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Laïcité, voile islamique et franc-maçonnerie

Publié : sam. 13 sept. 2003 8:49
par eliazar
Une dépêche de l'AFP, parue cette nuit, donne des indications précieuses sur les imbrications du principe légal de laïcité de la République Française avec d'une part les sociétés de pensée (en ce cas plus précisément la Franc-Maçonnerie) qui ont été à la base de son adoption à la fin du XVIIIème siècle - et d'autre part les problèmes posés par l'admission ou non de manifestations de foi religieuse dans les établissements de l'Éducation Nationale.

Je me suis permis d'en donner le texte, sans commentaires, dans ce même Forum; on pourra donc s'y reporter.

Ces problèmes sont naturellement liés à l'importance démographique accrue de la composante musulmane dans le peuple français, mais sont dans une certaine mesure concomitants avec la diminution massive de plus en plus accélérée de l'ancienne composante chrétienne de ce même peuple.

Notre société est en pleine mutation, dans la mesure où la composante dite musulmane est en train de se tourner de plus en plus vers une conception fondamentaliste de sa religion (même si actuellement encore ce mouvement ne se manifeste qu'à travers des groupes relativement petits) - tandis que sa composante chrétienne va au contraire vers une dissolution de plus en plus accélérée de son attachement à la foi proprement dite, accompagnée d'une perte de plus en plus massive des connaissances théologiques ou catéchétiques de base, et d'un glissement continu vers de petits groupes tournant à la secte, à l'ésotérisme de bazar, y compris la prolifération du recours fréquent au marché (prospère) des cartomanciennes, des voyantes, des gourous de toutes sortes.

Dans le même temps, ce recours aux superstitions (qui était naguère relativement important dans les milieux d'origine musulmane) est en train de s'étioler dans la population musulmane traditionnelle, de plus en plus gagnée par le désir d'affirmer une identité islamique "pure et dure".

Ce double mouvement potentiel, spectaculairement inverse, du christianisme (ou de ce qu'il en reste) et de l'islam (en constante progression), ne fait pas seulement de l'islam la deuxième religion actuelle en France (cette notion de "deuxième religion" masquant des différences de courants internes qui pour le moment ne sont pas encore négligeables), mais pose aussi pour nous orthodoxe une question de prospective à laquelle nos évêques ne semblent pas s'être intéressés jusqu'ici: qu'en est-il, au regard de l'orthodoxie, des perspectives ouvertes par ce qu'on appelait hier une "France terre de mission" ?

Plus radicalement, la dynamique missionnaire que manifeste de plus en plus l'islam ouvre-t-elle potentiellement la voie à une dynamique parallèle de la part des églises orthodoxes ? Ou bien resteront-elles frileusement repliées sur une conception post-colonialiste de la mission (en caricaturant : "convertir les petits Chinois" - ou les "petits nègres", ou les Aléoutiens, etc.) interdisant d'affirmer sa foi (et les exigeances de cette foi) de manière trop voyante, "déplacée" ?

Et dans cette perspective, quelle est la part (non encore prise en compte par la composante orthodoxe de notre société) du clivage social qui s'accroît également - entre une religion chrétienne vaguement synonyme de bourgeoisie tiède, notamment plus ancrée dans une relative ruralité (ou dans un "provincialisme", par contraste avec les masses urbaines caractéristiques des grandes métropoles) et un islam encore assimilé pour un certain temps aux couches les plus défavorisées du prolétariat des grandes villes?

Je crois que nous devrions nous intéresser à l'émergence de ces problèmes,dans ce Forum. Qu'en pensez-vous, les uns et les autres?

