Réflexions à l'occasion de la Nativité de notre Seigneur

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crevieauxp
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Réflexions à l'occasion de la Nativité de notre Seigneur

Message par crevieauxp »

En 1812, Alexandre Ier jura de se laisser pousser la barbe et de se réfugier dans les forêts avec son peuple plutôt que de se soumettre aux volontés de Napoléon. Ce que la Russie put ainsi montrer de meilleur, de plus fidèle doit nous inspirer dans nos querelles.

Nous venons de fêter la Nativité de notre Sauveur Jésus-Christ. Notre Sauveur est venu nous offrir la rédemption. Personne n’a jamais imaginé que ç’était à nous comme à nos ancêtres contemporains de notre Seigneur de Le sauver: depuis quand le pécheur doit-il sauver son sauveur ?

En constituant la tête de l’Eglise, notre Sauveur donna Son corps pour le salut de nos âmes. Depuis, les chrétiens constituent au sein de Son Eglise le corps de celle-ci. Mais le Séparant sous toutes ses formes a toujours voulu casser l’Eglise de Dieu. Cette lutte est stupide et n’a aucun sens, ce qui atteste de la bêtise même du Séparant qui s’imagine pouvoir être plus fort que le Père lui-même. Nous devrions comprendre cela pour ne pas craindre le Démon : Dieu est plus fort éternellement.

Mais notre pauvre âme déchue et fracassée par la chute n’y entend plus grand-chose. En fait, nous craignons plus le Démon que Dieu lui-même, nous redoutons sa force et son inconcevable victoire sur Dieu et Son Eglise. Nous oublions qu’avant la chute, Adam et Eve ne connaissaient pas la peur ni la honte, ni le doute ni la méchanceté. D’avoir manger à l’arbre de la connaissance ne nous a rien fait connaître de bien ni de mieux que ce que notre Créateur nous donna de vivre en nous créant. Par notre désobéissance, nous avons pris la liberté de choisir la mort plutôt que de rester dans la vie. Par cette liberté, nous nous sommes affaiblis car nous devons faire désormais un effort contre-naturel à notre condition de déchus. Cette force, nous devons la puiser au fond de nous avec l’aide de la Grâce divine qui sans notre concours ne peut pas nous assurer le salut.

Cette expérience tourmentée de la désobéissance et de la séparation avec notre Créateur est une lutte incessante car c’est à chaque instant qu’il nous faut renouveler notre allégeance à la milice spirituelle de notre Seigneur Jésus-Christ. Ce devoir vital nous conduit parfois à croire en la nécessité de sauver ce qui n’est pas à sauver par définition puisqu’il s’agit de l’instrument de notre salut et que cet instrument est le fait de Dieu lui-même. Ainsi, notre pauvre esprit qui devrait être l’œil de notre âme nous égare souvent avec sincérité à prendre pour vrai des attitudes ou des positions démoniaques et indéfendables. Nous sommes alors aveuglés par la panique ou l’emportement ou la colère ou la bêtise qui nous font croire être intelligents alors que nous ne sommes que stupidement malins c’est-à-dire le jouet du Malin. Nous entendons ainsi qu’il faut sauver l’Eglise alors que c’est l’Eglise qui sauve. Nous imaginons ainsi que la Vérité doit être sauvée alors que c’est elle qui sauve. Notre conduite comme membre de l’Eglise et notre raisonnement nous portent inconsciemment à vouloir sauver Dieu lui-même !

C’est un blasphème pire encore que celui de vouloir se mesurer à Dieu comme le Séparant puisqu’on se place ainsi dans le rôle salvateur qui n’appartient qu’à Dieu lui-même : certains adoptent la posture du sauveur de l’institution ecclésiale comme les sergianistes tandis que d’autres disent juste en rappelant que seule l’Eglise du Sauveur sauve. Même parmi ces derniers, les suspects abondent ; leur colère et leur véhémence rendent faussement témoignage à la justesse de la Vérité. Etre du Dieu de vérité et d’amour peut-il rendre méchant donc destructeur de son prochain ou amer donc destructeur pour soi-même ? Comment trouver l’édification de son âme dans de tels témoignages de douleur personnelle exprimés sous couvert de foi ardemment proclamée ? Où y voir nos œuvres pour notre prochain à travers autant d’acrimonie et de méchanceté pour autrui? Que nous sommes loin du chemin de l’amour de notre ennemi ! Pourtant, il n’y a pas d’amour sans celui que nous accordons à nos ennemis.

Depuis deux millénaires, il s’est toujours trouver des chrétiens authentiques pour proclamer et répéter la Vérité au monde à travers la vraie Foi. Par fidélité à Dieu et la Vérité, il fallait combattre les fourberies et les hérésies. Ces dernières eurent trois visages. Les premiers siècles de l’Eglise virent les contestations stériles sur la double nature de la personne de notre Sauveur Jésus-Christ. Ces querelles christologiques résolues, l’Eglise dut témoigner dans les fourbes causeries latines sur la pneumatologie. Chaque fois, le christianisme trouva des fidèles à travers la bouche desquels il put continuer d’exister et d’être ainsi disponible pour toutes les brebis égarées. Enfin, nous assistons maintenant aux tendances d’écartèlement ecclésiologique. A moins de cesser de croire en Dieu, nous devons comprendre que cette guerre est un leurre de plus, qu’elle est artificielle et qu’elle prendra fin par la manifestation de la victoire de l’Eglise de Dieu seule détentrice de la Vérité car l’Eglise a déjà gagné. Par définition, elle est juste et vraie et a déjà gagné toutes les luttes spirituelles avant même qu’elles n’aient commencé. Les luttes surgissent puis elles disparaissent tandis que l’Eglise et la Vérité restent.

