a ce qui veut parler sur muhamed et l'is...

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Antoine
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Message par Antoine »

Nicolas, voici un article qui présente une ébauche de réponse à ta question.Il était paru dans la revue Critique n° 671 en avril 2003 et avait fait grand bruit à l'époque.

On trouve ce texte de Remi Brague dans une meilleure mise en page sur le site:
http://www.revue-texto.net/Parutions/CR/Brague_CR.html
car là les traductions comparées sont en vis à vis alors que sur le forum elles sont l'une en dessous de l'autre.

Néanmoins pour le cas où ce site viendrait à disparaître en voici le texte:
Je reproduis en gras et en italique ce qui se trouve ainsi dans le texte original pour faciliter la compréhension.
Dans les passages qui présentent des comparaisons de traduction, j'ai également pris la liberté de faire précéder la traduction de R. Blachère du chiffre 1), puis en dessous, celle de Luxenberg du chiffre 2).

De plus on peut facilement imprimer à partir du forum alors qu'à partir du site la totalité du texte n'est pas prise en compte à l'impression.

Le texte fait une dizaine de pages 21-29,7.
Il m'a paru important et significatif de le présenter intégralement au forum sans faire de coupures ni de résumés qui auraient mélangé ma propre lecture du texte à sa livraison.




LE CORAN : SORTIR DU CERCLE ? [*]

Rémi BRAGUE
Université Paris 1[/b]
(Texte paru dans Critique, avril 2003, n° 671, p.232-251)

Compte rendu de :
LUXENBERG, Christoph. Die syro-aramâische Lesart des Koran. Ein Beitrag zur Entschlûsselung der Koransprache. Berlin : Das Arabische Buch, 2000, IX-311 p. ;
PRÉMARE, Alfred-Louis de . Les Fondations de l'Islam.. Entre écriture et histoire. Paris : Le Seuil, 2000, 535 p.


Un livre récent, dû au savant allemand Christoph Luxenberg [1], a peut-être effectué une véritable percée dans le domaine des études coraniques. C'est pourquoi il m'a semblé valoir la peine de le présenter au public français, qui risquerait de passer à côté [2]. Je suis conscient de n'avoir pour ce faire qu'une légitimité bien légère : si j'ai appris l'allemand, je suis moins arabisant que frotté d'arabe, et j'ignore le syriaque. En conséquence, mon rôle ne peut être ici que provisoire, en attendant mieux.

Au XIXe siècle, on disait par plaisanterie que la première langue sémitique était l'allemand, tant les auteurs allemands ou de langue allemande (qu'on pense au hongrois I. Goldziher) avaient une position dominante dans les études bibliques et islamologiques. Depuis lors, l'anglais a pris le dessus comme dans bien d'autres domaines, et pour les mêmes raisons.

Cependant, il n'est guère possible de ne pas utiliser les travaux des auteurs de langue allemande. Mais que dis-je, on y arrive très bien ! Dans bien des travaux, il suffit de parcourir la bibliographie pour s'en convaincre...

Quant aux vraies langues sémitiques, il faudrait être aussi savant que Luxenberg en arabe (littéral et dialectal) et en syriaque pour discuter de façon efficace les résultats de ce livre de pure philologie, et de lecture ardue. C'est très loin d'être mon cas. Je ne puis donc prétendre ici que présenter ses résultats, sans pouvoir m'engager dans la discussion critique approfondie qu'ils méritent et exigent [3].

En effet, nous sommes peut-être en présence d'une révolution, d'une révolution tranquille, et opérée sans jamais enfler le ton. Pour comprendre à quel point, il faut esquisser un panorama de la situation actuelle.



Le problème

Nous croyons disposer aujourd'hui de bien des traductions du Coran. Il y en a de tous les genres, du « scientifique » ennuyeux au poétique supposé « à l'orientale », en passant par l'édifiant ou l'étymologico-fumiste. Et les libraires, dit-on, ont été surpris de voir les ventes s'enfler subitement, après le 11 septembre. Il est de fait que le Coran se vend bien. De là à soutenir qu'on lirait ce que l'on a acheté, il y a un pas, car l'entreprise est ingrate et demande de la part du lecteur non spécialiste un exceptionnel sens du devoir [4]...

Reste à savoir si c'est bien le Coran que l'on lit à travers ces traductions. Et déjà, si c'est bien le Coran que les traducteurs on traduit. Outre les difficultés que doit affronter tout traducteur, il en est en effet une spécifique, préalable, et la plupart du temps invisible. C'est, pour le dire en un mot, de ne traduire que le Coran. Et non pas l'interprétation que la tradition des commentateurs médiévaux a donnée de certains mots ou passages difficiles -- et ils ne manquent. De ce point de vue il est d’ailleurs ironique de constater que le musulman arabophone qui lit « son » Coran, qui l'écoute réciter, ou qui le récite lui-même, est exactement logé à la même enseigne que le philologue occidental.

On croit lire écouter, traduire le Coran. En réalité, on ne fait que répéter les interprétations des commentateurs qui à partir de la fin du IXe siècle, en particulier à partir de Tabari (m. 923) ont cherché tout simplement à venir à bout du tissu d’obscurités qui constitue le « Livre clair. » C'est déjà un grand mérite, de la part d’un traducteur de ne pas en dissimuler l’existence derrière de beaux effets de style, vernis lisse, miroir qui ne renvoie que l’image de l’interprète lui-même et interdit de pénétrer jusqu’au sens.

Les traducteurs sérieux sont partis d'une décision de principe, qui es d'éviter l'anachronisme en tentant de n'expliquer le Coran qu'à partir de lui-même et de l'état de la langue arabe telle quelle était au w siècle. On peut en nommer trois, par ordre chronologique : vers l'anglais, Richard Bell [5], vers le français, Régis Blachère [6], vers l'allemand, Rudi Paret [7]. Des travaux consciencieux de ce genre sont les seuls qui méritent le nom de traductions du Coran. Mais ils infestent le texte de toutes sortes de parasites graphiques : parenthèses explicatives, points d’interrogation avouant le caractère hasardeux d’une interprétation, crochets indiquant ce que l'on a ajouté au texte pour le rendre intelligible. D'où chez le lecteur un découragement certain et la tentation de se rabattre sur des rendus plus lisibles, au besoin en dissimulant sa paresse derrière une invocation au génie poétique des « orientaux ».


Origine et date du Coran

Par ailleurs, nous ne savons pas quand le texte coranique l'on cherche ainsi à comprendre, puis à traduire a pris sa forme définitive.

La tradition musulmane raconte la belle histoire d'un texte noté sur des supports de fortune - les omoplates de chameau ont fait rêver bien des savants. Les divergences entre lecteur voire le risque de disparition violente de ceux-ci pendant les guerres de conquête auraient rendu nécessaire une fixation par écrit. Une commission réunie par le calife Uthman aura établi un texte définitif envoyé aux principales bases des conquérants, les autres textes étant alors brûlés.

Les chercheurs occidentaux s'écartent de cette tradition, dans deux directions contraires. Deux livres anglais parus la même année 1977 représentent deux tendances extrêmes.

Pour John Wansbrough, le Coran n'aurait atteint sa forme canonique que deux siècles après la mort de Mahomet [8]. à l'inverse, selon John Burton, il aurait été rassemblé du vivant même de celui-ci [9].

Pourquoi ne pas en rester à la tradition, telle qu'on vient de l'esquisser ? Parce qu'elle ne rend compte que d'une partie des témoignages, qui se contredisent les uns les autres. Le livre de A.-L. de Prémare [10] nous aide à démêler cet écheveau. Il a en particulier le mérite de réunir et de présenter en traduction, dans un appendice, le matériau brut des textes sur lesquels il se fonde (P, 395-468), dont ceux qui rapportent la collection du Coran (P, 444-468). Ces données sont «étonnamment contradictoires» (P, 282) quant à l'identité des personnes qui ont effectué la collecte des textes, de celles chez qui il étaient en dépôt, ainsi que sur la nature de ceux-ci, recueil ou feuilles séparées (P, 285).

Il semble que la distinction entre le Coran comme Livre de Dieu d'une part, et d'autre part les propos attribués à Mahomet (hadith) ne se soit mise en place que progressivement. Le Coran et certains hadiths seraient comme deux cristallisations d'un même magma. Le Livre de Dieu n'était considéré à l'origine « que comme une sélection des propos de Muhammad » (P, 283). « Le Coran est un ensemble de hadîth sélectionnés pour la récitation publique, et qui est destiné à représenter le livre de Dieu. La constitution d'un Coran semble avoir constitué pour une grande part en cette composition sélective. Ce fut l'une des tâches assumées par les clercs de l'islam tout au long du r siècle de l'hégire » (P, 318).

C'est cette « indécision initiale » (P, 319) qui explique par exemple que l'on retrouve dans le Coran des prescriptions figurant dans le hadith, mais sous une forme telle qu'elles ne sont compréhensibles que dans un contexte postérieur à la vie de Mahomet. Ainsi, les déclarations tardives de celui-ci, qui ont été regroupées dans ce qu'on appelle les Discours de l'adieu, recommandent d'observer une trêve rigoureuse pendant les mois sacrés ; ces dispositions sont atténuées dans le Coran lui-même car le contexte nouveau des guerres de conquête aurait rendu absurde le respect de cette trêve (P, 320).

Du coup, la question de l'auteur du Coran n'est pas close. Pour l'islam officiel, cet auteur est Dieu et lui seul, en aucun cas Mahomet, qui n'a fait que recevoir passivement une dictée surnaturelle. Les non-Musulmans ont coutume de parler de Mahomet comme de l'auteur réel, éventuellement inspiré, des textes coraniques. Les traditions anciennes contiennent cependant de quoi suggérer un travail collectif, non seulement de recueil, mais dans la rédaction de certains passages. Dans cette rédaction, un grand rôle semble avoir été joué par le futur calife Omar, dont le fils aurait dit : « aucun événement ne se produisait, opposant l'opinion des gens à celle de Omar, sans que le Coran ne soit révélé selon l'opinion de Omar » (P, 313-316).


Faits nouveaux

Une science s'est élaborée dans l'Europe de la Renaissance, puis des Lumières, enfin dans le cadre de l'historicisme du XIXe siècle, la philologie. Elle a été appliquée d'abord aux textes des classiques grecs et latins, puis généralisée à tout texte, même moderne ou contemporain, profane ou sacré. L'Ancien et le Nouveau Testament sont disponibles dans des éditions critiques qui se fondent sur la prise en compte systématique des variantes contenues dans tous les manuscrits anciens et témoignages indirects connus. Or, pour le Coran, nous ne possédons rien de ce genre. Les travaux de T. Nöldeke et de ses élèves ont abouti à une monumentale Histoire du Coran, mais l'édition qui devait en sortir n'a pas vu le jour.

Certains manuscrits sont connus, mais dispersés, et encore peu exploités. D'autres n'ont été découverts que récemment. C'est en particulier le cas d'une trouvaille effectuée en 1972 lors de la reconstruction de la grande mosquée de Sanaa, au Yémen. Une grande quantité de manuscrits de corans ont été découverts. Certains sont très anciens, probablement de la fin du VIIe siècle. Des échantillons des résultats commencent à être publiés, bien timidement [11]. Les versions de ces manuscrits présentent des particularités intéressantes par rapport au texte aujourd'hui officiel. Cela concerne l'ordre des sourates, mais aussi certaines graphies.

La tradition musulmane connaît depuis longtemps l'idée selon laquelle le Coran aurait été révélé selon plusieurs - on dit le plus souvent « sept » - façons de lire. Le mot dont on se sert (ahruf] est l'un des pluriels ambigus d'un mot lui-même ambigu, et il est difficile de préciser de quoi il s'agit exactement. S'agirait-il de voyelles ? Les auteurs musulmans ont recueilli des volumes entiers de « lectures » possibles de certains mots. Ce n'est que par exception qu'ils modifient le sens. En tout cas, les manuscrits de Sanaa présentent des variantes qui ne coïncident pas toujours avec celles que la tradition accepte.

