De l'Albanie du Caucase à l'albanais des Balkans

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Claude le Liseur
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Re: De l'Albanie du Caucase à l'albanais des Balkans

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :Dans notre recherche de la vérité, nous sommes déjà en possession des éléments suivants:

- Le christianisme orthodoxe connut, avant même la conversion des Slaves et le destin prodigieux qu'allait connaître la littérature slavonne (puis l'avènement d'autres langues liturgiques, comme l'arabe, le zyriane ou komi, le roumain, le finnois, le iakoute, le japonais... et le français), huit langues liturgiques: caucaso-albanien, arménien, besse, copte, géorgien, grec, gotique, guèze, latin et syriaque. L'arménien, le copte, le guèze et le syriaque sont encore aujourd'hui les langues liturgiques de prestigieuses Eglises vieilles-orientales qui ne sont pas en communion avec l'Eglise orthodoxe; au sein de l'Eglise orthodoxe, le copte et le syriaque ont été progressivement remplacés par l'arabe à parti du Xe siècle. L'usage de la langue gotique dans l'Eglise orthodoxe n'est plus mentionné après le IXe siècle. L'usage de l'arménien et du latin a disparu au Moyen Âge, en même temps que disparaissaient les orthodoxes arméniens et le monastère latin orthodoxe des Amalfitains au mont Athos. Le géorgien et le grec se sont maintenus - et avec quelle vitalité !- jusqu'à nos jours. L'albanien et le besse sont supposés avoir disparu sans laisser de traces.

- Il y a eu une littérature aghbanienne à partir du Ve siècle (invention de l'écriture caucaso-albanaise par l'Arménien saint Mesrop Machtots) et au moins jusqu'au VIIIe siècle, pendant lesquels il y a eu une Eglise autocéphale d'Ałuank qui avait sa propre langue liturgique, et donc ses livres liturgiques, et dont le territoire correspondait à un royaume indépendant qui devait aussi utiliser sa langue dans son administration, etc. Il n'y a pas de raison de penser qu'à certaines époques, cette langue n'ait pas pu être presqu'aussi prestigieuse que l'arménien et le géorgien, eux aussi langues d'Eglises autocéphales et de royaumes de vieille civilisation.

- Pourtant, tout document écrit en langue aghbanienne avait disparu, sans laisser aucune trace, jusqu'à ce que le linguiste géorgien Abuladze découvre en 1937 - douze siècles après la fin de l'autocéphalie caucaso-albanaise! - un manuscrit prouvant l'existence de l'écriture albanienne.

Le professeur Schramm, dans son ouvrage Anfänge des albanischen Christentums, page 147, est aussi sensible à ce destin de la langue et de la littérature aghbaniennes, dans un passage que j'ai eu tort de ne pas signaler lorsque j'ai publié sur le présent forum ma recension de son livre (14 janvier 2008):

Eine dritte, nach dem gleichen Muster für ein weiteres Volk der Kaukasusregion entworfeene christliche Kultur geht, wenn die Überlieferung recht hat, ebenfalls auf einen Anstoß des Maschotz zurück: auch die Aluaner -so hören wir - wollte er mit eigenen Alphabet ausgestattet sehen. Dieser dritten transkaukasischen Kirchensprache sollte freilich keine lange Dauer bescheiden sein. Denn die Aluaner (im heutigen Daghestan) mußten die volle Wucht des nach Norden ausgreifenden Kalifats über sich ergehen lassen. Ihre große Masse wird den Islam angenommen haben und sprachlich assimiliert worden sein. Daß abser von den Aluanern, die sich heute Uden nennen, immerhin drei Dörfer mit rund 3000 Einwohnern übriggeblieben sind, die ihren christlichen Glauben ebenso wie (wenn auch nicht in einer Literatur und Kirchenliteratur) ihre angestammte Sprache festgehalten haben, zeigt, daß die Bewahrungskräfte, denen wir nachsprüchen, selbst hir nicht onhne Rest überrollt wurden.

