Le métropolite Nicolas du Banat persiste et signe
Publié : jeu. 05 juin 2008 19:33
Pour ceux qui n'aiment pas croire leurs propres yeux, voici le début de la transcription d'une interview téléphonique donnée par Mgr Nicolas (Corneanu) du Banat, à l'Association roumaine des journalistes et éditeurs chrétiens (AZEC), et transcrite sur le site roumain http://www.razbointrucuvant.ro/2008/06/ ... -pare-rau/ .
• Razvan Bucuroiu:
- Înaltpreasfintia Voastra, este adevarat ca v-ati impartasit la Biserica Greco-Catolica din Timisoara acum doua duminici?
- Da, este perfect adevarat. Am fost invitat de catre confratii greco-catolici la sfintirea unei noi biserici de aici, din orasul Timisoara. In momentul cand s-a facut impartasirea credinciosilor, m-a impresionat multimea de credinciosi care, toti, alaturi evident de preotii care erau de fata, au cerut sa fie si ei impartasiti. Printre acei credinciosi erau nu numai greco-catolici, ci si ortodocsi, pentru ca in zona respectiva traiesc mai multi ortodocsi decat greco-catolici. Dar, sigur, solemnitatea si serviciul religios a fost al greco-catolicilor. In momentul cand s-a impartasit toata lumea, repet din nou, am fost impresionat, emotionat de modul cum toata asistenta, toti participantii la serviciul religios s-au apropiat de preotii care cuminecau, ca sa primeasca si ei Impartasania. Imi pare rau ca am dat in felul acesta posibilitatea unor comentarii, din cele mai, sa zic asa,.. negative, dar pentru mine, ca si om al lui Hristos si al lui Dumnezeu, a fost un gest de fratietate. Pe langa toate, in acel moment mi-am adus aminte de foarte multele intruniri ecumenice la care luam si eu parte in trecut si la care se dezbatea, pe vremea aceea, un document care se chema „Botez, Euharistie si comuniune“. Sigur ca pe plan ecumenic am fost toti de acord ca e necesar sa ne apropiem unii de altii si sa recurgem la tot ceea ce se poate pentru a manifesta fratietatea dintre marile confesiuni crestine.
Ma traduction:
Question de Razvan Bucuroiu:
- Votre Éminence, est-il vrai que vous avez communié à l'église gréco-catholique de Timişoara voici deux dimanches?
- Oui, c'est parfaitement vrai. J'ai été invité par des confrères gréco-catholiques à la consécration d'une église d'ici, de la ville de Timişoara. Au moment de la communion des fidèles, j'ai été impressionné par la multitude des fidèles qui, tous, entourés de manière évidente de prêtres qui étaient de face, ont demandé à communier. Parmi ces fidèles, il n'y avait pas seulement des gréco-catholiques, mais aussi des orthodoxes, parce que dans cette région, il y a beaucoup plus d'orthodoxes que de gréco-catholiques. Mais, assurément, cette solennité et ce service religieux étaient gréco-catholiques. Au moment où tout le monde a pris la communion, je le répète de nouveau, j'ai été impressionné, ému par la manière dont toute l'assistance, tous les participants au service religieux se sont approchés des prêtres qui communiaient, afin de recevoir eux aussi l'eucharistie. J'ai éprouvé un sentiment de…, si l'on peut dire ainsi, fraternité face à ce public de fidèles qui n'étaient pas seulement gréco-catholiques, je le répète, mais aussi orthodoxes, et, dans un geste spontané, je me suis approché et j'ai demandé à communier et j'ai communié entouré par les autres. Certes, il fallait réfléchir aux conséquences ou aux commentaires qui étaient prévisibles à ce sujet, mais cela a été un geste spontané de fraternité dont j'ai ressenti à ce moment, pour ainsi dire, qu'il était nécessaire que je le fisse aussi, entouré de tout ce public qui se trouvait alors à ce service religieux. Je regrette que j'ai donné lieu de cette manière à la possibilité de commentaires, pour le moins, disons,… négatifs, mais pour moi, en tant qu'homme du Christ et de Dieu, cela a été un geste de fraternité. Par-dessus tout, à ce moment, je me suis souvenu de très nombreuses rencontres œcuméniques auxquelles j'ai moi aussi pris part dans le passé et dans lesquelles on débattait, à cette époque, d'un document qui s'appelait "Baptême, Eucharistie, et communion." Il est certain que sur le plan œcuménique nous avons tous été d'accord qu'il est nécessaire de se rapprocher les uns des autres et que nous nous référions à tout ce que nous pouvons faire pour manifester la fraternité entre les grandes confessions chrétiennes.
