatique pour percer l'indicible.
Mais en aucun cas cette forme ne pourrait être en opposition ou en contradiction avec la première.
Par exemple le "filioque" est le type même d'une déviation dûe aux "approfondissements" par une méthode explorative spéculative et hérésiogène qui s'oppose à la Révélation en se posant elle-même comme antérieure et première à cette Révélation, barrant ainsi l'entrée dans ce mystère trinitaire et inaugurant une fausse théologie aux ramifications multiples.
A travers le filioque , c'est la Raison humaine qui se pose comme critère de Vérité et non plus le Christ qui , comme le souligne fort justement Jean-Louis, doit demeurer<< le critère suprême et la mesure de tout..>>. Car ce que nous dit le Christ c'est : "Je vous enverrai d'auprès du Père l'Esprit de vérité qui procède du Père, c'est lui qui rendra témoignage de moi, et vous aussi vous rendrez témoignage de moi parce que vous êtes avec moi depuis le début." Jn 15,26 .
Si le Christ avait voulu nous révéler que l'Esprit procède aussi de Lui il l'aurait fait. Tout témoignage qui n'est pas un témoignage en l'Esprit ou de l'Esprit par le témoin en conformité avec cette succession apostolique du témoignage "depuis le début" est hérésiogène.
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Antan a écrit :La notion de «développement des dogmes» est étrangère à la pensée de Théodore Studite vers l'an 800, c'est clair dans son texte. Mais ce même homme, s'il vivait de nos jours, trouverait peut-être que le développement des dogmes entendu dans le sens d'un approfondissement, n'a rien d'incompatible avec la Révélation ? Peut-être que lui aussi se rallierait à Newman ? Le développement d'un dogme ne contredit pas la vérité fondamentale étudiée, il permet d'en dévoiler d'autres aspects jusque-là inexplorés ou ignorés. Est-ce qu'il ne faut pas corriger l'angle de vue ?

Antan
Et si on suit votre raisonnement jusqu'au bout, pourquoi saint Théodore Studite ne s'est-il pas rallié au "développement d'un dogme" que constituait l'iconoclasme? Pourquoi aurait-il fallu réagir différement en 818 qu'aujourd'hui? Pourquoi n'a-t-il pas eu l'impression que l'iconoclasme constituait un "développement sans rien d'incompatible avec la révélation"? Cela lui aurait en tout cas permis d'avoir une vie plus tranquille.

J'ai cité le texte de saint Théodore Studite parce qu'il montre la position orthodoxe de toujours qui est celle de l'Eglise depuis les temps apostoliques. Il n'y avait pas d'intention polémique de ma part. Ce texte est un intéressant témoignage de l'attitude orthodoxe par rapport aux questions qui mettent en jeu notre salut.

A ce texte qui se suffit à lui-même et n'appelle pas de réplique, vous opposez un raisonnement qui aboutit finalement, avec des "si", à lui faire dire le contraire de ce qu'il dit. Avec de si, on peut mettre Paris en bouteille. D'autant plus que le texte de saint Théodore Studite montre clairement qu'il aurait réagi de la même façon qu'il l'a fait face à l'iconoclasme.
Jésus-Christ est le même hier, maintenant et à jamais. Les dogmes ne sont pas des décrets hiérarchiques avec lesquels on peut jongler. Ce sont nos garde-fous dans notre ascèse et les bornes sur le chemin de notre déification.
Quand je lis votre raisonnement, je ne vois pas ce qui permet de faire la différence entre "corriger l'angle de vue" et tomber dans une erreur nuisible à notre salut.
Je ne vois pas pourquoi je devrais me rallier à des enseignements différents que ceux que le Christ a transmis à ses Apôtres et par là à l'Eglise orthodoxe. Pour ceux qui l'auraient oublié, je tiens à rappeler que le christianisme repose sur une révélation. Ce n'est pas l'esprit humain qui pouvait par ses propres moyens appréhender les mystères ineffables de la Trinité consubstantielle et indivisible, de l'Incarnation, etc. Si vous voulez le sommet de ce à quoi peut arriver l'esprit humain par ses propres moyens, alors, à mon avis, c'est le bouddhisme. Mais pas le christianisme. Alors je ne vois pas comment la méthode de raisonnement scolastique ou, pire, les enseignements successifs et contradictoires de hiérarchies séparées de l'Eglise pourraient tout à coup découvrir des "vérités" différentes de celles que Notre Seigneur Jésus-Christ nous a révélées (Antoine a donné l'exemple caractéristique du Filioque).
Invité

