Le métropolite Nicolas du Banat persiste et signe

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Claude le Liseur
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Le métropolite Nicolas du Banat persiste et signe

Message par Claude le Liseur »

Pour ceux qui n'aiment pas croire leurs propres yeux, voici le début de la transcription d'une interview téléphonique donnée par Mgr Nicolas (Corneanu) du Banat, à l'Association roumaine des journalistes et éditeurs chrétiens (AZEC), et transcrite sur le site roumain http://www.razbointrucuvant.ro/2008/06/ ... -pare-rau/ .

• Razvan Bucuroiu:
- Înaltpreasfintia Voastra, este adevarat ca v-ati impartasit la Biserica Greco-Catolica din Timisoara acum doua duminici?
- Da, este perfect adevarat. Am fost invitat de catre confratii greco-catolici la sfintirea unei noi biserici de aici, din orasul Timisoara. In momentul cand s-a facut impartasirea credinciosilor, m-a impresionat multimea de credinciosi care, toti, alaturi evident de preotii care erau de fata, au cerut sa fie si ei impartasiti. Printre acei credinciosi erau nu numai greco-catolici, ci si ortodocsi, pentru ca in zona respectiva traiesc mai multi ortodocsi decat greco-catolici. Dar, sigur, solemnitatea si serviciul religios a fost al greco-catolicilor. In momentul cand s-a impartasit toata lumea, repet din nou, am fost impresionat, emotionat de modul cum toata asistenta, toti participantii la serviciul religios s-au apropiat de preotii care cuminecau, ca sa primeasca si ei Impartasania. Imi pare rau ca am dat in felul acesta posibilitatea unor comentarii, din cele mai, sa zic asa,.. negative, dar pentru mine, ca si om al lui Hristos si al lui Dumnezeu, a fost un gest de fratietate. Pe langa toate, in acel moment mi-am adus aminte de foarte multele intruniri ecumenice la care luam si eu parte in trecut si la care se dezbatea, pe vremea aceea, un document care se chema „Botez, Euharistie si comuniune“. Sigur ca pe plan ecumenic am fost toti de acord ca e necesar sa ne apropiem unii de altii si sa recurgem la tot ceea ce se poate pentru a manifesta fratietatea dintre marile confesiuni crestine.


Ma traduction:

Question de Razvan Bucuroiu:

- Votre Éminence, est-il vrai que vous avez communié à l'église gréco-catholique de Timişoara voici deux dimanches?

- Oui, c'est parfaitement vrai. J'ai été invité par des confrères gréco-catholiques à la consécration d'une église d'ici, de la ville de Timişoara. Au moment de la communion des fidèles, j'ai été impressionné par la multitude des fidèles qui, tous, entourés de manière évidente de prêtres qui étaient de face, ont demandé à communier. Parmi ces fidèles, il n'y avait pas seulement des gréco-catholiques, mais aussi des orthodoxes, parce que dans cette région, il y a beaucoup plus d'orthodoxes que de gréco-catholiques. Mais, assurément, cette solennité et ce service religieux étaient gréco-catholiques. Au moment où tout le monde a pris la communion, je le répète de nouveau, j'ai été impressionné, ému par la manière dont toute l'assistance, tous les participants au service religieux se sont approchés des prêtres qui communiaient, afin de recevoir eux aussi l'eucharistie. J'ai éprouvé un sentiment de…, si l'on peut dire ainsi, fraternité face à ce public de fidèles qui n'étaient pas seulement gréco-catholiques, je le répète, mais aussi orthodoxes, et, dans un geste spontané, je me suis approché et j'ai demandé à communier et j'ai communié entouré par les autres. Certes, il fallait réfléchir aux conséquences ou aux commentaires qui étaient prévisibles à ce sujet, mais cela a été un geste spontané de fraternité dont j'ai ressenti à ce moment, pour ainsi dire, qu'il était nécessaire que je le fisse aussi, entouré de tout ce public qui se trouvait alors à ce service religieux. Je regrette que j'ai donné lieu de cette manière à la possibilité de commentaires, pour le moins, disons,… négatifs, mais pour moi, en tant qu'homme du Christ et de Dieu, cela a été un geste de fraternité. Par-dessus tout, à ce moment, je me suis souvenu de très nombreuses rencontres œcuméniques auxquelles j'ai moi aussi pris part dans le passé et dans lesquelles on débattait, à cette époque, d'un document qui s'appelait "Baptême, Eucharistie, et communion." Il est certain que sur le plan œcuménique nous avons tous été d'accord qu'il est nécessaire de se rapprocher les uns des autres et que nous nous référions à tout ce que nous pouvons faire pour manifester la fraternité entre les grandes confessions chrétiennes.


Mon commentaire:

La communion uniate du métropolite Nicolas du Banat représente un événement important, l'aboutissement de soixante ans de participation de certaines Églises orthodoxes au mouvement œcuménique. Un pas est franchi, dans une absence totale de réactions. Il faut désormais s'attendre à beaucoup de gestes du même genre dans d'autres diocèses et d'autres Églises. C'est probablement la fin des ambiguités entretenues, où l'on donnait l'impression d'être en communion avec la Papauté tout en disant qu'on ne l'était pas, etc. On va enfin passer de la simple invitation de la chorale de la paroisse protestante à chanter à la liturgie orthodoxe à la concélébration pure et simple avec le pasteur évangélique (mais toujours de manière ethniquement pure - il ne faut pas trop en demander pour le moment). Dans un premier temps, il va être intéressant de voir quelles seront les sanctions contre les personnes qui se montreront critiques à l'égard de telles évolutions. Y aura-t-il à la fin un appel au bras séculier?

