Discours du pape Benoît XVI à l'Université de Ratisbonne

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Nicolas
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Discours du pape Benoît XVI à l'Université de Ratisbonne

Message par Nicolas »

Voici un communiqué d'une "agence press" aujourd'hui sur les propos du Pape sur l'Islam avec référence à une conversation de l'empereur Emmanuel II avec un Perse cultivé.

Egalement et surtout , référence sur son voyage en Turquie sur invitation du président turc. Quid de l'invitation de SS le Patriarche Bartholomée finalement qui n'a pas eu gain de cause. La passe d'arme durait depuis plus de 6 mois.

Les dignitaires musulmans du Moyen-Orient ont dénoncé jeudi les récents propos du pape Benoît XVI sur l'Islam et ont demandé des excuses au souverain pontife.

En Turquie, le chef de la Direction des affaires religieuses Ali Bardakoglu, plus haut dignitaire musulman du pays, s'est déclaré offensé par les propos tenus mardi par le pape sur le djihad (guerre sainte) musulman, les qualifiant d»'extraordinairement préoccupants, tristes et malheureux».

Durant son voyage en Allemagne, le pape avait cité un livre évoquant une conversation entre l'empereur byzantin du 14e siècle Manuel Paleologos II, de foi chrétienne, et un Perse cultivé, à propos du christianisme et l'Islam.

«L'empereur en vient à parler de la question du djihad ou guerre sainte», a dit Benoît XVI. «Il a dit, 'je cite', montre-moi ce que Mahomet a apporté de nouveau et tu ne trouveras que des choses diaboliques et inhumaines, comme son ordre de diffuser par l'épée la foi qu'il prêchait», a poursuivi le pape, citant l'empereur.

Ali Bardakoglu a déclaré jeudi à l'agence Anatolia qu'il attendait des excuses du pape, affirmant que c'est le christianisme et non l'Islam qui avait popularisé la conversion par l'épée.

En Egypte, Mohammed Mahdi Akef, chef des Frères musulmans, a estimé que «ces remarques n'expriment pas une compréhension correcte de l'Islam, elle sont simplement fausses et sont des croyances erronées répandues en Occident».

Il s'est dit «surpris que de telles remarques viennent de la part de quelqu'un assis en haut de l'Eglise catholique, qui a une influence sur l'opinion publique en Occident».

L'Organisation de la conférence islamique, qui a représente 57 pays musulmans, a indiqué de son côté qu'elle regrettait «les citations du pape et les autres falsifications qui ont offensé l'Islam». «L'OCI espère que cette campagne soudaine ne reflète pas une nouvelle tendance de la politique du Vatican vis-à-vis de la religion islamique», a ajouté l'organisation, basée à Djeddah, en Arabie Saoudite.

Devant ces réactions, le père Federico Lombardi, porte-parole du Vatican a affirmé jeudi que le pape respectait l'Islam. Benoît XVI veut «cultiver une attitude de respect et de dialogue envers les autres religions et cultures, et manifestement aussi envers l'Islam», a-t-il souligné dans un communiqué. «Ce n'était certainement pas l'intention du pape (...) de froisser la sensibilité des croyants musulmans.»

Le père Lombardi avait déjà assuré mardi que Benoît XVI n'avait pas cherché à présenter l'Islam comme «quelque chose de violent».

Benoît XVI doit se rendre quelques jours en Turquie à partir du 28 novembre, sa première visite dans un pays musulman, à l'invitation du président turc Ahmet Necdet Sezer. AP
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Nicolas a écrit :Voici un communiqué d'une "agence press" aujourd'hui sur les propos du Pape sur l'Islam avec référence à une conversation de l'empereur Emmanuel II avec un Perse cultivé.

Egalement et surtout , référence sur son voyage en Turquie sur invitation du président turc. Quid de l'invitation de SS le Patriarche Bartholomée finalement qui n'a pas eu gain de cause. La passe d'arme durait depuis plus de 6 mois.

Les dignitaires musulmans du Moyen-Orient ont dénoncé jeudi les récents propos du pape Benoît XVI sur l'Islam et ont demandé des excuses au souverain pontife.

En Turquie, le chef de la Direction des affaires religieuses Ali Bardakoglu, plus haut dignitaire musulman du pays, s'est déclaré offensé par les propos tenus mardi par le pape sur le djihad (guerre sainte) musulman, les qualifiant d»'extraordinairement préoccupants, tristes et malheureux».

Durant son voyage en Allemagne, le pape avait cité un livre évoquant une conversation entre l'empereur byzantin du 14e siècle Manuel Paleologos II, de foi chrétienne, et un Perse cultivé, à propos du christianisme et l'Islam.

«L'empereur en vient à parler de la question du djihad ou guerre sainte», a dit Benoît XVI. «Il a dit, 'je cite', montre-moi ce que Mahomet a apporté de nouveau et tu ne trouveras que des choses diaboliques et inhumaines, comme son ordre de diffuser par l'épée la foi qu'il prêchait», a poursuivi le pape, citant l'empereur.

Ali Bardakoglu a déclaré jeudi à l'agence Anatolia qu'il attendait des excuses du pape, affirmant que c'est le christianisme et non l'Islam qui avait popularisé la conversion par l'épée.

En Egypte, Mohammed Mahdi Akef, chef des Frères musulmans, a estimé que «ces remarques n'expriment pas une compréhension correcte de l'Islam, elle sont simplement fausses et sont des croyances erronées répandues en Occident».

Il s'est dit «surpris que de telles remarques viennent de la part de quelqu'un assis en haut de l'Eglise catholique, qui a une influence sur l'opinion publique en Occident».