Message par Invité »

Vous avez sans doute remarqué que je n'ai pas parlé de l'Église catholique, également que je n'ai pas parlé d'études universitaires ni de science, mais de «révélation», de "dévoilement" de la vérité. Seul l'Esprit Saint "dévoile" les Saintes Lettres et la "Révélation" et il la dévoile «tout entière» à ceux qui croient au Christ Vérité.

Il est inutile que je vous mentionne quelque enseignement que ce soit de l'Église romaine, car d'amblé vous rejetez tout en bloc. Mais puisque vous parlez de mépris de la science et des études universitaires, mais plutôt que vous affirmez que Dieu seul illumine, je veux bien vous citer un événement à travers lequel Dieu a parlé dans l'Église romaine pour instruire non seulement les bénéficiaires, mais le monde entier. Il s'agit du miracle de Lanciano. Par ce miracle Dieu lui-même est venu authentifier sa présence réelle dans le pain et le vin consacrés, devenus son Corps et son Sang. Il attesta au célébrant qui doutait que les paroles consécratoires qu'il prononçait était valides parce que son sacerdoce donc était valide. Donc aussi, que l'évêque qui l'avait ardonné était lui-même valide, etc. Et donc que l'épiscopat du Pape d'alors était valide.... Que toute l'Église catholique fondée sur Pierre dont le Pape est le successeur valide, EST ELLE-MEME VALIDE, véritable Église du Christ. L'Église romaine et l'Église orientale sont une seule et même Église du Christ. Ce que Dieu révèle à Lanciano n'est pas peu.

Ceux donc qui renient la présence réelle dans le pain consacré par l'Église romaine, et qui soutiennent l'hérésie de «l'adoration du pain» sont donc pleinement dans l'erreur, si saints et si savants soient-ils. Après la consécration, il n'y a plus de pain ni de vin, il y a le Corps et le Sang du Christ. C'est pourquoi nous pourvons toujours adorer Jésus présent dans l'Eucharistie jusqu'à la fin du monde. On peut être de ceux qui ne pratiquent pas cette dévotion, mais la Réalité demeure. Ce n'est pas parce les hommes ont cru que la Terre était plate qu'elle l'était. Ce n'est pas parce qu'un athée nie l'existence de Dieu que Dieu n'existe pas. Contre toute vérité de foi il y aura toujours des opposants incroyants, mais la Vérité subsiste.

Le développement des dogmes n'est pas d'abord une question de gymnastique intellectuelle, mais avant tout, dans une fidélité à l'Église des origines, une fidélité à l'inspiration du Saint Esprit qui "dévoile", illumine, éclaire, des profondeurs incomprises ou ignorées de certains aspects du Visage de Dieu. C'est le Saint Esprit ne cesse de faire entrer l'Église dans la Vérité tout entière. De même qu'à tel homme Dieu a révélé le sens profond d'un aspect de la parabole du Bon Samaritain, à tel autre, deux millénaires plus tard, Dieu peut encore dévoiler tet aspect incompris de la même parabole sans pour autant contredire la révélation antérieure ni le sens premier de la parabole. Il en va de même de la connaissance des mystères de Dieu infini, infiniment infini, pour emprunter le langage d'un des vôtres.

Ne serait-ce pas refuser la Lumière que de se fermer définitivement à toute inspiration nouvelle de l'Esprit Saint ?