Or, quand on est confronté à un événement de cette importance, il ne sert à rien de nier l'évidence. D'autant plus que le geste du métropolite Nicolas a suscité une mobilisation internetienne et médiatique en sa faveur que je n'ai jamais vue se manifester pour les évêques orthodoxes fidèles à leur foi. Certains des partisans du métropolite Nicolas ont des idées vraiment intéressantes, comme cette proposition d'organiser un référendum dans son diocèse – référendum qui lui serait de toute évidence favorable, mais aurait au moins l'avantage de clarifier les choses et de représenter un pas supplémentaire.
On notera, dans la suite de l'interview, qu'un des participants signale au métropolite Nicolas Corneanu, qui rappelle sa foi dans la validité des sacrements catholiques romains, que telle n'était pas la position orthodoxe traditionnelle; cet intervenant cite saint Païssios Vélitchkovsky, le traducteur slavon de la Philocalie, et le métropolite Hiérothée de Naupacte, qui ne fait d'ailleurs qu'exprimer une position qui est la pratique de l'Église de Grèce, laquelle ne campe pas sur les mêmes positions que la métropole du Banat. Mgr Nicolas répond que, si de telles positions ont existé dans l'Orthodoxie roumaine, c'était par hostilité aux Hongrois et que de telles positions ne sont plus défendables maintenant que les relations sont bonnes entre la Hongrie et la Roumanie.
Je trouve originale la position du métropolite Nicolas selon laquelle on peut participer à des actes cultuels d'une autre religion par sentiment de fraternité et de sympathie. La prochaine fois que je rendrai visite à un copain musulman, j'en profiterai pour aller faire les prières rituelles à la mosquée. Comme j'ai aussi des copains néo-païens, j'irai avec eux faire les rites pour le solstice.
Non, je plaisante, c'est une mentalité que je ne comprends pas, complètement contraire à ma mentalité – mais c'est sans doute parce que je suis un radical d'avant le déluge, un militant de la laïcité inexportable hors d'Europe occidentale -: je ne comprends pas pourquoi, pour manifester mon amitié à quelqu'un, je devrais participer à son culte. Contrairement à Mgr Nicolas du Banat, je crois que je peux entretenir les meilleures relations avec quelqu'un en n'ayant aucune participation à ses activités religieuses, voire en les désapprouvant, de même que je ne brandis pas le drapeau de tous mes amis qui ont des idées politiques opposées aux miennes. C'est sur des principes complètement opposés à ceux défendus par Mgr Nicolas que nous avons fait vivre une nation avec trois confessions et quatre langues.
Ceci dit, il est possible que la pensée et la praxis corneaniennes représentent un grand facteur d'unité nationale, mais elles ne représenteront sans doute pas un grand facteur d'unité panorthodoxe.

J'espère que toutes les conséquences de cette nouvelle position seront tirées, que les conditions pour communier dans les églises orthodoxes seront alignées sur celles pour communier dans les églises catholiques.

J'espère surtout que nous serons enfin autorisés à aller manifester à la manière du métropolite du Banat notre fraternité avec l'ECOF, les vieux-calendéristes, les Vieux-Ritualistes, les autocéphalistes ukrainiens, etc. A moins que, comme le laissent entendre les propos de Mgr Nicolas, il ne soit question de fraternité qu'entre les "grandes" confessions chrétiennes?
Claude le Liseur
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Re: Le métropolite Nicolas du Banat persiste et signe

Message par Claude le Liseur »

lecteur Claude a écrit :Pour ceux qui n'aiment pas croire leurs propres yeux, voici le début de la transcription d'une interview téléphonique donnée par Mgr Nicolas (Corneanu) du Banat, à l'Association roumaine des journalistes et éditeurs chrétiens (AZEC), et transcrite sur le site roumain http://www.razbointrucuvant.ro/2008/06/ ... -pare-rau/ .

• Razvan Bucuroiu:
- Înaltpreasfintia Voastra, este adevarat ca v-ati impartasit la Biserica Greco-Catolica din Timisoara acum doua duminici?
- Da, este perfect adevarat. Am fost invitat de catre confratii greco-catolici la sfintirea unei noi biserici de aici, din orasul Timisoara. In momentul cand s-a facut impartasirea credinciosilor, m-a impresionat multimea de credinciosi care, toti, alaturi evident de preotii care erau de fata, au cerut sa fie si ei impartasiti. Printre acei credinciosi erau nu numai greco-catolici, ci si ortodocsi, pentru ca in zona respectiva traiesc mai multi ortodocsi decat greco-catolici. Dar, sigur, solemnitatea si serviciul religios a fost al greco-catolicilor. In momentul cand s-a impartasit toata lumea, repet din nou, am fost impresionat, emotionat de modul cum toata asistenta, toti participantii la serviciul religios s-au apropiat de preotii care cuminecau, ca sa primeasca si ei Impartasania. Imi pare rau ca am dat in felul acesta posibilitatea unor comentarii, din cele mai, sa zic asa,.. negative, dar pentru mine, ca si om al lui Hristos si al lui Dumnezeu, a fost un gest de fratietate. Pe langa toate, in acel moment mi-am adus aminte de foarte multele intruniri ecumenice la care luam si eu parte in trecut si la care se dezbatea, pe vremea aceea, un document care se chema „Botez, Euharistie si comuniune“. Sigur ca pe plan ecumenic am fost toti de acord ca e necesar sa ne apropiem unii de altii si sa recurgem la tot ceea ce se poate pentru a manifesta fratietatea dintre marile confesiuni crestine.


Ma traduction:

Question de Razvan Bucuroiu:

- Votre Éminence, est-il vrai que vous avez communié à l'église gréco-catholique de Timişoara voici deux dimanches?

