Saint Grégoire de Narek - Eglise en Arménie

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Claude le Liseur
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Re: Saint Grégoire de Narek - Eglise en Arménie

Message par Claude le Liseur »

Nikolas a écrit :N'ayant toujours pas eu de réponse à mon précédant message, j'en conclu malheureusement que personne n'est en mesure de me répondre.

Je voudrais aussi poser deux questions à Claude:

Lorsque vous utiliser l'expression "Eglise arménienne grégorienne", dans votre message du 31 Oct 2006 9:09 de ce fil ou encore dans le très intéressant fil "De l'Albanie du Caucase à l'Albanie des Balkans", vous entendez par là Eglise apostolique Arménienne actuelle ?
Claude le Liseur a écrit :J'ai moi-même été pendant près de neuf ans un partisan acharné de la déclaration de Chambésy et de l'union avec les Eglises anciennes orientales. Plus j'ai progressé dans ma connaissance du dossier, plus j'ai déchanté. Et il y a d'autres problèmes que la christologie.
Je suis moi même actuellement très intéresser par ces questions, ayant été pendant plusieurs années passionnés par l'histoire et la vie de l'Eglise d'Ethiopie entre autres. Mais je connais mal les questions théologiques à ce sujet.
Peut être auriez des conseils de lecture à me donner sur le sujet?
Ou pourriez vous faire une analyse de la question sur le forum?

J'ai remarqué que dans le dernier ouvrage de Jean CLaude Larchet, Personne et nature, La Trinité - Le Christ - L’homme , collection « Théologies », Ed. Cerf, il y avait un article sur les fondements et la nature du monophysisme de l’Église arménienne.
Mais ce genre d'article peut il s'appliquer à la théologie des autres églises non-chalcédoniennes?
1re question: oui, "arménien grégorien" est une autre manière de dire "arménien apostolique".
2e question: le texte de Larchet qui avait été publié dans le Messager orthodoxe; le livre de Nina Garsoïan; les monographies qui existent sur chacune de ces Eglises (notamment dans la collection Fils d'Abraham).
3e question: entre nous, je doute fort que l'Eglise apostolique arménienne ait encore une théologie dogmatique. Je pense donc que ce qui concerne l'Eglise arménienne ne s'applique pas aux autres Eglises non-chalcédoniennes, qui peuvent au moins se référer à Sévère d'Antioche et qui me semblent dès lors avoir une position plus solide et moins sujette à variations circonstancielles.
Nikolas
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Re: Saint Grégoire de Narek - Eglise en Arménie

Message par Nikolas »

Nikolas a écrit :J'ai remarqué que dans le dernier ouvrage de Jean CLaude Larchet, Personne et nature, La Trinité - Le Christ - L’homme , collection « Théologies », Ed. Cerf, il y avait un article sur les fondements et la nature du monophysisme de l’Église arménienne.
Ce dernier ouvrage du docteur Larchet doit reprendre je pense les articles publiés dans le Messager Orthodoxe que vous évoqué, car dans la recension sur Orthodoxie.com, l'on peut lire entre autres:
Il reprend ses deux études célèbres sur « La question du Filioque » et « La question christologique. À propos du projet d’union entre l’Église orthodoxe et des Églises non chalcédoniennes », après les avoir actualisées en fonction des publications et déclarations parues depuis leur première édition jusqu’à cette année.
La deuxième étude est complétée par une étude, précédemment parue dans la revue de l’Académie théologique de Moscou mais encore inédite en français, sur les fondements et la nature du monophysisme de l’Église arménienne ».
[...]
http://www.orthodoxie.com/2011/12/-pers ... rchet.html
Je précise aussi que l'on peut lire sur le lien ci-dessous une brève vie de St Grégoire de Narek:
http://orthodoxie.centerblog.net/642853 ... 25-fevrier
Nikolas
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Re: Saint Grégoire de Narek - Eglise en Arménie

Message par Nikolas »

Dimanche 30 Décembre, l'emission Chrétien d'Orient (en général consacrée aux églises uniates) était consacré à l'Eglise Apostolique d'Arménie. Elle n'est hélas visible que durant encore 2 jours.
http://pluzz.francetv.fr/videos/orthodoxie.html
Y sont présenter notamment quelques lieux importants de l'Eglise d'Arménie, dont la fosse où fut jetter st Grégoire, ainsi que des reliques importantes, ou encore des évènements marquants comme la consécration du myrrhon.

