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Deux poids, deux mesures?

Publié : mar. 08 déc. 2009 17:10
par Claude le Liseur
Encore une fort intéressante dépêche de l'AFP: http://www.romandie.com/ats/news/091208 ... 4bno0n.asp

Maroc: cinq évangélistes étrangers expulsés
OUJDA (Maroc) - Cinq ressortissants étrangers ont été expulsés du Maroc samedi pour "réunion non déclarée et prosélytisme évangéliste", selon la préfecture de police d'Oujda (nord-est du Maroc), jointe mardi par l'AFP.

Les cinq personnes concernées par cette mesure d'expulsion sont deux Sud-africains, deux Suisses et un Guatémaltèque. Elles font partie d'un groupe composé également de 12 ressortissants marocains, remis en liberté le même jour.

L'interpellation de toutes ces personnes a eu lieu vendredi, suite à une perquisition dans une maison de Saïdia, une station balnéaire à 70 km au nord d'Oujda, a-t-on appris de même source.

L'intervention des services de police a eu lieu "suite à des informations faisant état d'agissements douteux en relation avec le prosélytisme évangéliste, de nature à porter atteinte aux valeurs religieuses du royaume", a précisé un communiqué du ministère de l'Intérieur.

Les perquisitions effectuées sur place "ont permis la saisie de plusieurs supports de prosélytisme, dont des ouvrages et des CD en arabe et en langues étrangères", ajoute le communiqué.

Trois des cinq ressortissants étrangers interpellés (les deux Suisses et le Guatémaltèque) ont été "refoulés via le poste frontalier de Melilla (ndlr: enclave espagnole au nord du Maroc). Les deux Sud-africains, qui avaient déjà leurs billets d'avion, l'ont été par l'aéroport Mohammed V de Casablanca", a-t-on ajouté de même source.

En mars dernier, cinq missionnaires étrangers (quatre Espagnols et une Allemande) avaient été également expulsés alors qu'ils tenaient une "réunion de prosélytisme avec des ressortissants marocains", selon un communiqué du ministère de l'Intérieur.

(©AFP / 08 décembre 2009 16h16)


Ainsi, on constate qu'au Maroc, pays musulman plus tolérant que beaucoup d'autres, le seul fait de parler de l'Evangile à des sujets du "Commandeur des Croyants" est interdit comme étant "de nature à porter atteinte aux valeurs religieuses du royaume".

Personne ne proteste.

En revanche, lorsque le 29 novembre 2009, un peuple européen pacifique et jusqu'à nouvel ordre souverain chez lui décide d'interdire l'érection de nouveaux minarets sur son sol ("les minarets sont nos baïonnettes", dixit le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdoğan), minarets qui sont effectivement de nature à porter atteinte à certaines valeurs religieuses, démocratiques, esthétiques, écologiques et nationales, ce même peuple se trouve condamné par les grandes consciences universelles que sont MM. Daniel Cohn-Bendit et Bernard Kouchner.

Il est vrai que, sous le proconsulat de sinistre mémoire de M. Kouchner au Kosovo, on a brûlé beaucoup d'églises et construit beaucoup de minarets. Ceci explique peut-être cela.

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : mer. 09 déc. 2009 18:51
par Claude le Liseur
Tiens, le patron se désolidarise de son sinistre des Affaires étrangères:

"Par référendum, le peuple suisse vient de se prononcer contre la construction de nouveaux minarets sur son territoire. Cette décision peut légitimement susciter bien des interrogations. Le référendum impose de répondre à la question posée par oui ou par non. Peut-on répondre par oui ou par non à une question aussi compliquée, qui touche à des choses aussi profondes? Je suis convaincu que l’on ne peut que susciter des malentendus douloureux, un sentiment d’injustice, blesser les âmes en apportant une réponse aussi tranchée à un problème qui doit pouvoir être résolu au cas par cas dans le respect des convictions et des croyances de chacun.

Mais comment ne pas être stupéfait par la réaction que cette décision a suscitée dans certains milieux médiatiques et politiques de notre propre pays? Réactions excessives, parfois caricaturales, à l’égard du peuple suisse, dont la démocratie, plus ancienne que la nôtre, a ses règles et ses traditions, qui sont celles d’une démocratie directe où le peuple a l’habitude de prendre la parole et de décider par lui-même?


Derrière la violence de ces prises de position se cache en réalité une méfiance viscérale pour tout ce qui vient du peuple. La référence au peuple, c’est déjà, pour certains, le commencement du populisme. Mais c’est en devenant sourd aux cris du peuple, indifférent à ses difficultés, à ses sentiments, à ses aspirations, que l’on nourrit le populisme. Ce mépris du peuple, car c’est une forme de mépris, finit toujours mal. Comment s’étonner du succès des extrêmes quand on ne prend pas en compte la souffrance des électeurs?

Ce qui vient de se passer me rappelle comment fut accueilli le rejet de la Constitution européenne en 2005. Je me souviens des paroles parfois blessantes qui ont été proférées contre cette majorité de Français qui avait choisi de dire non. C’était opposer irréductiblement la France du oui à celle du non, ouvrir une fracture qui, si elle avait dû se creuser davantage, n’aurait jamais permis à la France de reprendre sa place en Europe.


Pour réconcilier la France du oui et celle du non, il fallait d’abord essayer de comprendre ce qu’avaient voulu exprimer les Français. Il fallait admettre que cette majorité ne s’était pas égarée, mais qu’elle avait, comme la majorité des Irlandais ou la majorité des Néerlandais, exprimé ce qu’elle ressentait et rejeté en toute connaissance de cause une Europe dont elle ne voulait plus parce qu’elle donnait le sentiment d’être de plus en plus indifférente aux aspirations des peuples.

Ne pouvant changer les peuples, il fallait changer d’Europe. La France du non a commencé à se réconcilier avec celle du oui à partir du moment où, au lieu de la juger, on a cherché à la comprendre. C’est alors que, dépassant ce qui la divisait, la France a pu prendre la tête du combat pour changer l’Europe.

Alors, au lieu de vilipender les Suisses parce que leur réponse ne nous plaît pas, mieux vaut nous interroger sur ce qu’elle révèle. Pourquoi en Suisse, pays qui a une longue tradition d’ouverture, d’hospitalité, de tolérance, un tel rejet peut-il s’exprimer avec tant de force? Et que répondrait le peuple français à la même question?

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Au lieu de condamner sans appel le peuple suisse, essayons aussi de comprendre ce qu’il a voulu exprimer et ce que ressentent tant de peuples en Europe, y compris le peuple français. Rien ne serait pire que le déni. Rien ne serait pire que de ne pas regarder en face la réalité des sentiments, des préoccupations, des aspirations de tant d’Européens.

Comprenons bien d’abord que ce qui s’est passé n’a rien à voir avec la liberté de culte ou la liberté de conscience. Nul, pas plus en Suisse qu’ailleurs, ne songe à remettre en cause ces libertés fondamentales.

Les peuples d’Europe sont accueillants, sont tolérants, c’est dans leur nature et dans leur culture. Mais ils ne veulent pas que leur cadre de vie, leur mode de pensée et de relations sociales soient dénaturés. Et le sentiment de perdre son identité peut être une cause de profonde souffrance. La mondialisation contribue à aviver ce sentiment.