Par exemple, le même signe peut y noter les deux voyelles longues a et i. Rien n'empêche donc de prononcer certains noms propres coraniques de la même façon que leurs équivalents bibliques : Abraham, comme lisait déjà Ibn Mas ùd (P, 304 n. 8) et Satan, et non plus Ibrahim et Shaytan. On comprend aussi pourquoi le nom arabe de la Torah (Tawrâh) s'écrit d'une façon telle qu'il faudrait prononcer tawriyah [12]


Vaincu par sa conquête

II importe aussi de se représenter la distance qui sépare le contexte dans lequel écrivaient historiens et commentateurs et celui dans lequel le Coran a été écrit. Entre le vif et le IXe siècle, la situation des arabes a en effet changé de façon radicale, et avant tout grâce à l'islam. Unifiant les tribus en une force unique, celui-ci a permis en un siècle la conquête arabe. Celle-ci est le plus ancien fait historique que nous puissions constater sur la base de témoignages contemporains des faits. De cette conquête, nous ignorons les causes, et les ignorerons peut-être toujours [13]. Mais les résultats sont là : moins rapide que celle d'Alexandre le Grand, elle fut plus vaste et surtout plus durable. Elle est sans cesse remémorée comme une success-story miraculeuse, propulsant des bédouins faméliques d'une vie misérable « de sable et de poux (raml waqaml) à une opulence fantastique [14]. Elle soumit les rivages méridionaux de la Méditerranée, et tout le Moyen Orient, y compris des régions de très vieille culture comme la Perse ou la Mésopotamie.

Or, un paradoxe se présente. Ce qui fut une bénédiction pour ceux qui firent l'histoire devient le malheur de ceux qui l'écrivent. Le monde des débuts de l'islam fut oublié par ceux qui bénéficièrent de son succès [15]. En effet, les musulmans ne se penchèrent sur leur passé qu'à partir du IXe siècle, soit deux siècles après les événements. Et surtout, après des changements d'une ampleur énorme. Politiquement, d'abord : deux révolutions, celles qui mirent au pouvoir les deux dynasties omeyyade (661), puis abbasside (750). Sans compter le passage, à l'intérieur de la première, des Sufyanides au Marwanides (685), qui fut l'occasion d'un coup de barre capital : l'empire fut désormais administré en arabe, et non plus dans la langue des peuples conquis et par les familles de fonctionnaires déjà en place. Il eut sa monnaie propre, sans image et avec une inscription islamique. Il revendiqua une identité religieuse propre, symbolisée par le Dôme du rocher, à Jérusalem (691) (P, 298-301). Ce sont d'ailleurs les inscriptions sur ce monument qui représentent les plus anciens textes en style coranique que nous puissions dater - « en style coranique », car ils ne coïncident pas toujours exactement avec les lectures du Coran que nous possédons actuellement.

Toutes ces évolutions historiques ont arraché les musulmans au contexte d'origine dans lequel le Coran avait été écrit. En particulier, les grammairiens et commentateurs ne sont pas des Arabes du Hedjaz, mais des Persans vivant à Bagdad. Ils n'ont aucune idée de la société et du système juridique de l'Arabie d'avant l'islam. Et ils ne connaissent pas d'autre langue sémitique que l'arabe. Leurs interprétations continuent à guider celles des contemporains. C'est donc faire un grand pas en avant que de dessiner une image précise de leur univers intellectuel, afin de voir de quel point de vue ils considèrent le texte qu'ils commentent [16].

Mais un fait massif reste là, qui excuse bien des soupçons : les plus anciennes sources musulmanes datées que nous possédions sur l'histoire des débuts de l'islam ne remontent pas à moins de deux siècles des événements qu'ils prétendent raconter. En revanche, les quelques sources non-musulmanes contemporaines des faits nous en présentent une vue assez différente. Ces sources sont depuis peu commodément accessibles, grâce à un gros volume qui les recueille et en donne une traduction anglaise [17].


Le cercle

Quant au Coran, ses plus anciens manuscrits présentent un texte réduit à un simple ductus, qui ne note que les consonnes. Encore est-il dépourvu des points diacritiques que l'arabe écrit comporte aujourd'hui, nul ne sait exactement depuis quand. L'ajout de ceux-ci, seuls ou par deux ou trois, au-dessus ou en dessous de la ligne, permet de distinguer des consonnes à l'écriture identique. Par exemple, les cinq consonnes b, t, th, n, et y sont représentées par un simple décrochage qui indente une ligne continue. Les signes indiquant les voyelles brèves ne seront ajoutés que bien après.

« On ne sait pas vraiment sur l'initiative de qui, quand et dans quelles circonstances précises furent établies les règles de ponctuation et de vocalisation car plusieurs traditions contradictoires existent sur ce sujet, et l'on parle d'autres personnes qui furent les premières à introduire les points et les voyelles au-dessus et au-dessous des caractères » (P, 296, 458-460). A haute époque, ceux qui indiquent les deux voyelles longues a et i sont encore, soit omis, soit remplacés par une simple indentation. L'ambiguïté qui en résulte est extrême.

On suppose à l'accoutumée qu'une tradition orale continue permettait de la dissiper. Luxenberg montre qu'il n'en est rien : l'existence d'une tradition de ce genre rendrait incompréhensibles bien des récits dans lesquels Mahomet se déclare incapable d'expliquer certains versets, ou donne son aval à plusieurs lectures différentes (L, 19s., 61, 63, 226). Prémare aboutit à la même conclusion : le contexte de la formation du Coran est celui d'une culture de l'écrit : « nous ne sommes pas ici dans un univers de traditions orales, mais dans un univers de scribes compositeurs » (P, 312 et cf. 322, 337).

Les commentateurs prétendent éclairer les versets à partir du contexte dans lequel ils auraient été révélés (asbâb al-nuzûl). Or, nous ne savons rien, ce qui s'appelle savoir, des circonstances en question. Il se peut fort bien qu'elles aient été inventées justement pour rendre compte de textes devenus incompréhensibles : les ouvrages islamiques « pour une large part, bâtirent cette biographie [de Mahomet] en vue d'expliquer différents passages du Coran » (P, 10). De la sorte, ce sont les bizarreries du texte coranique qui expliquent les récits qui sont venus les enrober, plutôt que l'inverse.

Les œuvres des poètes antérieurs à l'islam constituent une autre référence des commentateurs. Ceux-ci essayent d'expliquer des termes coraniques par leur usage chez les anciens poètes païens ou chrétiens. Il faut d'abord accorder que ces textes remontent bien à haute époque, ce qui est loin d'être démontré (P, 251). C'est ce qu'a rappelé Taha Hussein dans un essai qui fit scandale en son temps, Sur la poésie antéislamique (1927). Ensuite, il arrive souvent qu'on explique ainsi l'obscur par le plus obscur : on interprète un passage d'un poème anté-islamique à la lumière du texte du Coran que l'on veut élucider (L, 13s., 210).

Le recours aux lexicographes et grammairiens arabes nous entraîne dans un nouveau cercle. Ceux-ci font entrer dans leurs compilations des acceptions tirées d'interprétations du Coran. Les dictionnaires arabes comportent encore des entrées qui ne font que consacrer un contresens (L, 88, 113, 153, 170).

Sortir du cercle

La méthode de C. Luxenberg est purement philologique, Elle consiste à expliquer les passages obscurs du Coran sans faire confiance aux commentateurs, grammairiens et lexicographes. Cela ne veut pas dire qu'il les ignore, car il y renvoie constamment. Cela veut dire qu'il les utilise à rebrousse-poil.

Tout dépend en effet de savoir en quelle langue le Coran est écrit. En arabe, comme il le dit lui-même ? Certes. Mais quel arabe? La discussion est déjà ancienne. S'agit-il de la langue commune qui rendait possible les joutes littéraires des poètes anté-islamiques (Nöldeke) ? Ou d'une langue métisse avec une forte proportion d'éléments du dialecte mekkois (Vollers, P. Kahle) [18] ?

Pour Luxenberg, l'arabe du Coran n'est certainement pas l'arabe officiel, tel qu'il sera constitué par les grammairiens des siècles suivants (L, 101). Il s'agit d'une langue intermédiaire, résultat d'un mélange entre l'arabe et le syriaque qui, depuis plusieurs siècles, constituait la langue de culture dans l’espace syro-irakien (L, 299). À tel point que jusqu'au toponyme la Mekke a une étymologie araméenne : la ville basse [L, 300).

Les grammairiens raisonnaient à partir de l'arabe classique dont le Coran était d'ailleurs supposé constituer le chef d’œuvre inimitable. Ils cherchaient donc à expliquer des tournures qui sont en fait, non pas du mauvais arabe, mais du bon syriaque (L, 41, 118). Luxenberg se reconnaît dans ce domaine un précurseur en la personne d'Alphonse Mingana, lui-même chrétien oriental, qui avait attiré l'attention sur les tournures syriaques dans le Coran dans un article qui semble ne pas avoir attiré l'attention [19].

Luxenberg propose donc une méthode en plusieurs étapes [L, 10-15). On ne passe à la suivante que si la précédente n'a pas permis d'élucider un passage obscur. Face à un tel passage, on cherchera successivement : 1) chez les commentateurs musulmans, des interprétations non retenues par les traducteurs occidentaux; 2) dans les dictionnaires arabes classiques, des sens négligés par les commentateurs ; 3) des racines syro-araméennes homonymes aux racines arabes mais dont le sens est différent de celles-ci. 4) On examine ensuite le ductus sans tenir compte des points diacritiques en restant dans le registre arabe; 5) on applique la même méthode, mais en cherchant une racine syro-araméenne ; 6) on retraduit l'arabe en araméen et examine la sémantique au niveau de celui-ci; 7) on cherche des sens méconnus de l’arabe dans les dictionnaires syriaque-arabe du xi° siècle. Enfin, 8) on cherche si de l'arabe authentique n'aurait pas été orthographié à la syriaque.


Les résultats

L'application de cette méthode confère aux textes un sens plus convaincant. Les phrases se coulent plus harmonieusement dans leur contexte. Bien des détails bizarres venant comme des cheveux sur la soupe, s'évanouissent. Il me faut en donner ici quelques exemples. Je ne puis fournir que les résultats, sans présenter le raisonnement toujours érudit et souvent subtil qui y mène et qui seul les rend plausibles. Le danger de ce procédé est de donner une impression d'arbitraire. On sera bien inspiré de ne pas se hâter de réfuter Luxenberg en se fondant sur ma présentation nécessairement mutilée.

Je présenterai d'abord la traduction française la plus sérieuse, celle de Régis Blachère, puis je traduirai de l'allemand celle de Luxenberg, en mettant en italique les mots dont il restitue le sens à partir du syro-araméen.

Abraham est sur le point de sacrifier son fils (XXXVII, 103-104) :

1) Or quand ils eurent prononcé le
salam et qu'il eut placé l'enfant
front contre terre...

2) Quand ils eurent fini (de préparer
le bûcher) et qu'il (Abraham) l'(son
fils) eut (placé) attaché sur le
bûcher
(L, 148).


Dans la sourate de Marie, Jésus à peine né s'adresse à sa mère pour la consoler (XIX, 24) :

1) Mais l'enfant qui était à ses pieds
lui parla : ne t'attriste pas ! Ton
Seigneur a mis à tes pieds un
ruisseau.

2) II l'appela dès après son accou-
chement
: ne t'attriste pas ! Ton
Seigneur a rendu ton accouche-
ment légitime
(L, 120).


Enfin, une meilleure compréhension des outils syntaxiques permet de restituer dans son articulation logique une période entière. En voici une, qui figure en XII, 116-117 :

1) Parmi les générations qui furent
avant vous, pourquoi les gens de
piété qui interdirent le scandale
sur la terre et que Nous sau-
vâmes, ne furent-ils que peu
nombreux, alors que les injustes
suivirent le luxe où ils vivaient et
furent coupables ? Ton Seigneur
n'était pas capable de faire injus-
tement périr ces cités alors que
leurs habitants pratiquaient la
sainteté,

2) Si, parmi les générations qu
furent avant vous, il n'y avait pas
eu que peu d'(hommes) vertueux-
desquels nous avons sauvé
quelques-uns - afin de résister au
mal sur la terre, de sorte que ceux
qui prévariquaient persévérèrent
dans leurs débordements et
furent pécheurs, alors, toi
Seigneur ne serait pas venu pour
anéantir les villes, si leurs habi-
tants avaient été justes (L, 189).


De la sorte, l'allusion au récit biblique devient plus claire Abraham marchande avec YHWH (Genèse, 18, 23-32), il s'avère que Sodome n'abritait même pas dix justes, ce pour quoi YHWH la détruit (ib., 19, 24s.), mais épargne Lot et sa famille (ib., 19, 16) (L, 190).


Adieu aux houris

Luxenberg examine à fond un exemple particulièrement intéressant, quoique le résultat de son enquête soit négatif.

