Noël

Échangez vos idées librement ici

Modérateur : Auteurs

Prealudium
Messages : 4
Inscription : lun. 02 janv. 2012 17:06

Noël

Message par Prealudium »

Bonjour à tous et merci pour votre accueil.
Tout d'abord, j'ai lu trop tard qu'il était souhaité que l'on utilise notre prénom comme pseudo ... Alors je me présente, je m'appelle Emmanuel. Prealudium fait référence à un prélude de Bach que je tentais un jour de déchiffrer.
Mais quel est mon lien avec l'orthodoxie? Dès l'enfance, je devrais dire déjà avant ma naissance, mes parents m'amenaient aux Pacques russes de l'église Saint Serge à Paris ou parfois à la cathédrale Alexandre Nevski. Les longues heures ainsi passées m'ont profondément imprégné de cette atmosphère devenue pour moi indispensable.
J'aimerais vous poser deux questions dont la deuxième fera l'objet d'un second message.
Je m'apprête à aller à la cathédrale de Genève demain soir pour Noël et je me demande quelle sont les différences principales en termes de liturgies entre l cérémonie donnée le soir, et celle qui sera donnée le 7 au matin.
Ma seconde question concerne la relique se trouvant dans le monastère de la la Sainte Trinité Alexander Svirsky en Carélie. Je développerai ceci dans un second message.
Merci à vous par avance pour votre lecture et peut-être pour vos réponses.
Tous mes voeux pour une année éclairée.
Emmanuel
Claude le Liseur
Messages : 4352
Inscription : mer. 18 juin 2003 15:13

Re: Noël

Message par Claude le Liseur »

Prealudium a écrit :Bonjour à tous et merci pour votre accueil.
Tout d'abord, j'ai lu trop tard qu'il était souhaité que l'on utilise notre prénom comme pseudo ... Alors je me présente, je m'appelle Emmanuel. Prealudium fait référence à un prélude de Bach que je tentais un jour de déchiffrer.
Mais quel est mon lien avec l'orthodoxie? Dès l'enfance, je devrais dire déjà avant ma naissance, mes parents m'amenaient aux Pacques russes de l'église Saint Serge à Paris ou parfois à la cathédrale Alexandre Nevski. Les longues heures ainsi passées m'ont profondément imprégné de cette atmosphère devenue pour moi indispensable.
J'aimerais vous poser deux questions dont la deuxième fera l'objet d'un second message.
Je m'apprête à aller à la cathédrale de Genève demain soir pour Noël et je me demande quelle sont les différences principales en termes de liturgies entre l cérémonie donnée le soir, et celle qui sera donnée le 7 au matin.
Ma seconde question concerne la relique se trouvant dans le monastère de la la Sainte Trinité Alexander Svirsky en Carélie. Je développerai ceci dans un second message.
Merci à vous par avance pour votre lecture et peut-être pour vos réponses.
Tous mes voeux pour une année éclairée.
Emmanuel
Ils vont célébrer des matines le vendredi soir et la liturgie le samedi matin. Cela peut surprendre de célébrer les matines la veille au soir (encore que ce soit, du point de vue liturgique, le même jour, puisque le jour liturgique va du coucher du soleil au coucher du soleil suivant), mais il faut préciser que c'est un usage normal chez les Russes.
En effet, les veilles de liturgies ordinaires, une paroisse comme celle que vous évoquez célèbre en fait un service dans lequel les matines suivent immédiatement les vêpres. Cet office est dit "de toute la nuit" (всенощная), ce que le diocèse dont relève l'église que vous citez traduit par "vigiles", mais il ne correspond pas à de vraies vigiles (grec αγριπνία). Les vigiles de la tradition byzantine durent en effet une bonne partie de la nuit et correspondent à un très long office où vêpres, matines et liturgie sont célébrées à la suite; elles ne sont célébrées qu'en des occasions spéciales (par exemple, la fête du saint dont la paroisse conserve des reliques). L'office russe "de toute la nuit" se termine en fait en début de soirée.
Autrement dit, les paroisses de tradition russe célèbrent normalement, le samedi soir, un office de vêpres et enchaînent sur matines. Les autres paroisses célèbrent, le samedi soir, l'office de vêpres, et célèbrent matines le dimanche matin juste avant la liturgie. Ainsi que je l'ai écrit plus haut, cette organisation est possible parce que, si du point de vue civil il s'agit d'un samedi soir et d'un dimanche matin, du point de vue liturgique, il s'agit du dimanche. C'est aussi la raison pour laquelle il est parfaitement légitime - et cela se fait dans certains cas (par exemple, les liturgies en français à la cathédrale orthodoxe grecque de Paris) - de célébrer aussi la liturgie le samedi soir.
Prealudium
Messages : 4
Inscription : lun. 02 janv. 2012 17:06

Re: Noël

Message par Prealudium »

Merci pour ces explications!
Claude le Liseur
Messages : 4352
Inscription : mer. 18 juin 2003 15:13

Re: Noël

Message par Claude le Liseur »

Voici la définition de l'office russe du soir donnée par Martine Roty, Dictionnaire russe-français des termes en usage dans l'Église russe, Institut d'études slaves, Paris 2010 (1re édition Paris 1980), pp. 23 s.