La mondialisation rend l’identité problématique parce que tout en elle concourt à l’ébranler, et elle en renforce en même temps le besoin parce que plus le monde est ouvert, plus la circulation et le brassage des idées, des hommes, des capitaux, des marchandises sont intenses, et plus on a besoin d’ancrage et de repères, plus on a besoin de sentir que l’on n’est pas seul au monde. Ce besoin d’appartenance, on peut y répondre par la tribu ou par la nation, par le communautarisme ou par la République.

L’identité nationale c’est l’antidote au tribalisme et au communautarisme. C’est pour cela que j’ai souhaité un grand débat sur l’identité nationale. Cette sourde menace que tant de gens dans nos vieilles nations européennes sentent, à tort ou à raison, peser sur leur identité, nous devons en parler tous ensemble de peur qu’à force d’être refoulé ce sentiment ne finisse par nourrir une terrible rancœur.

Les Suisses comme les Français savent que le changement est une nécessité. Leur longue histoire leur a appris que pour rester soi-même il faut accepter de changer. Comme les générations qui les ont précédés, ils savent que l’ouverture aux autres est un enrichissement. Nulle autre civilisation européenne n’a davantage pratiqué, tout au long de son histoire, le métissage des cultures qui est le contraire du communautarisme.

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Le métissage c’est la volonté de vivre ensemble. Le communautarisme c’est le choix de vivre séparément. Mais le métissage ce n’est pas la négation des identités, c’est pour chacun, vis-à-vis de l’autre, la reconnaissance, la compréhension et le respect.

C’est de la part de celui qui accueille la reconnaissance de ce que l’autre peut lui apporter. C’est de la part de celui qui arrive le respect de ce qui était là avant lui. C’est de la part de celui qui accueille l’offre de partager son héritage, son histoire, sa civilisation, son art de vivre. C’est de la part de celui qui arrive la volonté de s’inscrire sans brutalité, comme naturellement, dans cette société qu’il va contribuer à transformer, dans cette histoire qu’il va désormais contribuer à écrire. La clé de cet enrichissement mutuel qu’est le métissage des idées, des pensées, des cultures, c’est une assimilation réussie.

Respecter ceux qui arrivent, c’est leur permettre de prier dans des lieux de culte décents. On ne respecte pas les gens quand on les oblige à pratiquer leur religion dans des caves ou dans des hangars. Nous ne respectons pas nos propres valeurs en acceptant une telle situation. Car, une fois encore, la laïcité ce n’est pas le refus de toutes les religions, mais le respect de toutes les croyances. C’est un principe de neutralité, ce n’est pas un principe d’indifférence. Lorsque j’étais ministre de l’Intérieur, j’ai créé le Conseil français du culte musulman (CFCM) pour que la religion musulmane soit mise sur un pied d’égalité avec toutes les autres grandes religions.

Respecter ceux qui accueillent, c’est s’efforcer de ne pas les heurter, de ne pas les choquer, c’est en respecter les valeurs, les convictions, les lois, les traditions, et les faire – au moins en partie – siennes. C’est faire siennes l’égalité de l’homme et de la femme, la laïcité, la séparation du temporel et du spirituel.

Je m’adresse à mes compatriotes musulmans pour leur dire que je ferai tout pour qu’ils se sentent des citoyens comme les autres, jouissant des mêmes droits que tous les autres à vivre leur foi, à pratiquer leur religion avec la même liberté et la même dignité. Je combattrai toute forme de discrimination.

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Mais je veux leur dire aussi que, dans notre pays, où la civilisation chrétienne a laissé une trace aussi profonde, où les valeurs de la République sont partie intégrante de notre identité nationale, tout ce qui pourrait apparaître comme un défi lancé à cet héritage et à ces valeurs condamnerait à l’échec l’instauration si nécessaire d’un islam de France qui, sans rien renier de ce qui le fonde, aura su trouver en lui-même les voies par lesquelles il s’inclura sans heurt dans notre pacte social et notre pacte civique.

Chrétien, juif ou musulman, homme de foi, quelle que soit sa foi, croyant, quelle que soit sa croyance, chacun doit savoir se garder de toute ostentation et de toute provocation et, conscient de la chance qu’il a de vivre sur une terre de liberté, doit pratiquer son culte avec l’humble discrétion qui témoigne non de la tiédeur de ses convictions mais du respect fraternel qu’il éprouve vis-à-vis de celui qui ne pense pas comme lui, avec lequel il veut vivre."

(Nicolas Sarkozy, président de la République française, in Le Temps, n° 3569 du 9 décembre 2009, p. 14.)

Ce qui illustre bien la constatation de M. Sarkozy ( "derrière la violence de ces prises de position se cache en réalité une méfiance viscérale pour tout ce qui vient du peuple"), constatation qui s'applique d'ailleurs très bien à l'incontinence verbale de M. Kouchner, c'est l'attitude du "média suisse de référence", qui relègue le texte du président français en quatorzième page, et qui après avoir consacré les premières pages de neuf numéros consécutifs à fustiger le vote du peuple coupable de ne pas avoir obéi aux consignes de vote de la presse avec un parti pris pro-islamique lassant qui n'est pas sans relever d'une certaine "dhimmitude de l'Occident" naguère diagnostiquée par l'historienne israélienne Bat Ye'or, nous annonce en page 9, dans le numéro d'aujourd'hui, avec des timidités de vierge effarouchée, l'expulsion des Suisses coupables d'avoir parlé de l'Evangile au Maroc... Une information dont on aurait pu apprécier que le quotidien lui donnât la même place qu'à sa présentation lénifiante de l'Islam, étalée depuis des semaines et des semaines. C'est pourtant un fait qui en dit plus long que bien des discours.

Mais il est vrai qu'en des terres qui furent autrefois protestantes et où le soutien au prosélytisme islamique est le dernier combat des curés papistes et des pasteurs calvinistes - sans doute dans le but de faire fuir leurs denières ouailles - on ne lit guère un vieil archevêque orthodoxe de Thessalonique, un certain saint Grégoire Palamas qui proclamait:
"Toute parole peut détruire une autre parole; aucune parole ne peut détruire la vie."

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : jeu. 10 déc. 2009 7:55
par Anne Geneviève
Joli discours, il est très fort pour le blabla, notre président national. Mais il se fiche carrément du monde : il n'y a pas eu de réconciliation, il y a eu carrément un déni de vote pour le non à la constitution européenne et par derrière le coup de Lisbonne. Les gens du non (j'en suis), n'ont pas été compris, à part peut-être quelques politiciens professionnels (mais là, je dirais plutôt qu'ils furent arrosés), ils ont été contournés et niés.

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : jeu. 10 déc. 2009 11:33
par Claude le Liseur
Anne Geneviève a écrit :Joli discours, il est très fort pour le blabla, notre président national. Mais il se fiche carrément du monde : il n'y a pas eu de réconciliation, il y a eu carrément un déni de vote pour le non à la constitution européenne et par derrière le coup de Lisbonne. Les gens du non (j'en suis), n'ont pas été compris, à part peut-être quelques politiciens professionnels (mais là, je dirais plutôt qu'ils furent arrosés), ils ont été contournés et niés.

Bien sûr qu'il se fiche du monde. Bien sûr qu'il a imposé par une magouille parlementaire un traité auquel nous avions dit non. Mais il faut lui reconnaître le mérite de ridiculiser un peu plus Kouchner-la-Honte, le ministre des Affaires étrangères qui ne connaît rien aux usages diplomatiques. (Il est vrai que le sieur Kouchner ne semble pas savoir de quel pays il est le ministre des Affaires étrangères: la France, les Etats-Unis d'Amérique ou le Rwanda?).