Tout le monde connaît les houris, les vierges du paradis qui alimentent tant de fantasmes. Leur existence n'est d'ailleurs pas sans poser quelques difficultés. Les textes eux-mêmes ne sont pas clairs, à commencer par le mot « houri » lui-même. Il vient de hùr in, communément compris comme signifiant « blanches "quant aux" yeux». Or, de beaux yeux ne sauraient être blancs. Seuls ceux des aveugles le sont (XII, 84). Les commentateurs expliquent que le blanc des globes fait ressortir le noir des iris (L, 232). Avec cette logique, on dira que Marilyn Monroe était brune, quand sa peau bronzée faisait ressortir le blond de ses cheveux... Quant à la cohérence du texte, il est dit que les croyants entreront au paradis avec leurs épouses (XXXVI, 56; XLIII, 70), des épouses terrestres, donc. Les pauvres devraient-elles tenir la chandelle pendant que leurs maris s'ébattent avec les houris ? (L, 229).

Les chrétiens tirent souvent argument des houris pour reprocher aux musulmans leur paradis grossièrement matérialiste. Certains musulmans s'en tirent en allégorisant discrètement. D'autres, comme Avicenne, rétorquent que le paradis promis aux chrétiens - la vision de Dieu - pourrait certes convenir à un peuple de philosophes, mais qu'il est trop pâle pour motiver des guerriers et qu'il faut au peuple du tangible [20].

Luxenberg ne craint pas de désespérer Billancourt et nettoie le Coran de ce qu'il considère comme indigne de lui. À propos d'un passage communément compris comme signifiant que personne n'a défloré les houris, on lit un des très rares passages qui, dans ce livre froid, trahissent une émotion : « quiconque lit le Coran en y comprenant un tant soit peu quelque chose ne peut s'empêcher, à ce passage, de se prendre la tête dans les mains. Ce n'est pas la seule ignorance qui est ici responsable. Il faut déjà une bonne dose de culot, dans un livre saint, ce qu'est le Coran, pour s'imaginer quelque chose de tel et pour le prêter au Coran. Nous voulons donc nous efforcer de restituer sa dignité au Coran » (L, 249 et voir aussi 225, 259, 275).

Sous le traitement philologique de Luxenberg, les prétendues houris s'évanouissent. Les passages que l'on Interprétait en ce sens s'avèrent parler non de femmes, mais de... raisins blancs.

Mettons une fois de plus en parallèle les traductions reçues et celles de Luxenberg. Ainsi, XLIV, 54 et LU, 20 :

1) Nous les aurons mariés à des
Houris aux grands yeux.

2) Nous les installerons confortable-
ment sous des
(raisins) blancs,
(clairs) comme le cristal
(L, 226).


Ce passage me permet de donner un exemple pas trop technique de la méthode de Luxenberg. « Nous les avons mariés » traduit zawwajnâhum. Luxenberg suppose rawwahnâhum, dont le ductus ne se distingue de celui du premier mot que par des points diacritiques absents des manuscrits. Le mot fut lu à partir de la conjonction (bi-) qui suit, et suggéra le verbe « marier », lequel régit cette conjonction. Mais la même conjonction, en syriaque, signifie entre autres « parmi, sous. »

Ou encore II, 35 :


1) [Dans ces jardins, ils auront] des
épouses purifiées.

2) [...] toutes espèces de (fruits) purs(L, 242).


XXXVII, 48-49 :

1) Près d'eux seront des [vierges]
aux regards modestes, aux [yeux]
grands et beaux et qui seront
comme perles cachées,

2) Pour eux (seront à leur disposi-
tion) (pour qu'ils les cueillent) des
fruits pendants
(des raisins), (tels)
des joyaux, comme s'ils étaient
des perles(encore) enfermées
dans la coquille (L, 243).


En fait de joies paradisiaques, le Coran ne connaît donc que le boire et le manger, rien de plus (L, 247). Il ne s'écarte pas sur ce point de la symbolique du banquet eschatologique, présent dans les Écritures antérieures. Voire, il reprend avec Précision une imagerie courante en Orient chrétien, en particulier dans les hymnes sur le paradis d'un auteur qui était très lu dans le milieu d'origine du Coran, le père de l’Èglise syriaque s. Ephrem de Nisibe (L, 234s.).


Des heures arabes

On a depuis longtemps mis en rapport le Coran avec le monachisme, tel qu'il existait à l'époque de Mahomet et dans son milieu. La légende musulmane a parlé du moine Bahira qui aurait découvert les signes d'une mission prophétique chez Mahomet encore enfant [21]. La contre-histoire chrétienne, dès Jean Damascène (vers 650-750), a fait valoir que Mahomet aurait fréquenté un moine arien, qu'il ne nomme pas, et qui lui aurait tout soufflé [22]. On a pu interpréter comme l’aveu d’un emprunt le passage suivant « Certes nous savons que [les infidèles] disent : « Cet homme a seulement pour maître un mortel ! » Mais la langue de celui auquel ils pensent est [une langue] barbare, alors que cette prédication est [en] claire langue arabe» (XVI, 105). Luxenberg garde une tradition analogue, mais en se fondant sur un verbe syriaque (L, 87-90).

En tout état de cause, le Coran contient, outre des critiques envers les moines (IX, 31) des mentions qui leur sont favorables (V, 82). Il semble enfin que le fameux verset de la lumière (XXIV, 35-37) décrive une lampe de couvent, selon une thématique familière aux poètes antéislamiques [23].

Le Coran tel que le restitue Luxenberg s'avère contenir des allusions à des prières chrétiennes, pour ne pas dire des citations de celles-ci. Il convient de signaler que l'hypothèse avait déjà été avancée par un autre savant allemand auquel, curieusement, Luxenberg ne fait pas la moindre allusion, Günter Lüling. Le livre de cet outsider avait été publié à compte d'auteur, et n'avait que peu attiré l'attention [24]. Reste qu'il proposait de voir dans plusieurs sourates des hymnes chrétiennes antérieures à Mahomet, et « islamisées » ensuite par des rédacteurs plus tardifs. Parmi celles-ci, il en est que Luxenberg n'examine pas, comme la LV ou la LXXX. Mais il y a aussi la XCVI, qu'il examine. Et l'hypothèse philologique sous-jacente - ne pas tenir compte des points diacritiques - est analogue chez les deux auteurs.

Voici en tout cas la courte sourate 108, selon la traduction de R. Blachère, puis selon celle de Luxenberg.

1) En vérité, nous t'avons donné
l'abondance. Prie donc en l'hon-
neur de ton Seigneur et sacrifie !
En vérité, celui qui te hait se
trouve être le déshérité !

2) Nous t'avons donné la (vertu de)
constance. Prie donc ton Seigneur
et persévère (dans la prière) ! Ton
adversaire (Satan) est alors le
vaincu (L, 275).


On reconnaît une adaptation d'un passage du Nouveau Testament, la première épître de s. Pierre : «[...] Votre partie adverse, le Diable, comme un lion rugissant, rôde, cherchant qui dévorer. Résistez lui, fermes dans la foi [...] » (5, 8s.). Le verset est d'autant plus intéressant qu'il a été repris dans le livre de prière des moines, dans l'office du soir, les Compiles.

Selon la tradition musulmane, la sourate 96 fut la première à avoir été révélée par l'ange Gabriel. Voici à nouveau la traduction de Blachère [25] et celle de Luxenberg.

1) Prêche au nom de ton Seigneur
qui créa
qui créa l'homme d'une adhérence
Prêche !, ton Seigneur étant le
Très Généreux qui enseigna par le
Calame
Et enseigna à l'Homme ce qu'il
ignorait. Prenez garde ! L'Homme
en vérité est rebelle parce qu'il se passe de tous.
A ton Seigneur pourtant tu retourneras. Penses-tu
que celui qui défend
à un serviteur [d'Allah] de prier,
Penses-tu qu'il soit dans la Direction
ou qu'il ordonne la piété ?
Penses-tu [au contraire] qu'il crie au mensonge et
se détourne [de la vole droite] ? Ne sait-il pas
qu'Allah le voit ?
Qu'il prenne garde ! S'il ne s'arrête, en vérité, Nous
le traînerons [en Enfer] par le toupet de son front,
Toupet menteur et pécheur !
Qu'il appelle son clan !
Nous appellerons les Archanges.
Prends garde ! Ne lui obéis pas !
Prosterne-tol et rapproche-toi [d'AIlah] !


2) Invoque le nom de ton Seigneur, qui a créé,
qui a créé l'homme
(d'argile) collante; Invoque ton Seigneur digne qu'on
l'honore
, qui
a enseigné par le calame (l'Écriture)
à l'homme ce qu'il ne savait pas du tout. Certes,
l'homme oublie,
quand il voit qu'il s'est enrichi,
que (cela) se ramène à ton Seigneur.
Quand tu en vois un, qui (veut) empêcher (de prier)
un serviteur (de Dieu), quand il prie,
crois-tu qu'il est sur le droit chemin
voire qu'il a de pieuses pensées ?
(Mais) si tu crois qu' il renie (Dieu)
et se détourne (de Lui),
Ne sait-il pas que Dieu voit tout ?
S'il ne cesse pas, nous punirons l'adversaire,
l'adversaire
qui renie et pèche !
Invoque-t-il ses idoles,
c'est un (dieu) passager qu'il invoquera !
Tu ne dois pas du tout l'écouter, mais rends ton
culte et communie

(L, 293-296).


D'autres sourates, comme LXXIII et LXXIV, rendent un son analogue. On peut les lire comme des exhortations à la prière, en particulier à la prière du soir, qui constitueraient ainsi une sorte de règle monastique (L, 276).


La nature du Coran

II s'ensuit une conséquence capitale quant à la nature même du Coran, pris dans son ensemble.

Le Coran était ce que son nom dit très précisément, une fois qu'on le comprend à partir du syriaque : un lectionnaire(L, 56, 79), c'est-à-dire une anthologie de passages tirés de livres saints préexistants et adaptés en langue vernaculaire, anthologie faite pour la lecture liturgique (L. 275). C'est ce qu'affirme le début de la sourate XII, qui raconte l'histoire de Joseph (Genèse, 37-50), si on la traduit comme le fait Luxenberg : « Voici les versets de l'Écriture expliquée ; nous l'avons fait descendre comme un lectionnaire arabe, afin que vous puissiez comprendre. » (XII, 1-2) (L, 80s.) Ou encore XLI, 3 : « Écriture que nous avons traduite comme un lectionnaire arabe » (L, 96). Ou enfin LXXV, 17- 18 : « il nous incombe de le (le Coran, le lectionnaire) compiler (à partir d'extraits de l'Écriture) et de l'exposer (en enseignant). Si nous l'avons exposé (en enseignant), suis son exposé (c'est-à-dire la façon dont il t'a été enseigné) » (L, 97).

« Si Coran signifie à proprement parler lectionnaire, on est autorisé à admettre que le Coran ne voulait être compris comme rien d'autre qu'un livre liturgique avec des textes choisis de l'Écriture (Ancien et Nouveau Testaments), et nullement comme un succédané de l'Écriture elle-même, c'est-à-dire comme une Écriture indépendante. D'où les nombreuses allusions à l'Ecriture, sans la connaissance de laquelle le Coran pourrait sembler à son lecteur être un livre scellé de sept sceaux » (L, 79).

Le Livre par excellence dont il est question bien des fois, la « mère du livre » (III, 7 ; XIII, 39 ; XLIII, 4), c'est-à-dire le texte original, n'est autre que la Bible elle-même. Luxenberg traduit ainsi III, 7 : « C'est Lui qui a fait descendre sur toi le livre. Une de ses parties consiste en versets précis, qui (sont quasiment) l'Écriture originale (elle-même), et (une partie) en d'autres (versets) de même sens. » (L, 82) II se peut que ce qui est vise ici soit l'Écriture canonique et ce qui lui ressemble, a savoir les textes apocryphes (L, 83).

On notera une conséquence capitale : si Luxenberg a raison, le Coran ne prétendait pas remplacer la Bible, mais en fournir une version intelligible aux arabes de l'époque. Il ne se présentait donc pas comme une révélation immédiate (L, 100). De la sorte, la doctrine de la dogmatique islamique postérieure selon laquelle une révélation serait «abrogée» (naskh) et « remplacée » (tabdîl) par une révélation postérieure (l'Évangile remplaçant la Torah), jusqu'à la révélation définitive coïncidant avec l'islam, perdrait son fondement.


Le milieu d'origine

La question qui se fait jour est alors celle du rapport des textes coraniques avec la personne de Mahomet et les événements racontés dans sa biographie traditionnelle. Ce rapport, qui semble massif, a dans le Coran lui-même des bases textuelles fort ténues. Rappelons par exemple que les noms autour desquels tourne la biographie de Mahomet n'y figurent que rarement : la Mecque une seule fois (XLVIII, 24) - et non pas jamais, comme A.-L. de Prémare l'écrit par distraction

(P, 101 n. 42), Yathrib (plus tard Médine) une seule fois (XXXIII, 13s.), les Quraysh une seule fois (CVI, 1) (P, 69), le nom même de Muhammad deux fois (III, 144 ; XLVII, 2). Toutes les autres identifications relèvent de la tradition postérieure. On a formulé à ce propos des soupçons qui peuvent paraître relever de l'hypercritique, mais qui ne sont pas totalement en l'air.