- Oui, c'est parfaitement vrai. J'ai été invité par des confrères gréco-catholiques à la consécration d'une église d'ici, de la ville de Timişoara. Au moment de la communion des fidèles, j'ai été impressionné par la multitude des fidèles qui, tous, entourés de manière évidente de prêtres qui étaient de face, ont demandé à communier. Parmi ces fidèles, il n'y avait pas seulement des gréco-catholiques, mais aussi des orthodoxes, parce que dans cette région, il y a beaucoup plus d'orthodoxes que de gréco-catholiques. Mais, assurément, cette solennité et ce service religieux étaient gréco-catholiques. Au moment où tout le monde a pris la communion, je le répète de nouveau, j'ai été impressionné, ému par la manière dont toute l'assistance, tous les participants au service religieux se sont approchés des prêtres qui communiaient, afin de recevoir eux aussi l'eucharistie. J'ai éprouvé un sentiment de…, si l'on peut dire ainsi, fraternité face à ce public de fidèles qui n'étaient pas seulement gréco-catholiques, je le répète, mais aussi orthodoxes, et, dans un geste spontané, je me suis approché et j'ai demandé à communier et j'ai communié entouré par les autres. Certes, il fallait réfléchir aux conséquences ou aux commentaires qui étaient prévisibles à ce sujet, mais cela a été un geste spontané de fraternité dont j'ai ressenti à ce moment, pour ainsi dire, qu'il était nécessaire que je le fisse aussi, entouré de tout ce public qui se trouvait alors à ce service religieux. Je regrette que j'ai donné lieu de cette manière à la possibilité de commentaires, pour le moins, disons,… négatifs, mais pour moi, en tant qu'homme du Christ et de Dieu, cela a été un geste de fraternité. Par-dessus tout, à ce moment, je me suis souvenu de très nombreuses rencontres œcuméniques auxquelles j'ai moi aussi pris part dans le passé et dans lesquelles on débattait, à cette époque, d'un document qui s'appelait "Baptême, Eucharistie, et communion." Il est certain que sur le plan œcuménique nous avons tous été d'accord qu'il est nécessaire de se rapprocher les uns des autres et que nous nous référions à tout ce que nous pouvons faire pour manifester la fraternité entre les grandes confessions chrétiennes.


Mon commentaire:

La communion uniate du métropolite Nicolas du Banat représente un événement important, l'aboutissement de soixante ans de participation de certaines Églises orthodoxes au mouvement œcuménique. Un pas est franchi, dans une absence totale de réactions. Il faut désormais s'attendre à beaucoup de gestes du même genre dans d'autres diocèses et d'autres Églises. C'est probablement la fin des ambiguités entretenues, où l'on donnait l'impression d'être en communion avec la Papauté tout en disant qu'on ne l'était pas, etc. On va enfin passer de la simple invitation de la chorale de la paroisse protestante à chanter à la liturgie orthodoxe à la concélébration pure et simple avec le pasteur évangélique (mais toujours de manière ethniquement pure - il ne faut pas trop en demander pour le moment). Dans un premier temps, il va être intéressant de voir quelles seront les sanctions contre les personnes qui se montreront critiques à l'égard de telles évolutions. Y aura-t-il à la fin un appel au bras séculier?

Or, quand on est confronté à un événement de cette importance, il ne sert à rien de nier l'évidence. D'autant plus que le geste du métropolite Nicolas a suscité une mobilisation internetienne et médiatique en sa faveur que je n'ai jamais vue se manifester pour les évêques orthodoxes fidèles à leur foi. Certains des partisans du métropolite Nicolas ont des idées vraiment intéressantes, comme cette proposition d'organiser un référendum dans son diocèse – référendum qui lui serait de toute évidence favorable, mais aurait au moins l'avantage de clarifier les choses et de représenter un pas supplémentaire.
On notera, dans la suite de l'interview, qu'un des participants signale au métropolite Nicolas Corneanu, qui rappelle sa foi dans la validité des sacrements catholiques romains, que telle n'était pas la position orthodoxe traditionnelle; cet intervenant cite saint Païssios Vélitchkovsky, le traducteur slavon de la Philocalie, et le métropolite Hiérothée de Naupacte, qui ne fait d'ailleurs qu'exprimer une position qui est la pratique de l'Église de Grèce, laquelle ne campe pas sur les mêmes positions que la métropole du Banat. Mgr Nicolas répond que, si de telles positions ont existé dans l'Orthodoxie roumaine, c'était par hostilité aux Hongrois et que de telles positions ne sont plus défendables maintenant que les relations sont bonnes entre la Hongrie et la Roumanie.
Je trouve originale la position du métropolite Nicolas selon laquelle on peut participer à des actes cultuels d'une autre religion par sentiment de fraternité et de sympathie. La prochaine fois que je rendrai visite à un copain musulman, j'en profiterai pour aller faire les prières rituelles à la mosquée. Comme j'ai aussi des copains néo-païens, j'irai avec eux faire les rites pour le solstice.
Non, je plaisante, c'est une mentalité que je ne comprends pas, complètement contraire à ma mentalité – mais c'est sans doute parce que je suis un radical d'avant le déluge, un militant de la laïcité inexportable hors d'Europe occidentale -: je ne comprends pas pourquoi, pour manifester mon amitié à quelqu'un, je devrais participer à son culte. Contrairement à Mgr Nicolas du Banat, je crois que je peux entretenir les meilleures relations avec quelqu'un en n'ayant aucune participation à ses activités religieuses, voire en les désapprouvant, de même que je ne brandis pas le drapeau de tous mes amis qui ont des idées politiques opposées aux miennes. C'est sur des principes complètement opposés à ceux défendus par Mgr Nicolas que nous avons fait vivre un pays avec trois confessions et quatre langues.
Ceci dit, il est possible que la pensée et la praxis corneaniennes représentent un grand facteur d'unité nationale, mais elles ne représenteront sans doute pas un grand facteur d'unité panorthodoxe.

J'espère que toutes les conséquences de cette nouvelle position seront tirées, que les conditions pour communier dans les églises orthodoxes seront alignées sur celles pour communier dans les églises catholiques.

J'espère surtout que nous serons enfin autorisés à aller manifester à la manière du métropolite du Banat notre fraternité avec l'ECOF, les vieux-calendéristes, les Vieux-Ritualistes, les autocéphalistes ukrainiens, etc. A moins que, comme le laissent entendre les propos de Mgr Nicolas, il ne soit question de fraternité qu'entre les "grandes" confessions chrétiennes?

J'ai oublié de remercier "Théophylactère" qui m'a spontanément donné le lien vers la transcription de cet entretien téléphonique.
Jean-Mi
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Re: Le métropolite Nicolas du Banat persiste et signe

Message par Jean-Mi »

lecteur Claude a écrit :La prochaine fois que je rendrai visite à un copain musulman, j'en profiterai pour aller faire les prières rituelles à la mosquée.
Le Lecteur Claude prend de bons exemples pour diriger sa vie religieuse!

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bravo!