La déclaration du président Sarkozy a déjà suscité un commentaire assez pertinent du militant catholique bien connu Bernard Antony, qui souligne une fois de plus la confusion entre ethnie et religion dans le texte du président français.

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : sam. 12 déc. 2009 11:34
par J-Gabriel
Ah ce Kouchner ! Au début des années 90 il chantait pleins de slogans au nom de la vieille amitié franco-serbe et maintenant il fait reconnaître le Kosovo au français. Parce que bien sûr tout part de son avis, vu que ça fait quasiment 30 ans qu’il est sur le terrain !
L’autre jour sur la chaine Canal+, dans les news à propos d’un procès à la Hague, ils avaient déjà amputé le Kosovo sur une carte alors qu’on y parlait du conflit YOUGOSLAVE des années 90 ! Pour vous dire l’influence de ces gens en politique. C’est effroyable, Je pensais que Canal+ était assez indépendante à ce niveau là au vu de certaines de ses émissions diffusées au début de soirée en clair. Aussi je me demande pourquoi la Serbie ne reconnaît pas la Corse par exemple ?! Pourquoi les U.S.A. n'ont pas bombardé la Mecque après le 11 septembre ? A toutes ces questions que je me fais sans cesse sur la politique, je préfère m’en éloigner le plus possible avec l’aide de Dieu. Et souvent elle revient au galop justement avec cette histoire des minarets en Suisse. Ça ma titiller. J’ai donc foutue directement mon enveloppe de vote aux vieux-papiers (J’aurai pu voter blanc aussi). Je m'encourage avec des sages paroles comme celle du Patriarche Paul, mémoire éternel, qui disait à une place : « Je ne veux pas d’un Kosovo bâtie sur le sang… ».

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : ven. 18 déc. 2009 2:45
par Claude le Liseur
Quelques esprits libres qui ont survécu aux dernières vagues de répression dans le monde arabe commencent aussi à faire part de leur ras-le-bol devant la politique des deux poids, deux mesures.

Un journaliste qui écrit dans Le Soir d'Algérie, quotidien indépendant algérien de langue française, M. Ahmed Halli, semble particulièrement en verve (source: http://www.lesoirdalgerie.com/articles/ ... 2319&cid=8 ):
C'est Tarik Ramadan, le frère musulman imberbe, qui doit exulter : sous prétexte de lutter contre l'extrémisme, la Suisse vient de rendre un inestimable service aux fondamentalistes musulmans. Ces derniers ont beau jeu de crier aujourd'hui à l'islamophobie et de dénoncer un nouvel épisode du choc des civilisations inauguré par un pays théoriquement neutre.
Oui, c'est avec la plus bienveillante neutralité que les banques suisses acceptent d'accueillir l'argent des musulmans détourné par des dirigeants tout aussi musulmans. C'est un argent qui dégage une telle odeur suffocante de rapine et de morts que les Suisses eux-mêmes en sont indisposés. Les Suisses savent par expérience que l'argent n'est pas inodore, contrairement aux affirmations de Vespasien, et ils réfléchissent depuis longtemps aux moyens de s'en accommoder. Ils ont aussi la certitude que les voleurs arabes et musulmans ne sont pas près de retirer leurs dépôts des banques suisses qui leur assurent sécurité et confidentialité. Leur foi dans le système suisse rivalise avec leur croyance en Dieu, ses anges, ses prophètes, et au jugement dernier. C'est pourquoi, les détenteurs de comptes en Suisse, pour certains pourvoyeurs de fonds des activistes islamistes, ne lèveront pas le petit doigt pour changer leur code banque. Ils se contenteront d'attiser en vous la rancœur et la colère contre les Helvètes, coupables d'islamophobie, un mot destiné à terroriser davantage ceux qui ont vraiment peur de l'Islam. Ou pour être plus clairs, devrait-on parler de la peur des musulmans que certains appellent aussi «musulmanophobie ». Cette peur, plus vraie, plus réelle n'est pas seulement l'apanage des non-musulmans, mais pourrait être celle des musulmans eux-mêmes. Ceux qui sont inquiets devant la montée du fondamentalisme et de la soumission aveugle de leurs coreligionnaires à ses lois. Mais pour ne pas s'embrouiller davantage, gardons islamophobie pour désigner ce sentiment de peur, pour la commodité et parce qu'il a quelque chose de stigmatisant pour celui qui le ressent. Et puis, ce mot contient une charge réquisitoire non pas seulement contre la Suisse, mais contre toute l'Europe, accusée de reprendre le chemin des croisades. Ce qu'il y a d'amusant dans ces histoires de minarets, c'est qu'ils ne servent strictement à rien là où ils sont érigés, à part à servir de repères architecturaux ou d'épouvantails... suisses. Ou bien parlera- t-on désormais de minarets suisses, comme on parle de l'Arlésienne ou de châteaux en Espagne. Depuis Bilal, le premier muezzin de l'Islam, on a fait de progrès, notamment grâce aux conquêtes de l'électronique. Aujourd'hui, un muezzin n'est plus obligé de grimper péniblement l'escalier en colimaçon qui mène au sommet du minaret pour aller lancer son appel à la prière. Il peut le faire, à partir de chez lui (1), en actionnant un microphone et sans quitter ses pantoufles ou ses claquettes. Jadis, des insensés ont construit la tour de Babel, par orgueil et par vanité, et non pas pour se rapprocher de Dieu. Ils ont été sévèrement punis par le ciel avant d'être reniés par leur postérité. La même vanité et le même orgueil poussent encore aujourd'hui à édifier des minarets de plus en plus hauts, pour en imposer à son voisin... marocain (2). De nos jours, des haut-parleurs judicieusement disposés sur les terrasses des immeubles surélevés remplacent aisément les minarets tout en permettant d'imposer le respect aux mosquées alentour. Il n'y a rien de tel pour alimenter les cacophonies du vendredi, où seule la divine providence peut se retrouver. Pour en revenir à la Suisse, il faut sans doute préciser que c'est encore la vanité et l'orgueil qui sont à l'origine de cette histoire. Cela s'est passé à Langhental, dans le canton de Berne, où un imposant temple sikh a été édifié en 2006, non loin de la mosquée locale. Voyant cela, la communauté musulmane, à majorité turque, a décidé d'ériger un minaret, pour ne pas faire figure de parent pauvre. En attendant le permis de construire, ils ont mis en place un minaret factice en bois d'une hauteur suffisante pour impressionner la droite populiste suisse. Cette dernière a vu dans cette initiative, une revendication politique et religieuse, et pas seulement celle d'un droit à la visibilité. Quant à savoir pourquoi les Suisses ont peur de l'Islam tout en appréciant l'argent des musulmans, il faudra sans doute chercher la réponse dans les pays musulmans eux-mêmes. Commençons par Khaddafi, notre voisin libyen, qui a des rapports très particuliers avec la Suisse. Le Raïs libyen ne peut pas interdire, en représailles, la construction de beffrois en Libye, ni d'ailleurs en Arabie saoudite (3) ou en Algérie. Dans les pays arabes, la phobie des chrétiens et des juifs ne s'exprime qu'une fois par semaine, lors des prêches du vendredi. Quant à la construction de clochers d'églises, voire de synagogues, elle n'est pas à l'ordre du jour, et il n'existe pas de communauté religieuse assez téméraire pour la revendiquer. Khaddafi a donc adopté un profil bas en proposant que les institutions de l'ONU quittent la Suisse. On peut lui reprocher de mettre moins d'ardeur à défendre l'Islam, qu'il en a déployé pour son fils Hannibal, lorsqu'il avait été arrêté par les autorités helvétiques. En juillet 2008, ce dernier avait été brièvement incarcéré pour avoir frappé un membre de son personnel domestique. Pour riposter à ce crime de lèse-majesté, Papa Khaddafi avait suspendu ses livraisons de pétrole à la Suisse. Il avait également menacé de retirer tous ses avoirs des banques suisses. Affolées, les autorités de Berne avaient remis en liberté l'héritier de Khaddafi, avec les excuses du président de la Confédération helvétique lui-même. L'écrivaine koweïtienne Dalaâ Al-Mufti s'étonne du tapage organisé dans les pays arabes autour de cette affaire des minarets suisses. Dans le quotidien Al-Qabas, elle interroge : «Avez-vous oublié que les sonneries des cloches d'église sont interdites au Koweït ? Avez-vous oublié que la construction d'églises est interdite dans certains pays arabes et codifiée dans d'autres ? Avez-vous oublié les invocations exprimées dans nos mosquées tous les vendredis et appelant à les diviser, à les disperser et à les anéantir (les chrétiens) ? Avez-vous oublié les fatwas interdisant de souhaiter bonne fête aux chrétiens, que nos députés nous offrent en cadeau tous les Noëls ? Avez-vous oublié la loi, que nous sommes fiers d'être le seul pays à l'avoir votée, et qui interdit d'attribuer la nationalité koweïtienne aux non-musulmans ? Oui, la décision suisse est raciste et extrémiste, mais le racisme est-il légitime chez nous et illégitime chez eux ? Sommes-nous libres dans notre pays de proscrire, d'interdire et de rejeter, selon notre bon vouloir, alors qu'on exige d'eux de nous respecter, et de respecter notre religion et nos lois ? Les Suisses ont demandé d'interdire seulement les minarets. Ils n'ont pas interdit les mosquées ni les prières, ni un des piliers de l'islam. Comparez avec nos lois, et en toute objectivité ! Alors, pourquoi cette obstination et cet extrémisme ?»
A. H.
(1) Un confrère m'a raconté qu'un imam du Caire faisait l'appel à la prière de l'aube directement à partir de son lit. Il se rendormait aussitôt après avoir réveillé tout le voisinage, bien sûr.
(2) Evidemment, il vaudrait mieux que les deux pays rivalisent en matière de construction de minarets, faute de challenge plus enrichissant, plutôt que de guerroyer l'un contre l'autre.
(3) Il faut préciser toutefois que les mosquées déjà construites dans quatre villes de Suisse disposent déjà de minarets. Le référendum ne remet pas en cause leur existence.

