Confession d'Augsbourg et orthodoxie

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Athanase
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Confession d'Augsbourg et orthodoxie

Message par Athanase »

A la lecture de la confession d'Augsbourg, on s'aperçoit qu'aucune mention n'est faites dans ce texte du Filioque. De plus, Cyrille Loukaris ,un patriarche de Constantinople, vers 1620, a publié une confession de foi allant dans son sens. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi l'unité oecuménique n'a jamais pu s'effectuer entre le pro-testantisme(le catholicisme professant) et la Foi orthodoxe? Surtout en sachant que le pro-testantisme adhère aux Six premiers conciles oecuméniques!(325-681)

Merci!
Renaud
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Message par Renaud »

Sans même rentrer dans des considérations doctrinales je dirai que cette unité oecuménique était impossible pour toutes les raisons politiques qui permirent l'apparition de la réforme : les princes allemands et scandinaves , désormais maitre de leurs églises et enfin débarassé de Rome n'aurait certainement pas souhaité les voir s'éloigné de leurs pouvoirs, même pour une simple communion, vers une Eglise ayant pour seule puissance politique la professant était un faible Etat entouré de Tatars.

Notons que je ne parle ici uniquement des luthériens, l'union de l'Eglise orthodoxe avec les calvinistes et la plupart des anabatistes étant tellement utopique que je n'arrive pas à l'envisager.
Athanase
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Message par Athanase »

Et maintenant?
Renaud
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Message par Renaud »

Je ne comprend pas votre interrogation, même si de nombreuses églises protestantes courent après l'oecuménisme et l'esprit du monde, imposant ainsi un relativisme dans la pratique cultuelle ne pensez vous pas qu'il semblerait bizarre aux protestants de penser un jour que la vénération de la Vierge est de anti-chrétienne et le lendemain qu'il s'agit d"une chose naturelle dans l'adoration divine ? De penser le matin que la sola scriptura est le fondement de toute doctrine et le soir que la tradition est le pilier de l'Eglise ?
Athanase
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Message par Athanase »

Renaud a écrit :Je ne comprend pas votre interrogation, même si de nombreuses églises protestantes courent après l'oecuménisme et l'esprit du monde, imposant ainsi un relativisme dans la pratique cultuelle ne pensez vous pas qu'il semblerait bizarre aux protestants de penser un jour que la vénération de la Vierge est de anti-chrétienne et le lendemain qu'il s'agit d"une chose naturelle dans l'adoration divine ? De penser le matin que la sola scriptura est le fondement de toute doctrine et le soir que la tradition est le pilier de l'Eglise ?
Il ne semble pas que ce soit là une interprétation obligée de la Foi byzantine, comme l'exemple de Cyrille Loukaris le manifeste. De plus, l'appel à l'unité ne vient pas du monde mais de Écritures, selon Jn17, Php3/15-16, Eph4/4-7, Ac2/42 etc!... Ainsi, je repose ma question, la confession d'Augsbourg peut-elle avoir des chances d'être reconnue un jour en Foi byzantine?
Antoine
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Message par Antoine »

Il n'ya pas de "foi byzantine" comme vous le prétendez. cCette expression n'a aucun sens. L'Eglise Orthodoxe est la seule et unique Eglise du Christ. Elle a conservé le dépôt de la foi.
Son symbole de foi est celui du concile de Nicée ratifié par tous les conciles oecuméniques qui lui ont succédé.
La confession d'Augsburg, aussi intéressante soit-elle intellectuellement et historiquement, n'est pas un texte fondateur et conciliaire de l'Eglise exprimant "ce qui a toujours été cru par tous et partout".
Il faut rendre à Augsburg ce qui est à Augsburg et à Dieu ce qui est à Dieu.
Pour l'unité il n'ya pas d'autre possibilité que celle qui est offerte aux hétérodoxes de devenir orthodoxes, conformément aux évangiles que vous citez.
Athanase
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Message par Athanase »