L'une des reliques présentée est un bras reliquaire du saint apôtre Thadée (d'après le doc ci-dessous) ou Ananias (d'après le clerc arménien le présentant), que l'on peut apercevoir ici (hélas de dos)
http://www.spectacles-selection.com/arc ... isuels.htm
A la 18-19e minute, la question du présentateur de l'émission est, que signifie le signe des doigts de la main représentée. (Il s'agit de la positionner des doigts lorsqu'un clerc bénit).
Le clerc arménien lui répond : C'est le signe de bénédiction. Les trois doigts levés (index, majeur, auriculaire) signifie la Sainte Trinité, et les deux doigts joints (pouce et annulaire) représente l'union des deux natures du Christ.

Décidement c'est a rien y comprendre dans cette Eglise, entre ceux qui se réclame du monophysisme (comme le montre J.C Larchet dans Personne et nature, La Trinité - Le Christ - L’homme , collection « Théologies », Ed. Cerf, article sur les fondements et la nature du monophysisme de l’Église arménienne.) et ceux qui confesse le dogme Chalcédonien (du moins en apparence), il y a de quoi si perdre.
Eglise apostolique arménienne - monophysite ? - Orthodoxe ? - Dieu seul sait ???
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Jean-Louis Palierne a écrit :On ne peut, ni négliger les différends doctrinaux sous prétexte que nous ne saurions pas où l’Église n’est pas (sous-entendu ; donc elle ne saurait avoir de limites), ni dramatiser l’attitude des leaders en pensant qu’ils ont réussi à créer une “autre Église”, c’est-à-dire une pseudo-église et entraîné avec eux la masse des chrétiens ex-orthodoxes qu’ils ont réussi à duper. Ce phénomène d’entrainement s’est effet produit en Occident, où les chefs des schismes et hérésies latines ont réussi à créer un nouveau type d’hommes et une structure pseudo-ecclésiale (et encore il y aurait beaucoup de réserves à faire, mais on en a déjà abondamment parlé). Mais l’expérience montre que ça n’a pas été le cas dans les Églises anti-xhalcédoniennes, qui s’obstinent à répéter des phrases condamnées et à vénérer des maîtres anathématisés. Mais ils ne sont pas parvenus (et d’ailleurs jamais vraiment tenté) de condtruire un autre type d’homme, vicant dans un autre type d’Église. C’est pourquoi l’Église orthodoxe, tout en maintenant ses condamnations et tout en réaffirmant ses anathèmes, a adopté à l’égard de leurs fidèles, lorsqu’ils viennent rejoindre l’Église orthodoxe, une attitude très compréhensive, qui équivaut à considérer que les querelles dogmatiques avec les anti-chalcédoniens ne sont que des querelles de chefs.

Combien sage était cette réflexion de notre frère Jean-Louis Palierne d'éternelle mémoire!