L'Organisation de la conférence islamique, qui a représente 57 pays musulmans, a indiqué de son côté qu'elle regrettait «les citations du pape et les autres falsifications qui ont offensé l'Islam». «L'OCI espère que cette campagne soudaine ne reflète pas une nouvelle tendance de la politique du Vatican vis-à-vis de la religion islamique», a ajouté l'organisation, basée à Djeddah, en Arabie Saoudite.

Devant ces réactions, le père Federico Lombardi, porte-parole du Vatican a affirmé jeudi que le pape respectait l'Islam. Benoît XVI veut «cultiver une attitude de respect et de dialogue envers les autres religions et cultures, et manifestement aussi envers l'Islam», a-t-il souligné dans un communiqué. «Ce n'était certainement pas l'intention du pape (...) de froisser la sensibilité des croyants musulmans.»

Le père Lombardi avait déjà assuré mardi que Benoît XVI n'avait pas cherché à présenter l'Islam comme «quelque chose de violent».

Benoît XVI doit se rendre quelques jours en Turquie à partir du 28 novembre, sa première visite dans un pays musulman, à l'invitation du président turc Ahmet Necdet Sezer. AP
Il est cocasse que le pape de Rome se serve des Entretiens avec un musulman du saint empereur Manuel II Paléologue. (La 7e controverse de ce livre a été publiée en édition bilingue grec - français dans la collection Sources chrétiennes aux Editions du Cerf, numéro 115 de la collection, Paris 1966, introduction, texte critique, traduction et notes de Théodore Khoury). Or, saint Manuel II, antépénultième empereur des Romains, était un grand théologien orthodoxe, qui, lors de son séjour à Paris où il fut l'hôte de ce grand ami de l'Orthodoxie qu'était l'infortuné roi de France Charles VI, avait écrit un mémoire de réfutation du Filioque à l'intention des docteurs de la Sorbonne. Sur son lit de mort, en 1425, saint Manuel II, qui avait passé tout son règne à faire face à la menace musulmane, donna comme ultime recommandation à son fils Jean VIII de ne jamais signer d'union avec la Papauté. Jean VIII s'empressa de renier les conseils de son père, fut à l'origine de l'union de Florence, et cette politique religieuse eut les mêmes conséquences qu'avait eue la politique semblable dans le royaume arménien de Cilicie trois quarts de siècle plus tôt: la chute face à l'Islam.

Alors, Benoît XVI citant l'un des adversaires orthodoxes les plus résolus de l'unionisme et de l'uniatisme, qui plus est héros de la résistance de Constantinople face à l'avancée de l'Islam (chose qui ne cadre guère avec les fantasmagories historico-désinformationnelles de Madame Murr Nehmé), il nous faudra au minimum un bulletin de l'abbé de Tanoüarn alias Joël Prieur dans Minute pour nous expliquer que Madame Murr Nehmé détient quand même la vérité.

En plus, il est cultivé, Benoît XVI, et il fait un habile usage de sa culture. Citer les Entretiens avec un musulman de saint Manuel II Paléologue, c'est quand même autre chose qu'Oriana Fallaci ou Alexandre del Valle, c'est ce à quoi les destinataires du discours ne s'attendent pas et c'est plus difficile à balayer d'un revers de main.
Ceci étant, réjouissons-nous si on ne se contente plus de reprendre nos icônes et de les transposer hors de leur contexte, si l'on ne se contente plus de "pomper" l'enseignement orthodoxe sur les fins dernières en nous accusant de "commerce et tecnicité (sic) froide" quand nous rappelons l'eschatologie vaticane traditionnelle, mais que l'on se met à citer nommément nos grands théologiens confesseurs de la foi...

Saint Manuel II précise que ces Entretiens avec un musulman se déroulent à "Ancyre de Galatie", c'est-à-dire l'actuelle Ankara. Voilà qui devrait faire encore plus bondir les "islamistes modérés" dont le gouvernement siège dans cette ville.

Et voici maintenant le passage où le saint empereur orthodoxe s'en prend à la doctrine du djihad. Je suppose que c'est le passage dont Benoît XVI a dû faire la lecture. Je le cite ici dans la traduction de Théodore Khoury:

"Car montre-moi que Mahomet ait rien institué de neuf: tu ne trouverais rien que de mauvais et d'inhumain, tel ce qu'il statue en décrtant de faire progresser par l'épée la croyance qu'il prêchait.
"Mais il faut, je pense, m'expliquer là-dessus plus clairement. De trois choses, l'une devait nécessairement arriver aux hommes sur la terre:
- ou se ranger sous la Loi,
- ou payer des tributs et ne plus être réduits en esclavage,
- ou, à défaut de l'un et de l'autre, être taillés par le fer sans ménagement.
"Or, cela est fort absurde. Pourquoi? Parce que Dieu ne saurait se plaire dans le sang, et que ne pas agir raisonnablement est étranger à Dieu. Ce que tu dis a donc franchi, ou presque, les bornes de la déraison. D'abord en effet, comment n'est-il pas absurde de payer de l'argent et d'acheter ainsi la faculté de mener une vie impie et contraire à la Loi?
"Ensuite, la foi est un fruit de l'âme, non du corps. Celui donc qui entend amener quelqu'un à la foi a besoin d'une langue habile et d'une pensée juste, non de violence, ni de menace, ni de quelque instrument habile ou effrayant. Car de même que, quand il est besoin de forcer une nature non raisonnable, on n'aurait pas recours à la persuasion, de même pour persuader une âme raisonnable, on ne saurait recourir à la force du bras, ni au fouet, ni à aucune autre menace de mort.
"Nul ne saurait jamais prétendre que, s'il use de violence, c'est malgré soi, car c'est un ordre de Dieu. Car s'il était bon d'attaquer avec l'épée ceux qui sont totalement incroyants et que ce fût là une loi de Dieu descendue du ciel - comme Mahomet le soutient - il faudrait sans doute tuer tous ceux qui n'embrasseraient pas cette Loi et cette prédication. Il est en effet bien impie d'acheter la piété à prix d'argent. En opines-tu autrement? Je ne le pense pas. Comment le ferais-tu? Or, si cela n'est pas bon, tuer est encore bien pire."