:lol: :lol: :lol:

en laissant mon humour toujours aussi douteux et lamentable de côté, j'ai trouvé dans vos propos que je suis venu lire en vitesse (faut que j'achève mon "Schmemann" du jour) tant de justesse et d'équilibre.. Que nos acharnés oecuménistes en prennent de la graine.
Enfin, j'ai des doutes car en effet, comme je suis moi aussi convaincu que c'est la ligne de conduite de la majorité de notre épiscopat, je m'attend à ce que de réprobations directes mais douces (interdiction formelle de m'adresser à un évêque, qui m'a été adressée récemment), on passe très bientôt à la persécution directe.
Devra-t'on se cotiser pour acheter en groupe des billets d'avion pour aller communier une fois l'an au Mont-Sinaï?
Saint Maxime le Confesseur avait dur à encaisser, mais au moins il était prêtre et pouvait se "sustenter sacramentellement" - ce que la plupart d'entre nous ne peuvent faire, et les plus mauvais et acharnés d'entre les démolisseurs de l'Église le savent...

Il me semble qu'il n'y a pas que contre la crise alimentaire et pétrolière que je dois préparer des réserves...

Kyrie eleison
Claude le Liseur
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Re: Le métropolite Nicolas du Banat persiste et signe

Message par Claude le Liseur »

Jean-Mi a écrit : en laissant mon humour toujours aussi douteux et lamentable de côté, j'ai trouvé dans vos propos que je suis venu lire en vitesse (faut que j'achève mon "Schmemann" du jour) tant de justesse et d'équilibre.. Que nos acharnés oecuménistes en prennent de la graine.
Enfin, j'ai des doutes car en effet, comme je suis moi aussi convaincu que c'est la ligne de conduite de la majorité de notre épiscopat, je m'attend à ce que de réprobations directes mais douces (interdiction formelle de m'adresser à un évêque, qui m'a été adressée récemment), on passe très bientôt à la persécution directe.
Devra-t'on se cotiser pour acheter en groupe des billets d'avion pour aller communier une fois l'an au Mont-Sinaï?
Saint Maxime le Confesseur avait dur à encaisser, mais au moins il était prêtre et pouvait se "sustenter sacramentellement" - ce que la plupart d'entre nous ne peuvent faire, et les plus mauvais et acharnés d'entre les démolisseurs de l'Église le savent...

Il me semble qu'il n'y a pas que contre la crise alimentaire et pétrolière que je dois préparer des réserves...

Kyrie eleison

L'idée d'organiser des voyages en groupe pour aller communier n'est pas si absurde.

Je vous remercie de votre appréciation sur votre message, et elle me conduit à de nouveaux développements.

Vous trouvez que la position que je défends est "équilibrée" et je vous en remercie. Mais vous mettez aussi l'accent sur un point important.

Si Dieu m'en donne l'énergie, je traduirai petit à petit l'interview donnée à l'AZEC par Mgr Nicolas du Banat le 4 juin. Elle est significative en ce sens que toutes les positions dogmatiques, liturgiques, canoniques et même historiques défendues par le métropolite ne sont justifiées que par le sentimentalisme.
J'ai déjà à plusieurs reprises discuté sur ce forum avec des catholiques de la tendance sentimentaliste à qui je n'arrivais pas à faire comprendre que les faits existent, que l'on soit catholique, orthodoxe, musulman ou communiste. Autre chose est l'interprétation des faits, mais les faits ont une existence incontestable. De même que je suis encore sûr pour le moment d'avoir un corps, que c'est une réalité tangible. Il semble qu'arrivé à un certain degré de sentimentalisme, la notion de faits et de réalité objective ne soit plus comprise. Vous le constaterez vous-même en lisant la suite de l'interview du métropolite du Banat.

Vous savez, depuis le plus jeune âge, j'ai l'habitude de passer pour un salaud parce que j'opposais toujours la réalité objective des faits à la guimauve sentimentale dont je subodorais très jeune qu'elle servait à justifier les pires horreurs. J'ai aussi pris assez vite l'habitude de voir quelques années plus tard mes arguments repris par des gens qui m'avaient lynché avec les autres loups quand j'étais le seul à ne pas aller dans le sens unique et obligatoire. Mais voilà, je suis comme feu Georges Brassens: la musique qui marche au pas, ce n'est pas fait pour moi. J'ai déjà eu droit à ce genre d'expériences - me faire lyncher par des gens qui se sont ensuite, mais trop tard, ralliés à la position objecive et factuelle - pour les bébés phoques, la démographie du Tiers Monde, l'islamisation de l'Europe, etc., etc. Parce que les faits finissent toujours par se venger.

Il m'est donc très indifférent de me faire insulter par la meute qui s'est mise à défendre Mgr Nicolas Corneanu depuis son acte d'apostasie et qui n'a jamais défendu aucun évêque orthodoxe fidèle à sa foi. Je n'ai donc pas peur de dire que, pas plus que la violence n'est la force, le sentimentalisme vaporeux ne supplée à l'absence d'arguments.

En outre, je ne sais que trop vers quel enfer nous mène ce sentimentalisme qui finit par tenir lieu de religion, de politique, d'esthétique, d'éthique, etc. Vous savez ce que Napoléon Bonaparte disait du tsar Alexandre Ier: "Une âme noble... qui a fait étrangler son père". Et bien, j'en ai trop vu, des sentimentaux qui ont marché au pas derrière toutes sortes de drapeaux, des calligraphes chefs de police politique et des musiciens tortionnaires. Ce sont des sentimentaux qui ont détruit ma civilisation et mon continent. Et ça dure depuis longtemps, tout en empirant de génération en génération. Lisez les écrits des dirigeants de la Révolution française: ça dégouline de sentiments, c'est mielleux et doucereux. Et vous avez vu ce qu'ils ont fait...

Alors, que l'ancien collaborateur de la police politique communiste Nicolas Corneanu verse dans le sentimentalisme n'est pas pour m'étonner. Les gens qui ont ce profil psychologique sont effectivement, partout et toujours, prédisposés à avoir des engagements politiques qui ne risquent pas d'être celui du camp radical, libéral, agrarien et national (vous savez, les salauds qui se réfèrent à l'esprit des Lumières et à l'héritage européen de la pensée logique).

Mais c'est ici que le religieux rejoint le politique.