Antoine a écrit :Il n'ya pas de "foi byzantine" comme vous le prétendez. cCette expression n'a aucun sens. L'Eglise Orthodoxe est la seule et unique Eglise du Christ. Elle a conservé le dépôt de la foi.
Son symbole de foi est celui du concile de Nicée ratifié par tous les conciles oecuméniques qui lui ont succédé.
La confession d'Augsburg, aussi intéressante soit-elle intellectuellement et historiquement, n'est pas un texte fondateur et conciliaire de l'Eglise exprimant "ce qui a toujours été cru par tous et partout".
Il faut rendre à Augsburg ce qui est à Augsburg et à Dieu ce qui est à Dieu.
Pour l'unité il n'ya pas d'autre possibilité que celle qui est offerte aux hétérodoxes de devenir orthodoxes, conformément aux évangiles que vous citez.
Comment pouvez-vous nous qualifier d'hétérodoxe, puisque nous adhérons aussi et en premier lieu à J-C, tel qu'attesté par l'Écriture Sainte, selon, grosso modo, le canon scripturaire de Laodicée de 364, confirmé par le Quini-sexte de 692, et résumé par le Symbole de Nicée-Constantinople, dans sa version grecque originelle de 381,reçue officiellement en 451 à Chalcédoine, la seule techniquement valide et valable?
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

Je connais très mal le protestantisme, ni son histoire ni son présent. Je ne donne donc qu’une vague impression, et je ne demande qu’à être corrigé. Il m’a semblé que Luther, lorsqu’il est entré en conflit avec l’Église catholique, aurait bien voulu connaître le point de vue des orthodoxes, et même qu’il a tenté d’entrer en contact avec eux. Mais du côté orthodoxe, cette époque était une des pires de son histoire. La domination ottomane était dans sa phase ascendante, conquérante et cruelle. De plus la lettre de Luther au patriarche œcuménique arriva… à un moment où il n’y avait pas de patriarche. Quant à la Moscovie, elle en était encore aux premiers pas. À une autre époque, des discussions auraient peut-être pu se révéler plus positives. Toujours est-il qu’alors l’Orthodoxie ne répondit pas, pas plus à Luther qu’au Concile de Bâle.

Mais il me semble qu’il y avait du côté de Luther des convictions qui auraient bloqué le dialogue. La méthodologie de la Sola Scruptura implique que toute la Révélation est contenue dans des affirmations précises, celles que l’on peut “extraire” de la Sainte Écriture. Mais l’Église a reçu, à sa naissance, une Révélation bien plus vaste. Elle a reçu un ensemble de règles disciplinaires que l’Église s’est transmise de génération en génération et dont elle est loin d’avoir exprimé toutes les implications. Elle n’a pas explicité seulement le Symbole de la foi de Nicée-Constantinople, mais aussi les Canons apostoliques et un certain nombre de décisions conciliaires. Saint Basile, voulant décrire le contenu de cette Tradition non-écrite y place le rite du Baptême, celui de l’Anaphore eucharistique, la bénédiction du Saint-Chrême, la prière (de la Liturgie eucharistique) faite le huitième jour, c'est-à-dire le dimanche, par la communauté debout, tournée vers l’Orient en signe d’attente du Second Avènement. Saint Basile lui-même a écrit toute une œuvre sur le Saint Esprit où il explicite la Révélation du Saint Esprit à l’Église à partir de la formule trinitaire du Baptême pour expliciter un point qui restait encore obscur pour beaucoup. Enfin c’est encore saint Basile qui a fixé une première version de l’anaphore eucharistique, que nous appelons couramment “Liturgie de saint Basile” , dont saint Jean Chrysostome a fixé une seconde version, la “Liturgie de saint Jean Chrysostome. Ces deux textes, que je vous conseille de lire, sont d’une extraordinaire richesse “symbolique” (au sens où les Protestants définissent les textes de foi des diverses confessions).

Il y a aussi une extraordinaire richesse de la Tradition révélée à l’Église qui s’exprime dans l’hymnographie des offices (je vous conseille en particulier de lire l’hymnographie des fêtes de la Mère de Dieu). Et cette Tradition s’exprime également dans l’iconographie. Pour nous ce sont également des formes de la Révélation divine.

Je sais bien qu’il peut paraître étrange pour les intellectualistes conceptuels modernes que nous sommes de parler d’une Révélation quand il s’agit d’un ensemble de textes disciplinaires, de poèmes chantés, de formules rituelles lkiturgiques ou d’images, mais telle est notre foi que l’Incarnation du Fils Unique et Verbe de Dieu déborde la vie d’un homme — qui est à la fois le Créateur et le Prototype du genre humain —, mais devient une immense Révélation, qui a été confiée aux Aopitres entre la Résurrection et l’Ascension du Seigneur, puis transmise par ces Apôtres aux premiers évêques des Églises qu’ils fondèrent et par eux à la succession des synodes provinciaux. Les Conciles — les Conciles œcuméniques, mais beaucoup d’autres Conciles dits “locaux” — et les Pères n’ont par fait autre chose que de défendre contre les hérétiques et d’exprimer un peu plus précisément le contenu de cette Révélation.