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : sam. 19 déc. 2009 18:00
par Claude le Liseur
Le Temps du 17 décembre 2009 a publié, dans son courrier des lecteurs (page 15), le texte de Dalaa Al-Moufti auquel fait référence M. Ahmed Halli dans son article du Soir d'Algérie. Mme Dalaa Al-Moufti est présentée comme journaliste au quotidien Al-Qabas de Koweït. On notera que, depuis la votation du 29 novembre, c'est la deuxième fois en tout et pour tout - du moins à ma connaissance - que le quotidien romand de référence donne la parole à une personne qui ne jette pas la pierre à la majorité des électeurs suisses (la précédente prise de position discordante était celle du président Sarkozy). Naturellement, comme le témoignage de Madame Al-Moufti rompt avec la présentation lénifiante de l'Islam dans laquelle Le Temps se complaît, elle est reléguée dans le courrier des lecteurs. Je reproduis le texte tel qu'il a été publié dans le journal, avec les coupures faites par la rédaction. Tel quel, il reste suffisamment expressif, même si l'auteur n'écrit pas dans sa langue maternelle.

Les minarets et le Koweït

Le monde s'est agité après le résultat du vote contre la construction de minarets. Comme d'habitude, nos chers députés [du Koweït] ont eu leur part de réactions offusquées à l'annonce du résultat de ce vote [...] Je ne sais pas pourquoi nos députés oublient la liberté et la laïcité dans notre pays, et s'en rappellent seulement quand il s'agit des pays occidentaux. Pourquoi avons-nous le droit d'interdire, d'annuler et de mettre à l'index, alors que les autres ne peuvent pas le faire? Pourquoi pouvons-nous insulter, injurier et encore prêcher le mal pour toute personne qui n'appartient pas à notre religion, et si l'un d'eux se plaint, nous nous raidissons dans la fermeté? [...]
Une question se pose: avez-vous oublié? Avez-vous oublié que le son de clochers d'églises est interdit au Koweït? Avez-vous oublié les campagnes contre les "mécréants" se passent (et continueront à se perpétuer) dans la presse contre les chrétiens, chaque mois de décembre? Avez-vous oublié les lois interdisant la construction d'églises dans quelques-uns des pays arabes? Avez-vous oublié les appels, le vendredi dans nos mosquées, qui prient Dieu à leur "démantèlement"? Avez-vous oublié les fatwas qui interdisent de souhaiter aux chrétiens les bons voeux de Noël? Avez-vous oublié la loi d'interdire la naturalisation des non-Musulmans, dont nous sommes fiers d'avoir été le premier pays à avoir mis en application? [...] Comparez la décision des Suisses à nos lois et soyez justes. [...]


Cum grano salis, j'ajoute que personne, parmi les rares Occidentaux qui mentionnent de temps en temps la persécution des minorités chrétiennes d'un grand nombre de pays musulmans (sujet qui ne doit pas trop préoccuper un Kouchner, à voir ses exploits au Kosovo), ne prend le risque de rappeler que ces minorités chrétiennes sont tout de même les premiers habitants du pays. Le gouvernement égyptien rend presqu'impossible la construction d'églises par sa minorité de 5 ou 8% de Coptes. Mais ces Coptes représentaient 95 ou 98% de la population de l'Egypte en l'an 640. Il serait intéressant de raconter comment on réduit une majorité autochtone de 95 ou 98% à une minorité, bientôt présentée comme étrangère, de 5 ou 8%. Il serait intéressant, avant de s'extasier aussi stupidement que Le Temps le faisait pendant la campagne référendaire, sur la coexistence des minarets et des clochers à Istamboul, sur la manière dont une population grecque et orthodoxe qui est tout de même à l'origine de la fondation de la ville 1700 ans avant que les Turcs ne mettent les pieds en Anatolie est passée de 120'000 personnes en 1925 à 1'200 aujourd'hui. Ce serait intéressant, mais la question ne sera jamais abordée par les "faiseurs d'opinion" en Occident. Pas seulement parce que cela pourrait faire réfléchir leurs sujets (pardon; leurs concitoyens). Mais aussi parce qu'ils se veulent tellement nés de la dernière pluie, sans passé et sans avenir, qu'ils voudraient bien que tout le monde fût comme eux.

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : lun. 21 déc. 2009 11:00
par J-Gabriel
J'ai même pu entendre que la Suisse, avec ses 4 minarets est le pays non-musulman qui a le plus de minarets au m2 ! Et surtout dans ce vote en Suisse les adeptes de l'Islam sont nullement discriminés à l'instar des chrétiens dans divers pays du monde, (témoin: le premier message de cette rubrique) ils peuvent pratiquer leur religion le plus librement qui soit.