(Saint empereur Manuel II Paléologue, Entretiens avec un musulman, 7e controverse, 2c in fine - 3d, pages 143 et 145 de l'édition de Théodore Khoury.)

N.B. : L'Eglise fait mémoire de saint Manuel II le 21 juillet: viewtopic.php?t=766&highlight=manuel
serge maraite
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Message par serge maraite »

"fut à l'origine de l'union de Florence, et cette politique religieuse eut les mêmes conséquences qu'avait eue la politique semblable dans le royaume arménien de Cilicie trois quarts de siècle plus tôt: la chute face à l'Islam."


bonjour,
Merci de nous faire apprendre tant de choses.
Pardonnez mon ignorance ou mon incompréhension, mais sans cette politique religieuse d'union, la chute face à l'Islam aurait pu être évitée ?
C'est fort, non ? !
merci d'avance pour vos lumières
serge
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

serge maraite a écrit :"fut à l'origine de l'union de Florence, et cette politique religieuse eut les mêmes conséquences qu'avait eue la politique semblable dans le royaume arménien de Cilicie trois quarts de siècle plus tôt: la chute face à l'Islam."


bonjour,
Merci de nous faire apprendre tant de choses.
Pardonnez mon ignorance ou mon incompréhension, mais sans cette politique religieuse d'union, la chute face à l'Islam aurait pu être évitée ?
C'est fort, non ? !
merci d'avance pour vos lumières
serge
Vous avez une première constatation, purement humaine, c'est que cette politique de reniement de sa foi et de son histoire, de persécution et de division ne pouvait évidemment qu'affaiblir l'Empire. Jean VIII, en reniant ce qu'il était, ce que son peuple était et en divisant son peuple par la contrainte, a épuisé son Etat et l'a conduit à sa perte. C'est le constat que font tous les historiens laïcisants.

Mais il y a une autre explication, beaucoup plus importante, qui est de nature religieuse, qui se trouve dans tout l'Ancien Testament, qui est exprimée par le psaume 145, qui devient évidente si l'on songe à la mission du peuple de Dieu, et qui a d'ailleurs trouvé sa concrétisation dans les événements de 1438 à 1453. Jean VIII Paléologue et Constantin XI Dragasès avaient placé leur foi dans les hommes, et non en Dieu; les conséquences en étaient inévitables. C'est cette explication-là qui prend le dessus si l'on essaie de se situer dans le plan de Dieu. L'Empire des Romains avait une mission. Il a cru qu'il était devenu sa propre fin et s'est substitué lui-même à la fin qui lui avait été assignée par le Seigneur. S'étant ainsi détourné de Dieu par la fausse union de Florence, union sans Dieu ou contre Dieu, il ne pouvait que périr. Comme saint Manuel II en avait averti son fils.

N'oubliez pas que le christianisme, c'est les Béatitudes, c'est le royaume des Cieux au-dedans de nous, et que dans cette réalité-là, les choses ne se passent pas comme elles se passeraient dans un monde purement profane.

Et, en ce sens, Jean VIII apparaît comme l'anti-Alexandre Nevski.

Je vous renvoie pour cela à mon message du 6 mai 2006 dans la rubrique "Retour sur la question des azymes":

Le docteur Jean Besse parle du séjour de saint Manuel II Paléologue à Paris.
"Jamais il n'envisagea, comme ses successeurs Jean VIII et Constantin XI, de sacrifier l'Orthodoxie à des calculs politiques pour gagner l'appui des Latins contre les Turcs. Même s'il n'obtint à Paris qu'une aide dérisoire, ses successeurs, promoteurs et partisans, malgré saint Marc d'Ephèse, de l'Union de Ferrare-Florence, n'obtinrent rien de plus d'un Occident inconscient et hostile, nostalgique de l'empire latin d'Orient. Olivier Clément, dans son excellent essai sur Byzance et le christianisme (1964), reconnaissait: "Si l'Empire orthodoxe se prend pour une fin en soi, et tente d'asservir ou d'utiliser l'Eglise, il perd sa raison d'être et s'effondre. (...) Au contraire, sous un empereur fidèle comme Manuel II, la situation se rétablit par miracle: en 1399 comme en 1422, les Turcs doivent abandonner le siège de Constantinople et l'on parle d'une apparition salvatrice de la Vierge, le jour de l'assaut" (Olivier Clément, Byzance et le christianisme, Paris 1964, p. 103). " (Jean-Paul Besse, Un précurseur: Wladimir Guettée. Du gallicanisme à l'Orthodoxie, Monastère orthodoxe Saint-Michel, Lavardac 1992, p. 41.)

A la décharge de Jean VIII Paléologue, rappelons quand même que, pris de remords pour ce qu'il avait fait, il empêcha le pape Eugène IV de faire brûler vif saint Marc d'Ephèse.

Les historiens hostiles à l'Orthodoxie comme le professeur Louis Bréhier, farouche défenseur de l'union de Florence, se trouvent bien empruntés quand il s'agit d'évoquer ce fait difficilement acceptable pour eux que le Ciel est venu au secours d'un confesseur de l'Orthodoxie comme saint Manuel II Paléologue et qu'il n'y a pas eu la moindre manifestation venue d'en-haut en faveur des unionistes Jean VIII et Constantin XI. Cela donne des passages comme celui-ci, où l'apparition de la Théotokos est travestie en "panique inexplicable":
"Un illuminé, vénéré de tous, le scheik Seïd-Bokhari, de la famille du Prophète, avait prédit que la ville tomberait aux mains des musulmans le lundi 24 août [1422]. L'assaut général fut donné ce jour-là et la bataille avait été longue et acharnée, lorsque les Turcs furent pris d'une panique inexplicable, brûlèrent leurs machines de guerre et battirent en retraite, mais non sans laisser quelques troupes devant la ville." (Louis Bréhier, Vie et mort de Byzance, 3e édition, Albin Michel, Paris 1992, p. 396; la première édition est de 1946.)