ВСЕНОЩНАЯ, ВСЕНОЩНИЦА, ВСЕНОЩНОЕ БДЕНИЕ (accent courant: все-) παννυχίς, άγρυπνία. Vigile.La vigile est célébrée le dimanche et aux grandes fêtes. Elle devrait théoriquement être l' «office de toute la nuit», mais ce n'est le cas que dans les monastères de règle sévère car elle est souvent anticipée dans la soirée. Elle est composée de vêpres + matines + prime; ou grandes complies + matines + prime, aux fêtes de Noël, de la Théophanie et de l'Annonciation. Normalement, il y a cinquante-deux vigiles dominicales et les vigiles des fêtes; mais il arrive que, dans les églises paroissiales ou les petits monastères, la vigile ne soit célébrée le dimanche que lorsque celui-ci coïncide avec une fête d'une certaine importance.
L'office auquel vous avez assisté hier soir, c'était donc grandes complies + matines + prime.
Je pense qu'il faut peut-être compléter les explications de Madame Roty, parce que cet office russe de всенощная ne correspond plus à ce qu'est l'office grec de l'agrypnie (άγρυπνία). L'agrypnie reste bien une vigile de toute la nuit (la seule agrypnie à laquelle j'ai eu la chance d'assister, en français et dans un monastère orthodoxe des Alpes, durait environ de 21 heures à 2 heures du matin...) qui n'est célébrée qu'en des occasions bien particulières (en l'occurrence, il s'agissait de la fête d'un saint dont le monastère avait reçu des reliques) et qui est l'occasion d'un grand afflux populaire. En revanche, le reste du temps, l'usage grec ne célèbre, le soir, que les vêpres, et soude les matines à la divine liturgie.
L'office russe de всенощная est beaucoup plus court qu'une agrypnie (2 heures au lieu de 5 ou 6 heures) et commence en fin d'après-midi / début de soirée plutôt que dans la nuit, mais il est en revanche d'un usage très fréquent (plusieurs dizaines de fois dans l'année, comme l'indique Madame Roty), alors que l'agrypnie est célébrée de manière exceptionnelle.
Claude le Liseur
Messages : 4352
Inscription : mer. 18 juin 2003 15:13

Re: Noël

Message par Claude le Liseur »

Encore faut-il préciser que l'usage liturgique des paroisses de tradition russe était l'usage général dans l'Orthodoxie au XVIIIe siècle.

Dans le premier volume de la vaste trilogie qu'il entend consacrer à l'ecclésiologie, le professeur Larchet rappelle que le patriarcat de Constantinople suivait encore cet usage au début du XIXe siècle:

Dans le domaine liturgique, les Eglises autocéphales ont l'obligation de conserver l'unité de forme des offices, seules quelques variantes mineures pouvant être introduites. (note 19)

Note 19: Par exemple, le patriarcat de Constantinople, en 1838, a procédé à une réforme liturgique (en vigueur aujourd'hui dans toute l'Eglise grecque, sauf au Mont-Athos)caractérisée notamment par: la suppression de la prière pour les catéchumènes à la Liturgie; la suppression des Vigiles et la célébration des Matines le matin; le déplacement de la lecture de l'Evangile des Matines après la 8e ode du canon. Certaines Eglises ont institué de petits offices propres en relation avec leurs coutumes particulières, comme l'Eglise serbe l'office de la Slava, célébration de la fête du saint patron de la famille.

Jean-Claude Larchet, L'Eglise corps du Christ. Nature et structure, Le Cerf, Paris 2012, p. 152.
Il convient de préciser qu'à ma connaissance, la réforme liturgique de 1838 constitue aujourd'hui non seulement l'usage du patriarcat de Constantinople, de l'Eglise de Chypre, de l'Eglise de Grèce, des patriarcats de Serbie et de Roumanie (qui se trouvaient sous la juridiction de Constantinople en 1838), mais aussi des patriarcats d'Alexandrie, d'Antioche et de Jérusalem. Je suppose que cet usage doit aussi avoir été adopté en Bulgarie, en Albanie et en Finlande, mais je ne saurais le confirmer. Le patriarcat de Moscou et l'Eglise orthodoxe russe hors frontières ont gardé l'ancien usage. Je suppose qu'il doit en être ainsi aussi chez les Ukrainiens, en Pologne et en Géorgie, mais je ne le sais pas, pas plus que je ne sais quel est l'usage en Tchéquie, en Slovaquie et en Bulgarie.
Le patriarcat de Constantinople et l'Eglise de Grèce ont conservé jusqu'à ce jour l'usage des vigiles de toute la nuit, mais seulement à des occasions particulières.
Répondre