Ainsi, le cadre même de l'histoire de l'islam primitif ne va pas de soi. Par exemple, en ce qui concerne la base de départ des conquêtes, Yathrib (P, 99-104). La biographie de Mahomet nous parle des trois tribus juives de Médine (nom postérieur de Yathrib) avec lesquelles il dut composer avant de les chasser ou de les massacrer. Or, aucune source juive ne signale la présence d'une communauté dans cette ville. Le centre de gravité réel de cette histoire aurait-il été les confins Nord du désert d'Arabie ? Et ce ne serait qu'en un second temps qu'il aurait été comme « descendu » vers le Sud [26]. Certains indices le suggèrent. Par exemple, les trois déesses païennes mentionnées dans les fameux « versets sataniques » sont bien attestées dans l'épigraphie jordano-syrienne, alors que nous n'avons rien de tel dans le Hedjaz (P, 234 n. 20).

Le personnage central de la geste n'est pas non plus si clair. Jusqu'au nom de celui que nous appelons Mahomet : le mot muhammad est pour la grammaire un participe passif à sens d'adjectif : « loué ». Ne serait-il qu'une épithète qui aurait fait oublier le vrai nom du chef des conquérants [27]?

Il se pourrait que certains textes soient en fait antérieurs au prophète, qui les aurait simplement repris comme des citations. On l'a déjà soupçonné pour certains textes brefs, comme les deux dernières sourates, qui sont des formules magiques (P, 271). En serait-il de même pour les textes liturgiques dégagés par Luxenberg ?

S'il en était ainsi, la question du cadre concret (Sitz im Leben) du Coran se reposerait à nouveaux frais. Quelle communauté faut-il supposer comme milieu de la rédaction de tout ou partie du Coran ? Luxenberg mentionne la possibilité d'une origine judéo-chrétienne à titre d'hypothèse (L, 296), mais il se refuse à franchir les bornes de la pure philologie.

L'hypothèse n'est pas nouvelle. Il semble qu'elle ait été lancée au début du XXe siècle par le grand historien protestant des dogmes chrétiens A. von Harnack. Elle fut entre autres reprise par Hans-Joachim Schoeps, l'historien juif du judéo-christianisme, qui conclut un paragraphe sur « Les éléments ébionites dans l'islam », et avec lui tout son livre, par une phrase soulignée : « il résulte de cela un paradoxe d'une envergure vraiment à la mesure de l'histoire du monde : le fait que le judéo-christianisme, s'il a bien disparu de l'Église chrétienne, s'est maintenu dans l'islam et se prolonge dans certaines de ses impulsions directrices jusqu'à nos jours [28]. » Je rappelle ici que le savant israélien S. Pinès a cru retrouver les traces de milieux judéo-chrétiens qui auraient survécu jusqu'au IXe siècle en terre d'islam [29].

Quant au contenu doctrinal, la conception que le Coran se fait du Christ rappelle en effet la christologie des judéo-chrétiens. En revanche, il reste une grosse difficulté : nous n'avons pas de traces d'un lien direct entre le groupe judéo-chrétien expulsé de Jérusalem vers 66 et les événements situés six siècles plus tard.

Quoiqu'il en soit de ces spéculations, les livres de A.-L. de Prémare et de C. Luxenberg se complètent. Le premier redonne toute son épaisseur chronologique et humaine au processus de formation des textes fondateurs de l'islam. Le second propose une méthode de lecture desdits textes, et la rend plausible par des résultats parfois spectaculaires. Je suis bien incapable de prédire ce qui, du livre de Luxenberg, sera l'objet du consensus des savants et ce qu'il faudra en rejeter comme trop aventureux. Il se pourrait en tout cas qu'un pas en avant capital ait été réalisé.




[*] NDLR : Rémi Brague rend ici compte d'un ouvrage signé de Christoph Luxenberg. Il nous a paru intéressant par les problèmes de langue (et de traduction) qui intéressent la compréhension et l'interprétation du Coran. Il a connu un retentissement mondial qui se signale tant par des débats internes aux Études coraniques que par des répercussions idéologiques dont la présentation et a fortiori la synthèse excéderaient l'objet comme les objectifs de Texto!.


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NOTES

1 Je cite : L, suivi du numéro de la page.

2 Mon moteur de recherche sur Internet ne connaît aucune page en français dans laquelle le nom de C. Luxenberg soit mentionné, contre plusieurs dizaines en allemand et anglais. Je dois moi-même la connaissance du livre à une mention rapide dans un article de C. Gilliot paru dans Notre Histoire, 195 : « L'islam dans son texte. Le Coran », 2002, p.25.

3 Pour un premier compte rendu, voir R. Nabielek, « Weintrauben statt Jungfrauen aïs paradiesische Freude : zu einer neuen Lesart des Korans und ihrem Stellenwert innerhalb der modemen Koranforschung », IriformationsprojektNa.herundMittlererOsten., 23-24, 2000, p. 66-72.

4 Voir Carlyle, On Heroes. Hero-Worship, and the Heroic in History (1843), ch. 2, éd. Everyman, 1908, p. 299.

5 The Qur’an. Translated, with a critical rearrangement of the Surahs, Edimbourg, 1937 et 1939, 2 vol.

6 R. Blachère, Le Coron. Traduction selon un essai de reclassement des sourates, Paris, Maisonneuve, 1949-1950, 3 vol. XV-1240 p.

7 7. Der Koran. Übersetzung, Stuttgart et al., Kohlhammer, 1962, 524 p.

8 John E. Wansbrough, Quranic Studies. Sources and Methods of Scriptural Interpretation, Oxford, Oxford University Press, 1977, XXVI-256p.

9 John Burton, The Collection of the Quran, Cambridge, Cambridge University Press, 1977, VII-273 p.

10 Je cite : P, suivi du numéro de la page.

11 Gerd R. Puin, « Observations on Early Qur'an Manuscripts in San'a », S. Wild (éd.), The Qur'an. as a Text, Leyde, Brill, 1996, p. 107-111 ; H.-C. Graf von Bothmer, K.-H. Ohlig, G.-R. Puin, « Neue Wege der Koranforschung », Magazin Forschung (Universität des Saarlandes) 1, 1999, p. 33-46.

12 Puin, dans op. cit., p. 40a.

13 Voir Fred McGraw Donner, The Early Islamic Conquests, Princeton, Princeton University Press, 1981, p. 267-271.

14 Al-Amiri, al-Iclàm, p. 173s., cité dans T. Nagel, Stoat und Glaùbensgemeinschaft im Islam. Geschichte der politischen Ordnungsvorstellungen der Muslime, Zurich et Munich, Artemis, t. 1 : Von den Anfängen bis ins 13. Jahrhundert, 1981, p. 57-58 ; P. Crone et M. Hinds, God's Caliph. Religious Authority in the first centuries of Islam, Cambridge U.P., 1986, p. 105.

15 Voir les réflexions de méthode de P. Crone, Slaves on Horses : the evolution of the Islamic Polity, Cambridge U.P., 1980, p. 3-17.

16 Voir C. Gilllot, Exégèse, langue et théologie en islam : l'exégèse coranique de Tabari (m. 311 /923), Paris, Vrin, 1990, 320 p.

17 Voir Robert G. Hoyland, Seeing Islam As Others Saw It. A Survey and Evaluation of Christian, Jewish and Zoroastrian Writings On Early Islam, Princeton, The Darwin Press, 1997, XVIII-872 p.

18 Voir Nabielek, loc. cit. , p. 70b.

19 A. Mingana, Syriac influence on the style of the Kur'an », Bulletin of the John Rylands Library, 2, 1927, p. 77-98.

20 Avicenne, Epistola sulla vita futura, éd. F. Lucchetta, Padoue, Antenore, 1969, p. 94-96.

21 Voir Encyclopaedia of Islam, s.v. Bahira, t. 1, 922a-923;

22 Jean Damascène, Sur les hérésies, 100 [PG, 94, 764a] éd. B. Kotter, Die Schriften des Johannes v. Damaskos, Berlin et al. De Gruyter, t. 4, p. 60 ; français R. Le Coz dans Écrits sur l'islam Cerf, 1992, p. 210s.

23 Voir Encyclopaedia of Islam, s.v. Rahbaniyya, t. 8, 397a.

24 24. G. Lûling, Ûber den Ur-Qur'an. Ansàtze zur Rekonstruktion vorislamischer christlicher Strophenlieder im Qur'an, Erlangen, H. Lûling, 1974, XII-542 p. Pour des recensions en français, voir M. Rodinson, Der Islam, 54, 1977, p. 321-325 et C. Gilliot, Arabica, 30, 1983, p. 16-37.

25 25. Blachère divise la sourate en deux morceaux, les cinq premiers verset et la suite ; voir p. 9s. et 91s.

26 Hypothèse de M. Cook et P. Crone, Hagarism. The Making of the Islamic Empire, Cambridge University Press, 1977, p. 24s.

27 Hypothèse de A. Cheikh Moussa rapportée dans J. Chabbi, Le Seigneur des tribus. L'islam de Mahomet, Paris, Noêsis, 1997, p. 572 n. 400.

28 A. v. Hamack, Lehrbuch der Dogmengeschichte, vol. 2 : Die Entwicklung des christlichen Dogmas, I, 4, Tùbingen, 1909, p. 537 ; H.-J. Schoeps, Théologie und Geschichte des Judenchristentums, Tùbingen, Mohr, 1949, « Ebionitische Elemente im Islam », p. 334-342, cit. p. 342 ; voir aussi l'article touffu de M. P. Roncaglia, « Éléments ébionites et elkasaïtes dans le Coran », Proche-Orient chrétien, 21, Jérusalem, 1971,p.101-126.

29 Voir les articles recueillis dans le t. 4 de ses Collected Works : Studies on the History of Religions, Jérusalem, Magnes Press, 1996, p. 211-486.


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Antoine
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Message par Antoine »

Pour illustrer l'article de Rémi Brague ci-dessus voici un autre texte

Le Coran au risque de la philologie

Louis Grenier

Nouvelle revue CERTITUDES - octobre-novembre-décembre 2002 - n°12


C’est sans doute une bombe que vient d'amorcer le philologue allemand Christoph Luxenberg. Dans sa thèse de doctorat, parue en 2000, mais dont les résultats commencent seulement à atteindre le grand public, ce savant propose en effet de percer le secret des assez nombreux passages obscurs du Coran en partant de l'hypothèse que les passages en question sont peu compréhensibles en arabe parce que leur auteur s'est inspiré de sources écrites en syriaque. Si cette hypothèse est vérifiée — il faut attendre que les savants du monde entier se prononcent, mais les premiers échos sont positifs —, alors c'est sans doute toute notre perception du Coran et des intentions de Mahomet qui va s'en trouver bouleversée.

Les données du problème

Les circonstances de la rédaction du Coran sont mal connues. Les sources musulmanes les plus anciennes qui évoquent les premiers temps de l'islam sont en effet postérieures de deux siècles environ aux événements. Or, entre-temps, pour les Musulmans, tout a changé : la conquête a fait de l'islam la religion d'un immense empire, dont le centre est désormais Bagdad, et non plus Médine, et dont les élites sont persanes, et non plus arabes. Les traditions musulmanes les plus anciennes sont donc souvent anachroniques : les Musulmans ont oublié les débuts de leur propre histoire. Quant aux plus anciens manuscrits du Coran, dont certains remontent au Vile siècle, ils sont d'une lecture très délicate à cause de l'absence des voyelles : seules les consonnes sont écrites, et le système de points diacritiques de l'arabe moderne n'existe pas encore. Par surcroît, leur texte diffère assez souvent de celui qui a fini, plus tard, par devenir officiel dans l'islam. Aussi de nombreux passages du Coran sont-ils ambigus ou franchement inintelligibles. Les docteurs musulmans du Moyen Age ont bien sûr cherché à résoudre ces difficultés, mais leurs interprétations ne répondent pas aux normes de la philologie scientifique. Le problème reste donc entier.