Antan
Antoine
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Message par Antoine »

Une fois de plus vous répondez à côté .
Vous partez dans de grandes phrases pour mieux éviter de répondre précisément à ce qui vous est demandé.
Vous dîtes:
Seul l'Esprit Saint "dévoile" les Saintes Lettres et la "Révélation" et il la dévoile «tout entière» à ceux qui croient au Christ Vérité.
Non, c'est beaucoup trop imprécis et je vous ai déjà répondu ci-dessus. La Révélation se fait à l'Eglise du Christ.
Il est inutile que je vous mentionne quelque enseignement que ce soit de l'Église romaine, car d'amblé vous rejetez tout en bloc.
Cela vous évite surtout de répondre à la question précise qui vous est posée sur les dogmes.
On ne refuse pas tout en bloc car il reste toujours un fond de vérité dans le catholicisme romain même s'il est enfoui sous l'hérésie. Et nous ne nions certainement pas ce fond de vérité qui est orthodoxe.Mais on est loin de la plénitude de cette vérité.

L'histoire de Lanciano n'a rien à voir avec notre sujet.
Que toute l'Église catholique fondée sur Pierre dont le Pape est le successeur valide, EST ELLE-MEME VALIDE, véritable Église du Christ
Le pape n'est pas le successeur de St Pierre qui lui n'a jamais été non plus le chef de l'Eglise, transmettant cet hypothétique droit de suprématie à un hypothétique successeur qui résiderait dans une Rome hypothétique. Nous avons déjà traité ce sujet sur le forum (utilisez la fonction recherche)et ce n'est pas de cela qu'il est question dans cette rubrique.
Vous tenez un raisonnement absurde qui ne repose sur aucune vérité théologico-historique du style: Pierre est le chef de l'Eglise , le pape est son successeur, or il est infaillible donc l'Eglise catholique romaine est infaillible donc les dogmes sont justes, donc l'eucharistie est valide donc Lanciano est véridique. Vous avez le droit de croire à ces balivernes qui n'intéressent pas le forum et qui ne répondent pas aux questions qui vous sont posées.
Après la consécration, il n'y a plus de pain ni de vin, il y a le Corps et le Sang du Christ.
Encore faut -il pour qu'il y ait consécration que cela se fasse dans l'Eglise et pas dans n'importe quelle communauté hétérodoxe. Mais cela n'est pas le sujet de cette rubrique.
Répondez aux questions qui vous sont posées dans le cadre de ce que vous avez écrit. Vous ne le faites jamais. Sinon nous serons amenés à considérer que vous n'êtes venus que pour prôner votre idéologie catholique romaine pondant vos oeufs dans ce forum comme un coucou dans le nid des autres. L'orthodoxie ne semble pas vous intéresser pour l'instant.
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Antan,


Ne trouvez-vous pas qu'il y a une extraordinaire mauvaise foi à vouloir défendre les positions actuelles de l'Eglise catholique romaine, excommuniée depuis 1054, en se basant sur le miracle de Lanciano?

Car, si jamais miracle il y a eu à Lanciano, c'était au VIIème siècle, alors que le patriarcat de Rome était encore orthodoxe (le Filioque ne fut adopté à Rome qu'en 1014 et Rome ne s'est séparée de l'Eglise qu'en 1054)...

cf. http://www.lafamilledusacrecoeur.ca/dos ... ciano.html :

Ce miracle eut lieu, au début du 7e siècle, durant la célébration de la messe par un moine basilien.
"Moine basilien", c'est-à-dire de rite byzantin...

(D'autres sources indiquent la date de 750. Dans tous les cas, à l'époque où l'Italie était encore orthodoxe. Et il est toujours question d'un moine de rite byzantin. A la limite, vous ne savez pas si le prêtre témoin de ce miracle dont vous prétendez vous servir pour justifier les prétentions du Vatican au mépris de l'Histoire et de la Révélation ne relevait pas du patriarcat de Constantinople, comme une bonne partie de l'Italie de l'époque...)

Sans me prononcer sur le fait qu'il est assez amusant de vouloir répliquer à des arguments de nature théologique en nous sortant des histoires de miracles (et pourquoi pas Garabandal, Medjugorje et le sang de saint Janvier tant qu'on y est? et les prodiges des soufis musulmans et des lamas tibétains au passage?), vous devriez être un peu cohérent avec vous-même: si vous voulez faire du supposé miracle de Lanciano un argument, c'est surtout un argument en faveur de l'Eglise orthodoxe et du rite byzantin!