La prière, le recueillement, l’ascèse, le jeûne nous rapprochent de Dieu. Cette progression souvent chaotique et empirique nous permet de voir notre indignité avec toujours davantage de force. En nous rapprochant de Dieu, la conscience de nos péchés est toujours plus vive. Lorsque la glace pétrifiée fond de plus en plus vite au contact de la chaleur du Paraclet, la douleur est plus grande à moins d’avoir chassé entièrement le péché de notre âme. Quand nos vues obscurcies regardent plus droit vers la lumière du Sauveur, nous devenons aveugles à moins de voir par Sa lumière.

Des trésors d’inspiration prirent les formes les plus variées : théologiques, ecclésiologiques, eschatologiques, iconographiques, catéchétiques… Toujours inspirés, jamais inventés, les hommes de Dieu n’eurent jamais besoin de se consulter ou de se connaître. Les distances géographiques et les époques différentes ne permirent pas à nos Pères de se concerter pour expérimenter la même vie en Christ. Jamais ils ne durent se souvenir des dires de leurs prédécesseurs pour vivre et nourrir l’Eglise de leurs trésors spirituels ; lorsqu’on dit et vit la Vérité, nul besoin de souvenirs alors que le menteur, l’apostat ou le parjure doivent se rappeler tous leurs mensonges pour continuer à tromper : ne pas oublier ses mensonges pour ne pas se contredire, ne pas oublier ses omissions ou déformations pour ne pas être confondus.

Même lorsque les saints hommes de Dieu semblent en désaccord, rien ne les oppose : ni le fonds, ni l’intention, ni l’inspiration car, comme les Evangiles, les écrits des Pères se complètent et ne se contredisent.

Tout cela, nous autres pauvres mortels et pécheurs avons reçu le don de le comprendre aussi dans la vie profane. Lorsqu’un professeur d’arithmétique accorde la note maximale à l’élève qui trouve que 2+2 font 4, il n’a aucun besoin de se souvenir ou de connaître l’infinité des autres réponses, toutes fausses puisqu’il n’y en a qu’une qui dit que c’est 4. Dès que le professeur accorde quelques points à l’élève qui donnerait une autre réponse, est-il encore digne d’enseigner l’arithmétique ? A-t-il oublié la vraie réponse, la vérité, c’est-à-dire 4 ? Non, mais il a choisi comme Adam et Eve une autre réponse, une autre voie et cette voie ne conduit plus à 4, c’est-à-dire la vérité mais au mensonge puisqu’il n’y a que 4 pour dire la vérité de 2+2.
Serait-ce de la haine que de témoigner dans le silence de la prière, dans la douceur d’une réfutation chaleureuse ou la vigueur d’une proclamation publique à celui qui s’égare de 4 que rien n’a changé à 2+2 ? Que la Vérité n’a jamais changé, ne change pas et ne changera jamais puisque la Vérité de Dieu est éternelle comme Dieu lui-même ?

Qui oserait dire du professeur d’arithmétique qu’il est fou lorsqu’il rappelle à ses élèves, ses collègues, ses supérieurs qui en douteraient que 2+2 c’est 4 depuis toujours et pour toujours ?
Qui sinon les cancres, les malhonnêtes, les dérangés, les manipulés?
Qui sinon l’esprit de non-Vérité, l’esprit du trouble, de la falsification, de la déstabilisation, de la désobéissance, en fait de séparation?
Qui sinon l’esprit frondeur qui choisit de se battre contre l’éclatante Vérité ?
Qui sinon les alliés conscients ou involontaires du Malin, car il n’y a que le Malin pour ne pas être la Vérité car la Vérité est substantiellement unique, totale et éternelle. Tout ce qui n’en est pas n’est donc que du Malin, sa proie ou son fait.

Mais le plus tragique est que le Malin est malin : il prend les habits de ceux qui disent la Vérité pour qu’avec leurs propres mots il les accuse de ses propres péchés.

Nous connaissons tous des situations terriblement similaires dans nos paroisses ou diocèses. Même lorsque les mots justes que nous entendons sortent de la bouche de ceux qui sont manipulés ou jouets du Malin, nous devons écouter ces mots justes et tenter d’oublier que c’est le Malin qui les fait prononcer pour nous confondre. Sachons donc écouter les justes paroles d’amour sans condamner le pécheur qui les prononce et pour rester ou revenir dans la Vérité de Dieu, de Son Eglise et dans l’unité du Père, du Fils et du Saint Esprit.

Puisse l’exemple du tsar Alexandre Ier nous inspirer, amen.

Philippe Crévieaux
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