Luxenberg est parti de l'hypothèse selon laquelle les passages incompréhensibles du Coran seraient écrits non en mauvais arabe, mais en un arabe calqué sur du syriaque. Cette langue était en effet influente dans la péninsule arabique depuis plusieurs siècles, quand Mahomet rédigea le Coran ; il n'est donc pas absurde de penser qu'il aurait pu subir des influences de ce côté-là. Le syriaque est une langue araméenne dont le berceau est la Mésopotamie, et dont le principal centre culturel, dans l'Antiquité, a été la ville d'Édesse. Aujourd'hui encore, le syriaque est la langue liturgique des Chrétiens d'Irak, pays (« libéré » depuis peu...) dont il est l'une des trois langues officielles, aux côtés de l'arabe et du kurde. Langue des Chrétiens de l'empire perse entre le IIe et le VIIe siècle de notre ère, le syriaque a donné naissance à une brillante littérature, dont le représentant le plus connu en Occident est saint Éphrem de Nisibe (+ 373). La Bible grecque elle-même a été traduite en syriaque dès la fin du Hé siècle. La méthode suivie par Luxenberg consiste donc à chercher à savoir si les passages obscurs du Coran ne s'éclairciraient pas à condition de les traiter comme une traduction arabe littérale, et donc maladroite, de tournures syriaques correctes. Les résultats sont saisissants.

Un Coran entièrement revisité

Fort technique, la démonstration de Luxenberg ne peut bien sûr être résumée ici en quelques lignes. Par surcroît, ' pour pouvoir l'évaluer, il faudrait connaître à la fois le syriaque et l'arabe, ce qui n'est pas cas de l'auteur de ces lignes. Je vais donc présenter un bref aperçu des résultats les plus significatifs de cette méthode, en m'appuyant sur le compte-rendu détaillé que Rémi Brague, qui est professeur de philosophie à l'Université de Paris I-Sorbonne, vient de faire paraître dans le n° 671 de la revue Critique (avril 2003). Il en ressort que la rétroversion en syriaque opérée par Luxenberg fait disparaître les incohérences du texte arabe, en mettant mieux en relief les sources bibliques dont s'est à maintes reprises inspiré Mahomet, il apparaît même que le Coran contient vraisemblablement des allusions à des prières ou à des hymnes chrétiennes qui ont marqué Mahomet : ainsi, la sourate 108 (« Nous t’avons donné la vertu de constance. Prie donc ton Seigneur et persévère dans la prière ! Ton adversaire [satan] est alors le vaincu » [trad. R. Brague]) procède vraisemblablement d'une stylisation d'un passage de la première épître de saint Pierre : « Votre partie adverse, le diable, comme un lion rugissant, rôde, cherchant qui dévorer. Résistez-lui, fermes dans la foi... » (1 Petr. V, 8)! Enfin, pour l'anecdote, les fameuses houris, ces vierges du paradis pour qui certains islamistes sont prêts aujourd'hui à périr de mâle mort (en assassinant autrui par la même occasion), passent elles aussi à la trappe dans l'opération : correctement traduit, le Coran ne parle en effet pas de « houris aux grands yeux », mais simplement de « raisins blancs » ! Ainsi, la sourate XV, 54, ne doit pas être traduite par : « nous les Des combattants de l'islam] aurons mariés à des houris aux grands yeux », mais, plus prosaïquement : « nous les installerons confortablement sous des (raisins) blancs, (clairs) comme le cristal » (trad. R. Brague). En d'autres termes, Mahomet promet tout bonnement un paradis de type biblique, lieu d'un banquet eschatologique tout à fait conventionnel. De quoi désespérer Billancourt (ou AZF)...

Une meilleure compréhension de l'islam de Mahomet


Si elles s'avèrent fondées, les conséquences des découvertes de Luxenberg pourraient bouleverser de fond en comble notre compréhension de l'islam véritable, celui qu'a conçu Mahomet. Le Coran des califes des VIIIe et IXe siècles n'est en effet déjà plus celui de l'homme de Médine. Mahomet souhaitait semble-t-il non pas fonder une nouvelle religion, destinée à supplanter la Bible, mais simplement mettre au point un lectionnaire liturgique, autrement dit une anthologie de passages bibliques, d'hymnes et de prières (dont certaines sont chrétiennes), à l'attention des Arabes de la péninsule. C'est seulement après les fabuleuses conquêtes des VIIe et VIIIe siècles que les califes ont fait de l'islam une religion à part, centrée sur une nouvelle révélation.

Bien sûr, la parole est maintenant aux savants du monde entier ; mais on peut d'ores et déjà dire que l'ouvrage de Luxenberg va relancer la question de origines et de la nature même de l'islam.

Texte emprunté à :
http://certitudes.free.fr/nrc12/nrc12119.htm
Stephanopoulos
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Message par Stephanopoulos »

Bonjour à tous,


J'ai trouvé sur le net un article intéressant pour faire suite ou compléter ceux qui ont déjà été publiés ci-dessus par Antoine. Voici le lien : http://www.webzinemaker.com/admi/m9/pag ... &id=266228 .


Al Quran
Les éléments les plus anciens que nous possédions sur la vie de Muhammad ont été écrits par Ibn Ishaq seulement en 750 ... mais son travail a été perdu, et n’est disponible que par morceaux dans une recension plus tardive de Ibn Hisham qui est mort en 834, soit deux cents ans après la mort du Prophète.
On dit qu’il y a six recueils corrects et authentiques de traditions Hadith sur la vie du Prophète ... mais ils ne datent que de deux à trois siècles aprés sa mort (leurs auteurs sont morts entre 870 et 915). Et un critique du dixième siècle a souligné la faiblesse de deux cents traditions incorporées dans les recueils de Muslim et Bukhari, qui pourtant passent pour sérieux
Dans son étude classique, "On the Development of Hadith", Goldziher a démontré qu’un vaste nombre de traditions Hadith, acceptés même dans les recueils musulmans les plus rigoureusement critiques, étaient des faux complets de la fin du 8ème et du 9ème siècle et, en conséquence, que les chaînes de transmission (isnads) qui les étayaient étaient totalement fictives.

Même le texte du Coran doit être considéré comme suspect.
Quand les premières citations du Coran apparaissent sur des pièces de monnaie et des inscriptions, vers la fin du septième siècle, elles montrent des divergences par rapport au texte canonique. Celles-ci sont insignifiantes du point de vue du contenu, mais le fait qu’elles apparaissent dans des contextes aussi formels que ceux-là ne colle pas avec la notion selon laquelle le texte avait déjà été fixé.

Il faut dire que le Coran écrit actuel n'est pas l'oeuvre de Muhammad ; il a été compilé après sa mort selon le gré de divers personnages. En conséquence, il a existé plusieurs Corans dont le contenu et l'organisation des versets étaient totalement différents. Celui qui est considéré comme LE Coran est celui d'Uthman (644-656), un calife despotique qui a détruit toutes les sources antérieures (Umar et Abû Bakr avaient aussi fait disparaitre de nombreuses versions auparavant).
Alors que les Musulmans modernes peuvent être liés par une position intenablement conservatrice, les érudits musulmans des premières années étaient bien plus flexibles, réalisant que des parties du Coran étaient perdues, perverties, et qu’il y avait plusieurs milliers de variantes qui rendaient impossible le fait de parler du Coran unique.
Et ils savaient que les Corans compilés par les secrétaires particuliers du Prophète étaient différents de celui d'Othman.

Dans les premiers siècles de l'Islam, beaucoup d'ouvrages furent écrits, qui relevaient des différences entre les Corans existants ; et bien qu'Othman affirmait et inscrivait une seule version, il fallut des années pour que les savants islamiques reconnaissent ce livre, et le propagent dans le monde islamique.
Voici les noms des sept livres importants et notables qui furent écrits par les savants, à propos des différences entre les Corans :

- Le "livre de la différence des livres" (les Corans de Médine, de Koufféh et de Bassora ) écrit par Kassâeï.
- Le "livre de la différence des livres", écrit par Khalaf.
- Le "livre de la différence des habitants de Koufféh, de Bassora, et de Damas en matière des livres", écrit par Farrâ.
- Le "livre de la différence de Mossahéf", écrit par Ibn Davoud Sédjestani.
- Le "livre de Madaéni sur la différence des livres", écrit par Madaéni.
- Le "livre de la différence des livres de Damas, Hédjaz et l'Irak", écrit par Ibn Amér Yahsébi
- Le "livre de Mossahéf", écrit par Mohammad Ibn Abd al Rahaman Isphahanï.

Quelles étaient les différences de Corans entre les secrétaires du Prophète et celui d'Othman ?

-Le Coran d'Imam Ali :
il fut ordonné en fonction des dates des révélations et contient un relevé des versets abrogatifs et abrogés (les versets qui se contredisent).

-Le Coran d'Abd Allah Ibn Massoud :
Fazl Ibn Châsan disait que le nombre et l'ordre des sourates différaient considérablement de ceux du Coran d'Othman, car dans le coran d'Ibn Massoud, il n' y a que cent dix sourates.
Les noms de beaucoup de sourates étaient plus longs que ceux du Coran d'Othman.
Il n'y avait deux sourates nommées "Sadjdéh" (prosternation).
Il y avait quelques sourates supplémentaires, comme "Havâmime" ou "Mossabahât" dans le coran et qu'on ne trouve pas ailleurs.
Certains versets différaient, surtout dans la sourate "Va al Assre" qui disait ceci :
"J'en jure par l'heure de l'après-midi, l'homme travaille à sa perte. Tu en excepteras ceux qui croient et pratiquent les bonnes oeuvres, qui recommandent aux autres la vérité et la patience !"

-Le Coran d'Abi Ibn Kab :
L'ordre des sourates était différent. Selon Fazl Ibn Ghasan le livre commencait par "Fatéhat al Kétab" (l'ouverture du livre), "Bagharéh" (la vache), "Néssâ" (les femmes), "Allé Omran" (la famille Omran), "Anâm" (les bienfaits), "Eerâf" (le purgatoire), "Maédéh" (la table), "Anfâl" (les surestimations), "Davoud" (David), "Tahâr" (les propres), "Insân" (l'homme), "Nabi Aliéh al Salam" (le missionnaire auquel salut), "Hai Ahl al Kétab" (les gens du livre)... ( Selon Al Féhreste -La liste d'Ibn Nadime Page 46). La sourates "Younesse" (Jonas) était absente. Les sourates n'atteignaient pas les 116 et un bon nombre n'existaient pas du tout dans le Coran d'Othman; comme les sourates "Davoud" (David), "Tahâr" (les propres), "Nabi Aliéh al Salâm", etc...

Ainsi comme l'affirmera l'Imam Ja'far qui ne mâchait pas ses mots, "le véritable Coran n'existe pas !"

Selon As-Suyuti (mort en 1505) Ibn ’Umar al Khattab aurait dit :"Que personne d’entre vous ne dise qu’il a acquis le Coran entier, car qu’en sait-il ? Beaucoup du Coran a été perdu ! Alors qu’il dise : J’ai acquis ce qui était disponible. " (As-Suyuti, Itqan, partie 3, page 72).
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Cela indique bien que le Coran ne nous a pas été retransmi dans son intégralité.

L’Imâm Al-Bukhârî et Ibn Jarîr disent que, selon Ubayy Ibn Ka`b et Anas b. Malik, ces paroles ont été révélées dans la Sourate 102 "At-Takâthur" (La course aux richesses) : "le Prophète (paix et bénédiction d’Allâh sur lui) a dit : 'Si le fils d’Adam avait deux vallées de richesses, il souhaiterait que lui en fût échue une troisième. Rien ne peut remplir le ventre du fils d'Adam sauf la terre (= la mort), mais Dieu revient vers celui qui revient à Lui' ...".
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Pourtant on ne retrouve plus ce passage dans la sourate 102 (qui ne contient que 8 versets) du coran actuel. Il a donc été enlevé.

On rapporte qu'un homme récitait le Coran en compagnie de l'Imam Ja'far. Le narrateur dit qu'il entendit certains versets, durant la récitation, qui ne correspondaient pas à des versets reconnus. L'Imam Ja'far dit à la personne qui récitait : "Ne récite pas de cette manière. Récite comme les gens jusqu'à ce que le Mahdi (le Messie) arrive. Quand le Mahdi arrivera, il récitera le véritable Coran et le Coran compilé par Ali, sera de nouveau ramené !" (Usul Kafi: 2.622)
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Cela indique bien que les versions du Coran postérieures à celles d'Ali sont considérées comme défectueuses.

