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Une église orthodoxe en construction au Luxembourg

Publié : dim. 06 avr. 2008 15:03
par Claude le Liseur
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La communauté orthodoxe grecque du Grand-Duché de Luxembourg construit une fort belle église à Weiler-la-Tour, à une quinzaine de kilomètres de Luxembourg.

Je suis toujours reconnaissant aux Grecs de montrer, par leurs constructions d'églises, que eux, au moins, ne se considèrent pas comme des touristes de passage dans les pays où ils font souche.

Photographies prises le 11 février 2008 vers 15 heures.

Publié : mar. 08 avr. 2008 9:41
par Anne Geneviève
Y a-t-il des célébrations en luxembourgeois ou uniquement en grec ?

Publié : sam. 19 avr. 2008 15:56
par Claude le Liseur
Anne Geneviève a écrit :Y a-t-il des célébrations en luxembourgeois ou uniquement en grec ?
À ma connaissance, uniquement en grec. Mais quel exemple d'enracinement dans le seul fait de construire un lieu de culte, quand on compare à la politique suivie par certaines Églises ethniques présentes dans nos pays!

Vous savez que ce n'est que depuis 2005 environ que nous disposons de tous les livres liturgiques orthodoxes en version française, et ceci par le travail d'un seul homme, l'archimandrite Denis Guillaume. Alors, on risque de devoir attendre beaucoup plus longtemps pour avoir tous les livres liturgiques traduits en luxembourgeois, langue dont l'émergence littéraire est de toute manière beaucoup plus récente que celle du français, puisque la littérature d'expression luxembourgeoise n'a vraiment pris son envol qu'avec les oeuvres de Méchel (Michel) Lentz (1820-1893), Dicks (1823-1891) et Méchel (Michel) Rodange (1827-1876). Le chef d'oeuvre de Rodange, Renert oder de Fuuss am Frack an a Maansgréisst, qui est actuellement disponible dans une très belle édition annotée par Romain Hilgert (Editioun Guy Binsfeld, Luxembourg 1995, 256 pages), date de 1872. Alors, comme les orthodoxes sont lents, l'attente risque de durer...

Dans son utile ouvrage Parlons luxembourgeois (L'Harmattan, Paris 2004), le professeur François Schanen ne donne guère d'informations sur l'usage liturgique du luxembourgeois chez les catholiques romains et les protestants du Grand-Duché. Page 221, il se contente d'écrire: « Au culte catholique, les trois langues officielles [i.e. luxembourgeois, français et allemand -NdL ] ont leur place. » Il serait donc intéressant de savoir dans quelle mesure les autres communautés religieuses utilisent le luxembourgeois plutôt que l'allemand et le français.

Cette question est intéressante parce qu'elle aide aussi à déterminer le moment où un idiome n'est plus perçu comme un dialecte, mais comme une langue. Nul doute que dans le cas du Luxembourg, la tentative d'annexion par le IIIe Reich a beaucoup contribué à valoriser le statut du francique luxembourgeois comme moyen de se différencier de l'Allemagne. On notera au passage ce paradoxe que, si le francique luxembourgeois est considéré dans le Grand-Duché de Luxembourg comme une langue à part entière, officialisée par la loi du 24 février 1984, il est considéré en France - où la langue est parlée dans la région de Thionville - comme un dialecte dont la forme écrite serait l'allemand, opinion contre laquelle 90% des Luxembourgeois se sont élevés lors du fameux recensement du 10 octobre 1941, en pleine annexion de fait (cf. Gilbert Trausch e.a., Histoire du Luxembourg, Privat, Toulouse 2003, p. 249).

Par exemple, à ma connaissance, en Alsace, aussi bien protestants que catholiques ne célèbrent qu'en allemand et en français, jamais en alsacien. C'est bien un indice, parmi d'autres, que l'alsacien ne parvient pas à obtenir un statut supérieur à celui d'un dialecte.

La situation en Suisse alémanique est bien décrite par le docteur Stich dans son Parlons schwytzertütsch, L'Harmattan, Paris 2001, pp. 36 s.: « Dans les villes, l'allemand domine encore largement les cérémonies tout entières. Dans les bourgs (et faubourgs) et les villages, certaines prières (comme la prière universelle juste après le Credo), le sermon et les annonces paroissiales sont souvent en alémanique, comme pour le catéchisme et l'Histoire sainte à l'école. L'allemand se maintient pour l'ordinaire de la messe et les lectures de l'Ancien et du Nouveau Testament, pour lesquels on a toujours préféré une langue élevée, cérémonielle et archaïque. » Cet exemple montre très bien comment les choix en matière de langue liturgique traduisent la perception d'un idiome comme un dialecte d'une autre langue, ou comme une langue indépendante.