Pourtant, tout ceci ne devrait pas étonner de vrais chrétiens, a fortiori des chrétiens orthodoxes. La leçon de l'Ancien Testament n'est-elle pas que le peuple de Dieu doit placer sa confiance en Dieu seul? En perdant leur Empire et en risquant de perdre l'Eglise du Christ dans leurs combinaisons unionistes avec la Papauté, Jean VIII Paléologue et Constantin XI Dragasès oubliaient le Psaume 145, versets 3-6 (traduction de l'archimandrite Placide Deseille):

"Ne mettez point votre confiance dans les princes,
dans les fils des hommes, qui ne peuvent sauver
.

Leur esprit s'en ira, ils retourneront à leur poussière,
en ce jour-là périront toutes leurs pensées.

Bienheureux celui qui a pour secours le Dieu de Jacob,
et qui met son espérance dans le Seigneur son Dieu,

lui qui a fait le ciel et la terre,
la mer, et tout ce qu'ils renferment;
qui garde éternellement la vérité."


Pour plus de détails, vous pouvez vous reporter à ce fil.
serge maraite
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Message par serge maraite »

merci pour cette riche réponse.
Pour en revenir aux réalités purement humaines (mais peut-être suis-je hors sujet de ce fil), je repose ma question : sans cette union,de Florence, "aurions nous" resisté au raz de marée musulman mieux qu'en Afrique du Nord des siècles auparavant ?
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

serge maraite a écrit :merci pour cette riche réponse.
Pour en revenir aux réalités purement humaines (mais peut-être suis-je hors sujet de ce fil), je repose ma question : sans cette union,de Florence, "aurions nous" resisté au raz de marée musulman mieux qu'en Afrique du Nord des siècles auparavant ?
Oui, bien sûr.

Et d'ailleurs, nous avons tenu. La principauté du Monténégro n'est jamais tombée. Les principautés roumaines (Valachie et Moldavie) ont dû payer le tribut à l'Empire ottoman, mais n'oubliez pas que jamais les Ottomans n'ont pu imposer la construction d'une mosquée au nord du Danube.
Et, au prix d'une lutte dans laquelle ils étaient soutenus par une foi religieuse ardente et un irrépressible désir de liberté, les orthodoxes des Balkans ont, petit à petit, reconquis leur propre territoire, lutte qui a commencé avec la révolte de la Serbie en 1805 et s'est terminée avec la libération de Thessalonique en 1912.

C'est à ce moment-là que les puissances occidentales ont repris le jeu qu'elles avaient joué au XVe siècle en faveur de l'Islam et contre Constantinople.

Ou plutôt, s'agissant des événements de 1918 à 1923, une puissance occidentale.
La Grande-Bretagne...encore et toujours.

Avec comme conséquence la disparition de la population orthodoxe de l'Anatolie.
Mais pensez qu'à la veille de la guerre de 1914, les orthodoxes représentaient encore 15% de la population de l'actuelle Turquie (et les Arméniens aussi 15%).
Ils avaient donc pas mal "tenu".

De plus, il ne faut pas confondre défaite politique et disparition religieuse. L'Islam a conquis l'Egypte et le Levant au VIIe siècle, et le christianisme y reste vivant, du moins en Egypte, en Syrie, au Liban et en Jordanie. La disparition du christianisme maghrébin dans les cinq siècles qui ont suivi la conquête islamique est un cas particulier. Le donatisme a eu en Afrique du Nord un rôle incomparablement plus négatif encore que le monophysitisme en Egypte et dans le Levant.

Maintenant, il faut être juste et ce n'est pas à un juriste comme vous que j'apprendrais le suum cuique tribuere. Si la population orthodoxe avait pu remonter la pente en Anatolie entre le XVIe siècle et 1914, elle le devait aux Ottomans, qui avaient fait régner un ordre oppressif, cruel, corrompu et discriminatoire, mais au moins un ordre. Si l'Anatolie avait été livrée à la même anarchie que d'autres régions du monde musulman non tenues par les Ottomans, la population chrétienne s'y serait étiolée.

Quant à la disparition de la chrétienté d'Anatolie entre 1914 et 1924, c'est un autre chapitre, douloureux, où intervient une étrange conjonction entre le djihad islamique traditionnel et certaines idées européennes des XVIIIe et XIXe siècles réinterprétées à la sauce du Comité Union et Progrès (Etat-nation, antichristianisme des Lumières, franc-maçonnerie, racisme biologique) .

Il est intéressant de lire le livre de Youssef Courbage et Philippe Fargues, Chrétiens et Juifs dans l'Islam arabe et turc, Payot, Paris 1997, qui contient beaucoup de données statistiques et d'interprétations assez décapantes, comme la renaissance démographique du christianisme du Machrek et d'Anatolie sous la domination ottomane. Avec beaucoup de perspicacité, ils estiment qu'une des raisons de la diminution des conversions à l'Islam sous la domination ottomane vient du fait que les Ottomans étaient des adeptes purs et durs du sunnisme et ne toléraient pas de syncrétisme. En revanche, les dynasties turques précédentes étaient souvent adeptes d'un syncrétisme qui affaiblissait la foi des chrétiens et ne leur faisait plus voir les différences fondamentales avec l'Islam et ce qu'ils perdaient en apostasiant (cf. Courbage / Fargues, op. cit., p. 204).