Dans la suite de l'interview, Mgr Nicolas explique que la reconnaissance de la juridiction universelle du Pape serait la seule différence entre orthodoxes et catholiques romains. Ne nous attardons pas sur le fait que le Filioque et la théologie trinitaire ne soient pas cités. Ce qui est plus intéressant, c'est que ne soient absolument pas mentionnées les différences extrêmement importantes en ce qui concerne la vie spirituelle (grâce créée, nature du péché originel, doctrine orthodoxe des énergies, déification, méthodes d'oraison diamétralement opposées). Attention: la question, ici, n'est pas de savoir quelle spiritualité est légitime, mais bien de constater le fait objectif qu'il y a des différences considérables entre la vie spirituelle orthodoxe et la vie spirituelle catholique. Sinon, on se demande comment l'archimandrite Placide (Deseille) ou le métropolite Hiérothée (Vlachos) pourraient écrire des livres consacrés à la spiritualité orthodoxe.

Or, le point intéressant est que Mgr Nicolas appartient sans doute à un milieux religieux dans lequel la spiritualité orthodoxe n'est pas reçue - pour ne pas dire qu'elle est carrément condamnée, car j'ai connu, par exemple, une paroisse où il valait mieux ne pas mentionner le nom de saint Grégoire Palamas. Je me souviens que j'avais remarqué avec horreur - et photographié, tant j'étais choqué -, quand j'avais visité la cathédrale orthodoxe roumaine de Timişoara (il y a aussi dans cette ville une cathédrale d'un diocèse orthodoxe serbe beaucoup plus ancien), les affiches qui annonçaient les offices célébrés dans une chapelle de la cathédrale par le mouvement Oastea Domnului - un mouvement qui, sur fond d'Orthodoxie nominale, mêle le pentecôtisme émotionnel et ce moralisme extérieur factice que Mgr Hiérothée de Naupacte évoquait dans un texte que j'ai traduit du grec moderne et publié sur le présent forum.
Il y a deux ans, j'ai un jour, par hasard, assisté à la prestation d'un prêtre qui était lié à Oastea Domnului. Je pense que les membres du mouvement reçoivent une formation d'acteur, parce que c'était vraiment du théâtre. Le prêtre en question faisait appel aux larmes pour susciter l'émotion - l'émotionnalisme - parmi le public - les fidèles - en utilisant toutes les vieilles recettes des prédicateurs pentecôtistes. C'était un peu dans le style "bénédiction de Toronto". A la limite, on se demandait pourquoi il y avait encore besoin, dans ce contexte, d'un autel, d'un antimension, d'icônes, d'encensoirs, etc. J'étais accompagné par une personne dont une partie de la famille était liée à Oastea Domnului et qui se sentait encore plus mal que moi - et pour cause.

Et oui, de même que je suis un salaud en politique et en économie parce que j'essaie de trouver la meilleure solution en raisonnant à partir des faits, je suis aussi un salaud en matière spirituelle parce que je me méfie à tout prix du sentimentalisme et de l'émotionnalisme. Il me semble d'ailleurs que l'enseignement orthodoxe en matière spirituelle était de fuir à tout prix l'émotion, les pensées discursives, tout ce qui risquait de venir de nous-mêmes ou du Malin. Il est vrai que cela nous rapproche de la spiritualité bouddhiste, ou shivaïte, et que c'est sans doute malvenu de rappeler cette tradition spirituelle si le seul but est de copier le protestantisme anglo-saxon de 1920. Pourtant, je ne crois pas que ma nature déchue est apte à me sauver elle-même. Professant, comme René Guénon, qu'"une addition d'incompétences ne fait pas une compétence", je crois encore moins qu'un rassemblement de gens en proie à leurs émotions puisse être encore plus inspiré qu'une seule personne en proie à ses émotions. Vous verrez dans la suite de l'interview que Mgr Nicolas du Banat justifie en parte son acte en disant que la foule dans l'église l'a applaudi. A part le fait que dans ma famille, on n'applaudit jamais dans un lieu de culte, mais c'est sans doute une tradition culturelle des pays francophones qui diverge de la tradition culturelle banataise, je persiste à dire que la foule est capable de devenir un être différent de la somme des personnes qui la composent et qu'il y a encore plus de risques, dans les émotions d'une foule, d'être confrontées à des choses qui viennent d'en-bas que dans les émotions d'une seule personne. Je ne confonds pas le viol des foules par la propagande politique, le marketing ou le sentimentalisme religieux avec la spiritualité. Je suis donc un salaud. Et je préfère l'être que de suivre la voie spirituelle prônée par Mgr Nicolas Corneanu; on voudra bien m'excuser de préférer l'enseignement donné par des ascètes expérimentés qui disent exactement le contraire.

Je me permets, enfin, de faire la remarque que l'agitation des partisans de Mgr Nicolas du Banat sur Internet illustre à merveille ce mélange de sentimentalisme, d'émotionnalisme et de tribalisme où j'ai toujours l'impression de voir la répression et le totalitarisme pointer leur nez derrière les grandes proclamations d'amour universel. En effet, quand on lit ce genre de textes, point n'est besoin de réfléchir longtemps pour voir qui sont les extrémistes et les "Taliban" ( http://corneanu.skyrock.com/ ):

"Avant-hier l'association AZTEC (des journalistes prétendument chrétiens) a organisé une "conférence" où ils ont jugé Mgr Nicolas, en son absence, et lui ont "donné la parole" uniquement par téléphone, en lui posant des questions.

En réalité, la plupart des questions n'étaient que des axiomes, qu'ils voulaient lui imposer. Par exemple: «Les papistes n'ont ni sacerdoce, ni sacrements. Le Vatican n'est pas une église, mais un sistème politico-économique hors de l'Église, et le pape, avec tout le clergé du Vatican, ne sont pas les succsseurs des apôtres; ils n'ont point de traditon et de succession apostolique.»