On notera que le professeur Schramm appelle les Albanais du Caucase "Alouaniens" (Aluaner), ce qui, malheureusement, pour une oreille française, évoque inévitablement les Alains (en allemand Alanen). On sait que les Alains, après de multiples aventures qui les menèrent jusqu'en Europe occidentale et en Afrique du Nord au Ve siècle (il en reste le souvenir du roi alain Sangiban, qui défendit Orléans contre les Huns d'Attila, et d'innombrables noms de lieux ou de rivières, dont l'Allondon dans le canton de Genève en Suisse), s'installèrent - du moins pour une partie d'entre eux - dans le Caucase où ils sont à l'origine des actuels Ossètes. Une fois de plus, je dois ici souligner que, malgré les homonymies ou quasi-homonymies, il n'y a aucune parenté linguistique entre les Albanais des Balkans, les Albaniens du Caucase et les Alains (Ossètes) du Caucase:

- Les Albanais des Balkans parlent une langue qui constitue à elle seule une branche de la famille indo-européenne.
- Les Alains et leurs descendants les Ossètes parlaient /parlent une langue du groupe iranien de la famille indo-européenne.
- Les Albanais du Caucase, et leur descendant les Oudis, parlaient / parlent une langue du groupe ibéro-caucasien, donc une langue non indo-européenne.

Encore que la similitude des noms en grec (Ἀλβανία - Alvania - pour l'Albanie du Caucase et Άρβανον - Arvanon - pour la principauté à l'origine de l'Albanie des Balkans) repose peut-être sur une racine non indo-européenne -alp évoquant les hauteurs et que l'on retrouve dans le nom des Alpes. En effet, l' Ἀλβανία comme la principauté d'Άρβανον étaient des pays de montagne. Encore une étymologie qui a plus de sens si les Albanais des Balkans descendent du peuple montagnard des Besses plutôt que du peuple littoral et marin des Illyriens.

Toujours est-il que, à la lecture du texte de Schramm, je n'avais pas percuté, et pas fait le lien entre les Aluaner et ce très oublié royaume chrétien orthodoxe de l'Albanie du Caucase.

Gottfried Schramm nous signale donc qu'il y aurait encore aujourd'hui, dans le Caucase, trois villages d'Albaniens / Aghbaniens / Ałuank restés chrétiens et qui auraient gardé l'usage - oral, mais non plus littéraire - de la langue de l'antique royaume pour laquelle saint Mesrop Machtots mit au point un alphabet. J'ai donc voulu me renseigner sur ces Oudis (Uden) mentionnés par Schramm et je n'ai trouvé d'informations que sur Internet, le Dictionnaire de l'Orient chrétien d'Assfalg et Krüger les ignorant royalement.

En revanche, Wikipédia est une mine d'informations sur le sujet; grâces en soient rendues à ses rédacteurs.

Sur le Wikipédia anglophone, l'article http://en.wikipedia.org/wiki/Caucasian_ ... n_alphabet contient une reproduction des écrits en alphabet aghbanien sur le manuscrit N° 7117 du Maténadaran: c'est le manuscrit mentionné par Gertrud Pätsch, que j'ai citée dans le post précédent, à l'origine à la bibliothèque de la sainte Etchmiadzine, sur lequel le linguiste géorgien Elie (Ilia) Abouladzé (1901-1968) découvrit en 1937 l'écriture albanienne que l'on croyait à jamais perdue. (Le Maténadaran est un extraordinaire musée de manuscrits à Erevan en république d'Arménie.)

Pour une fois, le Wikipédia francophone nous en apprend beaucoup plus (ici: http://fr.wikipedia.org/wiki/Alphabet_aghbanien ).
L'alphabet aghbanien ou alphabet albanien, pour reprendre la transcription la plus usuelle en français, est un ancien alphabet utilisé par les Albaniens, les habitants d'un territoire aujourd'hui compris dans l'Azerbaïdjan et le Daguestan, pour écrire leur langue. Selon l'historien arménien du VIIe siècle Moïse Kaghankatvatsi reprenant Korioun, cet alphabet a été créé par le moine arménien Mesrop Machtots, créateur également des alphabets arménien et géorgien.

Mentionné dans des sources anciennes, cet alphabet n'a été redécouvert qu'en 1937 par le professeur géorgien Ilia Abuladze dans le manuscrit 7117 du Matenadaran, du XVe siècle, qui expose différents alphabets à titre comparatif (alphabets arménien, grec, latin, géorgien, syriaque, copte et albanien). La partie sur l'alphabet albanien est intitulée Aluanic girn e (« lettres albaniennes »). À travers ce document, Abuladze se trouvait en face d'une liste de lettres avec une transcription phonétique approximative en arménien, mais il n'avait pas de texte illustrant l'usage de cet alphabet.

Dès 1937, le linguiste A. Charnidze a rapproché la structure phonétique de cet alphabet de la langue oudi, résiduelle en Azerbaïdjan et en Géorgie.