Bon dans toutes ces histoires où j'ai le plus de soucis, c'est de rentrer dans ce jeu du "Pourquoi eux ils peuvent, et nous on peut pas ?" Que si à long terme, à force d'être mis sur un même socle, tout ça ne fait pas le jeu de l'œcuménisme ?

Y a t-il des conseils des Pères néptiques sur le relativisme ? Pendant ce carême j'ai essayé de me concentrer là-dessus, mais trop perturbé je n'ai rien trouvé.

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : lun. 21 déc. 2009 21:46
par Anne Geneviève
Dans les relations entre Etats, il serait tout de même de bonne venue d'exiger la réciprocité quand de nouveaux venus (immigrés dit bien ce que ça veut dire) ne cessent de réclamer de plus en plus de privilèges religieux. Là, il ne s'agit pas d'œcuménisme mais de respect international.

Il vient de se produire en Suède quelque chose de très grave : les musulmans ont demandé à ce que l'appel à la prière soit diffusé depuis le minaret de la mosquée de Botkyrka, au sud de Stockholm.
http://www.lemonde.fr/europe/article/20 ... _3214.html

Or il faut savoir que selon la sunna, un pays où retentit l'appel du muezzin fait partie de l'oumma, du dar al-islam, et doit donc être soumis aux usages musulmans, donc à la charia. C'est une véritable prise de pouvoir qui ne dit pas son nom.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Division_d ... _l%27islam

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : lun. 21 déc. 2009 23:49
par J-Gabriel
Anne Geneviève a écrit : [...] C'est une véritable prise de pouvoir qui ne dit pas son nom.
Et dans la rue quand on ose dénoncer la peste on se fait traiter de choléra ! Ça me fais penser à l’anecdote que je viens de lire, du clown qui criait au feu, parce qu’il y avait véritablement le feu dans la salle, mais les spectateurs rigolaient

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : mer. 23 déc. 2009 0:36
par Claude le Liseur
Le Temps a publié avant-hier (numéro du 21 décembre 2009, page 11) une lettre de M. Jacques Neyrinck, Belge naturalisé suisse, ancien professeur d'électricité à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, actuel conseiller national sous étiquette démocrate-chrétienne ou plutôt démocrate-« chrétienne », qui n'est pas de nature à me réconcilier avec le parti des anciens du détestable Sonderbund.
Voici le texte de cette affligeante épître:

« L’article du Père Jean Blaise Fellay dans Le Temps du 15 décembre recense les agressions subies par des chrétiens de la part des musulmans. Il eut été équitable de rappeler celle subies par des musulmans, depuis leur expulsion intégrale d’Espagne au XVIe siècle jusqu’à la guerre d’Irak déclenchée par George Bush. En revanche, l’Islam accorde un statut aux chrétiens et aux juifs et a accepté en son sein ces communautés pendant plus d’un millénaire. Les chrétiens ont procédé au génocide massif des juifs, qui a entraîné la création de l’Etat d’Israël source de tous les conflits du Moyen-Orient, et plus récemment à celui des musulmans kosovars et bosniaques, réfugiés en Suisse, qui ne sont pas des persécuteurs mais des persécutés. En matière de tolérance et d’agression, la chrétienté n’a pas de leçon à donner. »

Certes, on peut toujours dire qu’un pareil texte est si nul qu’il ne mérite ni commentaire ni réplique. Certes, l’auteur se trompe dans ses dates, récrit l’Histoire sans avoir le talent d’Alexandre Dumas et nous étonne par la somme de ses erreurs. (Comment oublier le fait que la guerre de George Bush, bien loin d’être une agression contre l’Islam, visait à détruire l’un des deux seuls régimes laïcs du monde arabe afin d’empêcher l’Iraq de devenir un jour le phare de la nation arabe en matière de libération de la femme, de laïcisation, d’émancipation des minorités religieuses, d’alphabétisation et d’industrialisation ?)

Certes, M. Neyrinck ne semble pas savoir que le christianisme est antérieur de six siècles à l'Islam et que les populations de Syrie ou d'Egypte avaient une religion avant la conquête islamique , ce qui lui permet de nous apprendre que l'Islam a une tradition de tolérance qui lui a permis d' « accepter » les chrétiens et les juifs ! Les coptes de Haute-Egypte, les Grecs de Constantinople ou les Maronites du Liban ont été « acceptés » sur leur propre sol, dans les vues l'excellent M. Neyrinck! Aussi attentatoire au bon sens (et démocrate-« chrétien » suisse!) que le quotidien de même tendance politique La Liberté, qui faisait de saint Nicolas de Myre un évêque « turc » sept siècles avant l'arrivée des Turcs en Anatolie. À moins que l'étrange récriture de l'histoire par M. Neyrinck ne révèle que, dans certains esprits, les Suisses sont déjà, sur leur propre sol, des dhimmis « acceptés» par l'Islam. Certes, il est effarant que M. Neyrinck ne sache pas que, lors de leur invasion de l’Espagne en 711, les musulmans n’ont pas trouvé une terre vierge. On ne saurait demander à un catholique contemporain d’avoir entendu parler d’Ossius de Cordoue ou Isidore de Séville.

Certes, on peut aussi se demander, tout simplement, si M. Neyrinck pourrait supporter trois jours le statut qu’impliquait autrefois pour les chrétiens la « tolérance » islamique qu’il vante avec tant d’insistance. L’enlèvement des enfants pour en faire des janissaires… L’impôt spécial… L’obligation de porter des signes distinctifs… L’interdiction du port d’arme… Mais là encore, on ne saurait demander à un parlementaire du PD « C » d’avoir la moindre idée de ce dont il parle.

Mais faisons un effort pour aller au-delà de l'anecdote. Pour déplorable et frappé au coin d’une inculture encyclopédique qu’il soit, le texte de M. Neyrinck est peut-être surtout révélateur du malaise de certains catholiques romains post-Vatican II qui ont du mal à vivre le passé de leur Église, et qui semblent être dans une recherche de boucs émissaires. Car enfin, ce qui ressort de ce texte, ce n'est pas l'amour des musulmans, lesquels ont d'ailleurs avant tout, eux aussi, droit à la Vérité. Non, ce qui ressort, c'est le poids d'un certain passé, qui se traduit par la haine de celui que l'on peut toujours massacrer et nier: le chrétien d'Orient. Peut-être s'ajoute ici le fait que M. Neyrinck ait peut-être de la peine à assumer le passé peu glorieux de son parti. Il est dommage que, comme d'habitude dans ce milieu, d'ailleurs, la bonne conscience s'acquière sur le dos des chrétiens d'Orient - qu'ils fussent orthodoxes, préchalcédoniens ou uniates. A ce propos, les Églises uniates du Moyen-Orient, autrefois créées pour des raisons politiques (en général par le consulat de France à Alep) et qui justifient sans cesse leur trahison par le soutien qu'elle leur aurait valu de la part de l'Occident contre l'environnement islamique, devraient sérieusement se poser la question de ce que vaut un soutien de l'ordre de celui exprimé par M. Neyrinck dans sa lettre: elles avaient le choix entre le déshonneur et l'abandon, elles ont choisi le déshonneur et elles récoltent quand même l'abandon.

Ne jetons pas la pierre à M. Neyrinck : c’est devenu une tendance irrésistible chez nous, Occidentaux, que de régler nos problèmes de conscience avec le sang des autres. Par exemple, notre amour de la liberté est si grand qu’il nous a poussés à libérer du poids de la vie quelques centaines de milliers d’Iraqiens et d’Afghans qui ne nous en avaient pourtant pas fait la demande.

