Gabadonia a écrit :J'ai connu des anciens calendaristes grecs et des membres de l'Eglise hors frontière qui me soutenaient que les églises orthodoxes actuelles n'avaient plus la grâce de l'Esprit Saint. Les reproches que les Grecs faisaient à leur hierarchie sont quand même assez fondées. Mais à partir de quand une église orthodoxe cesse de l'être ? De même, les conciles iconoclastes se réclamaient également de l'Esprit Saint. Y a-t-il un critère autre que subjectif pour en juger ?
Les Eglises « VCO » ont pour appuyer leur propos un problème épineux à résoudre : celui de leurs fractionnements par schismes successifs et anathèmes mutuels.
Leur éclatement en groupuscules divers est suffisant pour leur fermer la bouche et reste la meilleure preuve que leurs errances les a coupées de l’Eglise.
Quant à l’Eglise russe hors frontière elle s’est réunifiée avec Moscou après le schisme interne qui l’a coupée des Vitalystes. Je ne pense pas que ce soit de cette réunification qu’ ait surgi subitement la Grâce divine qu’elle récusait au patriarcat de Moscou et qu' elle lui reconnaît maintenant, ainsi qu'à toutes les Eglises orthodoxes en communion avec ce patriarcat. A moins qu'elle ne prétende l'avoir apportée dans le trousseau de mariage...
On peut reprocher beaucoup de choses aux juridictions patriarcales historiques concernant la praxis. Mais rien concernant le dogme. Pour qu’une Eglise orthodoxe perde la Grâce il faudrait que les prises de positions individuelles de tel ou tel ecclésiastique soient institutionnalisées et reçues par tous.
Même les propositions scandaleuses de Balamand restent lettre morte. Voir par exemple l’intervention de Lecteur Claude sur ce sujet en date : 16.05 13h31 (reportée sous le nom d’Antoine) à la rubrique Balamand le: Mer 30 Juil 2003 17h 45
Pour répondre à votre question il y a effectivement des critères objectifs : l’universalité de l’Eglise, sa Catholicité, l’invariabilité du dogme, le respect du rite, la Tradition.
Vous trouverez beaucoup de choses sur le forum ne serait qu’en faisant une recherche sur le mot "dogme".
(Recherchez par "message" et non par "rubrique" dans le choix de recherche qui vous est proposéau bas de la grille.)
La réponse d’Anne Geneviève est aussi juste que lapidaire :
Le seul critère qui me vient à l'esprit, c'est la cohérence, l'unanimité des conciles : "ce qui a été cru toujours et par tous" dans l'Eglise.
Cette citation est extraite du "Commonitorium" de St Vincent de Lérins . Elle définit la Tradition de l'Eglise. Elle fait l'unanimité des Pères.
Pour illustrer cette réponse voici un texte de Khomiakov extrait de :
« L’Eglise latine et le protestantisme au point de l’Eglise d’Orient »
publié par les Editions Xenia, p93-97.
(Il faut lire ce livre )
La foi est la suite d'une révélation admise comme telle; elle est la croyance à un fait invisible manifesté par un fait visible : mais elle n'est pas une croyance purement logique et rationnelle ; elle est bien plus que cela. Elle n'est pas un acte de la raison seule, mais un acte de toutes les puissances de l'intelligence saisie et subjuguée dans ses plus intimes profondeurs par la vivante vérité du fait révélé. Elle n'est pas seulement pensée ou sentie, mais pensée et sentie à la fois. En un mot, elle n'est pas la connaissance seule, mais la connaissance et la vie en même temps.
[…]
L'examen lui-même, par la multiplicité des données comme par son but, qui est la vérité vivante et non pas seulement logique, exige donc l'emploi de toutes les forces de l'intelligence dans la volonté comme dans la raison, et l'examen intime de ces mêmes forces. Il doit pour ainsi dire, non seulement prendre en considération l'univers visible, mais la puissance et la pureté de l'organe visuel. Son point de départ est donc le plus humble aveu de sa faiblesse; car il faudrait non point un orgueil satanique, mais une démence sans nom, pour que l'homme s'attribuât aussi bien la perfection morale que la perfection de la raison, et c'est cependant ce qu'il devrait faire pour s'attribuer l'indépendance individuelle, vu que dans ce système l'ombre du péché implique déjà la possibilité de l'erreur, ou plutôt sa nécessité dans le cas où l'homme se permettrait une confiance excessive dans ses propres forces ou dans les dons de la grâce qui lui ont été accordés personnellement. La Vérité ne peut donc exister que là où est la sainteté sans tache, c'est-à-dire dans la totalité de l'Église universelle, qui est la manifestation de l'Esprit divin dans l'humanité.