A l'heure actuelle, ce que je crains, c'est que les orthodoxes ne paient pour les propos de Benoît XVI. Les chrétiens qui sont en contact quotidien avec l'Islam, ce sont les orthodoxes, pas les disciples de Benoît XVI. Le plus effrayant serait que les islamistes bosniaques, naguère puissamment armés par la Croatie nationale-catholique de Tudjman (cf., entre autres, Comment le Djihad est arrivé en Europe, de Jürgen Elsässer, traduit de l'allemand par Fred Hissim, préface de Jean-Pierre Chevènement, Editions Xénia, Vevey 2006; commande directe sur Internet: http://www.editions-xenia.com/php2/inde ... Itemid=117 ), relancent une offensive contre les orthodoxes de Bosnie et d'Herzégovine pour leur faire payer les propos critiques prononcés sur l'Islam par Benoît XVI avec qui les orthodoxes n'ont rien à voir.

Je me demande d'ailleurs si ce n'était pas le but recherché. Benoît XVI sait que ses fidèles sont loin de la ligne de fracture entre Islam majoritaire et christianisme majoritaire. Toutes les représailles éventuelles des musulmans retomberont sur les orthodoxes. (Un peu comme au temps des Croisades, où les Croisés n'ont d'ailleurs pas manqué de faire aussi la guerre aux orthodoxes.) Qui plus est, si nous sommes des "schismatiques orientaux" avec un "clergé ignorant", comme le répète l'enseignement du mépris papal depuis des siècles et des siècles, pourquoi attaquer l'Islam à travers une citation d'un saint orthodoxe qui fut un résistant farouche à la Papauté de son époque, et non à travers une citation d'un grand théologien scolastique "bien formé" dans ces séminaires qui font l'orgueil des uniates?
Dernière modification par Claude le Liseur le sam. 16 sept. 2006 11:20, modifié 5 fois.
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

Je crois qu’il ne faut pas commettre l’erreur de croire qu’une politique prétenduement “habile” a pu modifier le cours de l’Histoire, de même que maintenant une habile stratégie de pourparlers de réconciliation interconfessionnelle pourrait restaurer le prestige du christianisme dans le monde.

Je n’ai pas à juger ce que fut l’Église d’Afrique (c’est-à-dire d’Afrique du Nord), elle a donné de grandes leçons canoniques à l’Église orthodoxe, qui en conserve soigneusement le texte. Mais l’Église d’Afrique c’était aussi une solidarité sans faille avec l’ordre cuvil romain. Elle ne connaissait pas de monachisme, et elle n’a pas su gagner l’adhésion des indigènes Berbères. L’Église d’Espagne et l’Église des Gaules ont mieux résisté, et elles avaient un mouvement monastique et érémitique impressionnant. Finalement l’Église d’Espagne et l’Église des Gaules ont su faire reculer l’Islam (n’oublions pas que la pression islamique a très longtemps été très forte même au nord des Pyrénées).
Jean-Louis Palierne
paliernejl@wanadoo.fr
Pascal-Yannick
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Message par Pascal-Yannick »

lecteur Claude a écrit :(chose qui ne cadre guère avec les fantasmagories historico-désinformationnelles de Madame Murr Nehmé)
Vous faites bien de mettre l'accent sur les tendances désinformationnelles si je me permets de cet auteur.Il y a quelques mois m'interrogeant sur le concile de Florence j'étais "tombé" sur une interview (de je ne sais quel journal) de Madame Murr Nehmé au sujet de son ouvrage:"Mahomet II impose le Schisme orthodoxe" et je dois avouer que cela m'avais troublé.Plus troublant était cette citation-dont je doute de l'authenticité- du patriarche Ignace IV d'Antioche à Notre-Dame de Paris, comme texte de couverture dudit ouvrage:"Le différent Orthodoxes et Catholiques n'est pas dogmatique.Nous sommes capables de nous unir avec Rome parce que nous sommes fidèles avec entêtement à nos racines".Dame Murr est visiblement uniate.
Je vous en passerai, des détails de cette interview car cela reviendrait à tomber dans cette campagne "historico-désinformationnelle"
Et la Vérité vous rendra libre
Pascal-Yannick
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Message par Pascal-Yannick »

Pascal-Yannick a écrit : Je vous en passerai, des détails de cette interview car cela reviendrait à tomber dans cette campagne "historico-désinformationnelle"
Par souci d'objectivité je donne la source de mes références et liberté au modérateur de censurer:http://www.onefineart.com/en/artists/li ... age2.shtml
Et la Vérité vous rendra libre
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Pascal-Yannick a écrit :
Pascal-Yannick a écrit : Je vous en passerai, des détails de cette interview car cela reviendrait à tomber dans cette campagne "historico-désinformationnelle"
Par souci d'objectivité je donne la source de mes références et liberté au modérateur de censurer:http://www.onefineart.com/en/artists/li ... age2.shtml
Nous n'avons aucune raison de censurer ce lien, bien au contraire.

Nous, nous n'avons rien à cacher. Nous, chrétiens orthodoxes, sommes les serviteurs de la Vérité, Vérité que nos pères dans la foi ont préservée en subissant des souffrances telles que le monde n'en avait jamais vues. "Vous connaîtrez la Vérité, et la Vérité vous rendra libres."

Le livre de Madame Murr Nehmé s'adresse avant tout à un public ignorant et qui désire rester dans son ignorance. Pis encore, il s'agit aussi d'un public qui n'a jamais entendu parler du principe de non contradiction.