Selon Jabir, l'Imam Baqir aurait dit : "Personne ne peut affirmer avoir rassemblé tout le Coran tel qu'il a été révélé par Allah, si ce n'est un menteur. Les seules personnes à avoir entièrement compilé et appris par cœur le véritable Coran étaient Ali ibn Abi Talib et les Imams qui lui ont succédé !" (Usul Kafi: 1:228 )
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Les Chiites le confirment : "Celui qui a compilé le Coran véritable c'était Ali ibn alit tabib !" (A noter qu'ils estiment aussi que les versets relatifs à Ali ont été supprimés par Uthman, le calife imposteur anti-Chiites)

Selon As-Suyuti, Aïsha, l’épouse favorite du Prophète, aurait dit : "Du temps du Prophète, la sourate des Parties faisait deux cents versets à la lecture. Quand Uthman édita les copies du Coran, seuls les versets actuels furent enregistrés !" (73).
Selon As-Suyuti aussi, Uba Ibn Ka’b, l’un des grands compagnons de Muhammad, aurait demandé à l’un des Musulmans, "Combien y a-t-il de versets dans la sourate des Parties ?" Le Musulman dit : "Soixante-treize versets." Uba Ibn Ka’b lui raconta : "Autrefois il était pratiquement égal à la sourate de la Vache (environ 286 versets) et comprenait le verset de la lapidation". L’homme demanda : "Qu’est-ce que le verset de la lapidation ?" Uba Ibn Ka’b dit : "Si un vieil homme ou une vieille femme commettait l’adultère, lapidez-les à mort."
Au sujet de ce verset disparu, Ibn Majah a rapporté les paroles de Aisha qui disait : "Le verset relatif à la lapidation et à l'allaitement (9, 8a) est venu et sa feuille se trouvait sous mon lit : aussi, quand l'envoyé de Dieu mourut, et que nous fûmes occupés par les détails entourant sa mort, un animal domestique entra et dévora la feuille."
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Les textes historiques confirment effectivement que les anciens musulmans lapidaient les personnes adultères, suivant en cela ce qui était écrit dans un verset dont on n'a plus retrouvé la trace depuis.

Au sujet du verset 6 de la sourate 33 "Les confédérés" ("...Pour les croyants le Prophète a priorité sur eux-mêmes; et ses épouses sont leurs mères."), Uthman dit que le texte d'Ubai b. Ka'b comportait : "Pour les croyants le Prophète a priorité sur eux-mêmes ; et il est un père pour eux et ses épouses sont leurs mères."
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Voila encore une sourate qui a été modifiée.

Au sujet du verset 49 de la sourate 12 "Joseph" ("...Puis, viendra après cela une année où les gens auront beaucoup de pluies et presseront le raisin et les olives..."), l'Imam Ja'far raconta qu'un homme demanda comment il devait lire ce verset. Ali répondit que ce verset avait initialement été révélé comme suit : "Puis une année viendra ou les gens recevront une aide généreuse et ou il pleuvra abondamment" (Commentaire d'Al-Qummi: 192)
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Ce commentaire indique que le Coran a été modifié pour rendre service aux fantaisies des Califes amateurs de vin. Le mot Yâ'siroun ayant été transformé en Yâsiroun.
A noter que les Kharijites trouvaient que la sourate "Joseph" racontait une histoire trop offensante et érotique pour vraiment appartenir au Coran authentique. (Pourtant cette sourate s'inspirait d'un passage de l'Ancien testament).

Au sujet du verset 33 (ou 30) de la sourate 3 "La Famille d'Imran" ("...Certes, Allah a élu entre tous les hommes Adam, Noé, la famille d'Abraham et la famille d'Imran..."), le commentateur chiite Allamah Ali ibn Ibrahim AI-Qummi a dit : "Les mots 'La Famille de Mouhammad' étaient eux aussi révélés avec les mots 'La Famille d'Imraan'. Mais les compagnons du Prophète ont retiré les mots 'La Famille de Mouhammad' du texte original". (Commentaire d'Al-Qummi:308).
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Il est clair que ce commentaire accuse les Compagnons du Prophète d'avoir modifié le Coran.

Au sujet du verset 114 (ou 115) de la sourate 20 "Taha" ("...En effet, Nous avions auparavant fait une recommandation (ou un pacte) à Adam, mais il l'oublia, et Nous n'avons pas trouvé chez lui de résolution ferme..."), Usul Kafi a rapporté que l'Imam Ja'far aurait dit que ce verset avait initialement été révélé avec les mots suivants : "Nous avons parlé à Adam de Mohammed, Ali, Fatima, Hassan, Hussain et des Imams, leurs progénitures, mais Adam a oublié." (Usul Kafi : 1:416)
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On retrouve ici l'écho de la guerre entre les partisans de Ali (proto-Chiites) et les partisans d'Uthman (proto-Sunnites) qui trafiquaient le contenu du Coran et des hadiths pour essayer de difamer leurs adversaires tout en se glorifiant eux-mêmes.

Au sujet du verset 9 (ou 10) de la sourate 47 "Muhammad" ("...C'est parce qu'ils ont de la répulsion pour ce qu'Allah a fait descendre. Il rendra donc vaines leurs oeuvres..."), l'Imam Mohammed Baqir aurait dit que l'ange Jibreel avait transmis initialement le verset comme suit : "C'est parce qu'ils découvrirent ce qu'Allah révéla à propos de Ali." C'est ainsi que les apostats enlevèrent le nom de Ali du Coran. (Commentaire d'Al-Qummi: 1011)
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On retrouve encore ici l'écho des guerres entre partisans de Ali et partisans d'Uthman : Les chiites accusent des sunnites d'avoir effacé les textes louangeant leur chef Ali.

Dans le verset 29 de la sourate "Waqi'ah", il est écrit :"Et les gens de la droite ; Que sont les gens de la droite ? Ils seront parmi des jujubiers sans épines, et parmi des bananiers aux régimes bien fournis." Une personne récita ce verset en présence de Ali. Celui-ci dit que le mot "Talh" n'était pas le bon et que l'on devait lire Tal'a comme dans la sourate Shu'araa. Certains demandèrent pourquoi ils ne changeraient pas le mot pour réécrire le bon. Ali répondit que le temps n'était pas encore venu de le faire car corriger le Coran ne ferait que troubler les gens. Il fut dit la même chose aux Imams, seul le Mahdi (le Messie) aura le droit de réintroduire le Coran tel qu'il était au temps du Prophète. (Commentaire d'Al-Qummi: 1067)
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Ici aussi les Chiites prétendent qu'Ali savait que le Coran avait été corrompu.

Un des scribes suggéra de rajouter deux versets en l'honneur du Prophète à la fin de la sourate 9 "Le repentir". La majorité des scribes fut d'accord avec lui. Ali, quant à lui, trouva la chose scandaleuse. Il ne cessa de leur répéter, avec véhémence, que la parole de Dieu ne devait jamais subir la moindre altération.
De nombreux documents font référence au désaccord d'Ali. Par exemple, Jalaluddin Al-Suyuty, a écrit en 1318 : "On demanda à Ali : 'Pourquoi restes-tu chez toi ?' Il leur répondit : 'On a rajouté quelque chose au Coran et j'ai fait le serment de ne sortir que pour la prière tant que le vrai Coran ne serait pas rétabli !' " (Al Itqaan fee 'ulum al Quran, p.59)
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Justement, ces deux versets (128 et 129, ou 130) de la sourate 9 ont toujours été douteux. Par exemple, on peut lire dans la fameuse Hadith de Bukhary et le fameux Itqaa de Al-Suyuty que "chaque verset du Coran a été vérifié par de nombreux témoins, les versets 128 et 129 de la Sourate 9 mis à part. Seul Khuzeimah Ibn Thaabet Al-Ansaary les avait en sa possession." Lorsque cet étrange fait fut remis en cause par certains, quelqu'un apporta une Hadith disant que "Le témoignage de Khuzeimah vaut le témoignage de deux hommes !!!" "... ce qui n'est autre qu'un argument d'autorité.

Mullah Muhsin Kashani, un savant Chiite du 11ème siècle, fait le commentaire suivant : "Il est clair, d'après toutes les traditions et récits de la famille du Prophète, que le Coran que les musulmans possèdent de nos jours, n'est pas le Coran complet tel qu'il a été révélé à Mohammed. Certains versets contredisent même ce qui a été révélé. Parmi les versets qui ont été modifiés ou qui disparurent figurent ceux où apparaissaient les noms d'Ali, 'la Famille de Mohammed' et à plusieurs reprises certains ou figuraient les noms d'hypocrites. Plus encore, l'ordre des sourates dans le Coran actuel n'est pas celui qu'avait choisit Allah et son Messager". (Tafseer de Saafi : l:32).

Abû Mansur Ahmed Tibrisi, un célèbre savant Chiite du 8ème siècle, a écrit: "Enumérer les modifications et les oublis de ce type (dans le Coran d'aujourd'hui) deviendrait vite un travail laborieux et pourrait mettre à jour ce que la Taqiyyah m'oblige à ne pas divulguer (Taqiyyah = pratique Chiite consistant à cacher la vérité pour des raisons religieuses)..." (AI-Ihtijaj de Tibrisi 1:254)

Jabir a rapporté que l'Imam Bar a dit : "Personne ne peut affirmer avoir rassemblé tout le Coran tel qu'il a été révélé par Allah, si ce n'est un menteur ! Le Prophète dit alors : c'est ainsi que le démon m'a envoyé ses deux serviteurs à l'instant Abu Bakr et Umar". (Commentaire de bas de page de la traduction de Maqbool : Sourate "Hajj": 674)

Le Mullah Baqir raconte un récit rapporté par l'Imam Zainul Abideen selon lequel un homme vint voir l'Imam et lui demanda de l'informer à propos d'Abû Bakr et de Umar. L'Imam lui dit qu'ils étaient tous les deux des mécréants. (Haqqul Yaqeen : 551)

-Al haj annouri attabrassi, mort en 1230, rapporte dans son livre "Fassl al khitab fi tahrifi kitabi rabbi al arbabe" que plus de 300 grands savants schiites ont déclaré à l'unanimité que le Saint Coran a été falsifié ou modifié.
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On peut résumer ainsi ce que disent les Chiites à ce sujet :

- Le texte du Coran dont les musulmans disposent n'est pas conforme à ce qui a été Révélé au Prophète Muhammad. Ceux qui ont compilé cette version (c'est-à-dire les Compagnons, parmi lesquels Abu Bakr, Umar et Uthmân) ont falsifié ce Texte révélé afin de servir leurs intérêts.

- Des passages et même des sourates entières du Coran contenant, notamment les vertus de Ali et des gens de la famille du Prophète Mouhammad ont été effacés par les "hypocrites" (c'est-à-dire des Compagnons) anti-chiites. An Noûri At Tabrassi affirme que les savants chiites qui renient la falsification du Coran n'agissent que par "taquiyya" (attitude qui a pour but de dissimuler sa foi réelle).

- Selon les Chiites, le texte révélé n'a été compilé sous sa forme originale et dans son intégralité que par Ali. Des membres d'un cercle très fermé de l'élite chiite prétendent connaitre néanmoins le contenu de cette compilation. Mais il n'ont pas le droit de la dévoiler au grand public (même au sein des chiites): Ce n'est que lorsque celui qu'il considèrent comme étant leur douzième imâm infaillible ("le Mahdi", caché dans une grotte depuis douze siècles) reviendra parmi les hommes, qu'il dévoilera à nouveau en public la véritable et authentique compilation du Qour'aane.

Même par l'analyse du style poétique, on peut déceler des phrases suplémentaires qui ont été ajoutées au Coran car elles rompent le rythme et la versification des sourates.(ex : 20-15, 78-1 à 5, 78-32 à 34, 74-31 et 50-24 à 32).
Ainsi la sourate 42-36 à 38 a été visiblement rajoutée pour justifier le choix d'Uthman comme calife à la place d'Ali. De même, une glose a été ajoutée à la sourate 104 pour traduire faussement hawiya ("sans enfant") par hotama ("feu de l'enfer").