En effet, d'un côté on ne voit, à vue humaine, aucun espoir d'union entre les Églises "monophysites" et l'Orthodoxie, d'un autre côté, il est aussi réjouissant de voir à quel point leurs fidèles, lorsqu'ils fréquentent nos paroisses, ont les mêmes réflexes et les mêmes attitudes que nous: Jean-Louis avait raison de dire que ces "hérésies"-là, contrairement à la Papauté, n'avaient pas eu pour but de "construire un autre type d'homme, vivant dans un autre type d’Église".
Exemple observé dans une paroisse d'une région rurale de mon pays, avec un prêtre autochtone qui a eu beaucoup à lutter pour y reconstruire une vie liturgique normale après les ravages faits par d'éternels mécontents, qui furent vieux-calendéristes un jour et monophysites le lendemain. Les Serbes, qui constituent l'écrasante majorité des orthodoxes nominaux loin à la ronde, ne viennent pas: les bienveillants disent qu'ils vont dans les grandes villes, là où il y a des églises russes; les neutres que le titisme les a trop déchristianisés; les mauvaises langues qu'on leur dit de ne fréquenter que les paroisses de leur ethnie. Les autochtones ne sont pas très nombreux et ne le seront pas avant longtemps: c'est le syndrome québécois; la région connaissait encore en 1960 un catholicisme qui prétendait régenter toute la société; les masses ont rejeté le bébé avec l'eau du bain, et sont désormais vaccinées contre le christianisme. Alors qui a longtemps constitué le noyau dur de la paroisse? Une poignée de réfugiés de la Corne de l'Afrique, "monophysites", mais avant tout chrétiens fervents. Semaine après semaine, ils sont là, les femmes drapées dans leurs grands voiles blancs, les hommes portant parfois des chemises brodées qui doivent remonter à un très lointain passée biblique. Et, curieusement ou pas, ils préfèrent aller à la chapelle orthodoxe avec laquelle leur Église n'est pas en communion, que dans la chapelle, presque voisine, d'une ecclésiole issue des episcopi vagantes qui se revendique pourtant de la foi "monophysite". Depuis quelques années, les Roumains et les Grecs ont commencé à arriver dans cette région où on ne les voyait pas il y a encore cinq ans; les réfugiés "monophysites" de la Corne de l'Afrique ne représentent plus que le quart de l'effectif de la paroisse orthodoxe, mais, il y a encore trois ans, ce devait être la moitié. L'intégration se fait facilement: les adultes n'ont pas l'habitude de communier et ne se posent donc pas la question de savoir si leur Église d'origine est en communion avec nous ou pas ; quant à leurs enfants, ils les ont fait baptiser par le prêtre orthodoxe. Cette osmose que nous observons à la base, nous ne pourrions pas l'observer avec des luthériens ou des uniates ou que sais-je encore; elle montre à quel point l'observation de Jean-Louis Palierne était judicieuse; tout se passe en effet comme si "les querelles dogmatiques avec les anti-chalcédoniens n'étaient que des querelles de chefs".
Claude le Liseur
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Re: Saint Grégoire de Narek - Eglise en Arménie

Message par Claude le Liseur »

Nikolas a écrit :Dimanche 30 Décembre, l'emission Chrétien d'Orient (en général consacrée aux églises uniates) était consacré à l'Eglise Apostolique d'Arménie. Elle n'est hélas visible que durant encore 2 jours.
http://pluzz.francetv.fr/videos/orthodoxie.html
Y sont présenter notamment quelques lieux importants de l'Eglise d'Arménie, dont la fosse où fut jetter st Grégoire, ainsi que des reliques importantes, ou encore des évènements marquants comme la consécration du myrrhon.

L'une des reliques présentée est un bras reliquaire du saint apôtre Thadée (d'après le doc ci-dessous) ou Ananias (d'après le clerc arménien le présentant), que l'on peut apercevoir ici (hélas de dos)
http://www.spectacles-selection.com/arc ... isuels.htm
A la 18-19e minute, la question du présentateur de l'émission est, que signifie le signe des doigts de la main représentée. (Il s'agit de la positionner des doigts lorsqu'un clerc bénit).
Le clerc arménien lui répond : C'est le signe de bénédiction. Les trois doigts levés (index, majeur, auriculaire) signifie la Sainte Trinité, et les deux doigts joints (pouce et annulaire) représente l'union des deux natures du Christ.