Prenons l'exemple de l'interview à laquelle vous nous renvoyez. Elle affirme que le patriarche d'Antioche Ignace IV (Hazim) serait partisan de l'union avec Rome. Supposons que Madame Murr Nehmé ait le don de sonder les reins et les coeurs et que cela soit vrai. Alors, je reprends sa thèse extravagante selon laquelle saint Gennade (Scholarios) aurait imposé la rupture avec Rome. S'il a suffit d'un patriarche pour fonder l'Eglise orthodoxe dans la perspective murr nehmienne, pourquoi un patriarche n'arrive-t-il pas à la détruire?

Rien que cette interview de quelques lignes est truffée d'erreurs. "Byzance" (le seul choix du terme par Madame Murr Nehmé n'est pas innocent et montre ses préférences idéologiques; les catholiques romains de l'époque dont elle semble si nostalgique étaient plus honnêtes et parlaient de la "Romanie") n'était pas une théocratie; on ne pourrait pas en dire autant de la Papauté de Grégoire VII, par exemple, mais notre historienne n'a sans doute pas entendu parler de l'épisode de Canossa.

A défaut de lire Empereur et prêtre, de Gilbert Dagron, réfutation universitaire du mythe du césaropapisme, Madame Murr Nehmé aurait pu se donner la peine de feuilleter un calendrier des saints orthodoxes. Il y aurait vu le nombre d'évêques canonisés pour leur résistance aux empiètements de l'Etat dans le domaine de l'Eglise, depuis saint Athanase d'Alexandrie au IVe siècle jusqu'à saint Arsène de Rostov au XVIIIe, voire saint Tikhon de Moscou au XXe. Je ne voudrais même pas lui raconter la résistance du métropolite de Valachie Gennade (Petrescu) aux interventions uniatisantes du gouvernement libéral dans la Roumanie de 1895; je ne voudrais pas lui infliger un tel démenti à ses théories.

(Précisons au passage que ces "libéraux" grecs ou roumains du style Vénizélos n'avaient rien à voir avec notre tradition suisse ou française, voire piémontaise, de libéralisme et de radicalisme que je m'efforce avec peine de maintenir, en ayant conscience que je ne suis qu'un nain par rapport à ses géants que furent les Druey, les Furrer, les Ochsenbein et autres vainqueurs des traîtres séparatistes du Sonderbund. Ces "libéraux" grecs ou roumains, bien loin d'être des patriotes et des partisans de la séparation de l'Eglise et de l'Etat dans la ligne de notre libéralisme et de notre radicalisme, étaient des émules tardifs de Pierre Ier et de Catherine II, des ennemis de leur propre culture, et des partisans de la construction d'Eglises totalement inféodées à l'Etat prétendument démocratique dans la lignée du pire érastianisme. Le césaropapisme, ce n'est pas Byzance; c'est Eleuthère Vénizélos.)

Elle passe sous silence la manière dont les Turcs ont traité saint Gennade (Scholarios) après la chute de Constantinople.

Elle passe sous silence le concile de Jérusalem de 1444, loin de la domination ottomane, où les patriarches d'Antioche, de Jérusalem et d'Alexandrie ainsi que l'archevêque de Césarée de Cappadoce ont excommunié le patriarche unioniste de Constantinople.

Elle passe sous silence le concile de Constantinople de 1484, vingt ans après la mort de l'objet de sa haine, saint Gennade, où fut renouvelée la condamnation de la fausse union de Florence.

Je voudrais qu'elle m'explique la condamnation immédiate de l'union de Florence par l'Eglise de Russie qui était loin de la menace ottomane, et loin de l'influence de saint Marc d'Ephèse et de saint Gennade, dont la grandeur spirituelle semble totalement incompréhensible pour notre pamphlétaire.

Il faudrait des dizaines de pages pour réfuter une à une les erreurs de faits et de dates, les omissions, les exagérations de ce livre. Un de nos lecteurs l'a fait. Pour ma part, je sais très bien que ce genre de livre est destiné à un public qui ne veut surtout pas connaître ce qui s'est vraiment passé et qui ne se trouve pas dans le pamphlet en question. Je connais ce genre de public, je l'ai souvent rencontré, je sais qu'il n'est guère sensible à la parole de vérité.

La vérité est sous nos yeux; encore faut-il vouloir la regarder.

Pardonnez-moi de ne pas vous répondre plus en détail, et pardonnez-moi de vous inviter une fois de plus à utiliser la fonction "Rechercher". C'est que nous avons malheureusement déjà bien des fois réfuté ce livre en diverses occasions. J'ai trouvé l'argumentation de ce livre si faible que j'ai compris qu'il s'adressait à un public qui ne serait pas ébranlé par des arguments, à un public qui ne cherchait pas à s'instruire mais à être conforté dans ses idées fausses. Il suffit d'ouvrir n'importe quel livre d'histoire sérieux (type L'Histoire du christianisme publiée en 14 volumes chez Desclée de Brouwer) ou de consulter les sources (par exemple les Mémoires de Sylvestre Syropoulos sur le concile de Florence, pourtant traduits en français, et publiés au Vatican, qui a sans doute un plus grand souci de la vérité que certains de ses partisans orientaux) pour se rendre compte que la construction de ce pamphlet ne correspond pas à la réalité. Le "cirque oriental" continue à toucher le public français, aujourd'hui comme dans l'entre-deux-guerres. (Rassurez-vous, il ne touche pas le public suisse.)