Le chrétien Al-Kindi (à ne pas confondre avec l’Arabe, philosophe musulman) écrivant aux alentours de l’an 830, critiquait le Coran en ces termes :
"Le résultat de tout ceci est patent pour vous qui avez lu les écritures et qui voyez comment, dans votre livre, les histoires sont brouillées ensemble et entremêlées ; une preuve que beaucoup de mains différentes ont été à l’œuvre, et ont causé des divergences, ajoutant ou retranchant tout ce qui leur plaisait ou déplaisait. Et maintenant, voici les conditions d’une révélation envoyée ici-bas depuis le Ciel ?"
A noter, également, que le Coran aurait été mal traduit.
Christoph Luxenberg, éminent professeur de linguistique, a montré que de nombreux passages obscurs du Coran s’éclaircissent si on lit certains mots en syriaque et non en arabe.
Ainsi fait-il disparaître les houris, vierges aux grands yeux de biche du Paradis, toujours consentantes, promises aux croyants.
Selon la nouvelle analyse avancée par Christoph Luxenberg, qui s’appuie sur les Hymnes d’Ephrem le Syrien, le contexte est clair : ce sont de la nourriture et des boissons qui sont offertes, et non des jeunes filles pures.
En syriaque, le mot “hour” est un adjectif féminin pluriel qui signifie blanc, dans lequel le mot “raisin” est implicite.Les éphèbes immortels ou les jeunes filles semblables à des perles décrites par des sourates (exemples : 44-54, 52-20 et 56,22) seraient nés d’une interprétation erronée d’une expression qui signifie en syriaque “des raisins frais”, que les justes auront le plaisir de goûter, par opposition aux breuvages bouillants réservés aux infidèles et aux damnés.
"Nous leur aurons donné pour épouses des Houris aux grands yeux" se transforme alors en : "Nous leur donnerons une vie facile sous de blanches et cristallines grappes de raisin".
En tentant de lire à partir du vocabulaire arabo-syriaque d'autres passages obscurs du Coran, les résultats sont étonnants. Ainsi, dans le verset 24 de la sourate 19 ("Marie"), par exemple, il est question de Marie, qui est accusée de grossesse illégitime et chassée par ses parents. Avant l'accouchement, elle se retire sous un palmier et dit: "Dussé-je être morte plutôt que de vivre à cette heure!" Jésus, qui vient de naître, lui dit : "Ne t'attriste pas, ton Seigneur a mis au-dessous de toi un ruisseau". Pourtant le mot "sariya" ne signifie pas "ruisseau" en arabe. C'est en fait un adjectif araméen qui signifie "légitime". Et "au-dessous de toi", lu à l'araméenne, signifie "accouchement". Cela donne alors : "Ne t'attriste pas, ton Seigneur a rendu ton accouchement légitime". Alors là, ca devient clair : Marie ne souhaitait pas la mort parcequ'elle avait soif mais parcequ'on lui reprochait d'avoir un fils illégitime.
Un autre exemple est celui de la sourate 108 ("Al-Kawthar /L'Abondance") , dont le sens est obscur :
"En vérité, Nous t'avons donné l'ABONDANCE. Prie donc ton Seigneur et SACRIFIE ! En vérité, celui qui te HAIT se trouve DÉSHÉRITÉ".
Tous les chercheurs reconnaissent que cela n'a pas de sens. Mais avec une lecture syro-araméenne, cela donne :
"Nous t'avons donné la PERSÉVÉRANCE. Prie donc ton Seigneur et PERSISTE !
Ton ADVERSAIRE se trouve alors VAINCU".
A l'origine de cette courte sourate, se trouve une liturgie syriaque, réminiscence de la première épître de saint Pierre 5, 8-9.

Mais il y a plus grave :
Même Muhammad est suspecté de ne pas avoir transcrit fidèlement la parole de Dieu :

Le Coran passe pour être la parole de Allah (voir les sourates 43-3, 55-77, 85-22). Pourtant des sourates s'adressent à Dieu à la 2ème personne (sourates 1-4 à 6, 113, 114, 27-91, 6-104 à 114); de même, dans les sourates 75-1 et 90-1, Allah jure au nom d'Allah ! Se parle-t-il à lui-même ? (Quand aux sourates 19-64 et 36-164 à 166, il est clair que ce sont des anges qui s'y expriment et non pas Dieu.)
Cela indique donc que certaines sourates ont été acceptées alors qu'elles ne venaient visiblement pas de Dieu.

Selon At Tabari et Ibn Sad, Mahomet aurait accordé quelques concessions pour amadouer les non-musulmans de la Mecque : il aurait ainsi dit qu'on pouvait adorer les "trois filles d'Allah" (des déesses paiennes). Par la suite, il aurait retiré ces paroles de la sourate 53-19 à 23 en disant que c'était le diable qui les lui avait soufflées (ce sont les fameux "versets sataniques").
Cela montre que l'on ne peut pas se fier aveuglément à tout ce qu'a révélé le Prophète.

Le célèbre commentateur Boukhari a rapporté l'anecdote suivante : "Le Prophète, ayant entendu quelqu'un réciter le Coran à la mosquée, dit : 'Dieu fera miséricorde à cet homme, car il m'a rappelé tel et tel verset qui m'ont échappé dans telle et telle sourate'."
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Cela montre que la mémoire de Prophète était faillible. Peut-on alors lui faire confiance pour la retranscription des paroles de Dieu ?

Une autre fois, c'est un compagnon du Prophète, le futur calife Umar, qui se flatte d'avoir été à l'origine d'une révélation : "J'ai dit : 'ô apôtre d'Allah, des gens bien et des gens moins bien fréquentent tes femmes. Si tu leur ordonnais de se voiler ?' Alors, le verset du voile est descendu." et dans les hadiths (Vol. 1:148) recueillies par Boukhari, on lit :"Umar était extrêmement désireux que les versets de Al Hijab (observance du voile par les femmes musulmanes) soient révélés. Accédant à ses désirs, Allah révéla les versets de Al Hijab. "
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Si même le Prophète laisse nimporte qui inventer de nouvelle sourates, alors comment se fier au contenu du Coran ?

Ibn Abi-Sahr (Abd Allah ibn Sad Abi Sahr) était le scribe du Prophète. Il se flattait d'avoir pu noter "miséricordieux" et "absoluteur", là où le prophète lui avait dicté "sage" et "puissant".
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On notera que Ibn Abi-Sahr finira plus tard par apostasier l'islam, estimant qu'un Prophète qui laissait son scribe modifier la parole de Dieu ne pouvait pas être un prophète véridique. Il était également dégoûté par l’opportunisme des révélations divines, qui tombaient toujours à pic pour justifier les actes du Prophète. Il fut plus tard exécuté...


A noter aussi que le Coran contient des mots non-arabes : n'est-ce pas une preuve qu'il a été retouché au contact de populations non-arabes converties à l'islam ?
On trouve, par exmple : "qintâr "(Coran 3/14), d'origine byzantine ; "surâdiq" (75/51), d'origine abyssinienne ; "sundus" (18/31), d'origine persane ; etc. etc... Or le Coran se prétend lui-même être "en arabe pur". La conclusion est donc que ces mots non-arabes ont été rajoutés au texte originel (qui était "en arabe pur") lors de la conquête de territoires perses et byzantins par les Arabes, après la mort du Prophète.

Exemples de termes persans dans le Coran :

Abarigh, Estabragh,Tanour,Djahanam, Dinar, Al Rass,Al Rome, Zandjébil,
Sédjil, Saradégh, Saghar, Salsabil, Sndass, Ghofl, Kafour, Kanz, Kourte,
Madjous, Mardjan, Mask, Maghalid, Mazdjah, Né, Houd, Yagoute, Al Yahoud.

Exemples de termes abyssins / éthiopiens :

- Ela Raéc, Avâh, Avâb, Al Djabt, Horm, Haub, Dôrï, Sïnïn, Shatre,
Tâhâ, Tâghoute, Al Eram, Ghéise, Ghoureh, Kafle, Machcouh, Mansâh, Nachééh,Yassin, Yassdon.

Exemples de termes romains dans le Coran :

Sérâte, Tafagh, Ferdôs, Ghéste, Ghéstass.

Exemples de termes syriens dans le Coran :

Yam, Houn, Ghouyoum, Addan, Toure.

Exemples de termes hébraïques dans le Coran :

Akhlad, Baïre, Raéna, Al Rahmân, Tavâ, Marghoum, Hodnâ, Ghamle.

Exemples de termes nabatéens dans le Coran :

Varz, Varâ, Malakoute, Côfre, Ghat, Mazhan, Sinâé, Sôfréh, Havâriyoun,
Hasbe, Akvab, Asphar, Al, Alîm.

Certains versets du Coran sont même des traductions des Gattas de l'Avesta :

"Lorsqu'au début de l'univers, tu nous as créés, et soufflé de ta nature
pour nous offrir la raison, lorsque tu nous as inspiré de la vie."
(l'Avesta)
= la sourate 15 - le verset 29 du Coran.

"Quelle est la punition de celui qui rend maître le menteur impur?"
(l'Avesta)
= "la Sourate 9 - le Verset 31 du Coran.

"Quel est la sanction dece malveillant qui ne gagne sa vie qu'en blessant les agriculteurs honnêtes et les animaux ?" (l'Avesta)
= la Sourate 9 - le Verset 34 du Coran.


Et une anecdote pour finir :

Jusqu'aux alentours de l'An Mille, les commentaires autour du Coran ont été innombrables, en liaison avec une grande effervescence intellectuelle.
Mais en l'an 1019, le calife abasside de Bagdad, Al Qadir, craignant que la libre discussion ne mène à des divisions, a fait lire au palais et dans les mosquées une épître dite «épître de Qadir» (Risala al-qâdiriya) par laquelle il a interdit toute exégèse nouvelle et fermé la porte à l'effort de recherche personnel des musulmans (l'ijithad).
Cette décision a été d'une importance capitale pour l'islam. Elle a tué l'esprit critique et favorisé l'imitation servile (le taqlid). Toute recherche sur le texte primordial du Coran devenait alors impossible... et toute chance de trouver la vérité aussi.
Mais ...
En 1972, au cours de travaux de restauration, des ouvriers ont trouvé une cachette dans les combles de la grande mosquée Jama'a al-kabir de Sanaa, capitale du Yémen. une sorte de cachette, ce qu'on appelle une "tombe de papiers".
Le dr Gerd-Rüdiger Puin a découvert alors qu'on était en présence de manuscrits arabes du Coran parmi les plus anciens connus. Il obtint le droit d'en tirer des microfilms, malgré les réticences de ses hôtes, car les autorités du Yémen ne souhaitaient pas que le contenu des manuscrits soit révélé au grand public. Le Dr Puin soupçonnait même les Yéménites d'avoir volontairement exposé à la lumière ses microfilms, pour les rendre inutilisables. Cependant les pellicules étaient voilées, mais encore lisibles.
Quelle inavouable vérité renferment donc les manuscrits de Sanaa ? Pour le Dr Puin, ils constituent la preuve que le texte coranique a connu des "évolutions". Bref, qu'il a une histoire. Et cette hypothèse n'est tout simplement pas admissible pour l'islam sunnite.
Gerd Puin a étudié le fac-similé des manuscrits de Sanaa : "Il s'agit d'un Coran de style hedjazien, qui correspond à la graphie en vigueur à la fin du VIIe siècle dans le Hedjaz, la région de La Mecque et de Médine." Le manuscrit daterait de 680 environ.
En comparant les manuscrits il relève une dizaine de variantes par page avec le Coran actuel, mais qui ne sont "pas significatives". La découverte qui l'enthousiasme le plus est un palimpseste : un manuscrit sous l'écriture duquel apparaît nettement un autre texte, effacé par lavage. "Ce texte est également un passage du Coran, écrit dans le même style archaïque. Il est malheureusement impossible de le déchiffrer. Sans doute s'agit-il du plus ancien texte coranique connu.
Pourquoi l'a-t-on 'lavé' ? Peut-être simplement parce que son contenu n'était plus admissible..." Fin de l'article.

En ce qui concerne les palimpsestes, la technologie actuelle permet de les déchiffrer, contrairement à ce que dit ce texte.
Stephanopoulos
theodore
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Le Mahomet de Virgil Gheorghiu

Message par theodore »

Il y aussi le "Mahomet" du prêtre orthodoxe roumain Virgil Gheorghiu que j'aurais bien aimé lire, est-il bien documenté?
La Croix est la volonté prête à toutes les douleurs.
Saint Isaac de Nisibe dit le Syrien
NicolasII
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Re: Le Mahomet de Virgil Gheorghiu

Message par NicolasII »

Merci pour toutes ces réponses, je suis comblé au delà de ce que j'espérai.
Je vais prendre le temps tout bien lire.