Décidement c'est a rien y comprendre dans cette Eglise, entre ceux qui se réclame du monophysisme (comme le montre J.C Larchet dans Personne et nature, La Trinité - Le Christ - L’homme , collection « Théologies », Ed. Cerf, article sur les fondements et la nature du monophysisme de l’Église arménienne.) et ceux qui confesse le dogme Chalcédonien (du moins en apparence), il y a de quoi si perdre.
Eglise apostolique arménienne - monophysite ? - Orthodoxe ? - Dieu seul sait ???
J'ai beaucoup d'attirance pour la civilisation arménienne et de sympathie pour le peuple arménien. J'ai de l'admiration pour certains aspects de l’Église apostolique arménienne, mais d'autres suscitent franchement ma réticence. Il faut reconnaître que l’Église apostolique arménienne a laissé s'épanouir certains poisons qui se sont déjà infiltrés dans l'Église orthodoxe, mais qui, pour l'instant, sont encore contenus. Je parle de la confusion entre religion et culture et religion et nation et de cette fameuse et dévastatrice notion de diaspora. L'Église arménienne grégorienne répandue à travers le monde ne fait pas de convertis. Elle n'a pratiquement plus de vie monastique. Elle n'a procédé à aucune canonisation depuis plusieurs siècles. Ses positions dogmatiques sont ambiguës. Tout ceci correspond à des tendances qui sont latentes chez nous et qui, à terme, mèneraient notre Église à sa perte (d'autant plus qu'aucune Église locale, même pas la Grèce ou Chypre, ne pourrait survivre grâce à l'équation religion = nation qui, au moins, assure la pérennité de l'Église arménienne). Une Église orthodoxe répandue à travers le monde, mais sans aucune activité de traduction des textes liturgiques ou de mission, sans vie monastique et sans dogmatique, serait vouée à la disparition. Nous devons être vigilants, car certains hiérarques ont, dans un passé récent, tenu des discours qui correspondent à cette hypothèse.

J'étais à l'église arménienne le soir du 24 avril pour la commémoration du génocide de 1915. Pas une parole ne fut prononcée dans une langue autre que l'arménien. L'identité était parfaitement conservée, mais il n'y a avait aucune volonté d'ouverture sur l'extérieur, aucune envie d'attirer à soi. Ce choix peut-il vraiment assurer la pérennité de l'Église arménienne en Europe occidentale sur le long terme?

Un dimanche du Grand Carême, en allant à l'église, j'avais laissé ma voiture près d'une chapelle protestante. En rentrant de la liturgie, je marche devant la chapelle et je me rends compte que celle-ci était désormais mise à disposition d'une paroisse copte. Je rentre dans la chapelle et j'assiste à quelques minutes de la liturgie copte (qu'ils avaient commencée peut-être une demi-heure plus tard que la liturgie à l'église orthodoxe point trop éloignée où je m'étais rendu). Je me rends compte que le chœur s'efforce de chanter en français: l'adaptation des mélodies coptes à la langue française n'est pas encore au point, mais l'effort est là. L'essentiel de la liturgie est célébrée en copte et en arabe, mais un rétroprojecteur projette sur une façade au fond de la chapelle le texte de la liturgie en copte, arabe, et grec, avec une traduction arabe sur une deuxième colonne et une traduction française sur une troisième colonne; on fait aussi un effort pour qu'une personne qui passerait là par hasard puisse comprendre ce qui se passe. Et il ne s'agit pas d'une paroisse à vocation missionnaire: je vois bien que les fidèles autour de moi sont originaires d'Égypte et de la Corne de l'Afrique. Je me dis que là, l'aspect religieux l'emporte sur l'aspect identitaire et qu'ils se sont organisés pour transmettre et durer.

Ces anecdotes ne sont que le reflet subjectif, au travers des impressions éprouvées par ma petite personne, d'une réalité décrite avec sagesse et perspicacité par feu notre frère Jean-Louis Palierne. Ceci explique aussi pourquoi, alors que sur le papier l'Église apostolique arménienne est plus proche de l'Église orthodoxe que le sont les autres Églises préchalcédoniennes (christologie non sévérienne, etc.), en pratique je n'imagine pas des fidèles arméniens venir en masse à une de nos liturgies comme je le racontais tantôt à propos des humbles réfugiés érythréens dans la petite paroisse orthodoxe francophone où j'ai fait mes Pâques.

Je ne fais pas ces constatations pour jeter la pierre aux Arméniens. J'y vis plutôt une mise en garde pour nous.
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