Bien des hérésies avaient troublé le monde chrétien dès son origine. Les apôtres n'avaient pas encore terminé leur carrière terrestre que déjà l'erreur avait séduit beaucoup de leurs disciples. Plus tard, chaque siècle avait augmenté le nombre des hérésies, telles que le sabellianisme, le montanisme et tant d'autres. Enfin le nestorianisme, l'eutychianisme avec leurs différentes ramifications et surtout l'arianisme – qui, comme on le sait, a été la cause occasionnelle du schisme romain – avaient enlevé à l'Église une multitude de ses fidèles. Ces hérésies peuvent-elles renaître? Non. Le dogme qu'elles attaquaient, tout en étant implicitement renfermé dans la tradition ecclésiastique, n'avait pas encore reçu une définition complètement claire, et l'erreur était possible pour la faiblesse de la foi individuelle. Par la volonté de Dieu, la grâce de son Verbe éternel, et l'inspiration de l'Esprit de vérité et de vie, le dogme a été défini dans les conciles et l'erreur en ce sens est devenue impossible même pour la faiblesse individuelle. L'incrédulité est possible, mais l'arianisme ne l'est plus. Il en est ainsi des autres hérésies. Elles étaient des erreurs dans le dogme révélé soit de la nature intime de Dieu, soit de ses rapports avec la nature humaine, mais tout en faussant la doctrine traditionnelle, elles prétendaient lui rester fidèles. Elles étaient des erreurs plus ou moins coupables, mais des erreurs individuelles qui n'attaquaient pas le dogme de l'universalité ecclésiastique et voulaient prouver leur vérité par le consentement de tous les chrétiens. Le romanisme, en remplaçant l'unité de la foi universelle par l'indépendance de l'opinion individuelle ou diocésaine – car l'admission de l'infaillibilité papale n'est venue que plus tard comme je l'ai montré – a été la première hérésie contre le dogme de la nature de l'Église ou de sa foi en elle-même. La Réforme n'a été qu'une continuation de cette même hérésie sous une apparence différente.
Telle est la définition de toutes les sectes de l'Occident, et une fois définie, l'erreur de leur doctrine n'est plus possible pour les membres de l'Église.
En résulte-t-il qu'ils sont à l'abri de toute erreur? Nullement: autant vaudrait dire qu'ils sont à l'abri de tout péché. Une telle perfection n'appartient qu'à la totalité vivante de l'Église et ne peut être donnée à aucun de ses membres individuellement. Quel est en effet l'homme qui puisse être sûr de ne jamais donner une interprétation erronée soit à la Parole écrite, soit à la tradition vivante qui sont les expressions de l'Esprit divin dans l'Église? Celui-là seul aurait droit à une telle infaillibilité qui pourrait se dire l'organe vivant de l'Esprit de Dieu. S'ensuit-il que l'erreur est possible en fait de foi pour le chrétien orthodoxe? Non: car le chrétien par sa foi dans l'Église universelle réduit sa propre croyance dans les questions qui n'ont point encore été clairement définies à l'état d'opinion personnelle – ou d'opinion locale si elle était commune à tout un diocèse. Cependant cette erreur d'opinion, tout en étant sans danger pour l'Église, n'est point innocente dans le chrétien. Elle est la marque et la conséquence d'une erreur ou d'une faiblesse morale qui rend jusqu'à un certain point l'homme indigne de la lumière céleste, et elle ne peut, comme tout péché, être effacée que par la miséricorde divine. La foi du chrétien doit être aussi pleine de crainte que de joie et de reconnaissance. Qu'il prie ! qu'il demande la lumière qui lui manque ! et qu'il n'ose se tranquilliser ni comme le réformé qui dit: « Bah! je me trompe peut-être, mais j'ai de bonnes intentions et Dieu m'en tiendra compte ainsi que de ma faiblesse », ni comme le romain qui dit: « Bah, je me trompe peut-être, mais qu'importe? Le pape sait la vérité pour moi, et je me soumets d'avance à sa décision. »
Note d’Antoine:
Il serait erroné de penser que cette attitude soulignée par Khomiakov est aujourd’hui dépassée. Elle a trouvé de nombreuses illustrations sur ce forum dans les interventions de catholiques romains. Par exemple dans la rubrique "Deux articles intéressants" le Ven 15 Avr 2005 13:12 cet échange avec Thomas qui écrivait :
«Quant à cet important prélat croate récemment béatifié, je suis bien certain que l'Eglise ne lui aurait pas accordé cet honneur s'il y avait le moindre doute sur son rôle dans les évènements tragiques auxquels il fut mêlé durant la seconde guerre mondiale.»