Savez-vous qu'il existe un lien important entre le Luxembourg et la plus importante figure de l'Orthodoxie occidentale de ces 150 dernières années? C'est à Ehnen, village luxembourgeois, sur la Moselle, que l'archiprêtre Wladimir Guettée a passé les denières années de sa vie. Il s'était réfugié dans ce pays, francophone et tolérant, pour fuir l'atmosphère d'intolérance religieuse et de papisme militant du régime de l'Ordre moral du maréchal de Mac-Mahon et du prince de Broglie (1873-1877), régime qui entraîna en représailles dès 1880 une politique anticléricale de la part de la nouvelle majorité. Replié à Ehnen, le docteur Guettée y dirigea jusqu'en 1892 sa revue L'Union chrétienne, imprimée depuis 1870 à Bruxelles, donc en Belgique, autre pays francophone plus tolérant et moins agité que la France.

Signalons au passage que, dans les premiers numéros de L'Union chrétienne, publiés alors que Guettée n'était pas encore orthodoxe - sa conversion devait intervenir en 1861 -, un des contributeurs, sous le pseudonyme d'Ignotus, n'était autre qu'Alexis Khomiakov (1804-1860). Khomiakov représente le cas rare d'un écrivain russe qui a écrit une partie de son oeuvre directement en français dans le but délibéré de présenter un point de vue orthodoxe au public de langue française. Longtemps introuvable, son livre L'Église latine et le protestantisme au point de vue de l'Eglise d'Orient a été réédité, avec un appareil critique, par les éditions Xenia à Vevey en 2006 dans le silence assourdissant de ceux qui se sont arrogé le droit de parler au nom de l'Église orthodoxe dans nos contrées (cf. http://www.editions-xenia.com/livres/khomiakov/ ).

Père Wladimir mourut à Ehnen le 22 mars 1892 et fut inhumé le 23 avril 1892 au cimetière des Batignolles, à Paris, où il attend depuis une glorieuse résurrection.
Cf. en particulier Jean Besse, Un précurseur. Wladimir Guettée, Monastère orthodoxe Saint-Michel, Lavardac 1992, pp. 148 s.
Je m'étonne d'ailleurs qu'aucun orthodoxe francophone n'ait eu l'idée d'organiser un pèlerinage à Ehnen en souvenir de celui à qui nous devons tant.

Publié : dim. 20 avr. 2008 7:36
par Anne Geneviève
Merci pour toutes ces précieuses précisions, Claude.

ENTREE SOLENNELLE EN LA NOUVELLE EGLISE SAINT-NICOLAS...

Publié : lun. 28 avr. 2008 2:06
par Silouane
ENTREE SOLENNELLE EN LA NOUVELLE EGLISE SAINT NICOLAS AU LUXEMBOURG

Le dimanche 20 avril, Dimanche des Rameaux, la paroisse orthodoxe des SS. Anargyres du Luxembourg (Patriarcat Oecuménique) a fait son entrée solennelle dans ses nouveaux bâtiments, son église nouvelement construite, au cœur du village Weiler-la-Tour, près de la ville de Luxembourg.

La solennité s’est déroulée à l’occasion de la célébration des Matines de ce jour, suivies de la Petite Bénédiction des eaux et de la Divine Liturgie, présidée par Mgr Athénagoras de Sinope, évêque auxilliaire du Métropolite de Belgique (Patriarcat Œcuménique), en concélébration avec le Père Eleftherios Anyfantakis (recteur de la paroisse du Luxembourg). De nombreux fidèles venus de toutes parts de la région avaient tenu à participer à cette journée historique.

Après la Divine Liturgie, l'Evêque Athénagoras prit la parole et a félécité le Père Eleftherios, les membres du conseil paroissial et tous les fidèles et a souhaité qu'il aur toujours autant de monde aux célébrations des offices divins. La consécration de l’église aura prochainement lieu sous la présidence de Son Eminence le Métropolite Pantéléimon de Belgique et Exarque des Pays-Bas et du Luxembourg La nouvelle église sera dédiée à Saint Nicolas de Myre, le Thaumaturge.