Mon commentaire:
La communion uniate du métropolite Nicolas du Banat représente un événement important, l'aboutissement de soixante ans de participation de certaines Églises orthodoxes au mouvement œcuménique. Un pas est franchi, dans une absence totale de réactions. Il faut désormais s'attendre à beaucoup de gestes du même genre dans d'autres diocèses et d'autres Églises. C'est probablement la fin des ambiguités entretenues, où l'on donnait l'impression d'être en communion avec la Papauté tout en disant qu'on ne l'était pas, etc. On va enfin passer de la simple invitation de la chorale de la paroisse protestante à chanter à la liturgie orthodoxe à la concélébration pure et simple avec le pasteur évangélique (mais toujours de manière ethniquement pure - il ne faut pas trop en demander pour le moment). Dans un premier temps, il va être intéressant de voir quelles seront les sanctions contre les personnes qui se montreront critiques à l'égard de telles évolutions. Y aura-t-il à la fin un appel au bras séculier?
Or, quand on est confronté à un événement de cette importance, il ne sert à rien de nier l'évidence. D'autant plus que le geste du métropolite Nicolas a suscité une mobilisation internetienne et médiatique en sa faveur que je n'ai jamais vue se manifester pour les évêques orthodoxes fidèles à leur foi. Certains des partisans du métropolite Nicolas ont des idées vraiment intéressantes, comme cette proposition d'organiser un référendum dans son diocèse – référendum qui lui serait de toute évidence favorable, mais aurait au moins l'avantage de clarifier les choses et de représenter un pas supplémentaire.
On notera, dans la suite de l'interview, qu'un des participants signale au métropolite Nicolas Corneanu, qui rappelle sa foi dans la validité des sacrements catholiques romains, que telle n'était pas la position orthodoxe traditionnelle; cet intervenant cite saint Païssios Vélitchkovsky, le traducteur slavon de la Philocalie, et le métropolite Hiérothée de Naupacte, qui ne fait d'ailleurs qu'exprimer une position qui est la pratique de l'Église de Grèce, laquelle ne campe pas sur les mêmes positions que la métropole du Banat. Mgr Nicolas répond que, si de telles positions ont existé dans l'Orthodoxie roumaine, c'était par hostilité aux Hongrois et que de telles positions ne sont plus défendables maintenant que les relations sont bonnes entre la Hongrie et la Roumanie.
Je trouve originale la position du métropolite Nicolas selon laquelle on peut participer à des actes cultuels d'une autre religion par sentiment de fraternité et de sympathie. La prochaine fois que je rendrai visite à un copain musulman, j'en profiterai pour aller faire les prières rituelles à la mosquée. Comme j'ai aussi des copains néo-païens, j'irai avec eux faire les rites pour le solstice.
Non, je plaisante, c'est une mentalité que je ne comprends pas, complètement contraire à ma mentalité – mais c'est sans doute parce que je suis un radical d'avant le déluge, un militant de la laïcité inexportable hors d'Europe occidentale -: je ne comprends pas pourquoi, pour manifester mon amitié à quelqu'un, je devrais participer à son culte. Contrairement à Mgr Nicolas du Banat, je crois que je peux entretenir les meilleures relations avec quelqu'un en n'ayant aucune participation à ses activités religieuses, voire en les désapprouvant, de même que je ne brandis pas le drapeau de tous mes amis qui ont des idées politiques opposées aux miennes. C'est sur des principes complètement opposés à ceux défendus par Mgr Nicolas que nous avons fait vivre une nation avec trois confessions et quatre langues.
Ceci dit, il est possible que la pensée et la praxis corneaniennes représentent un grand facteur d'unité nationale, mais elles ne représenteront sans doute pas un grand facteur d'unité panorthodoxe.
J'espère que toutes les conséquences de cette nouvelle position seront tirées, que les conditions pour communier dans les églises orthodoxes seront alignées sur celles pour communier dans les églises catholiques.