Au passage, M. Neyrinck nous apprend que la Shoah fut l'oeuvre de chrétiens (nous apprenons avec étonnement les convictions chrétiennes de MM. Hitler, Himmler ou Heydrich; ils les avaient bien cachées de leur vivant). Puisqu'il aime fouiller les histoires de génocide, jusqu’à en inventer en Bosnie et au Kosovo, il est dommage qu'il n'ajoute pas à sa fastidieuse énumération le génocide pratiqué par la Croatie des très catholiques Pavelić et Stepinac contre sa population orthodoxe, et dans lequel la division SS musulmane bosniaque Handschar joua quelque rôle; voilà un génocide dont les auteurs avaient des convictions catholiques romaines bien affirmées, au point de confier le commandement d'un camp d'extermination à un franciscain ; voilà un génocide que M. Neyrinck pourrait vraiment attribuer à des chrétiens. Il est vrai que, d'une part, les victimes, simples paysans de confession chrétienne orthodoxe, ne sont pas de nature à susciter l'émotion médiatique, et que, d'autre part, aborder ce sujet pourrait forcer M. Neyrinck à vraiment remettre en cause la hiérarchie ecclésiastique dont il dépend et l'idéologie du parti qui l'a fait élire au Conseil national. Il y a donc des génocides politiquement incorrects, dont on ne saurait parler.

On notera aussi que, dans son goût d’entomologiste pour la recherche des génocides, M. Neyrinck oublie soigneusement de mentionner le génocide des Arméniens (1915-1921), celui des Assyro-Chaldéens, celui des Grecs pontiques, tous génocides bien organisés au nom du djihad.

Le problème avait été diagnostiqué par l'archiprêtre Wladimir Guettée d'éternelle mémoire (1816-1892) lorsqu'il opposait l'Eglise orthodoxe couverte du sang de ses martyrs et l'Eglise romaine couverte du sang de ceux qu'elle avait fait assassiner. Certes, mais pourquoi faut-il toujours que des catholiques qui vivent mal ce passé se fassent une virginité sur le dos des autres?

Il est vrai que nos hiérarchies orthodoxes portent une responsabilité écrasante dans ce problème psychologique qui afflige bon nombre de nos frères catholiques romains. Comme préalable à tout dialogue avec le Vatican, avant d’aborder les sujets difficiles de la foi, ces sujets qui engagent le salut de notre âme, il fallait – il eût fallu – exiger du Vatican une chose simple : une contrition sincère pour les Croisades – dirigées contre l’Empire orthodoxe de Constantinople nouvelle Rome -, l’Inquisition – dirigée à l’origine contre les chrétiens orthodoxes d’Italie du Sud – , l’uniatisme, le déclenchement de la première Guerre mondiale par les Habsbourg excités à la haine contre tout ce qui est orthodoxe (on se souvient de Pie X : « Se vince la Russia, vince lo scisma ! »), la collaboration avec les bolcheviks, le génocide oustachi, l’enseignement du mépris anti-orthodoxe poursuivi jusqu’à nos jours. Ce préalable ne fut jamais posé, pas plus que ne fut jamais demandé le vrai acte de réconciliation qu’eût été la suppression des Églises uniates – à tout le moins leur latinisation. On s’est engagé dans un dialogue avec un partenaire à qui on n’avait pas donné la possibilité de se retourner sur lui-même, de se repentir et de se réconcilier avec lui-même. Un tel dialogue, qui n’a même pas été capable d’aborder les sujets simples et factuels avant d’aborder les sujets difficiles de la foi, ne pourra donc jamais aboutir à rien de constructif. En un certain sens, la lettre de M. Neyrinck, en nous donnant l’impression d’un catholicisme divisé contre lui-même et qui en est réduit à présenter des excuses à l’Islam pour ne pas les présenter à ses vraies victimes historiques – les chrétiens orthodoxes -, nous révèle aussi les faux présupposés de l’œcuménisme contemporain, « maison construite sur le sable » (Mt 7,26) et destinée à s’écrouler.

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : mer. 23 déc. 2009 1:56
par Claude le Liseur
Une très intéressante dépêche AFP qui nous montre un mécanisme à l'oeuvre - un mécanisme aussi pervers que celui utilisé par le groupe de pression moderniste en Finlande.

http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2009/ ... #xtor=AL-5
La secrétaire d'Etat aux Aînés Nora Berra a claqué aujourd'hui la porte de la réunion du groupe UMP à l'Assemblée nationale, pour protester contre des propos "insupportables" du député UMP et ancien garde des Sceaux Pascal Clément sur les minarets, a appris l'AFP de sources concordantes. Selon plusieurs participants à cette réunion à huis clos sur le port du voile intégral, Pascal Clément aurait évoqué de la sorte la question des minarets : "Le jour où il y aura autant de minarets que de cathédrales en France, ça ne sera plus la France".

En entendant ces propos, Mme Berra se serait levée et aurait quitté la salle Colbert en lançant, selon son entourage : "Qu'un ancien garde des Sceaux tienne ces propos anti-laïcs dans une enceinte symbole de la République comme l'Assemblée nationale, c'est insupportable ! C'est ça la démocratie ?".
Là encore, le premier mot qui vient à l'esprit est outrecuidance. Mais, là encore, il faut aller au-delà des apparences et faire un effort d'analyse.

Il n'y a pas besoin d'être grand clerc pour comprendre à quelle "laïcité" se réfère Mme Berra. Il ne s'agit pas de la véritable laïcité, du principe "Eglise libre dans Etat libre" proclamé par Cavour. Il s'agit d'une laïcité telle qu'elle est pratiquée en Turquie depuis Mustafa Kemal: la laïcité destinée à briser les chrétiens, à broyer le passé chrétien d'un pays. La laïcité de Mme Berra, c'est l'étrange laïcité de la Cour européenne des droits de l'Homme, interdisant les crucifix dans les écoles italiennes, au mépris de la culture du peuple italien - car, là, il ne s'agit même plus des convictions religieuses des individus -, mais qui est maintenant saisie par les Hafid Ouardiri & cie pour planter les minarets en Suisse. Ces distorsions, ces interprétations à géométrie variable de mots comme "laïcité" et "liberté religieuse" - des mots que l'on vide de leur sens, mais des mots pour lesquelles nous nous sommes battus et pour lesquels nous avons versé notre sang- n'ont qu'un seul but: nous briser, détruire tout ce que nous sommes, définitivement anéantir les peuples d'Europe (je suppose au profit de l'idéologie du consumérisme, de l'homme-marchandise, de Mc World). Compendra-t-on enfin que nous sommes maintenant en danger d'être complètement rayés de la surface de la terre?

Que l'on en vienne à diaboliser M. Pascal Clément parce qu'il a simplement rappelé que la France est un pays de tradition chrétienne - un pays culturellement chrétien -, montre bien qu'on n'est plus dans le contexte de la véritable laïcité, garante de la liberté et de l'éveil national, la laïcité des radicaux suisses de 1847, de Cavour ou de Clemenceau, mais en plein obscurantisme totalitaire. Le seul fait que M. Clément n'ait pas le droit de dire qu'une France islamisée n'est plus la France montre que nous sommes dans un cauchemar orwellien. Il ne reste plus qu'à aller jusqu'au bout dans l'imitation de l'Océania de 1984 et de créer un Ministère de la Vérité qui aura pour première tâche d'effacer toute trace de la culture de l'Europe.

