Connaissez-vous la thèse développée par les démographes Courbage et Fargue, selon laquelle le christianisme s'est effondré en Anatolie tant qu'y fleurissait un soufisme prétendument syncrétique, ouvert et tolérant (mais travaillant toujours in fine pour l'Islam), et qu'il s'y est redressé dès que les Ottomans y eurent imposé un sunnisme sans concession, montrant ainsi que les deux religions étaient bien différentes et que la conversion à l'Islam était un changement bien plus grand que voulaient bien le dire les soufis?Maksim a écrit :Je comprends que cela ne doit pas être facile de donner des chiffres exacts ou du moins vraisemblables pour un pays qui ignore volontiers les statistiques quand ça l'arrange -ou ne l'arrange pas. Je (j'ai été traducteur juré) me souviens de l'époque où la case "religion" ne suffisait pas dans les extraits d'état civil, il y avait une sous case "confession" qui a fini par disparaître car la mention autre que "sunnite/hanéfite" -probablement déplaisant pour l'autorité- revenait trop souvent, tout comme la question posée -dans le temps- par les proposés aux recensements: "Votre langue maternelle ?".
Mais aujourd'hui, mon propos est autre:
Je souhaiterais vous parler le l'auteure Elif Shafak (poursuivie dans le temps, mais finalement acquittée, pour son livre "La bâtarde d'Istanbul" -ce fameux article 301 du code pénal, plus d'une fois mis en exergue par la Cour des droits de l'homme du Conseil de l'Europe) et de son nouveau livre "Soufi, mon amour" où je crois voir une tentative d'échappée de la part des soufis vers le christianisme et j'aimerais savoir si vous y verrez la même chose que moi.
Si vous n'avez pas beaucoup de temps à y consacrer, vous pourriez commencer par les seuls chapitres intitulés "Chams" et "Roumi" où l'approche générale est exposée en clair et ne lire le reste, la partie romancée, que si ce début vous interpelle.
Je ne suis pas très objectif sur le chapitre du soufisme, parce que j'y ai été confronté par des rencontres avec des disciples de Guénon, Schuon & Cie, qui m'en ont donné une image très négative - en tout cas une image d'ennemi terrible du christianisme, précisément parce qu'avançant masqué. Il s'agissait d'Occidentaux chez qui le reniement était à la fois total et inavoué. Peut-être aurais-je eu une opinion plus irénique si les soufis que j'avais rencontrés avaient été issus d'un terreau musulman un peu plus authentique?