Et auquel il a été répondu:
«Voilà le fruit de la papolâtrie. Tout est déjà préjugé et le dossier tabou est scellé. Vous êtes certain avant même de savoir. Alors que dire de l'examen d'une disposition dogmatique!? Vous avez déjà votre réponse qui vous évite toute étude: Vous êtes certain que "l'Eglise catholique romaine ne lui aurait pas accordé le moindre intérêt si ce dogme ne contenait pas la Vérité" Le pape a dit "je suis infaillible" or comme le pape est infaillible cela prouve bien qu'il est infaillible.»
[…]
Comme la Réforme n'est qu'une continuation et un développement du romanisme, je dois d'abord parler de nos rapports avec ce dernier. Un rapprochement est-il possible? La réponse ne peut être que négative. La vérité n'admet pas de compromis.
[…]
Je le répète, le romanisme peut admettre une pareille fusion; mais l'Église ne connaît pas de compromis dans le dogme de la foi. Elle exige l'unité parfaite, de même qu'elle ne peut donner en échange que l'égalité parfaite; car elle connaît la fraternité, mais ne connaît pas la sujétion. Il n'y a donc pas de rapprochement possible à moins d'un retour complet sur l'erreur de plus de dix siècles.
Note d’Antoine :
Là encore Khomiakov ne se trompait pas.
On voit par exemple dans les propositions catholiques romaines de réunification la naissance d’une Eglise à deux dogmatiques. Une dogmatique du 1er millénaire fidèle à la foi apostolique et une adhésion facultative à la dogmatique romaine du 2ème millénaire.
Ainsi en vous reportant à la rubrique Immaculée conception, vous trouverez les déails dans les messages du Mer 18 Mai 2005 1h 54 et Ven 20 Mai 2005 22h52
« La proposition faite aux Anglicans est la suivante : Les Ktos ont prononcé des dogmes. Si vous n’étiez pas en communion avec eux au moment où ils ont été prononcés vous ne serez pas obligé d’en croire le contenu et de le considérer comme une vérité de foi . En revanche vous ne considèrerez pas que ces dogmes sont contraires à la Foi Chrétienne donc des hérésies.
Question :
Tous les nouveaux baptisés qui entrent dans le catholicisme après la promulgation de ces dogmes tombent-ils sous la même loi que ceux qui étaient dans une autre confession au préalable? Que devient la signification d’un dogme ? Ceci ne devra-t-il ne s’appliquer qu’aux dogmes de l’Immaculée conception et de l’Assomption ou à tous les dogmes en général ?
La communion ne repose-t-elle pas depuis toujours sur une même confession de la foi ?
On se demande pourquoi continuer un dialogue stérile avec des théologiens catholiques qui ont un sens de l’Eglise inversement proportionnel à celui de la papauté.»