Comme quoi, votre prosélytisme vient de magnifiquement tomber à plat.
Dernière modification par Claude le Liseur le lun. 15 nov. 2004 18:08, modifié 1 fois.
Yiannis
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Message par Yiannis »

A propos de l'expérience spirituelle et la validité des mystères des hétérodoxes, je voudrais rapporter une histoire qu'on m'a racontée récemment au Mont Athos. Le moine qui me l'a racontée, ex-catholique romain, d'origine anglaise, est un personnage très sérieux. Un père spirituel athonite, très connnu, qui était le gerontas dudit moine et qui habite actuellement dans un monastère fondé par lui aux Etats-Unis, recevait la confession d'un prêtre orthodoxe, converti à l'Orthodoxie. Le gerontas athonite "voyait" avec précision des péchés non-confessés que le prêtre ne lui disait pas. Il l'a alors révélé audit prêtre, qui, surpris, lui a répondu que ces péchés - commis par lui alors qu'il était laïc et non-orthodoxe - avaient déjà été confessés, à un autre père spirituel. Le gerontas, supris lui aussi car il "voyait" des péchés déjà confessés, lui a alors posé la question: Mon fils, est-ce que tu as été reçu à l'Eglise Orthodoxe par chrismation seule et non par baptême? Ce qui était d'ailleurs absolument vrai. Cet événément s'est passé aux Etats-Unis.
Je ne veut pas dire que cette histoire constitue la règle, mais, personnellement, elle m'a fait réfléchir un peu plus sur certaines choses. La question qui se pose, au moinis pour moi, est la suivante: est-ce que cette expérience spirituelle doit être soumise au jugement de l'Eglise ou, au moins, à celui de la Sainte Communauté du Mont Athos? Et, en tout cas, est-ce que la position officielle de l'Eglise à l'égard du baptême des hétérodoxes est dictée par l'amour à l'égard des convertis ou bien par des raisons politiques, qui concernent les relations "sociales" de l'Admnistration (quel mot!) de l'Eglise avec les communautés hétérodoxes? En un seul mot: est-ce que l'Eglise a le droit de cacher ce qui est correct au profit de celui qui est politiquement correct?
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

Non, ce n’est pas par souci de “cacher” ce qui est correct que l’Église orthodoxe doit recevoir par la Chrismation les non-orthodoxes qui viennent à elle à partir de groupements “schismatiques”. Si elle agit ainsi c’est, comme saint Basile l’a très clairement rappelé dans son canon 1, pour être fidèle à la Tradition arcane secrète, c’est-à-dire la Tradition non écrite, concernant la réception des schismatiques.

Cette Tradition, comme le rappelle saint Basile, veut que les hérétiques (c’est-à-dire tous ceux qui ont modifié ou rejetté la foi trinitaire et qui ne donnent pas le Baptême en vue de la purification des péchés par triple immersion « au nom du Père, et du Fils et du saint Esprit », soient baptisés. Il ne s’agit même pas en réalité d’un re-baptême, car celui qu’ils avaient reçu dans les groupes en question n’était rien.

Par contre tous ceux qui ont été baptisés dans des groupes où le Baptême reste correctement administré, doivent non pas être rebaptisés, mais chrismés, ce saint Mystère de l’Église orthodoxe venant dans ce cas donner au Baptême formellement exact mais inopérant qu’ils avaient reçu, la puissance purificatrice que seule l’Église orthodoxe peut lui donner. L’Église orthodoxe en effet ne doit pas réitérer ce geste formellement exact, bien qu’il n’ait pas eu d’effet. Ce n’était donc qu’une coquille vide que l’Église orthodoxe vient remplir de la Grâce divine.

À plusieurs reprises des Églises locales orthodoxes ont décidé durant certaines périodes de rebaptiser les schismatiques. Ce fut le cas de saint Cyprien de Carthage et de Firmilien de Césarée. Ce fut aussi le cas de l’Église de Rome. Saint Basile (évêque de Césarée à son tour) cite les deux premiers, mais considère que ces Pères n’avaient établi que des coutumes locales valables seulement pour leurs ouailles (lui-même était l’un des successeurs de Firmilien à Césarée), et pour sa part il demande qu’on retourne (y compris dans son propre diocèse) à la Tradition catholique qui nous vient des Apôtres. L’Église d’Afrique, elle, (c’est-à-dire le Concile de Carthage) a reproché à l’Église de Rome d’avoir agi ainsi, sans mentionner que c’était cette même position qu’avait soutenue un siècle auparavant, son évêque saint Cyprien. Plus tard nous avons un texte de saint Grégoire de Rome qui revient à la position catholique.