Peut-être est-ce parce que je connais très mal le Protestantisme, mais il y a quelque chose que je n’ai jamais compris. Si l’on veut se limiter au principe de la “Sola Scriptura”, comment peut-on délimiter ce qui est vraiment “Scriptura” et ce qui ne l’est pas ? L’Antiquité nous a transmis un certain nombre de textes qui portent des titres vénérables, comme par exemple “l’Évangile de Thomas” ou le “Protévangile de Jacques”. Comment peut-on faire le tri entre ce qui est “scripturaire” et ce qui ne l’est pas ? Les plus anciens manuscrits qui contiennent la totalité de la Bible, Ancien et Nouveau Testaments, sont postérieurs aux premières définitions canoniques de ce Canon des Écritures. Et dans l’Ancien Testament les Bibles protestantes placent à un rang inférieur quelques livres “deutéro-canoniques” contenus dans la Septante. Mais s’ils sont mis ainsi à un rang inférieur, pourquoi ne pas faire de même avec certains “apocryphes du Nouveau Testament. Il me semble que les Protestant ont le souvenir d’une Tradition du Canon des Écritures, mais qu’ils la soumettent à critique. Mais comment peut-on alors peut-on considérer la “Sola Scriptura” comme un ensemble clos formant le socle de notre foi ?

En tout état de cause je crois que la Confession d’Augsbourg procède d’une réaction légitime contre les positions qui dominaient alors dans l’Église latine, mais qu’elle ignore tout ce qui a constitué la richesse de l’Élise. Elle tentait de se reporter à une image exagérément simplifiée de l’Église primitive — et encore en ignorant la saint Chrême, l’anaphore eucharistique et la communion au Corps et au Sang du Sauveur dans les Saints Dons, la présidence de la communauté par un évêque siégeant à l’image et à la place du Christ et avant tout la sainteté de la très pure Déipare, véritablement la Mère du Deu-homme.
Jean-Louis Palierne
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Athanase
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Message par Athanase »

Le Sola Scriptura a été pratiqué par les saints Pères bien avant Luther. D'ailleurs, quel intérêt d'avoir fixé le canon biblique en 364 et en 692 sans sola scriptura ou juxta scriptura? De plus, le Symbole commun de notre Foi, Symbole de Nicée-Constantinople, est norme normée qui distingue les Chrétiens des autres. Tellement qu'il a été prescrit, à Ephèse en 431 et à Sainte-Sophie, en 880, qu'il ne fallait pas composer d'autre symbole. Or, nous adhérons à ce symbole. Comment donc pouvez-vous nous regarder comme des hétérodoxes? :roll:
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

Non, les Pères n’utilisaient point le principe de la “Sola Scriptura”. J’ai donné l’exemple de saint Basile appuyant la foi en la divinité su Saint Esprit sur l’analyse des paroles du rite du Baptême. Quiconque a pratiqué un peu les Pères sait bien qu’ils n’exposent pas leur théologie en se fondant sur une analyse textuelle de la Sainte Écriture, mais sur une expérience transmise. Ce qu’ils trouvent dans l’Écriture c’est la parole du Verbe de Dieu (même dans les Psaumes, même chez les Prophètes de l’ANcien Testament, c’est le Verbe qui parle ou c’est de Lui que l’on parle), mais on la vit et on en vit avant d’y trouver matière à analyse. La révélation de notre foi nous est transmise par la Tradition des saints Mystères. Le Nouveau Testament, l’Évangile, les Béatitudes, les Paraboles, le récit de la Passion, sont destinés à être proclamés devant le peuple, ounertement, c’est le “kérygme”. Les saints Mystères sont (devraient être) célébrés portes fermées, après le renvoi des catéchumènes. C’est alors qu’on dit le “Symbole de la foi”.