Un long fragment de texte rédigé dans cet alphabet a été découvert en 1996 par Zaza Alexidze, directeur de l'Institut des manuscrits de Tbilissi, sur un palimpseste du Monastère Sainte-Catherine du Sinaï. Le texte albanien avait été gratté puis recouvert d'une version géorgienne de la vie des pères du désert. Zaza Alexidze et Jean-Pierre Mahé ont présenté en 2001 les premiers essais de déchiffrement de cette langue inconnue à l'Académie des inscriptions et belles-lettres de Paris. À partir de l'alphabet du manuscrit arménien 7117 et d'une comparaison avec le vocabulaire oudi, ils ont pu établir que les fragments retrouvés étaient des extraits de l'Évangile de Jean et du lectionnaire albanien, datables entre les Ve et VIIIe siècles.
Ainsi, le premier déchiffrement d'un texte caucaso-albanais ne date que de 2001 et a été l'oeuvre du plus grand caucasologue français - digne hommage rendu par un spécialiste de l'arménien et du géorgien à une langue qui aurait pu connaître la même gloire que les deux autres idiomes des chrétiens de Transcaucasie si ses locuteurs ne s'étaient trouvés au pire moment au pire endroit...

L'article du Wikipédia francophone sur l'oudi -nom actuelle de l'albanais du Caucase - nous indique que cette langue comptait encore, en 1995, 5'720 locuteurs dont 4'200 en Azerbaïdjan ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Oudi ).

Le recensement soviétique de 1989 avait compté 7'971 personnes d'ethnie oudi, dont 7'063 avaient conservé leur langue, selon l'étude de 2005 que l'on trouvera à l'adresse suivante: http://www.sil.org/silesr/2005/silesr2005-014.pdf (The Sociolinguistic Situation of the Udi in Azerbaijan, par John M. Clifton, Deborah A. Clifton, Peter Kirk, et Roar Ljøkjell). Cette étude nous donne d'intéressantes informations sur les derniers descendants de l'antique royaume d'Albanie du Caucase, notamment en confirmant que, contrairement à leurs voisins (qui sont en fait, probablement, des descendants de Caucaso-Albanais ayant renié leur langue et leur foi au Moyen Âge), ils sont restés chrétiens. Malheureusement, comme ce fut déjà le cas à la fin du premier millénaire pour leurs ancêtres aghbaniens, les Oudis se sont divisés entre l'Eglise orthodoxe géorgienne et l'Eglise apostolique arménienne. Malgré une forte émigration vers la Géorgie (un village fondé par des Oudis orthodoxes à Oktomberi en Géorgie, en 1919) et la Russie (quelque 1'000 Oudis dans la ville de Krasnodar), les Oudis constitueraient encore l'écrasante majorité de la population du bourg de Nij, au nord de l'Azerbaïdjan (4'000 habitants sur 6'000). L'enquête indique que, si les Oudis d'Oktomberi sont rattachés au catholicat orthodoxe de Géorgie, ceux de Nij dépendant du catholicat arménien d'Etchmiadzine. Ce rattachement des Ałuank de Nij à l'Eglise apostolique arménienne est très ancien, puisqu'il remonte à la perte de l'autocéphalie du catholicossat d'Albanie vers l'an 705; on sait que ce catholicat, par la suite devenu un simple diocèse arménien, fut transféré vers 1400 à Gandzasar dans l'actuel Nagorny-Karabakh et privé de son titre de catholicossat par le tsar Nicolas Ier en 1836. C'est d'ailleurs à tort que Clifton, Clifton, Kirk et Ljøkjell écrivent (page 3) que "Tsar Nicholas I forced the Udi people to give up the Albanian tradition": il n'avait fait que supprimer un catholicat qui n'avait plus d'albanien que le nom et qui était en fait arménien depuis des siècles.

Toujours d'après cette enquête, il semble que, pendant des générations, les prêtres arméniens en charge des Oudis de Nij aient arménisé les noms de famille de leurs fidèles en tenant les registres de baptêmes, Ces noms à désience arménienne ont a exposé les Oudis à une hostilité certaine de la part de leurs voisins musulmans au cours des hostilités entre l'Arménie et l'Azerbaïjdan à propos du Haut-Karabakh après la chute de l'Union soviétique. D'après l'enquête, cette animosité est retombée lorsque les Oudis ont repris leur noms de famille traditionnels - albaniens et non arméniens - qui leur évitaient ainsi de passer pour des Arméniens. Des Oudis semblent aussi avoir indiqué aux linguistes qui les ont interrogés qu'ils souhaitaient se séparer de l'Eglise arménienne et restaurer l'Eglise albanaise. Je vois mal comment on pourrait rétablir une Eglise autocéphale pour 4'000 personnes, à moins que, si les Oudis veulent mener leur projet jusqu'au bout, ils n'embrassent la foi orthodoxe au sein du patriarcat de Moscou et que celui-ci crée un doyenné de langue albanienne pour les Oudis de Nij et de la diaspora russe.