La festivité se termina par une réception. Une journée de grande réjouissance pour tous ceux qui étaient présents. La paroisse fut fondée vers 1980.
Source: http://www.orthodoxia.be/Z-Nouvelles/Lu ... urgie.html

Publié : jeu. 08 mai 2008 19:29
par Jean-Mi
lecteur Claude a écrit : Signalons au passage que, dans les premiers numéros de L'Union chrétienne, publiés alors que Guettée n'était pas encore orthodoxe - sa conversion devait intervenir en 1861 -, un des contributeurs, sous le pseudonyme d'Ignotus, n'était autre qu'Alexis Khomiakov (1804-1860). Khomiakov représente le cas rare d'un écrivain russe qui a écrit une partie de son oeuvre directement en français dans le but délibéré de présenter un point de vue orthodoxe au public de langue française. Longtemps introuvable, son livre L'Église latine et le protestantisme au point de vue de l'Eglise d'Orient a été réédité, avec un appareil critique, par les éditions Xenia à Vevey en 2006 dans le silence assourdissant de ceux qui se sont arrogé le droit de parler au nom de l'Église orthodoxe dans nos contrées (cf. http://www.editions-xenia.com/livres/khomiakov/ ).
parlant d'A.S. Khomiakov, j'ai publié (je pense pas trop mal réalisée) une traduction libre de droits dans La Voile n° 4
http://www.orthodoxes.net
ne pas s'arrêter aux détails qui tuent, merci ;-) - seul compte le texte du grand Khomiakov.. celui qui transmet est médiocre, comme à son habitude.

XB!

Jean-Mi

Re:

Publié : lun. 09 mars 2015 10:46
par Claude le Liseur
Anne Geneviève a écrit :Y a-t-il des célébrations en luxembourgeois ou uniquement en grec ?
Le site orthodoxie.com donne un lien vers le site du journal luxembourgeois Luxemburger Wort, qui a publié un article en français, abondamment illustré, sur l'Orthodoxie dans le Grand-Duché:

http://orthodoxie.com/la-foi-cest-la-co ... uxembourg/

Bien que l'article ait l'honnêteté de présenter deux convertis à l'Orthodoxie (une Luxembourgeoise, épouse du prêtre de la paroisse russe, et un Français), tout ceci reste très ethnique: Russes, Grecs, Serbes et Roumains. Il n'est fait à aucun moment état de célébrations ou de lectures en luxembourgeois, ni même en allemand.

Il y a une bonne quinzaine d'années, un prêtre de l'Eglise orthodoxe russe hors frontières m'avait dit que le prêtre de la paroisse russe de Luxembourg avait construit son église lui-même, mais j'ignorais que l'histoire fût aussi émouvante (cf. l'interview de la presbytera Emilie Poukh par le Luxemburger Wort).

On ne peut qu'une fois de plus constater l'extrême lenteur des orthodoxes à traduire leurs textes liturgiques, et la chance que nous avons eue, nous francophones, de bénéficier du travail de l'archimandrite Denis (Guillaume) d'éternelle mémoire.

Ce n'est pas faire injure à la langue luxembourgeoise que de constater que le suédois est une langue beaucoup plus parlée et au rayonnement culturel beaucoup plus grand (pensons à Strindberg, à Selma Lagerlöf,à Ingmar Bergman, mais aussi à Tove Jansson, suécophone de Finlande et créatrice des inoubliables Moumines qui font le bonheur des petits et des grands à travers le monde depuis 1946). Et bien, j'ai récemment appris que ce n'est qu'en 2014 qu'a été achevée la traduction de l'office de Noël en suédois, par des paléohimérologites de Suède. Cette lenteur est d'autant plus irritante que l'Eglise orthodoxe de Finlande a aussi dans sa juridiction une partie de la minorité suécophone de Finlande (j'ai donné dans un autre fil l'horaire des célébrations en suédois à Helsinki). Alors, si une langue qui a au moins 9 millions de locuteurs, une culture prestigieuse, une littérature au rayonnement international et qui est en plus langue officielle d'une Eglise orthodoxe territoriale attend depuis des décennies que soit terminée la traduction de tous les textes liturgiques, le luxembourgeois, porteur d'une culture certes respectable mais sans l'aura de la culture suédoise, et de surcroît parlé par moins d'un million de personnes, risque d'attendre encore quelques siècles. Nous croyons avoir l'éternité devant nous... mais, quand le fils de l'Homme reviendra sur Terre, y trouvera-t-il la foi (Lc 18,8)?