Je suppose que ladite Mme Berra n'a sans doute jamais entendu parler des propos du général de Gaulle à propos de son village qui s'appelait Colombey-les-Deux-Églises et pas Colombey-les-Deux-Mosquées. Il est vrai que le Général, ce n'est pas grand chose par rapport à Mme Berra...

Sait-on au passage que l'une des plus fermes condamnations du délirant jugement de la Cour européenne des droits de l'Homme interdisant les crucifix dans les écoles en Italie est venue d'un bouddhiste? Sa Sainteté le Dalaï-Lama déclara le 18 novembre 2009 devant la Chambre des députés italienne (cf. les informations sur ce sujet sur le site Religioscope de notre frère Jean-François Mayer http://religion.info/english/articles/article_452.shtml ):
It is of fundamental importance to maintain your own traditions, and Italy has a Christian and Catholic background. Therefore, to keep the tradition of the crucifix in the schools is extremely important.
Ma traduction:
Il est d'une importance fondamentale de maintenir vos propres traditions, et l'Italie a un fond chrétien et catholique. Par conséquent, il est extrêmement important de conserver la tradition des crucifix dans les écoles.
Sommes-nous encore capables d'entendre cette admonestation venue de l'Himalaya? Moi non plus, je ne suis pas catholique romain, mais je suis prêt à me battre pour que l'Italie puisse conserver dans ses lieux publics tous les symboles du catholicisme romain, du moins tant qu'elle-même n'en aura pas décidé autrement - elle-même, et non pas un groupe de juges dont la mission est d'imposer aux peuples d'Europe une idéologie dont ils ne veulent pas.

Mais il est vrai que l'Océan de Sagesse, ce n'est pas non plus grand chose par rapport à Mme Berra...

"It's later than you think" ("Il est plus tard que vous le pensez"), proclame le hiéromoine Séraphin (Rose) de Platina sur l'icône qui le représente. Oui, il est plus tard que nous ne le pensions.

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : mer. 23 déc. 2009 8:07
par Anne Geneviève
Et chaque jour un peu plus tard...

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : mar. 05 janv. 2010 16:09
par Claude le Liseur
Ici, l'intéressant témoignage de l'écrivain suisse d'origine tunisienne Rafik ben Salah sur des réactions maghrébines bien plus mesurées que celles des sieurs Kouchner ou Morin:

http://www.culturactif.ch/invite/salah2.htm
J'avais quitté Genève le samedi 28 novembre, après avoir accompli mon devoir civique de votant, par correspondance, comme à l'accoutumée.
Et puis, tandis que j'arrivais en Afrique, je n'avais plus pensé ni aux objets du vote du lendemain, ni à ses résultats.
J'ai donc atterri à Tunis, le même jour, n'ayant plus comme préoccupation que mes petits travaux contributifs au Colloque pour lequel j'avais été invité : la littérature tunisienne d'expression française, au joli titre de : « Voix anciennes et nouvelles voies » sur quoi l'on m'avait engagé.
Ce colloque s'ouvrait le lundi 30 novembre, date à laquelle paraissaient les résultats du vote, désormais suisse, sur l'acceptation ou le refus de l'extension des constructions des minarets en Suisse.
Mais de cette votation helvétique, j'avoue que je m'étais détourné.
Or, tandis que le colloque ouvrait ses travaux, tandis que se déroulaient les communications savantes des professeurs sur la présence de la francophonie en Tunisie, un bruit circulait dans les travées sur l'interdiction désormais acquise en Suisse dont les musulmans feraient les frais : nul minaret ne se dresserait plus en Suisse et si les mosquées continueraient d'avoir droit de cité, elles ne seraient plus minarisées !
Et ce murmure de la salle du colloque auquel je n'avais d'abord prêté qu'une attention agacée (décidément, ces Tunisiens, dont je suis, sont bien indisciplinés, chahutant ainsi quelque peu un important contributeur à l'édifice de la francophonie), ce murmure donc persistait, jusqu'à ce que m'en parvînt l'écho.
Pourquoi, diable, s'agitait-on ainsi, ce lundi 30 novembre 2009, au sujet d'une votation suisse qui avait eu lieu à 1000 kilomètres à vol d'oiseau de l'Alma mater sise au pays de Carthage, celui de Tertullien, de Saint Augustin … ?
C'est la pause-café de dix heures trente qui allait libérer les voix jusque-là chuchotées. Et que disaient-elles, ces voix, à une si grande distance du pays de Gayoum ben Tell ?

C'est du pays de Saint Cyprien que je vous écris, chers Suissamis.

Que disaient donc les voix tunisiennes issues des universités et des milieux du livre réunies ?
Elles étaient de deux voies, de deux poids.
L'une, à dominante féminine, levait le V de Churchill et se réjouissait du vote clair et tranché, celui des Suisses qui, grâce à leur démocratie dite directe, mettaient le holà au péril islamiste. Ce danger d'abord imperceptible quand il prend racine, et qui devient sournois et progressivement menaçant, partout où on lui ouvre la voie.

On applaudissait donc ce matin du 30 novembre, au coup d'arrêt donné à l'extension de l'islamisme radical, symbolisé par l'avance pernicieuse de ses emblèmes dont le minaret n'est que le signe avant-coureur. Une mosquée, oui, disait une voix, mais une mosquée minarisée , non et trois fois non, bravo les Suisses ! Et puis même, fallait-il encore vraiment des mosquées surenchérissait-on avec espièglerie !
Et une autre voix ajoutait qu'il convenait de tirer les leçons du passé, car en la Tunisie moderne, pour prendre cet exemple, nul n'avait envisagé que les islamistes gagneraient le moindre pouce de terrain, tellement le pays avait engagé ses forces dans le combat contre l'obscurantisme dont l'islamisme radical n'était que l'expression naturelle. Et pourtant, ne voyait-on pas ces combattants d'Allah courir les rues de la capitale, aborder les oreilles encore tendres pour y déverser les pires insanités, menaçant les enfants des tortures les plus cruelles s'ils n'adoptaient leurs sombres voies, celles du fanatisme religieux, celles du combat contre l'altérité qui refusait tout ensemble le voile et la barbe. Pour concrétiser leurs menaces, les islamistes radicaux ne diffusaient-ils pas des enregistrements de sons et de voix faisant entendre les hurlements des dénégateurs sous la torture des anges d'Allah venus convertir les mécréants ?
Nul n'avait donc jamais imaginé que l'on arriverait à de telles extrémités, au pays de Carthage, celui où le régime issu de l'Indépendance avait tant investi dans les lumières de l'esprit ! Alors, prenons garde de ne laisser pas les islamistes avancer !
Un autre homme, un libraire éclairé, conte à ce moment de la conversation qu'il est du côté des Suisses, car il ne voudrait pas qu'il leur arrive ce qu'il vient de vivre dans son foyer.
Voyez donc cette gamine, sa fille, une enfant moderne de quatorze ans, vivant avec son temps, heureuse et lumineuse qui se fait épingler par des barbus qui la menacent des justiciers d'Allah si elle refuse de se convertir à leur foi, en portant le voile, en refusant d'aller à la plage et bien d'autres interdits au motif que le corps d'une musulmane ne se montre pas ! Cette enfant, craignant les anges punisseurs d'Allah, déclarait tout de go à son père que désormais elle vivrait recluse comme une nonne du temps jadis. Et le père d'argumenter, allant dans le sens de sa fille, concluant que, puisqu'elle avait choisi la voie radicale, il la suivrait, reprenant du même coup l'autorité paternelle prescrite par les islamistes eux-mêmes, et qu'au nom de cette autorité, il lui ordonnait de recouvrer sa liberté de citoyenne, de revenir à l'école et à la plage.
Et de quoi avait donc peur cette enfant pour céder aux islamistes ?
Eh bien ! il faut se figurer que le mécréant, selon les prosélytes radicaux, est la proie désignée des anges d'Allah qui s'emparent de lui dès sa descente dans la tombe (où on l'aide si nécessaire à tomber ) et que, tour à tour, ces monstres se saisissent de son corps pour lui faire subir les sept viols, chaque ange à son tour, et que ce traitement lui est servi éternellement, pour avoir désobéi aux injonctions de l'islam dans ce bas monde.
C'est avec cela qu'ils terrorisent nos enfants, concluait cet homme de culture et d'esprit.
Mais il n'y avait pas que ces voix concordantes avec le refus des Suisses. Oyez plutôt.