Pour le reste, le Wikipédia anglais http://en.wikipedia.org/wiki/Church_of_ ... an_Albania mentionne que les églises de Nij sont fermées depuis la persécution communiste des années 1930, mais aussi qu'il y aurait une communauté chrétienne-albanienne enregistrée auprès des autorités compétentes de la république d'Azerbaïdjan depuis 2003 (depuis le 10 avril 2003 selon le Wikipédia azeri: http://az.wikipedia.org/wiki/Alban_H%C9 ... ls%C9%99si ).

Voilà le peu d'informations que j'ai réussi à réunir sur la situation actuelle des Albanais du Caucase. Privés de leur royaume depuis le VIIe siècle, privés de leur autocéphalie ecclésiastique depuis le VIIIe siècle, réduits à moins de 8'000 individus, ils n'ont évidemment pas eu le même acharnement à survivre et la même résistance à toutes les tragédies que le professeur Schramm souligne chez les Albanais des Balkans, capables de reconstituer sans cesse des Etats, de croître sur le plan démographique (ils sont aujourd'hui au moins 6 millions) et autocéphales sur le plan ecclésiastique depuis les années 1930. Pourtant, il y a bien un point commun qui souligne une fois de plus le grand intérêt des recherches de Gottfiried Schramm.
Car enfin, ces chrétiens besses de la région de Remesiana, aujourd'hui Bela Palanka, ils ont bien existé, avec leurs monastères à Jérusalem - comme les Aghbaniens -, leur langue liturgique - là encore comme les Aghbaniens - et, comme les Aghbaniens, ils sont supposés avoir disparu sans laisser de traces.

Alors, récrivons le début de ce message en remplaçant "caucaso-albanien" par "besse" et "oudi" par "albanais". Imaginons qu'un jour, un linguiste, découvre quelque part - probablement dans une bibliothèque oubliée d'un monastère abandonné de la région d'Italie du Sud où les Arbëresh émigrèrent, fuyant l'Islam, au XVe siècle - , un manuscrit contenant des textes en besse -langue supposée à jamais disparue -, comme, en 1937, Elie Abouladzé découvrit à Erevan un manuscrit contenant des textes en langue aghbanienne supposée à jamais disparue. Imaginons qu'un autre linguiste découvre que le besse est l'ancêtre de l'albanais moderne , comme Charnidze le fit en 1937 pour la filiation albanien / oudi. Imaginons qu'un jour d'autres linguistes arrivent à déchiffrer le besse sur la base de l'albanais, comme Alexidze et Mahé déchiffrèrent en 2001 l'aghbanien sur la base de l'oudi. J'espère juste que, ce jour-là, on se souviendra des travaux pionniers du professeur Gottfried Schramm.

Car c'est ainsi que procède la science: à coup d'hypothèses solidement étayées, mais dont la confirmation ne vient peut-être que des décennies plus tard.

D'après le célèbre site du professeur Leclerc (Université Laval de Québec) sur l'aménagement linguistique dans le monde, la République d'Azerbaïdjan aurait mis en place un enseignement de l'oudi à l'école primaire: http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/azer ... ol-min.htm
Claude le Liseur
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Re: De l'Albanie du Caucase à l'albanais des Balkans

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :
(...)