Ce n’est pas l’histoire du dogme au courant des premiers siècles qui trouve son reflet dans la Liturgie, pour autant que puissions le savoir, c’est la Liturgie qui inspire le dogme. C’est pourquoi notre foi ne se limite pas à un Symbole, elle n’est pas limitée par la critique textuelle des Saintes Écritures, c’est une expérience infiniment plus vaste.

Je salue avec intérêt le respect des luthériens pour le Symbole de Nicée-Constantinople et pour la Tradition des sept Conciles œcuméniques, mais la foi orthodoxe c’est encore infiniment plus, et elle n’inclut pas la Confession d’Augsbourg. Par exemple si vous ignorez la proclamation de Marie "Théotokos" (je traduis "Déipare") par le Concile d'Éphèse, si vous ignorez le rôle dans l'Église du charisme épiscopal, à l'image et à la place du Christ, l'unique Tête de l'Église, vous êtes peut-être (je le souhaite) sur la voie qui vous mènera à l'Orthodoxie, vous n'êtes pas encore arrivé au bout.

Mais je suis bien d'accord pour dire que les luthériens ne sont pas des calvinistes.
Jean-Louis Palierne
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Athanase
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Message par Athanase »

Le Sola scriptura ou le juxta scriptura, le principe de l'Écriture norme ultime mais non unique de la Foi a bel et bien été utilisé par les Pères (Cf. l'analyse de Marc Lods dans la Revue Réformée et bien d'autres patrologues...). De toutes façons, on ne voit pas l'utilité de la clôture du canon scripturaire par les conciles de Laodicée en 364 ni celui du Quini-sexte en 692, si ce n'est sur la base de ce principe. Donc, le sola scriptura n'est pas qu'une problématique occidentale.

D'autre part, l'interdiction de composer un autre symbole de foi que celui de Nicée-Constantinople indique qu'il est le seul caneva de la Foi accepté par l'Église. Donc, que l'Église se retrouve à l'intérieur du Credo et pas à l'extérieur. Ainsi, les byzantins, les romains et les professants(pro-testants) se retrouvent dans l'Église.

Cyrille Loukaris, patriarche de Constantinople au XVIIe sièlce, a publié une confession de Foi évangélique qui montre que les développements de la Foi de l'Église dans un sens pro-testant n'est pas impossible et ne heurte pas l'orthodoxie de la Foi du credo. Qu'en dites-vous? C'est quand même un appui de taille!

Certes, le principe lex orandi-lex credendi(Rom10/13-17)a son importance dogmatique:mais dans quel sens?

C'est pourquoi, je vous invite à l'analyse commune du Credo pour éclaircir nos points de rencontre. En voilà le texte:


Symbole de Nicée

Nous croyons en un seul Dieu, le Père tout-puissant,
créateur du ciel et de la terre,
de toutes choses visibles et invisibles.
Nous croyons en un seul Seigneur, Jésus-Christ,
le Fils unique de Dieu,
né du Père avant tous les siècles,
Dieu venu de Dieu,
engendré et non créé,
consubstantiel au Père
et par qui tout a été fait ;
qui, pour nous les hommes et pour notre salut,
est descendu des cieux
et s'est incarné par le Saint-Esprit de la vierge Marie
et a été fait homme.
Il a été crucifié sous Ponce Pilate,
il a souffert et il a été mis au tombeau.
Il est ressuscité des morts le troisième jour,
conformément aux écritures :
il est monté aux cieux où il siège à la droite du Père.
De là, il reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts
et son règne n'aura pas de fin.
Nous croyons en l'Esprit-Saint,
qui règne et donne la vie,
qui procède du Père,
qui a parlé par les prophètes,
qui, avec le Père et le Fils, est adoré et glorifié.
Nous croyons l'Eglise une, sainte,
catholique et apostolique.
Nous confessons un seul baptême en rémission des péchés ;
nous attendons la résurrection des morts et la vie du monde à venir.
Amen
Dernière modification par Athanase le dim. 28 mai 2006 17:52, modifié 2 fois.
ampliatus
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Message par ampliatus »

Cher Athanase,

Ce que vous écrivez est très intéressant. Pourriez-vous publier cette confession de foi de Cyrille Loukaris ? Je me souviens qu'il en est parlé dans "les voies de la théologie russe". Je crois que le retour à l'Evangile est un devoir constant pour toutes les Eglises.
Athanase
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Message par Athanase »

Message du modérateur:

Athanase, merci de vous plier aux règles de ce forum et de publier vos textes avec traduction en Français.