Un concile peut-il combler l'abîme qui sépare le schisme de l'Église? Non; car il faut qu'il soit déjà comblé pour qu'un concile soit possible. Des hommes imbus d'opinions erronées ont pu prendre part à des conciles oecuméniques et revenir à la vérité ou persister dans l'erreur et par là se séparer de l'Église: mais malgré leurs erreurs dans les dogmes les plus fondamentaux de la foi, ils ne niaient pas le droit divin de l'universalité ecclésiastique. Ils espéraient – ils le prétendaient au moins – définir en termes clairs et indubitables le dogme professé par l'Église et obtenir la grâce d'être l'expression de la foi de tous leurs frères. Tel était le but et le sens des conciles. Telle est l'idée renfermée dans l'introduction commune à toutes leurs décisions : « Il a plu à l'Esprit Saint, etc. » Ce n'est pas une prétention orgueilleuse, mais une humble espérance confirmée ou rejetée plus tard par le consentement ou le désaveu de « tout le peuple ecclésiastique » ou « de tout le corps de Christ » comme l'ont dit les patriarches. Il y a eu des conciles hérétiques, entre autres ceux qui ont rédigé le symbole semi-arien, où les évêques signataires ont été deux fois plus nombreux qu'à celui de Nicée, où les empereurs ont accepté l'hérésie, où les patriarches l'ont proclamée, et où les papes s'y sont soumis : car l'apostasie du pape Libère n'est sujette à aucun doute. […] D'où vient donc que ces conciles sont rejetés quoiqu'ils n'offrent aucune différence apparente avec les conciles oecuméniques? C'est de ce que leurs décisions n'ont pas été reconnues pour être la voix de l'Église par « tout le peuple ecclésiastique », par ce peuple où dans les questions de foi il n'y a pas de différence entre le lettré et l'ignorant, l'ecclésiastique et le laïque, l'homme et la femme, le souverain et son sujet, le maître et l'esclave, où quand il le faut, selon la volonté de Dieu, l'adolescent reçoit le don de la vision et l'enfant la parole de sagesse, et le berger illettré démasque et réfute l'hérésie de son savant évêque, afin que tous ne soient qu'un dans l'unité libre de la foi vivante qui est la manifestation de l'Esprit de Dieu. C'est là le dogme qui gît au fond de l'idée même du concile. Or, comment et de quel droit prendra-t-il part au concile, celui qui, comme le réformé, a remplacé la sainteté de la foi universelle par l'indépendance de l'opinion individuelle? ou celui qui, comme le romain, a donné au rationalisme de l'opinion diocésaine les droits qui n'appartiennent qu'à l'inspiration de l'Église universelle? Si la vérité de Dieu a pu se révéler au monde occidental assez clairement pour que cette révélation soit devenue un article de foi sans avoir eu besoin d'être confirmée par l'Orient, à quoi bon un concile? Qu'aura à faire l'ilote grec ou russe auprès de ces vases d'élection, auprès des représentants de ces peuples qui se sont oints eux-mêmes du saint chrême d'infaillibilité? Un concile n'est pas possible, à moins que l'Occident, revenant à l'idée même des conciles, ne commence par condamner son usurpation et toutes ses suites, c'est-à-dire par revenir au symbole primitif et par soumettre l'opinion qui l'avait altéré au jugement de la foi universelle. En un mot, pour qu'un concile soit possible, il faut que le rationalisme qui met la raison humaine ou une garantie quelconque à la place de l'amour mutuel soit clairement compris et condamné. Ce n'est donc point un concile qui comblera l'abîme, car l'abîme doit être comblé avant que le concile puisse se réunir *.
·Note de Khomiakov: Telle est évidemment la conviction du grand Marc d'Éphèse, quand, à l'assemblée religieuse de Florence, il exigeait que le symbole fût restauré dans sa pureté et que la clause intercalée ne fût plus exprimée que comme une opinion hors du symbole. Laissant à Dieu le soin de rectifier l'erreur, il la rendait innocente en ce qu'il l'excluait du dogme, c'est-à-dire de la profession de foi. L'hérésie contre l'Église était rejetée par là même, et la communion redevenait possible. Mais l'orgueil du rationalisme ne voulut pas se condamner.
Suite au texte de Khomiakov il faut aussi relire sur le forum la rubrique suivante :
Saint Ambroise du désert d'Optina et la fin des temps
Olia: Jeu 26 Juin 2003 17:06 texte traduit par
Catherine: Mer 13 Aoû 2003 8:23