- Le christianisme orthodoxe connut, avant même la conversion des Slaves et le destin prodigieux qu'allait connaître la littérature slavonne (puis l'avènement d'autres langues liturgiques, comme l'arabe, le zyriane ou komi, le roumain, le finnois, le iakoute, le japonais... et le français), huit langues liturgiques: caucaso-albanien, arménien, besse, copte, géorgien, grec, gotique, guèze, latin et syriaque. L'arménien, le copte, le guèze et le syriaque sont encore aujourd'hui les langues liturgiques de prestigieuses Eglises vieilles-orientales qui ne sont pas en communion avec l'Eglise orthodoxe; au sein de l'Eglise orthodoxe, le copte et le syriaque ont été progressivement remplacés par l'arabe à parti du Xe siècle. L'usage de la langue gotique dans l'Eglise orthodoxe n'est plus mentionné après le IXe siècle. L'usage de l'arménien et du latin a disparu au Moyen Âge, en même temps que disparaissaient les orthodoxes arméniens et le monastère latin orthodoxe des Amalfitains au mont Athos. Le géorgien et le grec se sont maintenus - et avec quelle vitalité !- jusqu'à nos jours. L'albanien et le besse sont supposés avoir disparu sans laisser de traces.
Je suis maintenant en mesure de confirmer que ce n'est pas que sur le papier que le norvégien (bokmål en tout cas) fait partie des langues liturgiques, ayant eu l'occasion de participer à une liturgie dans cette langue. Il m'a été difficile de trouver un exemplaire des divines Liturgies traduites en bokmål, mais c'est chose faite, et l'exemplaire que je me suis procuré (Den ortodokse kirkes guddommelige liturgier, Solum Forlag, Oslo 2005, page 7) indique qu'il y a eu une édition danoise des divines Liturgies dès 1909. Je ne sais pas si l'usage liturgique du danois a perduré jusqu'à nos jours. Mais, ce que je peux affirmer en tant que témoin, c'est qu'il y a une vie liturgique orthodoxe complète en norvégien.
Il est heureux que l'Église orthodoxe, malgré la tentation omniprésente du phylétisme, persiste dans cet effort de traduction qui, seul, pourra nous permettre d'échapper au sort funeste que connut l'Église d'Orient, catholicossat (dit nestorien) de Séleucie-Ctésiphon, autrefois répandue jusqu'en Chine et très vite réduite à son bastion des montagnes de Haute-Mésopotamie, par attachement obstiné à la culture syriaque et refus d'inculturation dans les pays de mission.
Claude le Liseur
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Re: De l'Albanie du Caucase à l'albanais des Balkans

Message par Claude le Liseur »

Claude le Liseur a écrit :


Je suis maintenant en mesure de confirmer que ce n'est pas que sur le papier que le norvégien (bokmål en tout cas) fait partie des langues liturgiques, ayant eu l'occasion de participer à une liturgie dans cette langue. Il m'a été difficile de trouver un exemplaire des divines Liturgies traduites en bokmål, mais c'est chose faite, et l'exemplaire que je me suis procuré (Den ortodokse kirkes guddommelige liturgier, Solum Forlag, Oslo 2005, page 7) indique qu'il y a eu une édition danoise des divines Liturgies dès 1909. Je ne sais pas si l'usage liturgique du danois a perduré jusqu'à nos jours. Mais, ce que je peux affirmer en tant que témoin, c'est qu'il y a une vie liturgique orthodoxe complète en norvégien.
Il est heureux que l'Église orthodoxe, malgré la tentation omniprésente du phylétisme, persiste dans cet effort de traduction qui, seul, pourra nous permettre d'échapper au sort funeste que connut l'Église d'Orient, catholicossat (dit nestorien) de Séleucie-Ctésiphon, autrefois répandue jusqu'en Chine et très vite réduite à son bastion des montagnes de Haute-Mésopotamie, par attachement obstiné à la culture syriaque et refus d'inculturation dans les pays de mission.

Le missel Den ortodokse kirkes guddommelige liturgier mentionne une traduction danoise en 1909 par un dénommé C. Siletzky. La traduction en bokmål, celle que j'ai entre les mains, est de l'archimandrite Johannes Johansen et date de 1983, même si je l'ai dans une édition particulièrement soignée de 2005. Une traduction en nynorsk due à Ola Breivega (l'homme qui avait réussi à introduire l'enseignement du nynorsk au très important institut de philologie norvégienne de l'université de Cluj-Napoca - le nynorsk rayonne visiblement plus en Transylvanie qu'à Oslo) a été publiée en 1989 sous le titre Den guddomlege liturgien. Les partitions de Stig Simeon Frøyshov pour le chant d'église ont été publiées en 1996. (Frøyshov est un ancien élève de l'institut Saint-Serge, ce qui fait de la paroisse orthodoxe norvégienne le dernier endroit d'Oslo où on a quelque espoir de se faire comprendre en français.)
Je suppose que s'il y a traduction en nynorsk, il doit bien y avoir usage liturgique du nynorsk, mais je me demande bien où...
En tout cas, je complète mon message du 20 mai en indiquant que les divines Liturgies ont bien été traduites dans les deux idiomes norvégiens.
Comme je serais heureux de voir un jour les livres liturgiques en luxembourgeois, en basque et dans l'un ou l'autre des idiomes romanches (ce qui ne paraît pas réalisable à vue humaine, puisqu'il n'y a même pas de paroisse orthodoxe en pays romanche, l'unique paroisse orthodoxe des Grisons célébrant à ma connaissance en roumain dans une ville de langue allemande qui a perdu le romanche il y a bien longtemps, mais Dieu voulant...).
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