Vous voudrez bien également respecter l'Orthodoxie de ce Forum Orthodoxe et vous contenter de poser vos questions sur l'orthodoxie et non pas d'y venir défendre le protestantisme luthérien.

Nous ne sommes pas un forum interconfessionnel.

Vous voudrez bien également arrêter "d'engueuler" vos interlocuteurs par l'emploi outancier de majuscules en caractères gras, très grande taille et de couleur.

Antoine
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

La clôture du Canon eucharistique par le Quinisexte Concile œcuménique ne signifie pas que la foi chrétienne soit contenue dans la Sola Scriptura. Elle comprend beaucoup d’autre chose. Elle ne se limite pas non plus au Symbole de Nicée’Constantinople. Elle comprend beaucoup d’autres choses. Les luthériens acceptent-ils de pratiquer le signe de la Croix ? Les luthériens ont des inspecteurs ecclésiastiques. Je pense qu’il y en a un à Paris. C’est déjà beaucoup d’avoir un “inspecteur” conduisant les pasteurs. C’est un souvenir de la fonction épiscopale de la Tradition de l’Église. Mais est-il ordonné par un synode en communion avec les autres synodes d’évêques orthodoxes ?

Utilisez-vous le Saint Chrême béni par l’évêque pour conférer le sceau des dons du Saint Esprit ? Invoquez-vous l’Esprit Saint pour qu’il descende sur les dons offerts en prémices du jour où le Seigneur viendra en gloire ? (debout et tournés vers l’Orient comme nous le rappelle saint Basile) Commémorez-vous les défunts à chaque Eucharistie, car ils vivent toujours un combat qui prolonge le nôtre ? Commémorez-vous les saints glorifiés par le martyre ? Vénérez-vous les saintes icônes en présentant de la lumière et de l’encens ? Tout cela, et bien d’autres choses encore, est aussi la foi orthodoxe.

J’entends bien que la réception du Canon des Écritures et du Symbole de la foi (= Credo) par les communautés de la Confession d’Augsbourg représente un élément qui différencie profondément ces communautés des autres communautés chrétiennes qui n’acceptent de la Tradition chrétienne que des lambeaux beaucoup plus rudimentaires. Cela montre qu’un développement de la foi des communautés luthériennes à partir de ce socle commun dans un sens orthodoxe n’est pas impossible, certains le font à notre époque et sautent le pas (comme ce fut le cas du regretté Jiri Pelikan, et naguère d’un certain nombre de princesses allemandes entrant par mariage à la cour de Russie l’ont fait aussi et ne l’ont jamais regrettée — avez-vous entendu parler de sainte Élizabeth, le princesse martyre devenue la moniale Marthe ?). Je ne peux que vous invitez à continuer sur cette voie. Vous avez effectivement un appui de taille puisque déjà vous avez conservé l’héritage, qui nous est donc commun, du Canon des Écritures et du Symbole de la foi.

L’image selon laquelle l’Église se trouve “à l’intérieur du Credo” est quelque peu restrictive. Il vaudrait mieux dire que le Credo est le socle de l’Église. C’est à partir de là que tout commence. À la liturgie eucharistique, le diacre dit : « Les portes ! Les portes ! Que les catéchumènes se retirent !» C’est alors que les fidèles se retrouvent entre eux, sous la présidence de l’évêque, et on récite le Credo. Et à la Liturgie chaque fidèle (fidèle < fides = foi) récite le Credo à la première personne du singulier : « Je crois », et non :  « Nous croyons ».

D’autre part les Pères latins du IVème siècle discutèrent longtemps pour savoir comment il faut traduire le néologisme grec homoousion. ils conclurent (avec la participation de quelques confrères grecs) qu’il ne suffisait pas de parler d’une “même substance” que le Père, car il s’agit d’une substance non point semblable qui serait séparée et divisée, mais d’une unique substance commune et partagée : le Père, et le Fils, et le Sainr Esprit partagent et ont en commun une unique Divinité, et tout ce que fait le Fils est consommé par l’Esprit saint, et tout ce que fait le Saint Esprit manifeste le Fils.