Dans les temps modernes nous avons eu pendant un court laps de temps l’Église de Russie (au XVIIème siècle) et aussi jusque de nos jours l’Église de Grèce qui ont adopté ces positions de rebaptisation. Ce n’est pas ce que disent les saints Canons de l’Église orthodoxe.

Il faut bien comprendre que recevoir par la chrismation ne consiste pas à “reconnaître” un baptême conféré en dehors de l’Église, mais à respecter un geste qui n’a eu aucune efficacité et représente cependant un geste respectable.

Certes d’autres commentaires ont été donnés de cette pratique de l’Église, par complaisance œcuménisante. Il ne faut pas les croire, mais il ne faudrait pas croire non plus qu’il serait conforme à la position correcte, la position canonique de la Tradition orthodoxe, de baptiser ceux qui ont reçu un baptême vide.

Il ne serait pas correct non plus de recevoir tous les schismatique (sans faire de différences entre eux) par la confession de la foi orthodoxe, suivie d’une simple chirothésie (que l’on présente d’ailleurs comme une réconciliation des pécheurs, dite “absolution”). La tradition canonique reconnaît en effet l’existence d’une troisième catégorie de groupes non-orthodoxes, qu’on a appelée suivant les époques, “parasynagogues”, “conventicules”, ou “dissidents etc, séparés de l’Église par un conflit seulement disciplinaire, et que l’on doit recevoir par cette chirothésie. C’est par exemple le cas des anti-chalcédoniens d’aujourd’hui. Mais ce n’est pas le cas de ceux qui viennent des grandes Églises d’Occident.

C’est ici que l’on cache quelque chose aux convertis occidentaux, pour obéir à une attitude “politiquement correcte”.
Jean-Louis Palierne
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Yiannis
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Message par Yiannis »

Je ne veux pas mettre en doute la compétence de M. J.-L. Palierne, qui est bien meilleure que la mienne, et la pertinence de ses arguments. Pourtant, les choses dans le sujet de la réception des hétérodoxes ne sont pas noir et blanc, il y a certainement des zones grises. Le père Georges Métallinos de l'Université d'Athènes, dans son livre "Omologo en vaptisma" ("Je confesse un baptême") soutient avec arguments une position bien différente. Il n'est pas le seul: il y a aussi d'autres théologiens en Grèce, très sérieux et très loin du zélotisme, qui sont pour la réception des hétérodoxes par baptême.

A propos des Anti-chalcédoniens, il y a la décision d'un concile qui m'échappe (je crois qu'il s'agit de celui in Trullo) qui préscrit la chrismation pour les Arméniens. Est-ce que la foi des Arméniens au 6e siècle était plus éloignée de celle des Orthodoxes qu'aujourd'hui? Et pourquoi faudrait-il faire une distinction entre les Anti-chalcédoniens et les Catholiques Romains? Le fait que la spiritualité des Anti-chalcédoniens est maintenant plus proche de celle des Orthodoxes que celle des Catholiques, ne signifie pas grand'chose, tant qu'ils réfusent 3 conciles écuméniques et considèrent comme des grands saints et pères de l'Eglise des personnages condamnés par des conciles et la conscience orthodoxe.

Personellement, j'étais pour la réception des Catholiques Romains par le baptême. Je ne peux pourtant rénier l'expérience spirituelle d'un grand père athonite (voir mon message précédent) qui n'est pas un zélote, qui, dans le pays où il est maintenant, suit le nouveau calendrier et qui commémore l'évêque local du Patriarcat Ecuménique, comme on fait d'ailleurs dans tous les monastères qu'il a fondés, par la grâce de Dieu. Tout simplement, j'admets que je ne sais pas ce qu'il faut dire sur ce sujet, et en tout cas je ne saurais plus soutenir de façon aussi catégorique que Jean-Louis la réception des hétérodoxes par chrismation. J'ai l'impression que la question reste toujours ouverte.
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