Publié : ven. 15 juil. 2005 17:08
par Anne Geneviève
Un fil ouvert par Eliazar et qui n’a pas eu de réponses. Mais j’ai envie de le faire remonter car le problème qu’il expose demeure et prend même de l’ampleur. Aujourd’hui, en région parisienne, les gamines voilées ne choquent plus dans le paysage : il y en a trop, le regard s’habitue. A tort car les jeunes femmes voilées, celles que l’on a mariées dans l’islam pur et dur, ont, elles, un regard résigné, accablé et angoissé qui me donne envie de mordre. Ou de hurler. Un vieux reste de féminisme ? Non, un vieux reste de dignité chrétienne. Les fervents de l’islam se veulent muslim, soumis, serviteurs ou esclaves de Dieu (dans les langues anciennes, c’est le même mot) mais toute la merveille de la venue du Christ s’exprime lorsqu’Il dit : « Je ne vous appelle plus serviteurs mais amis ». Et c’était déjà en germe dans le judaïsme avec la métaphore des fiançailles de Dieu avec son peuple. Relire les prophètes. L’islam radical représente une régression et même loin en deçà d’Abraham, une régression à la religion suméro-chaldéenne où l’homme est créé pour faire le boulot que les dieux n’ont pas envie de se farcir, bref à l’état d’esclave. Devant cette régression, l’insistance sur le monothéisme au lieu du polythéisme de Sumer n’a peut-être pas tant d’importance.
Les progrès de cet islam radical, s’il parvenait à se maintenir, signifieraient ramener de force l’humanité, dans sa relation à Dieu, à un type de soumission qui a au moins 5 à 6000 ans d’âge. Il effacerait toute la progression des alliances, de Noé au Christ. Ce n’est pas rien ! Et pour notre époque déboussolée, quelle tentation ! Pas de dogmes, des pratiques qui donnent des repères simples dans la vie – simplistes même, mais baste, d’autant plus séduisants, un sentiment d’appartenance fort. Il ne vous en coûtera que votre liberté…
Dans la fable du chien et du loup, tout le monde ne se sent pas l’envie de repartir avec le loup, si famélique et si crotté… C’est rassurant, le collier.
Oui, c’est forcément en deçà d’Abraham qui, s’il recevait les anges à sa table, parlait à Dieu « en direct ». Pour Mohammed, sa révélation vient d’un ange. Pas de dialogue avec Dieu : une prière hommage, prosterné comme un suppliant, un prisonnier ou un esclave dans les civilisations du Croissant Fertile.
Il faut que les orthodoxes se réveillent. L’enjeu n’est pas futile : c’est toute l’eschatologie qui est en cause, toute la pédagogie divine et l’incarnation du Christ qui nous ouvre la prodigieuse espérance de la déification. Et on laisserait, pour être bien gentil et bien œcuménique, l’humanité dégringoler hors de cette espérance ? On laisserait se fermer les portes que le Christ a ouvertes (et même brisées, celles de l’enfer) ?
Ne nous leurrons pas. Si, faute d’effort missionnaire, nous laissons l’islam s’installer et prendre la première place en Europe occidentale, qui portera le flambeau chrétien ? Faut-il compter sur la Russie, attaquée de toute part par les groupes musulmans radicaux qui tiennent des régions entières (lire les dépêches de l’agence Itar-Tass) au sud de la Volga ? Ou sur l’Eglise du Japon ?

Publié : ven. 15 juil. 2005 17:42
par Irène
Succinctement, très succintement, j'aurai - pour ce problème - la même réponse que celle du fil "Théologie et science : anthropologie" : que peuvent faire des citoyens isolés face à cette déferlante dont les dangers n'ont pas été anticipés par les pouvoirs publics ...

Anne Geneviève, cette question a déjà été abordée sur le forum dans d'autres fils : nous allons avoir du travail pour collationner tout cela !

Mais on peut continuer sur ce fil qui examine la situation sous un angle plus religieux.

Islam : ce n'est pas de la politique tout court...

Publié : ven. 15 juil. 2005 18:48
par Anne Geneviève
Oui, je me suis aperçue après coup qu'il y avait de nombreux fils sur cette question. Mais je crois essentiel de ne pas en rester à la politique (les Lumières vs la liberté spirituelle ; maman, j'ai peur du terrorisme !) ou à l'histoire (Constantinople ou les Balkans sous le joug ottoman et ce qui s'en suivit), même si la politique et l'histoire sont angoissantes et suggèrent des lendemains très désenchantés. Il me semble essentiel de voir cette question de l'islam, de ses tendances, de ses évolutions possibles, etc. d'une manière théologique.
Je suis frappée par le type de recherche spirituelle des jeunes. Ce n'est pas un hasard si l'islam radical recrute dans la jeunesse. J'ai vu des jeunes ktos qui avaient exactement le même regard que les gamines à foulard et, il y a deux jours, j'ai discuté avec un jeune juif qui portait ouvertement la kippa et les franges. Lui aussi avait ce regard un peu spécial, mélange de ferveur, de défi et d'une indéfinissable jouissance. Or tous ces jeunes avec qui j'ai pu parler ont la même demande: celle d'une loi, de préférence divine, d'obligations strictes et de fautes bien définies. Ils sont d'autant plus radicaux qu'ils manquent de repères et ce n'est pas le monde actuel qui va leur en donner !
Le Dieu qu'ils recherchent est d'abord un législateur strict.
Peuvent-ils faire la différence entre pardon et laxisme ? Entre justice et vengeance ? Ce n'est pas sûr.
Et l'islam a cultivé dès l'origine la conversion forcée, de préférence par les armes... Conséquence encore de sa régression spirituelle vers la vieille Chaldée. J'y reviendrai.