Ce pourquoi ils adoptèrent le néologisme latin “consubstantialem”. Je note au passage que cela nous oblige à adopter dans le “Notre Père” pour traduire le grec ton arton ton epiousion, une traduction par “pain substantiel”, car les Pères du Concile de Nicée n’avaient certainement pas oublié le mot épiousion employé par Jésus lorsqu’il forgèrent leur néologisme “homoousion” du Symbole. Nous ne devons pas oublier que nous devons traduire ”homousion” par “consubstantiel” et donc traduire “epiousion” par “substantiel” ou bien par “prosubstantiel".

Je félicite les luthériens qui utilisent un Credo sans “filioque”.

Si les pasteurs luthériens donnent toujours bien le Baptême “au nom du Père, et du Fils et du saint Esprit” (mais est-ce toujours le cas aujourd’hui ?) il est évident que ce Baptême ne doit pas être réitéré, et que l’Église orthodoxe doit donner force spirituelle à ce Baptême impuissant par le saint Mystère de l’onction du Saint Chrême. Ainsi un ex-luthérien pourra-t-il devenir un bon orthodoxe. Il y aura été préparé par le texte du Credo conservé par les luthériens.

Mais dans tout ce que vous dites exprimez-vous un point de vue général de l’ensemble des luthériens, ou bien d’une tendance ou d’une fraction, disons “traditionnaliste” ?

Ces débats ne datent pas d’aujourd’hui, et vous avez raison de rappeler que Cyrille Loukaris, qui était patriarche de Constantinople au XVIIème siècle, avait rédigé une “Confession de foi” qui s’efforçait de tirer l’Orthodoxie dans un sens calviniste. Cette confession provoqua un certain émoi dans l’Église orthodoxe. Peu de temps après un Moldave qui était devenu métropolite de Kiev (à l’époque Kiev se trouvait sous la souveraineté polono-lituanienne, mais sa métropole orthodoxe était suffragante du patriarcat œcuménique), Pierre Moghila (il avait fait une partie de ses études chez les Jésuites) s’efforça de donner une image savante (au sens occidental) de l’Église orthodoxe en rédigeant une autre “Confession orthodoxe” qui utilisait des concepts et des méthodes empruntés à la scolastique latine (par exemple la théorie des sept sacrements)

Ce texte passa dans la Russie moscovite, mais son influence ne s’affirma qu’à partir du XIXème siècle. Mais à cette époque le tsar Pierre le Grand s’efforçait “d’européaniser” et de moderniser la Russie et son Église. Comme conseiller en matière ecclésiastique il avait pour conseiller un certain Théophane Prokopovitch, de formation luthérienne, dont Pierre fit un évêque orthodoxe et qui dota l’Église de Russie d’une structure de type luthérien, dirigée par un “collège” appelé ‘Saint Synode” et administrée par un “OberProkurer” civil. Plus tard l’Église de Russie subit encore l’enfluence d’un Ober mystico-maçonnique, Alexandre Golitsyn, puis le pendule revint au centre avec un excellent métropolite de Moscou, Philarète Drozdov, puis son enseignement théologique fut piloté par l’œuvre d’un homme qui faisait la synthèse entre la scolastique catholique et l’influence luthérienne, s'efforçant de retomber de manière rationnelle sur des positions orthodoxes, Macaire Boulgakov.

Après tout cela l’Église orthodoxe a bien du mal à retourner aux sources patristiques et à se débarrasser du pretige des échelles de valeur occidentales véhiculées par cette succession de textes “symboliques” qui ont peu à voir avec la Tradition.

Heureusement l’Église orthodoxe a toujours été marquée par un grand traditionnalisme liturgique. C’est très important, car pour nous, Lex orandi, Lex credendi. C’est en commentant les paroles et les rites des saints Mystères que la foi peut être conservée. Le “Symbole de la foi” lui-même, avant d’être rangé dans la catégorie de ce que l’esprit moderne appelle “les textes symboliques” était avant tout destiné à un usage liturgique : il devait être récité par le candidat au Baptême lors de la “redditio Symboli”. Il a été fait pour cela.