J'espère surtout que nous serons enfin autorisés à aller manifester à la manière du métropolite du Banat notre fraternité avec l'ECOF, les vieux-calendéristes, les Vieux-Ritualistes, les autocéphalistes ukrainiens, etc. A moins que, comme le laissent entendre les propos de Mgr Nicolas, il ne soit question de fraternité qu'entre les "grandes" confessions chrétiennes?
• Razvan Bucuroiu:
- Înaltpreasfintia Voastra, este adevarat ca v-ati impartasit la Biserica Greco-Catolica din Timisoara acum doua duminici?
- Da, este perfect adevarat. Am fost invitat de catre confratii greco-catolici la sfintirea unei noi biserici de aici, din orasul Timisoara. In momentul cand s-a facut impartasirea credinciosilor, m-a impresionat multimea de credinciosi care, toti, alaturi evident de preotii care erau de fata, au cerut sa fie si ei impartasiti. Printre acei credinciosi erau nu numai greco-catolici, ci si ortodocsi, pentru ca in zona respectiva traiesc mai multi ortodocsi decat greco-catolici. Dar, sigur, solemnitatea si serviciul religios a fost al greco-catolicilor. In momentul cand s-a impartasit toata lumea, repet din nou, am fost impresionat, emotionat de modul cum toata asistenta, toti participantii la serviciul religios s-au apropiat de preotii care cuminecau, ca sa primeasca si ei Impartasania. Imi pare rau ca am dat in felul acesta posibilitatea unor comentarii, din cele mai, sa zic asa,.. negative, dar pentru mine, ca si om al lui Hristos si al lui Dumnezeu, a fost un gest de fratietate. Pe langa toate, in acel moment mi-am adus aminte de foarte multele intruniri ecumenice la care luam si eu parte in trecut si la care se dezbatea, pe vremea aceea, un document care se chema „Botez, Euharistie si comuniune“. Sigur ca pe plan ecumenic am fost toti de acord ca e necesar sa ne apropiem unii de altii si sa recurgem la tot ceea ce se poate pentru a manifesta fratietatea dintre marile confesiuni crestine.
Ma traduction:
Question de Razvan Bucuroiu:
- Votre Éminence, est-il vrai que vous avez communié à l'église gréco-catholique de Timişoara voici deux dimanches?
- Oui, c'est parfaitement vrai. J'ai été invité par des confrères gréco-catholiques à la consécration d'une église d'ici, de la ville de Timişoara. Au moment de la communion des fidèles, j'ai été impressionné par la multitude des fidèles qui, tous, entourés de manière évidente de prêtres qui étaient de face, ont demandé à communier. Parmi ces fidèles, il n'y avait pas seulement des gréco-catholiques, mais aussi des orthodoxes, parce que dans cette région, il y a beaucoup plus d'orthodoxes que de gréco-catholiques. Mais, assurément, cette solennité et ce service religieux étaient gréco-catholiques. Au moment où tout le monde a pris la communion, je le répète de nouveau, j'ai été impressionné, ému par la manière dont toute l'assistance, tous les participants au service religieux se sont approchés des prêtres qui communiaient, afin de recevoir eux aussi l'eucharistie. J'ai éprouvé un sentiment de…, si l'on peut dire ainsi, fraternité face à ce public de fidèles qui n'étaient pas seulement gréco-catholiques, je le répète, mais aussi orthodoxes, et, dans un geste spontané, je me suis approché et j'ai demandé à communier et j'ai communié entouré par les autres. Certes, il fallait réfléchir aux conséquences ou aux commentaires qui étaient prévisibles à ce sujet, mais cela a été un geste spontané de fraternité dont j'ai ressenti à ce moment, pour ainsi dire, qu'il était nécessaire que je le fisse aussi, entouré de tout ce public qui se trouvait alors à ce service religieux. Je regrette que j'ai donné lieu de cette manière à la possibilité de commentaires, pour le moins, disons,… négatifs, mais pour moi, en tant qu'homme du Christ et de Dieu, cela a été un geste de fraternité. Par-dessus tout, à ce moment, je me suis souvenu de très nombreuses rencontres œcuméniques auxquelles j'ai moi aussi pris part dans le passé et dans lesquelles on débattait, à cette époque, d'un document qui s'appelait "Baptême, Eucharistie, et communion." Il est certain que sur le plan œcuménique nous avons tous été d'accord qu'il est nécessaire de se rapprocher les uns des autres et que nous nous référions à tout ce que nous pouvons faire pour manifester la fraternité entre les grandes confessions chrétiennes.
