Publié : mer. 16 févr. 2005 13:05
La tradition historique russe rapporte que le prince des Russes de Kiev, alors païens, désirant que son peuple embrasse une grande religion, envoya des ambassadeurs chez les juifs, chez les musulmans et chez les chrétiens (à Constantinople). Les deux premiers ne les satisfaisaient pas, mais assistant aux prières orthodoxes à Sainte Sophie, ils se croyaient au Paradis. C’est pourquoi la Russie naissante adopta la vraie Église, l’Église orthodoxe.
Ceci suppose que les chrétiens de Constantinople les avaient laissés pénétrer dans une Église orthodoxe pour y assister aux offices. Ceci répond au premier des cas envisagés par Jean-Serge, et ce fut très bénéfique : de nos jours aussi nous constatons que la Liturgie orthodoxe est le meilleur moyen de démontrer la force de vérité qui se trouve dans l’Orthodoxie. Et je crois qu’il a existé et qu’il existera de plus en plus des cas ou des groupes catholiques “en recherche” demanderont à des orthodoxes de leur organiser des offices orthodoxes “pour voir”. Faut-il hausser les épaules ? (Là ce serait le troisième des cas de Jean Serge) Non, je crois seulement qu’il faut s’assurer que cela s’inscrit bien dans un parcours de recherche (ce qui va être de plus en plus fréquent).
Dans le deuxième cas également, je partage l’opinion de Jean-Serge, mais force est de constater que toute l’ambiance intellectuelle et morale de l’Occident est porteuse d’une pensée profondément hétérodoxe, et que son influence sur l’Église orthodoxe pénètre même sans participation à leurs offices liturgiques, tout simplement par l’air du temps.
Mais il faut de plus compter avec le prestige énorme que l’enseignement scolastique a su s’acquérir sur l’Église orthodoxe, cette méthode “savante” et intellectuelle inculqué en Occident dans des institutions “d’enseignement théologique” spécialisées pour la formation du clergé. Je me permets de renvoyer à l’ouvrage de Florovsky sur Les Voies de la Théologie russe qui étudie les terrifiants ravages qu’ont pu faire la théologie latinisante puis la théologie luthérienne sur l’enseignement dans académies ecclésiastiques russes. (on y verra même des exemples de “rosaire orthodoxe)
L’influence intériorisée de l’exemple occidentale sur l’Église orthodoxe est beaucoup plus étendue que les compromissions (j’entends les concélébrations relativisantes) auxquelles a prêté le mouvement œcuménique (et je crois que celles-ci ont cessé ou pratiquement). Il arrive qu’on entende des clercs et des hiérarques orthodoxes reconnaître qu’ils considèrent l’Église catholique comme “une Église sérieuse”.
La théologie académique d’influence occidentale enseignée dans l’Église orthodoxe procède à une analyse détaillée des éléments qui permettent de reconnaître l’authenticité d’une Église et la “validité” de ses “sacrements”, et l’un des éléments les plus importants est la “succession apostolique”. Tous ces concepts sont des concepts typiques de la scolastique occidentale. C’est cependant en se fondant sur ce type “d’analyse” que l’Église russe pratique la réception des catholiques par une simple confession de la foi, alors qu’on exige des anglicans et des luthériens qu’ils reçoivent la chrismation. En effet les catholiques auraient dit-on reçu une “confirmation” valide puisque leur épiscopat aurait conservé la “succession apostolique”.
Tout à fait d’accord sur le quatrième cas de Jean-Serge
Pas du tout d’accord sur le cinquième. Il existe bel et bien différentes catégories d’hétérodoxie. Elles ont été définies pour la première fois par saint Basile dans la première de ses “Lettres canoniques” qui répondaient à une liste de questions posées par son disciples et ami saint Amphiloque d’Iconium. Ces trois catégories ont été plusieurs fois reprises par d’autres canons de divers Conciles (locaux ou œcuméniques), et en particulier par le canon du concile “In Trullo” que citait Antoine. Comme il s’agit des procédures de réception pour ceux qui reviennent dans l’Église orthodoxe, on s’est mis à parler, plus commodément, des “réceptions du premier rite” (ou de la première procédure), du deuxième ou du troisième (même remarque).