C’est justement l’abus des textes “symboliques” qui a conduit à une intellectualisation de la foi, à un conceptualisme qui amène l’Église orthodoxe à prendre souvent l’apparence d’un “luthéranisme de rite oriental”.
Jean-Louis Palierne
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Athanase
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Message par Athanase »

Jean-Louis Palierne a écrit :La clôture du Canon eucharistique par le Quinisexte Concile œcuménique ne signifie pas que la foi chrétienne soit contenue dans la Sola Scriptura. Elle comprend beaucoup d’autre chose. Elle ne se limite pas non plus au Symbole de Nicée’Constantinople. Elle comprend beaucoup d’autres choses. J’entends bien que la réception du Canon des Écritures et du Symbole de la foi (= Credo) par les communautés de la Confession d’Augsbourg représente un élément qui différencie profondément ces communautés des autres communautés chrétiennes qui n’acceptent de la Tradition chrétienne que des lambeaux beaucoup plus rudimentaires.. Vous avez effectivement un appui de taille puisque déjà vous avez conservé l’héritage, qui nous est donc commun, du Canon des Écritures et du Symbole de la foi.

L’image selon laquelle l’Église se trouve “à l’intérieur du Credo” est quelque peu restrictive. Il vaudrait mieux dire que le Credo est le socle de l’Église. C’est à partir de là que tout commence. À la liturgie eucharistique, le diacre dit : « Les portes ! Les portes ! Que les catéchumènes se retirent !» C’est alors que les fidèles se retrouvent entre eux, sous la présidence de l’évêque, et on récite le Credo. Et à la Liturgie chaque fidèle (fidèle < fides = foi) récite le Credo à la première personne du singulier : « Je crois », et non :  « Nous croyons ».
Je félicite les luthériens d’utiliser un Credo sans “filioque”.
Vous n'êtes pas sans connaître l'importance capitale du Symbole oecuménique pour notre Foi. Car, un symbole est un signe de reconnaissance et celui de Nicée-Constantinople est le seul signe de reconnaissance entre les Chrétiens.

Or, dans ce symbole, il est dit qu'il faut croire à la Résurrection du Christ conformément aux Écritures. Ainsi, le principe du sola scriptura est-il bien intégré et affirmé dans la Foi chrétienne de toujours, puisque si nous devons croire au sola scriptura pour affirmer le point capital de notre Foi-la Résurrection de J-C(Icor15), alors qu'en sera-t-il du reste? Ce qui nous convie à affirmer que le canon biblique reconnu par Laodicée, confirmé par le Quini-sexte, est bien la norme ultime de notre Foi. Sinon, que signifierait notre symbole?

D'autre part, nous utilisons le symbole sans filioque, non que le filioque ne soit pas scripturaire mais parce qu'il fausse le sens de ce symbole. En effet, ce symbole a pour but d'affirmer la divinité des personnes avant d'établir leur distinction. Ainsi, structurellement,le symbole commence par affirmer la divinité totale du Père, puis celle, consubstantielle, du Fils et , enfin, celle de l'Esprit Saint qui émane ultimement du Père seul. C'est pourquoi, on peut affirmer que le Saint-Esprit est adoré et glorifié avec le Père et le Fils. L'adjonction maladroite du filioque à ce symbole le fait tomber dans le dithéisme et l'idolâtrie, car on ne comprendrait pas de qui tirerait sa divinité le Saint-Esprit.

De plus, ce schéma du symbole est résolument biblique puisque la révélation se fit d'abord du Père, puis du Fils et enfin, à Pentecôte, de l'Esprit Saint. Néanmoins, la théologie trinitaire latine est fondée scripturairement et suppose la théologie trinitaire grecque. Comme l'abstrait suppose le concret. Ces deux façons d'aborder le mystère ne se confrontent pas mais se complètent. Nous acceptons donc le filioque sans l'inclure dans le Symbole de Nicée-Constantinople mais en acceptant celui de s. Athanase.

Il faut donc comprendre que le schisme de 1054 fut de responbsabilité romaine, techniquement et ecclésiastiquement.

Ainsi, Rome fit-elle aussi schisme avec la Foi évangélique en 1564 en répudiant la confession d'Augsbourg inaltérée de 1530. La question qui demeure est de savoir si l'unité chrétienne entre pro-testants et orthodoxes est possible à partir du symbole? Je crois que c'est possible, puisque rien ne saurait s'opposer au symbole sans exclure de la chrétienté. Aussi, il serait judicieux d'analyser ici le symbole pour voir s'il n'existe pas une possibilité de véritable oecuménisme entre nos deux mouvances, comme la confession de Cyrille Loukaris le laisse présager!

P.S. Je suis un pro-testant ou catholique professant conservateur. Je répudie le libéralisme théologique qui n'est que de l'apostasie!
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