L'autre son de cloche était qu'il fallait laisser faire, et permettre aux musulmans de Suisse de construire à l'envi leurs mosquées minarisées . Il n'y avait pas de quoi s'affoler. Car interdire, cela vous dresse l'épine après vous avoir brisé l'échine, à quoi bon semer la frustration qui est souvent génératrice de haine, a-t-on dit ? Le musulman, aujourd'hui minoritaire, se sentira rejeté, et demain, devenu à son tour suisse ou peut-être l'est-il déjà, il se déclarera citoyen de seconde zone, un citoyen discriminé !
Et puis de quoi avaient donc peur les Suisses qui ont voté pour le refus des minarets ? De n'avoir pas la réciprocité en nos pays, si l'envie leur venait de souhaiter prier chez nous ou si, s'y sentant à l'étroit, le désir de construire des cathédrales leur venait ?
Eh bien ! à la bonne heure, disait un juriste présent autour du café. Et cet orateur de se demander si ses auditeurs connaissaient tous la plus grande avenue de Tunis ? Ses Champs-Élysées ? Eh bien quel était le plus grand, le plus majestueux, peut-être aussi le plus ancien bâtiment de cette avenue ?
C'était bien sûr vrai, reconnaissait-on : la Cathédrale de Tunis s'y dressait, seul monument religieux du centre ville avec, sur l'avenue perpendiculaire, une belle synagogue, plus haute qu'un minaret. La mosquée, elle, il fallait aller la chercher dans les souks, parmi les échoppes des dinandiers.
Fallait-il encore des preuves à l'ouverture de ce pays sur le monde, fallait-il encore des preuves sur leurs tolérances, reprenait le juriste qui ajoutait, que quiconque voulait construire une cathédrale en leurs contrées ne rencontrerait pas plus d'obstacles que celui qui aurait le projet de bâtir une mosquée !
Alors, pourquoi les musulmans de Suisse n'auraient-ils pas les mêmes droits que ceux qu'offre la Constutution en Tunisie ?

Mais ce n'était pas l'avis du camp opposé que composaient des femmes en majorité !

Cependant, voici que les cloches du colloque nous rappelaient, réunissant autour de la littérature les voix qui s'étaient opposées.

C'est de là que je vous écrivais, Chers Suissamis.

Rafik ben Salah

Re: Deux poids, deux mesures?

Publié : mar. 12 janv. 2010 0:51
par Claude le Liseur
Claude le Liseur a écrit :Le Temps a publié avant-hier (numéro du 21 décembre 2009, page 11) une lettre de M. Jacques Neyrinck, Belge naturalisé suisse, ancien professeur d'électricité à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, actuel conseiller national sous étiquette démocrate-chrétienne ou plutôt démocrate-« chrétienne », qui n'est pas de nature à me réconcilier avec le parti des anciens du détestable Sonderbund.
Voici le texte de cette affligeante épître:

« L’article du Père Jean Blaise Fellay dans Le Temps du 15 décembre recense les agressions subies par des chrétiens de la part des musulmans. Il eut été équitable de rappeler celle subies par des musulmans, depuis leur expulsion intégrale d’Espagne au XVIe siècle jusqu’à la guerre d’Irak déclenchée par George Bush. En revanche, l’Islam accorde un statut aux chrétiens et aux juifs et a accepté en son sein ces communautés pendant plus d’un millénaire. Les chrétiens ont procédé au génocide massif des juifs, qui a entraîné la création de l’Etat d’Israël source de tous les conflits du Moyen-Orient, et plus récemment à celui des musulmans kosovars et bosniaques, réfugiés en Suisse, qui ne sont pas des persécuteurs mais des persécutés. En matière de tolérance et d’agression, la chrétienté n’a pas de leçon à donner. »

Voici, sous la description d'une univiersitaire française spécialiste du chiisme, la manière dont fonctionne, à l'heure actuelle, en république islamique d'Iran, le «statut» accordé par l'Islam aux chrétiens et aux juifs et qui fait se pâmer le conseiller national démocrate-chrétien Neyrinck. (Ce qui fera sans doute pleurer le professeur Neyrinck, c'est que ce «statut» n'existe plus au Liban, en Jordanie et en Syrie, et qu'il n'existait plus en Iraq sous Saddam Hussein, pas seulement grâce à l'indéniable bienveillance des rois Hussein et Abdallah de Jordanie ni grâce au laïcisme du parti Baas, mais aussi parce que les affreux colonisateurs britanniques et français apportaient aussi dans leurs bagages certaines idées de liberté, d'égalité et de sécularisation qui ont trouvé un écho certain même - surtout ? - parmi les nationalistes qui ont ensuite expulsé le colonisateur. )
De par cette situation, les minoritaires se sont trouvés en grande partie exclus de l'enseignement et des administrations (proviseurs et directeurs nommés par l'État, interdiction dans les locaux scolaires de l'enseignement religieux de la communauté, interdiction aux membres du clergé d'entrer dans les locaux scolaires, les religieux musulmans y étant seuls, admis). Les activités commerciales leur sont en grande partie fermées et le système idéologique des universités rend assez difficile à la plupart d'entre eux la poursuite d'études supérieures. Ils n'ont pas droit aux mêmes prestations sociales que les Musulmans et sont passibles, en matière criminelle, de peines spécifiques. Par ailleurs, depuis 1983, les enfants, dans les écoles, reçoivent l'enseignement obligatoire du catéchisme syncrétique d'inspiration islamique dans lequel ils apprennet qu'ils sont, respectivement, polythéistes, impurs, inférieurs, adeptes d'une fausse religion et falsificateurs des Écritures. Enfin, les minoritaires doivent se conformer aux prescriptions vestimentaires islamiques "par respect pour les croyances religieuses et les traditions culturelles du pays", d'où l'obligation pour les jeunes filles de porter le voile à l'intérieur même de leurs propres écoles ou bâtiments associatifs. (Geneviève Gobillot, Les Chiites, Brepols, Turnhout 1998, pp. 166 s.)
Et oui, les faits sont têtus, surtout quand ils sont exposés d'une manière sobre et argumentée qui créé un heureux contraste avec le lyrisme de la prose neyrinckienne, mais il est tellement plus facile de fantasmer dans le courrier des lecteurs d'un quotidien totalement acquis aux mêmes fantaisies...