Ça ressemble tellement au procès intenté au Christ par les pontifes! "


En quelques lignes, tout un résumé du sentimentalisme pseudo-religieux:
- les journalistes qui ont interviewé Mgr Nicolas, parce qu'ils n'étaient pas d'accord avec l'idéologie que défend aujourd'hui le métropolite Nicolas (qui en a défendu bien d'autres dans le passé !), deviennent des "journalistes prétenduement chrétiens"; mais enfin, si l'on professe que tout se vaut, comment peut-il y avoir de vrais et de faux chrétiens? Et si l'on dégouline d'amour universel - sauf, on l'a vu, à l'égard du pauvre père Cléopa et du peuple russe -, comment peut-on porter de pareils jugements?
- la citation sur l'invalidité des sacrements hétérodoxes n'était pas un axiome qu'un journaliste cherchait à imposer au métropolite; c'était le rappel de la position orthodoxe traditionnelle, contraire à celle du métropolite Nicolas, à travers une citation du métropolite Hiérothée (Vlachos) de Naupacte et Saint-Blaise qui est un de nos plus brillants écrivains; on constatera donc que l'idéologie de l'amour universel et du sentimentalisme adogmatique est si totalitaire qu'elle ne tolère plus que l'on puisse même rappeler la position théologique traditionnelle; cela rejoint la remarque de Jean-Mi à propos de ces gens qui ne peuvent pas tolérer que nous nous intéressions en priorité à nos propres centres d'intérêt sur les seuls espaces de discussion que nous avons encore, tous les autres media orthodoxes étant dans la ligne qui sera bientôt la seule ligne autorisée; cela rejoint de manière frappante la politique suivie par les protestants libéraux au sein de l'Eglise luthérienne officielle de Norvège, où ils avaient d'abord timidement fait accepter, comme une concession, l'ordination de femmes pasteurs avant d'en arriver quelques décennies plus tard à imposer à tous les étudiants en théologie la signature d'une déclaration obligatoire selon laquelle ils reconnaissaient le sacerdoce des femmes; au fond, l'archevêque catholique romain de Tulle, Mgr Marcel Lefebvre, avait bien résumé la situation quand il avait dit "il n'y a pas plus intolérant qu'un libéral" (s'entend bien sûr d'un libéral en religion, de l'idéologie oecuméniste, et pas des libéraux en politique);
- enfin, la dernière remarque "Ça ressemble tellement au procès intenté au Christ par les pontifes!" est très significative; je trouve que le Dieu-Homme est de plus en plus galvaudés au profit de petits sauveurs politiques ou pseudo-religieux; cette allusion au prototype de tous les procès injustes me fait frémir quand je pense aux choix qu'a faits le nouveau "Christ" Nicolas Corneanu dans les années 1950 et que je les compare aux choix qu'avaient faits d'autres prêtres orthodoxes et qui les ont menés à mourir à Aiud ou au camp de concentration du canal sans qu'il y a ait jamais en leur faveur le dixième de la mobilisation médiatique qui soutient aujourd'hui le métropolite du Banat; enfin, il ne me viendrait pas à l'esprit de mettre à toutes les sauces l'unique sacrifice du Sauveur, et je mesure quelle est la distance qui sépare ma mentalité de salaud, recherchant le plus possible la sobriété spirituelle, de l'émotionalisme de la théologie adogmatique qui sera sans doute bientôt obligatoire. Et pourtant, oui, je succombe à mon tour à l'émotion, et j'ai de la peine à ne pas verser une larme, quand je vois que l'on compare l'interview du métropolite du Banat au procès fait à Notre Seigneur par le Sanhédrin, et que je pense à tous les gens, depuis 1914, qui ont connu des procès autrement plus dangereux. C'est étonnant qu'après un siècle de persécutions de toutes sortes, après que l'Europe a été transformée en un vaste cimetière, après que 80 à 85% du clergé orthodoxe russe d'avant 1917 ait été physiquement liquidé, on puisse tranquillement faire ce genre de comparaisons sans avoir un tant soit peu l'impression de tomber dans l'hyperbole.

Là encore, c'est sans doute une différence culturelle et je ne devrais pas avoir ce genre de réactions. Je suis trop marqué par ma propre culture, dans laquelle un certain Talleyrand a dit que "Tout ce qui est excessif est insignifiant".
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

"Il n'y a pas plus intolérants que les libéraux" : c'est vrai parfois en politique aussi. Je me suis fait honnir de libertariens catho tradis pour avoir osé m'opposer à la position américaniste de François Guillaumat et Georges Lane sur le Kosovo.
Pour le reste, je suis en plein accord avec vous, mon cher Claude. J'ajouterai ceci : on chercherait vainement dans toute l'Ecriture Sainte le mot "amour" suspendu dans le vague et l'universel. Qu'il s'agisse des Evangiles ou de l'A.T., ce terme a toujours un complément: aimer Dieu, aimer son prochain, aimer ses ennemis, etc., avec des exemples pour montrer de quoi l'on parle. Ce qui signifie que l'amour n'est pas le sentimentalisme, qu'il est autrement incarné et exigeant.
Il se pourrait que ce sentimentalisme, ce recours à l'émotion confondue avec l'amour soit l'un des fruits lointains du filioque. Le monde païen l'ignorait ou le méprisait, comme on le voit encore en Inde ou dans le bouddhisme. Il apparaît au XVIIIe siècle, avec la revendication du "bonheur", un bonheur tout terrestre, superficiel et quotidien quasiment confondu avec le confort bourgeois. Avant de triompher tant dans le pentecôtisme américain que dans l'infantilisation des fidèles catholiques romains au XIXe siècle (il faut lire les bulletins paroissiaux des années 1860 !), ce sentimentalisme du bonheur s'inscrit dans la constitution américaine. Fruit lointain du filioque parce qu'on le voit associé au déisme, à une conception abstraite de Dieu qui insiste d'abord sur la nature divine et minimise la vie et l'hypostase. Si je n'ai pas sauté un ou deux pas logiques dans cette filiation, cela expliquerait aussi pourquoi qui recourt à ce sentimentalisme ne peut pas aborder ni comprendre même la question du filioque et, partant, les divergences dogmatiques entre Rome et l'orthodoxie. Enfin, c'est une piste de réflexion que je livre à votre sagacité.
"Viens, Lumière sans crépuscule, viens, Esprit Saint qui veut sauver tous..."
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Anne Geneviève a écrit :"Il n'y a pas plus intolérants que les libéraux" : c'est vrai parfois en politique aussi. Je me suis fait honnir de libertariens catho tradis pour avoir osé m'opposer à la position américaniste de François Guillaumat et Georges Lane sur le Kosovo.
Pour le reste, je suis en plein accord avec vous, mon cher Claude. J'ajouterai ceci : on chercherait vainement dans toute l'Ecriture Sainte le mot "amour" suspendu dans le vague et l'universel. Qu'il s'agisse des Evangiles ou de l'A.T., ce terme a toujours un complément: aimer Dieu, aimer son prochain, aimer ses ennemis, etc., avec des exemples pour montrer de quoi l'on parle. Ce qui signifie que l'amour n'est pas le sentimentalisme, qu'il est autrement incarné et exigeant.
Il se pourrait que ce sentimentalisme, ce recours à l'émotion confondue avec l'amour soit l'un des fruits lointains du filioque. Le monde païen l'ignorait ou le méprisait, comme on le voit encore en Inde ou dans le bouddhisme. Il apparaît au XVIIIe siècle, avec la revendication du "bonheur", un bonheur tout terrestre, superficiel et quotidien quasiment confondu avec le confort bourgeois. Avant de triompher tant dans le pentecôtisme américain que dans l'infantilisation des fidèles catholiques romains au XIXe siècle (il faut lire les bulletins paroissiaux des années 1860 !), ce sentimentalisme du bonheur s'inscrit dans la constitution américaine. Fruit lointain du filioque parce qu'on le voit associé au déisme, à une conception abstraite de Dieu qui insiste d'abord sur la nature divine et minimise la vie et l'hypostase. Si je n'ai pas sauté un ou deux pas logiques dans cette filiation, cela expliquerait aussi pourquoi qui recourt à ce sentimentalisme ne peut pas aborder ni comprendre même la question du filioque et, partant, les divergences dogmatiques entre Rome et l'orthodoxie. Enfin, c'est une piste de réflexion que je livre à votre sagacité.
Mais vous mettez en plein dans le mille, ma chère Anne-Geneviève avec cette archéologie du bonheur!