Les hérétiques font l’objet des réceptions du premier rite. Ce sont ceux qui ont abandonné la formule traditionnelle du Baptême, telle que nous l’a transmise la Tradition de nos Pères. Les membres de ces groupes doivent être pour nous “comme des païens”. On appelle “schismatiques ceux qui pratiquent encore le Baptême traditionnel, mais qui ont quitté l’Église. Comme ils ont quitté l’Église leur Baptême n’a aucune efficacité : il ne peut conférer la Grâce divine. Cependant les saints Canons interdisent formellement de “réitérer” le Baptême. L’Église doit ajouter a posteriori à ce Baptême nul la Grâce qui lui faisait défaut en oignant le candidat du saint Chrême. Il s’agit donc d’un geste unique qui à la fois confère la Grâce baptismale et constitue une Chrismation (“sceau des dons du saint Esprit”). La troisième catégorie est constituée de ces groupes qui n’ont eu que des problèmes disciplinaires avec l’Église orthodoxe et ne s’en sont pas réellement séparés. On les reçoit par une simple confession de la foi.
Cette tri-partition des groupes hétérodoxes est une doctrine constante de l’Église orthodoxe. Il est caractéristique que l’Église, qui considérait l’arianisme comme une hérésie extrêment grave, presque un retour au paganisme, puisqu’il enseignait “qu’il fut un temps où le Verbe n’était pas”, recevait les ex-ariens revenant dans l’Orthodoxie de la vraie Église, par une Chrismation, et non par un Baptême, parce qu’ils avaient conservé la formule et les gestes traditionnels transmis par les Pères. On voit donc que ces étiquettes “d’hérétiques” ou de “schismatiques” utilisées pour les procédures de réceptions des hétérodoxes ne coïncident pas avec l’usage qui en est fait lorsqu’on étudie leurs enseignements.
Je ne veux pas prier avec un Témoin de Jéhovah ou avec un unitarien. Mais dès l’instant où quelqu’un a baptisé un homme pour effacer ses péchés et donc pour son salut, “au nom du Père, et du Fils, et du saint Esprit” je ne peux plus le considérer comme un païen. Même s’il lui reste encore un long chemin à parcourir pour participer pleinement au plérôme (= la plénitude) de l’Église, je dois déjà le considérer comme un “frère en Christ”.
Ceci suppose que les chrétiens de Constantinople les avaient laissés pénétrer dans une Église orthodoxe pour y assister aux offices. Ceci répond au premier des cas envisagés par Jean-Serge, et ce fut très bénéfique : de nos jours aussi nous constatons que la Liturgie orthodoxe est le meilleur moyen de démontrer la force de vérité qui se trouve dans l’Orthodoxie. Et je crois qu’il a existé et qu’il existera de plus en plus des cas ou des groupes catholiques “en recherche” demanderont à des orthodoxes de leur organiser des offices orthodoxes “pour voir”. Faut-il hausser les épaules ? (Là ce serait le troisième des cas de Jean Serge) Non, je crois seulement qu’il faut s’assurer que cela s’inscrit bien dans un parcours de recherche (ce qui va être de plus en plus fréquent).
Dans le deuxième cas également, je partage l’opinion de Jean-Serge, mais force est de constater que toute l’ambiance intellectuelle et morale de l’Occident est porteuse d’une pensée profondément hétérodoxe, et que son influence sur l’Église orthodoxe pénètre même sans participation à leurs offices liturgiques, tout simplement par l’air du temps.
Mais il faut de plus compter avec le prestige énorme que l’enseignement scolastique a su s’acquérir sur l’Église orthodoxe, cette méthode “savante” et intellectuelle inculqué en Occident dans des institutions “d’enseignement théologique” spécialisées pour la formation du clergé. Je me permets de renvoyer à l’ouvrage de Florovsky sur Les Voies de la Théologie russe qui étudie les terrifiants ravages qu’ont pu faire la théologie latinisante puis la théologie luthérienne sur l’enseignement dans académies ecclésiastiques russes. (on y verra même des exemples de “rosaire orthodoxe)
L’influence intériorisée de l’exemple occidentale sur l’Église orthodoxe est beaucoup plus étendue que les compromissions (j’entends les concélébrations relativisantes) auxquelles a prêté le mouvement œcuménique (et je crois que celles-ci ont cessé ou pratiquement). Il arrive qu’on entende des clercs et des hiérarques orthodoxes reconnaître qu’ils considèrent l’Église catholique comme “une Église sérieuse”.