Mon commentaire:
La communion uniate du métropolite Nicolas du Banat représente un événement important, l'aboutissement de soixante ans de participation de certaines Églises orthodoxes au mouvement œcuménique. Un pas est franchi, dans une absence totale de réactions. Il faut désormais s'attendre à beaucoup de gestes du même genre dans d'autres diocèses et d'autres Églises. C'est probablement la fin des ambiguités entretenues, où l'on donnait l'impression d'être en communion avec la Papauté tout en disant qu'on ne l'était pas, etc. On va enfin passer de la simple invitation de la chorale de la paroisse protestante à chanter à la liturgie orthodoxe à la concélébration pure et simple avec le pasteur évangélique (mais toujours de manière ethniquement pure - il ne faut pas trop en demander pour le moment). Dans un premier temps, il va être intéressant de voir quelles seront les sanctions contre les personnes qui se montreront critiques à l'égard de telles évolutions. Y aura-t-il à la fin un appel au bras séculier?
Or, quand on est confronté à un événement de cette importance, il ne sert à rien de nier l'évidence. D'autant plus que le geste du métropolite Nicolas a suscité une mobilisation internetienne et médiatique en sa faveur que je n'ai jamais vue se manifester pour les évêques orthodoxes fidèles à leur foi. Certains des partisans du métropolite Nicolas ont des idées vraiment intéressantes, comme cette proposition d'organiser un référendum dans son diocèse – référendum qui lui serait de toute évidence favorable, mais aurait au moins l'avantage de clarifier les choses et de représenter un pas supplémentaire.
On notera, dans la suite de l'interview, qu'un des participants signale au métropolite Nicolas Corneanu, qui rappelle sa foi dans la validité des sacrements catholiques romains, que telle n'était pas la position orthodoxe traditionnelle; cet intervenant cite saint Païssios Vélitchkovsky, le traducteur slavon de la Philocalie, et le métropolite Hiérothée de Naupacte, qui ne fait d'ailleurs qu'exprimer une position qui est la pratique de l'Église de Grèce, laquelle ne campe pas sur les mêmes positions que la métropole du Banat. Mgr Nicolas répond que, si de telles positions ont existé dans l'Orthodoxie roumaine, c'était par hostilité aux Hongrois et que de telles positions ne sont plus défendables maintenant que les relations sont bonnes entre la Hongrie et la Roumanie.
Je trouve originale la position du métropolite Nicolas selon laquelle on peut participer à des actes cultuels d'une autre religion par sentiment de fraternité et de sympathie. La prochaine fois que je rendrai visite à un copain musulman, j'en profiterai pour aller faire les prières rituelles à la mosquée. Comme j'ai aussi des copains néo-païens, j'irai avec eux faire les rites pour le solstice.
Non, je plaisante, c'est une mentalité que je ne comprends pas, complètement contraire à ma mentalité – mais c'est sans doute parce que je suis un radical d'avant le déluge, un militant de la laïcité inexportable hors d'Europe occidentale -: je ne comprends pas pourquoi, pour manifester mon amitié à quelqu'un, je devrais participer à son culte. Contrairement à Mgr Nicolas du Banat, je crois que je peux entretenir les meilleures relations avec quelqu'un en n'ayant aucune participation à ses activités religieuses, voire en les désapprouvant, de même que je ne brandis pas le drapeau de tous mes amis qui ont des idées politiques opposées aux miennes. C'est sur des principes complètement opposés à ceux défendus par Mgr Nicolas que nous avons fait vivre une nation avec trois confessions et quatre langues.
Ceci dit, il est possible que la pensée et la praxis corneaniennes représentent un grand facteur d'unité nationale, mais elles ne représenteront sans doute pas un grand facteur d'unité panorthodoxe.
J'espère que toutes les conséquences de cette nouvelle position seront tirées, que les conditions pour communier dans les églises orthodoxes seront alignées sur celles pour communier dans les églises catholiques.
J'espère surtout que nous serons enfin autorisés à aller manifester à la manière du métropolite du Banat notre fraternité avec l'ECOF, les vieux-calendéristes, les Vieux-Ritualistes, les autocéphalistes ukrainiens, etc. A moins que, comme le laissent entendre les propos de Mgr Nicolas, il ne soit question de fraternité qu'entre les "grandes" confessions chrétiennes?