Et puis, le problème est toujours le même, aujourd'hui comme hier. Si l'on ne vit pas dans l'univers du christianisme, si l'on ne comprend pas l'esprit des Béatitudes, on ne peut pas comprendre le mouvement de résistance orthodoxe à Constantinople après la fausse union de Florence. On ne peut pas comprendre ce que c'est que le martyre, ce que c'est que de s'amasser un "trésor dans les cieux" (Lc 12, 33-34), on ne peut pas comprendre pourquoi le peuple rassemblé derrière saint Marc d'Ephèse et saint Gennade Scholarios préférait tout perdre sur cette terre plutôt que de vendre son âme, bref on ne peut pas comprendre la préférence donnée au Royaume des Cieux par rapport au royaume de ce monde. Mais voilà, l'histoire du peuple de Dieu, ce n'est pas Le Prince de Machiavel. Je ne peux pas reprocher à un uniate ou uniatisant de ne pas comprendre la réalité divino-humaine de la vie dans l'Eglise. En revanche, je peux reprocher à un historien de ne pas faire l'effort d'essayer de comprendre les motivations des gens dont il écrit l'histoire, même si ces motivations relèvent d'une ferveur chrétienne difficilement compréhensible pour l'historien en question.

Il n'y a pas grand'chose à dire de plus, et nous devrions en effet consacrer le peu de temps que nous avons à des sujets plus postifs et constructifs.
Pascal-Yannick
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Message par Pascal-Yannick »

Sincères excuses je ne savais pas que l'ouvrage en question avait déjà été l'objet d'une réflexion dans ce forum.
Et la Vérité vous rendra libre
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Pascal-Yannick a écrit :Sincères excuses je ne savais pas que l'ouvrage en question avait déjà été l'objet d'une réflexion dans ce forum.
Vous n'avez pas à vous excuser. Vous ne pouviez pas le savoir. Je fais juste ce renvoi parce que nous en avons en effet beaucoup parlé. Je n'avais pas l'intention de vous faire le moindre reproche et vous me voyez désolé si vous en avez eu l'impression.
serge maraite
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Message par serge maraite »

ROME, Samedi 16 septembre 2006 (ZENIT.org) Face aux réactions de différentes communautés musulmanes à certains passages du Discours du pape Benoît XVI à lUniversité de Ratisbonne, le 12 septembre dernier, dans le cadre de son voyage en Allemagne, le cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire dEtat, a publié ce samedi la déclaration suivante :

* * *



Face aux réactions de la part des musulmans concernant certains passages du discours du Saint-Père Benoît XVI à lUniversité de Ratisbonne, je souhaite ajouter ce qui suit aux éclaircissements et précisions déjà apportés par le directeur de la Salle de presse du Saint-Siège :

- La position du pape sur lislam est clairement celle qui est exprimée dans le document conciliaire Nostra Aetate : « L'Eglise regarde avec estime les musulmans, qui adorent le Dieu Un, vivant et subsistant, créateur du ciel et de ta terre, qui a parlé aux hommes. Ils cherchent à se soumettre de toute leur âme aux décrets de Dieu, même s'ils sont cachés, comme s'est soumis à Dieu Abraham, auquel la foi islamique se réfère volontiers. Bien qu'ils ne reconnaissent pas Jésus comme Dieu, ils le vénèrent comme prophète; ils honorent sa mère virginale, Marie, et parfois même l'invoquent avec piété. De plus, ils attendent le jour du jugement où Dieu rétribuera tous les hommes ressuscités. Aussi ont-ils en estime la vie morale et rendent-ils un culte à Dieu, surtout par la prière, l'aumône et le jeûne (n. 3)

- Loption du pape en faveur du dialogue interreligieux et interculturel est tout aussi claire. Au cours de sa rencontre avec les représentants de quelques communautés musulmanes à Cologne, le 20 août 2005, il a affirmé que ce dialogue entre chrétiens et musulmans « ne peut pas se réduire à un choix passager », ajoutant : « Les leçons du passé doivent nous servir à éviter de répéter les mêmes erreurs. Nous voulons rechercher les voies de la réconciliation et apprendre à vivre en respectant chacun l'identité de l'autre ».

- Quant au jugement de lempereur byzantin Manuel II Paléologue, quil cite dans le discours de Ratisbonne, le Saint-Père navait et na absolument pas lintention de le faire sien. Il la simplement utilisé comme occasion pour proposer, dans un contexte universitaire et selon le résultat dune lecture complète et attentive du texte, quelques réflexions sur le thème du rapport entre religion et violence en général, et pour conclure par un refus clair et radical de la motivation religieuse de la violence, doù quelle vienne. Il est opportun de rappeler à cet égard ce que Benoît XVI lui-même a récemment affirmé dans le Message commémoratif du XXe anniversaire de la rencontre interreligieuse de prière pour la paix voulue par son bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II à Assise en octobre 1986 : Les « manifestations de violence ne peuvent pas être attribuées à la religion en tant que telle, mais aux limites culturelles dans lesquelles elle est vécue et se développe dans le temps. … En effet, des témoignages du lien intime qui existe entre le rapport avec Dieu et l'éthique de l'amour sont visibles dans toutes les grandes traditions religieuses ».

Le Saint-Père regrette par conséquent vivement que certains passages de son discours aient pu offenser la sensibilité des croyants musulmans et quils aient été interprétés dune manière qui ne correspondait absolument pas à ses intentions. Dautre part, face à la fervente religiosité des croyants musulmans, il a mis en garde la culture occidentale sécularisée, afin quelle évite « le mépris de Dieu et le cynisme qui considère la dérision du sacré comme un droit de la liberté ».

En réaffirmant son respect et son estime pour ceux qui professent la religion musulmane, il forme le voeu quon les aide à comprendre dans leur juste sens ses paroles, afin que, ce moment difficile rapidement surmonté, se renforce le témoignage au « Dieu Un, vivant et subsistant, créateur du ciel et de ta terre, qui a parlé aux hommes » et la collaboration pour « défendre et promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté » (Nostra Aetate, n. 3).