Qui a dit: "Le bonheur est une idée neuve en Europe"? Saint-Just, le bras droit de Robespierre, sur fond de guillotines dressées sur toutes les places publiques, de déchristianisation obligatoire, d'usines de graisse humaine en Vendée, de petit roi emmuré (Louis XVII) et de "noyades républicaines" à Nantes.

Ceci dit, je voudrais rajouter trois précisions à mon précédent message:

- le blog de "Théophylactère" où il a été le premier à signaler l'interview de Mgr Nicolas du Banat : http://orthodoxie-libre.over-blog.com/
- le lien vers le fil du présent forum où j'avais traduit le texte de Mgr Hiérothée de Naupacte et Saint-Blaise sur le "moralisme extérieur factice":
viewtopic.php?t=2146
- enfin, je voudrais préciser que, d'un point de vue moral et éthique, j'estime que la communion uniate du métropolite Nicolas du Banat est sans doute l'une des meilleures choses qu'il ait faites dans sa vie. Après tant d'années passées à servir dans la clandestinité les ennemis de l'Eglise (1950-1982), après les souvenirs cuisants qu'il a laissés rue Jean-de-Beauvais à Paris, après tant d'années qui se sont écoulées dans le mensonge, il a trouvé en lui le courage de poser un acte public que d'autres - qui pensent comme lui - n'ont pas eu le courage de poser. Il a fait tout haut, sous les appareils photographiques - encore qu'il s'en soit trouvé pour ne pas être convaincus par ces photographies ! - et les applaudissements de la foule - puisque les églises deviennent maintenant des annexes de l'Olympia ! -, en le revendiquant crânement et hautement, ce que sans doute beaucoup de ses confrères font dans le secret ou rêvent de faire. Il est en quelque sorte passé de l'ombre à la lumière en étant le premier évêque à tirer clairement les conséquences logiques de 350 ans de théologie augustinienne, de 180 ans de phylétisme et de 90 ans d'oecuménisme qui se sont petit à petit répandus dans l'Orthodoxie. Il faudrait donc, pour la cause de la vérité et de la sincérité qui est toujours préférable à un climat d'hypocrisie et de double langage, que d'autres partisans de la même idéologie lui emboîtent le pas.
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Je signale que j'ai traduit d'autres passages de l'entretien accordé le 4 juin 2008 par Mgr Nicolas (Corneanu), métropolite du Banat, dans un nouveau fil: viewtopic.php?t=2316
Makcim
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Message par Makcim »

Ici Londres, les salauds parlent aux salauds...

Celui qui a expérimenté intimement et a donc terriblement pris conscience de l’énormité de ce qui le sépare de son frère quand pourtant il entre dans le même temple, en confessant le même Dieu, avec la même foi, sans dévier, pour communier au même calice, sait à quel point la fraternité qui le lie à son frère n’est pas vraiment de ce monde et ne pourra jamais se satisfaire de démonstrations extérieures et qu’il y faut toute la puissance de l’invisible miséricorde divine, toute l’intercession de tous les saints et plus particulièrement de la Toute Sainte Mère de Dieu, et surtout il y faut tout le mystère du Corps du Christ pour que ce mot ne soit pas pure illusion, mensonge diplomatique, inutile volontarisme, dérisoire vanité, parole hypocrite, habile simulacre mais réelle communion.

Alors combien plus cela s’applique à ceux dont la foi n’est pas réellement la même…

J'ai eu ( comme lecteur Claude et bien d'autres) dans ma vie considérablement plus d'occasions de fraterniser avec toutes sortes de personnes agnostiques, athées (même militants), ou de foi sans rapport avec ce qu'il est convenu d'appeler le Christianisme, qu'avec des chrétiens déclarés et il ne m'est jamais venu à l'idée de me mêler à leurs réunions ou rites pour leur prouver une prétendue fraternité qui n'est somme toute que le rouleau compresseur de l'indifférenciation pseudo égalitariste. Tous les chemins mènent-ils donc vraiment à Rome ? Kif kif je kiffe pas.