Nicolas.
Makcim
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Message par Makcim »

A lire :
un article d'un catholique qui recadre les sources "chrétiennes " du Coran autrement dit "l'Evangile de Barnabé" : http://biblio.domuni.org/articlesbible/ ... /index.htm

et un site très fouillé, consacré à l'étude comparative de nos Saintes Ecritures et du livre des mahométans par des protestants :
http://facealislam.free.fr/
Makcim
Claude le Liseur
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Re: Le Mahomet de Virgil Gheorghiu

Message par Claude le Liseur »

theodore a écrit :Il y aussi le "Mahomet" du prêtre orthodoxe roumain Virgil Gheorghiu que j'aurais bien aimé lire, est-il bien documenté?
Non. A fuir absolument. Après avoir écrit de beaux romans sur la Roumanie orthodoxe dans les années 1950 et 1960 (La Vingt-Cinquième Heure, Pourquoi m'a-ton appelé Virgile?, Dieu ne reçoit que le dimanche...), Mgr Gheorghiu a commis deux ouvrages d'une valeur on ne peut plus douteuse. Christ au Liban était un ouvrage militant à la gloire de la cause maronite, remplie d'affirmations incroyables, comme celle que les papes de Rome allaient directement au paradis après leur mort et étaient automatiquement canonisés (p. 131 de l'édition de 1979), alors que l'Eglise catholique romaine elle-même n'a béatifié ou canonisé aucun de ses pontifes parmi ceux qui se sont succédé entre Célestin V (+ 1296, canonisé 1313) et Pie V (+ 1572, canonisé 1712), et ensuite plus aucun jusqu'à Innocent XI (+ 1689, béatifié 1956). Evidemment, quand on voit ce genre d'orthodoxes plus papistes que la Papauté elle-même, on ne s'étonne plus de voir les ennemis de l'Orthodoxie - comme ceux qui s'illustrent sur tel forum qui fait la gloire de la théologie eschatologique belge - trouver que tel ou tel intervenant qui défend la tradition orthodoxe sur le présent forum est radical ou excessif: s'ils jugent la théologie orthodoxe à l'aune des bobards de Mgr Gheorghiu dans Christ au Liban, ils risquent l'apoplexie s'ils débarquent en Grèce ou en Roumanie.
La Vie de Mahomet est un simple décalque de la Sirat, c'est à dire de la version officielle musulmane de la bi-hagiographie de Mahomet. Vous retrouverez donc dans le livre de Mgr Gheorghiu toutes les affirmations maintenant battues en brèche par les avancées de l'islamologie (et ça ne remonte pas à hier, puisqu'il y avait déjà eu les livres du pseudo-Hanna Zachariah dans les années 1950). Si vous vous plongez dans La Vie de Mahomet de Mgr Gheorghiu, vous lirez à peu près les croyances d'un musulman traditionnel qui ne serait au courant ni de Hanna Zacharia, ni de Bertuel, ni de Crone, ni de Max Cabantous, etc. Ce livre est tellement orienté en faveur de l'Islam que le regretté Cheikh Si Hamza Boubakeur, l'ancien recteur de l'Institut musulman de la Grande mosquée de Paris, le recommandait pour la "catéchèse" des Français qui voulaient se convertir à l'Islam (document reproduit en annexe à Pierre Assouline, Les nouveaux convertis, Folio Actuel N° 30, Gallimard, Paris 1992).
On peut tout de même se poser des questions sur le sérieux d'un prêtre orthodoxe capable d'écrire à la fois un livre appelant à la croisade aux côté des phalanges maronites contre les musulmans libanais et un livre reprenant sans le moindre esprit critique les légendes musulmanes sur la vie de Mahomet. Et alors que cet homme avait auparavant écrit des livres qui sont de beaux témoignages sur la tradition orthodoxe vécue dans les villages de Moldavie. Je me demande si cette évolution n'était pas due au fait que Mgr Gheorghiu avait pris l'habitude de fréquenter des milieux pour qui l'hostilité à l'égard de notre Patriarcat roumain était devenue le seul critère de vérité.
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

Une dépêche AFP trouvée sur le site laïc-info et qui me semble apporter quelque complément à tout ce que nous avons dit sur l'islam.
Ou quand l'iconoclasme confine à la folie...
Egypte: une fatwa contre les statues abasourdit les artistes égyptiens
Une fatwa interdisant l'exposition de statues dans les maisons a provoqué la colère des artistes et des intellectuels en Egypte, qui assurent qu'elle est dictée par un obscurantisme moyenâgeux.
Se référant à un hadith du prophète Mahomet affirmant que les sculpteurs seraient tourmentés lors du Jugement, le mufti Ali Gomaa, l'une des plus hautes autorités religieuses du pays, a publié cette semaine la fatwa considérant que "la fabrication de statues est proscrite et qu'il est donc interdit de les exposer dans les maisons".
Si les Frères musulmans qualifient cette fatwa de "leurre" destiné à détourner les Egyptiens de leurs véritables préoccupations, les artistes estiment que l'avis religieux est une bombe à retardement, dont les dégâts pourraient toucher même l'archéologie pharaonique.
"C'est une catastrophe!", déplore le romancier Gamal al-Ghitani. "Il ne serait désormais pas improbable que quelqu'un entre dans le temple de Karnak (Louxor) ou un autre temple pharaonique et le détruise".
Toute représentation humaine, et pas seulement celle des prophètes, est interdite par les théologiens les plus traditionalistes de l'islam sunnite.
Ils affirment que dès son retour à la Mecque après un exil (hijra, 622 après J.C.) de dix ans à Médine, Mahomet avait ordonné la destruction des statues érigées autour de la Kaaba.
"C'est une fatwa digne des talibans et son auteur peut être considéré comme le mufti du terrorisme", ajoute M. Ghitani.
Selon lui, de nombreux religieux progressistes, "comme Mohammad Abdou, ont considéré il y a plus d'un siècle que les statues et les images ne sont pas proscrites et que seule leur adoration l'est".
Au début du siècle dernier, l'imam réformiste Mohammad Abdou a autorisé la représentation humaine par le dessin, la peinture et la sculpture.
Se fondant sur les mêmes textes que ses prédécesseurs, il avait affirmé que l'interdiction de la représentation humaine était "caduque", la propagation de la foi islamique ayant rendu impossible le retour à l'adoration des statues, courante durant l'ère pré-islamique.
"Il est très étonnant que cette fatwa (du mufti Gomaa) ignore 15 siècles d'histoire et considère que l'humanité n'a pas changé depuis les premiers temps de l'islam", s'est indigné le réalisateur, Dawoud Abdel Sayed.
"C'est ce type de mentalité qui a conduit à la destruction par les talibans de statues bouddhistes", estime-t-il.
La destruction en Afghanistan en 2001 des statues pré-islamiques de Bamiyan, sculptées dans la falaise entre les 2e et 5e siècle, était destinée, selon le chef suprême des talibans le mollah Mohamed Omar, à "prévenir un retour de l'idolâtrie".
"Verrait-on aujourd'hui quelqu'un adorer la statue de Gamal Abdel Nasser?! (...) Cette statue rend hommage à un homme qui a eu un rôle important dans la vie politique en Egypte", a poursuivi M. Abdel Sayed.
Pour le romancier Ezzat al-Qamhawi, une telle décision ne peut que repousser les musulmans vers le Moyen Âge.
Youssef Zidane, un responsable à la Bibliotheca Alexandrina, s'étonne que cette question soit même soulevée dans un pays où "plus de 10 institutions gouvernementales enseignent la sculpture".
"Aucun artiste ne pense à imiter la création humaine. Il vise tout simplement la beauté et Dieu aime la beauté", a affirmé de son côté l'architecte Salah Masri.
"Cette fatwa reflète l'incapacité de l'institution (religieuse) à comprendre les problèmes auxquels sont confrontés les musulmans à l'heure actuelle", a lancé M. Ghitani.
Ce point de vue est partagé par Essam al-Aryane, porte-parole des Frères musulmans. "Ce qui inquiète les gens c'est la corruption. Ce qu'ils attendent c'est une fatwa contre la même présence à la tête du pays pendant 25 ans et non contre les statues", estime-t-il.
Alors que de nombreux Egyptiens n'ont pas de quoi acheter du pain, dit-il, ils n'ont certainement pas de quoi s'offrir des statues.
Copyright - AFP
Plus de science -- un imam, il y a quelques années, avait lancé une fatwa contre ceux qui ne croient pas que la terre est plate. Ce pauvre imbécile ne savait même pas qu'à l'époque de Mohammed, tout le monde savait que la terre était ronde, mais passons. Plus d'art...
Alors qu'est-ce qui reste d'humain ?
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Antoine
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Message par Antoine »

Mahiedine avait ouvert cette rubrique par l'insulte suivante:
ET LES JUIVE SONT LES FILE DU DIABLE ET AUSSI LES PETIT FILS DU CAUCHON.
Je pensais que ce n'était qu'une insulte mais au gré de mes lectures je m'aperçois qu'en réalité c'est pire: il ne faisait que citer le Coran! (sourate 5, v. 60). «ceux dont Il a fait des singes, des porcs,»
Sont visés dans cette sourate les gens du livre qui ont précédé Le Coran, c'est à dire les Juifs.
hilaire
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Message par hilaire »

Et les chrétiens aussi alors? puisque chronologiquement le coran a été inventé après la venue du Christ.
Stephanopoulos
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Message par Stephanopoulos »

Antoine a raison, ce verset vise les juifs.

D'après André Chouraqui : "Le verset évoque l'histoire des juifs qui transgressèrent le repos du Shabbat et de ceux qui ne crurent pas au miracle de la table céleste servie pour Jésus; voir 5. 114 : pour châtiment de leur incrédulité, disent les commentaires, ils furent métamorphosés en singes et en porcs." (le coran, traduit et présenté par André Chouraqui, éd. Robert Laffont, Paris, 1990, note p. 235)

Cela dit, les chrétiens (c'est-à-dire nous) ne sont guère mieux lotis!

Par exemple, le verset 5. 69 proclame le salut éternel des sabéens, des juifs et des chrétiens. Cependant, le verset 3. 85 a abrogé le verset 5.69
ce qui fait que, finalement, les commentaires classiques proclament que le salut n'est pas possible en dehors de l'islam. (Cf. Ibid., note p. 238)
Stephanopoulos
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

Ce verset s'inscrit au coeur de toute une diatribe sur les juifs, exact. Mais comme j'ai fait la bêtise d'acheter la traduction (????) de Jean Grosjean, dans mon exemplaire, les raisons de ladite diatribe sont assez peu claires. Merci à Stephanopoulos de ses précisions.
A ce propos, la traduction J. Grosjean, en édition de poche, est paraît-il la plus fréquente dans nos banlieues et autres pays francophones. Cela ne risque pas de former les esprits à la logique minimale.
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Antoine
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Message par Antoine »

« Je présenterai d'abord la traduction française la plus sérieuse, celle de Régis Blachère, […]»

Dixit Remi Brague ci-dessus, message du Jeu 06 Avr 2006 23h28
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

En contrepoint de ce fil, trois nouvelles données vendredi soir sur Radio Courtoisie par une journaliste de Valeurs actuelles invitée par Brigitte Level, toutes trois récentes.
Je les ai notées au vol pendant qu'elle parlait, ce qui explique que je n'ai pas toutes les précisions voulues.
Juin 2006. En France. Lors de l’inauguration d’une exposition de photos sur l’Arménie, des associations turques ont fait une descente et exigé que le photographe retire des légendes faisant allusion au génocide. Il a refusé. Les autorités locales étaient là, au buffet d’inauguration. A la suite de l’incident, l’expo fut immédiatement fermée sans avoir donc pu être ouverte au public.
Toujours 2006, colloque sur les Coptes à Paris. Le public noyauté par des intellectuels musulmans qui ont refusé qu’une femme parle à ce colloque. L’intervenante a été priée de s’incliner.
Encore 2006. Marseille. Un diacre copte en règle, ayant entamé une demande de naturalisation en France, propriétaire d’une boutique de sandwichs qui lui permettait de vivre, chargé dans son Eglise de la catéchèse, a été expulsé sur demande des imams locaux qui lui reprochent son influence sur leurs jeunes.
Ce message coranique sans ambiguïté devrait nous amener à la vigilance sur la façon dont les autorités françaises, au mépris de notre propre loi, favorisent ainsi l’islam au détriment des chrétiens ou des autres, d'ailleurs.
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Kazan
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Message par Kazan »

Chère Anne Geneviève,
Tout cela ne peut étonner que ceux qui n'ont pas encore intégré le caractère intrinsèquement satanique, de l'humanisme, des "lumières" et de tous les systèmes politiques qui en sont nés (à vrai dire, ils couvrent largement la planète)
La république Française se dit "laïque". En fait, dépuis le début avec le culte de l'être suprème ou de la déesse raison, elle favorise toutes les religions ou croyances à l'exception du christianisme dont elle est l'ennemi bien mal masqué et qu'elle pense ainsi affaiblir ou détruire.
Et si la hierarchie catholique de France s'entend si bien avec les "autorités" la conclusion est facile à tirer.
A l'Est, tout au long des siècles, l'Orthodoxie a survécu au pire parce qu'elle possédait la Vie et au prix d'un nombre inoui de martyrs.
A l'Ouest, je ne donne pas cher des autres croyances chrétiennes.
Mais je ne lis pas dans le marc de café ... c'est seulement logique et tout aussi logiquement, comme dans les balkans, les orthodoxes devraient, un jour, être persécutés en Occident.
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