Traduction de loriginal italien réalisée par Zenit
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

Il n’est pas inutile, comme d’ailleurs chaque fois que se déchaîne une polémique médiatique, de revenir au texte de base.
On trouve le discours de B16 en français sur le site
www.catholic.net
Comme je n’aime pas trop laisser les autres et surtout les journaux penser pour moi, je l’ai lu. Il n’y est pas question de l’islam, sauf dans cette citation d’ailleurs moins complète que l’extrait donné par Claude – et que les médias ont encore tronquée pour la rendre plus scandaleuse aux yeux de leurs lecteurs. Il n’y est que très peu question de s’opposer à la violence en matière de conversion comme le prétend Tarcisio Bertone. C’est avant tout une défense de l’hellénisme, du platonisme, de la rationalité de Dieu contre d’une part les théologies de la liberté transcendante de Dieu et d’autre part une conception réductionniste de la science contemporaine. C’est un discours très dense, très riche, qu’il faudrait effectivement critiquer mais avec des arguments de même niveau. Il y a dans ce texte des points sur lesquels nous serons d’accord, en particulier sur l’importance de la langue et de la pensée grecques, quand il dit : « Aujourd’hui, nous savons que la traduction grecque de l’Ancien Testament réalisée à Alexandrie - la « Septante » - est plus qu’une simple (un mot qu’on pourrait presque comprendre de façon assez négative) traduction du texte hébreu : c’est en effet un témoignage textuel qui a une valeur en lui-même et une étape spécifique importante de l’histoire de la Révélation, à travers laquelle s’est réalisée cette rencontre d’une manière qui, pour la naissance du christianisme et sa diffusion, a eu une signification décisive. » mais immédiatement vient autre chose qui me pose problème : « Fondamentalement, il s’agit d’une rencontre entre la foi et la raison, entre l’authentique philosophie des lumières [B16 entend par ce terme le platonisme] et la religion. En partant véritablement de la nature intime de la foi chrétienne et, dans le même temps, de la nature de la pensée grecque qui ne faisait désormais plus qu’un avec la foi, Manuel II pouvait dire : Ne pas agir « avec le logos » est contraire à la nature de Dieu. »
B16 en tire tout un argumentaire qui lui permet de critiquer la Réforme pour sa séparation entre Ecriture Sainte et métaphysique ; le modernisme de l’école allemande et en particulier Harnack qu’il accuse de vider le christianisme de tout le divin (il n'a pas tout à fait tort !) ; le relativisme actuel qui aimerait soumettre la théologie aux différentes cultures.
Cette défense de l’hellénisme, très allemande au demeurant et qui rappelle les beaux jours de la philosophie germanique, contraste effectivement avec le rejet des « Grecs » par les « Latins » au moyen âge mais, très habilement, il glisse sur cette controverse là. Il n’attaque, des médiévaux, que Duns Scott. Mais c’est aussi qu’il confond hellénisme et platonisme et, dans son opposition à Duns Scott, nous retrouvons l’une des bases de l’augustinisme, la soumission de Dieu à sa propre nature.
Si vous le permettez, je préparerai une lecture critique de ce discours mais après avoir relu Duns Scott qui m’est un peu sorti de la mémoire.
"Viens, Lumière sans crépuscule, viens, Esprit Saint qui veut sauver tous..."
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

Je crois qu’il y a plusieurs niveaux. D’une part le pape B16 est dans une situation tragique et cherche à faire des concessions aux orthodoxes que ceux-ci ne pourront ni refuser ni acceoter, mais marqueront le début d’une nouvelle étape de keurs relations, non plus confusionnistes, mais négociatives.

Mais d’autre part le consensus médiatico-idéologiue occidental politiquement correct et maçonique cherche à montrer que les religions ne peuvent parler que de paix, de tolérance et d’amour. Ceux qui parlent autrement sont accusés de fanatisme et de fondamentalime. Un court passage du discours de B16 a donc été utilisé pour montrer que dans ce geste il y a une tentative de raviver “l’esprit de croisade”.

B16 est dans le colimateur de tous les cathos “libéraux” (en particulier des cathos français “dans le vent”. Son élection a été très mal vécue par eux. Ils ne ratent aucune occasion de répandre sur lui des rumeurs défavorables. Et l’une des manières de lui savonner la planche est d’assurer que “non non, il n’a pas voulu porter atteinte aux bonnes relations entre l’Islam raisonnable et les cathos raisonnables. Il n’a fait que citer un texte médiéval". Et on fait remarquer, mezzo vioe, que "c’est un intellectuel de haut niveau, qui ne sait pas bien parler aux médias…"

B16 est dans une situation très délicate. Il sait qu’il est le capitaine d’”un vaisseau qui fait eau de toute part” comme il a dit lui-même. Il cherche une issue. Il est probable qu’au moins une grande partie du discours de Ratisbonne est destinée à alimenter le rapprochement avec les orthodoxes. Il leur faéit miroiter une participation à l’inspiration de l’Europe, au nom de l’identité chrétienne. Il laisse entendre qu’il ne croit pas à un rapprochement avec l’Islam. Il parle des Pères, de la Septante, de Byzance (l’allusion à l’Islam se trouve dans une citation d’un empereur byzantin, voilà qui facilitera le rapprochement entre la Turquie et l’Europe !), et probablement est prêt, dans des discussions plus confidentielles, à faire des concessions institutionnelles assez iomportantes.

Ceci explique l’embarras des épiscopats orthodoxes, qui ne sont pas disposés ni à dire oui, ni à dire non. Nous aurons certainement bien des occasions d’en reparler.

Mais ce discours n’arrive pas à passer du plan philosophique au plan théologique. Sa terminologie, sa méthodologie, sont très conceptuelles et rationalistes. Il faudrait aussi abandonner Thomas d’Aquin au profit de Grégoire Palamas.
Jean-Louis Palierne
paliernejl@wanadoo.fr
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