Que valent en effet ces discours politiquement corrects avec leur soi-disant reconnaissance et respect des différences – qui ne sont même pas réellement respectées par le fait même de cette bienveillante indifférenciation contemporaine généralisée – et que valent ces gestes théâtraux, soigneusement et incontournablement médiatisés, exemplaires , par leur aveugle naïveté dans le meilleur des cas, ou leur artifice carriériste dans le pire, et dans tous les cas leur regrettable confusion mentale ?
- Pet de lapin
Makcim
Glicherie
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Message par Glicherie »

Sur Orthodoxie.com=
La communion du métropolite roumain Nicolae (Corneanu) dans une église grecque-catholique agite l’Église roumaine et suscite des réactions dans tout le monde orthodoxe
Le 26 mai, le site de l’église grecque-catholique (uniate) roumaine Greco-Catolica.org diffusait, sous le titre «À Timisoara un miracle a eu lieu», l’information que le métropolite Nicolae Corneanu du Banat (Patriarcat de Roumanie) avait communié le 25 mai avec le clergé catholique à l'occasion de la consécration d'une église greco-catholique à laquelle participait également le nonce apostolique.

Devant les réactions immédiatement provoquées par cet évènement, les autorités de l’Église roumaines ont tout d’abord caché leur embarras en affirmant que les faits n’étaient pas vérifiés, cela en dépit de photos très explicites [photo_1, photo_2, photo_3] publiées par le site gréco-catholique ayant diffusé l’information. Le Patriarcat a néanmoins publié le 27 mai un communiqué dans lequel il informait que la question serait examinée au cours de la prochaine réunion du Saint-Synode de l’Église roumaine devant se tenir au mois de juillet, se limitant pour l’heure à noter que «des actes et des gestes inconsidérés sont plus de nature à compliquer le dialogue avec l’Église catholique qu’à le faire progresser».

Le 4 juin, le métropolite Nicolae, interviewé par téléphone pendant une vingtaine de minutes par plusieurs membres l’AZEC (Association des journalistes et éditeurs roumains) au cours d’une réunion à laquelle participaient plusieurs théologiens dont le P. Stefan Buchiu, professeur de dogmatique à la faculté de théologie de Bucarest et Radu Preda de la faculté de théologie de Cluj, reconnaissait les faits et expliquait sur son geste par des motifs affectifs et des raisons politiques (on trouvera ici le podcast de l’interview, ici sa transcription, et ici : 1ère et 2ème partie d'une traduction française partielle).

Sous la pression du clergé et des fidèles de Roumanie, mais aussi des réactions de l’ensemble du monde orthodoxe, le Patriarcat de Roumanie a décidé de mettre la question à l’ordre du jour de la réunion du «Synode permanent» (constitué du patriarche, des métropolites et de trois évêques: Nifon, Ioan et Sofronie) déjà prévue le 6 juin au monastère de Neamts à l’occasion de la béatification de plusieurs hésychaste de la région. À l’issue de cette réunion cependant, aucune décision n’a été prise; l’un des participants a indiqué que la discussion avait simplement eu pour but de préparer la réunion plénière du mois de juillet. L’une des raisons en est qu’aucune décision ne peut être prise sans que l’intéressé ait eu la possibilité de s’expliquer officiellement devant ses confrères; une autre raison en est que le «Synode permanent», en raison de sa composition restreinte, n’est pas habilité à prendre une décision susceptible de sanctionner un membre du clergé ayant rang de métropolite. La déposition du métropolite Nicolae a été préconisée officieusement par plusieurs prélats de l’Église roumaine dont le métropolite de Cluj-Napoca Bartolomeu Anania. Mais selon des sources autorisées, la décision la plus probable du Saint-Synode serait de lui demander de se retirer pour raison d’âge ou de santé. Plusieurs personnalités, dans des courriers adressés Saint-Synode, ont fait remarquer que l’absence d’une prise de position claire et rapide de sa part ne pouvait qu’être préjudiciable à l’Église roumaine en laissant se développer et s’exarcerber les tensions très fortes qui existent plusieurs années entre le courant progressiste et le courant conservateur, et dont pourrait finalement tirer profit l’ «Église» dissidente des vieux-calendaristes qui ne cesse de dénoncer le laxisme de l’Église officielle et les tendances œcuménistes du patriarche.
Les réactions continuent à être très vives dans le monde orthodoxe. Le site officiel du Patriarcat de Moscou a informé le 6 juin que le métropolite Cyrille, chef du Département des relations extérieurs du Patriarcat de Moscou venait de demander à son homologue roumain, l’évêque Cyprien, d’«apporter des éclaircissements sur l’information selon laquelle un des principaux hiérarques de l’Église orthodoxe roumaine a communié avec ceux qui n’appartiennent pas à l’Église orthodoxe», et avait demandé également au patriarche Daniel et au Saint-Synode de l’Église orthodoxe roumaine d’exprimer son attitude par rapport à cet événement».
Le métropolite Nicolae Corneanu est né ne 1923 et est depuis 1962 archevêque de Timisoara et métropolite du Banat; il a enseigné dans plusieurs institutions théologique et est depuis 1992 membre d’honneur de l’Académie roumaine. Après la chute du régime communiste en Roumanie, les archives de la Securitate ont révélé qu’il en avait été, entre 1950 et 1988, un informateur actif. Le métropolite Nicolae s’était acquis une certaine sympathie auprès de la population roumaine après s’être confessé publiquement de cette collaboration, ce que d’autres prélats de l’Église roumaine, qui avaient également été des collaborateurs de la police secrète, s’étaient refusé à faire.
Cet événement est survenu alors qu’un autre événement, qui s’est produit au mois de janvier de cette année, continue à provoquer des remous au sein de l’Église roumaine: la concélébration, lors de la fête de la Théophanie, de la bénédiction des eaux par l’évêque Sofronie d’Oradea avec l’évêque grec-catholique (uniate) Virgil Bercea d’Oradea.
Claude le Liseur
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Inscription : mer. 18 juin 2003 15:13

Message par Claude le Liseur »

Pour avoir le texte complet et la traduction complète de ces déclarations du métropolite Nicolas (Corneanu) du Banat, prière de consulter le fil
viewtopic.php?t=2322 .
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