La théologie académique d’influence occidentale enseignée dans l’Église orthodoxe procède à une analyse détaillée des éléments qui permettent de reconnaître l’authenticité d’une Église et la “validité” de ses “sacrements”, et l’un des éléments les plus importants est la “succession apostolique”. Tous ces concepts sont des concepts typiques de la scolastique occidentale. C’est cependant en se fondant sur ce type “d’analyse” que l’Église russe pratique la réception des catholiques par une simple confession de la foi, alors qu’on exige des anglicans et des luthériens qu’ils reçoivent la chrismation. En effet les catholiques auraient dit-on reçu une “confirmation” valide puisque leur épiscopat aurait conservé la “succession apostolique”.
Tout à fait d’accord sur le quatrième cas de Jean-Serge
Pas du tout d’accord sur le cinquième. Il existe bel et bien différentes catégories d’hétérodoxie. Elles ont été définies pour la première fois par saint Basile dans la première de ses “Lettres canoniques” qui répondaient à une liste de questions posées par son disciples et ami saint Amphiloque d’Iconium. Ces trois catégories ont été plusieurs fois reprises par d’autres canons de divers Conciles (locaux ou œcuméniques), et en particulier par le canon du concile “In Trullo” que citait Antoine. Comme il s’agit des procédures de réception pour ceux qui reviennent dans l’Église orthodoxe, on s’est mis à parler, plus commodément, des “réceptions du premier rite” (ou de la première procédure), du deuxième ou du troisième (même remarque).
Les hérétiques font l’objet des réceptions du premier rite. Ce sont ceux qui ont abandonné la formule traditionnelle du Baptême, telle que nous l’a transmise la Tradition de nos Pères. Les membres de ces groupes doivent être pour nous “comme des païens”. On appelle “schismatiques ceux qui pratiquent encore le Baptême traditionnel, mais qui ont quitté l’Église. Comme ils ont quitté l’Église leur Baptême n’a aucune efficacité : il ne peut conférer la Grâce divine. Cependant les saints Canons interdisent formellement de “réitérer” le Baptême. L’Église doit ajouter a posteriori à ce Baptême nul la Grâce qui lui faisait défaut en oignant le candidat du saint Chrême. Il s’agit donc d’un geste unique qui à la fois confère la Grâce baptismale et constitue une Chrismation (“sceau des dons du saint Esprit”). La troisième catégorie est constituée de ces groupes qui n’ont eu que des problèmes disciplinaires avec l’Église orthodoxe et ne s’en sont pas réellement séparés. On les reçoit par une simple confession de la foi.
Cette tri-partition des groupes hétérodoxes est une doctrine constante de l’Église orthodoxe. Il est caractéristique que l’Église, qui considérait l’arianisme comme une hérésie extrêment grave, presque un retour au paganisme, puisqu’il enseignait “qu’il fut un temps où le Verbe n’était pas”, recevait les ex-ariens revenant dans l’Orthodoxie de la vraie Église, par une Chrismation, et non par un Baptême, parce qu’ils avaient conservé la formule et les gestes traditionnels transmis par les Pères. On voit donc que ces étiquettes “d’hérétiques” ou de “schismatiques” utilisées pour les procédures de réceptions des hétérodoxes ne coïncident pas avec l’usage qui en est fait lorsqu’on étudie leurs enseignements.
Je ne veux pas prier avec un Témoin de Jéhovah ou avec un unitarien. Mais dès l’instant où quelqu’un a baptisé un homme pour effacer ses péchés et donc pour son salut, “au nom du Père, et du Fils, et du saint Esprit” je ne peux plus le considérer comme un païen. Même s’il lui reste encore un long chemin à parcourir pour participer pleinement au plérôme (= la plénitude) de l’Église, je dois déjà le considérer comme un “frère en Christ”.