Bac et avortement

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Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

L’Église n’a jamais sous-estimé l’importance du rôle de l’État, régulateur et animateur de la société globale. Elle ne sous-estime pas non plus les motivations des hommes d’État : à côté de débordements tyranniques ou démagogiques, il y a presque toujours à un moment ou à un autre le désir ou la nécessité de se rendre utiles à leurs concitoyens, même s’ils sont animés par une idéologie totalitaire.

L’action du pouvoir n’a que rarement à satisfaire aux critères du Bien ou du Mal, du Vrai ut du Faux. Il leur revient de choisir entre plusieurs possibilités et de mobiliser les énergies de leurs concitoyens au sercive d’une politique. À l’heure actuelle en France beaucoup d’hommes politiques voudraient trouver le moyen de diminuer la charge de l’État, de stimuler l’initiative privée, de faire accepter plus d’austérité pour obtenir plus d’efforts… Mais comment obtenir l’adhésion des électeurs ? Pour l’instant, aucun homme politique n’y arrive.

Il me semble que c’est justement le poids des idéologies qui est en cause. Chaque homme politique se sent obligé prétend que son programme est dicté par une idéologie plus vraie et donc plus efficace. Tant que l’on se placera sur ce plan-là, on ne pourra pas avancer. Churchill, lui, en 1940, ne proposait aux Anglais que du sang et des larmes.

Tant qu’on ne voudra faire de la politique qu’au nom de Vrai et de la meilleure chose possible, tant qu’on attendra des électeurs qu’ils y adhèrent avec enthousiasme, on fait de la politique qu’un substitut de religion. En ce sens je crois que Giorgos a raison de placer la religion au niveau de la création esthétique, et non au niveau de l’éthique. Mais j’aimerais trouver un autre mot que “esthétique”.

Il me semble que le rejet actuel de toute idéologie, ainsi que de tous les leaders politiques, ouvre un petit espoir. C’est en ce sens que je dis que nous sommes en train de liquider la Révolution française.
Jean-Louis Palierne
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eliazar
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Le bac, l'avortement, Louis XVI et quelques autres

Message par eliazar »

J'aime ce que vient d'écrire Jean-Louis Palierne:
Il me semble que le rejet actuel de toute idéologie, ainsi que de tous les leaders politiques, ouvre un petit espoir. C’est en ce sens que je dis que nous sommes en train de liquider la Révolution française.
Parce que j'y vois, comme dans la plupart des citations bibliques, une cascade de sens voisins superposés, qui s'éclairent les uns les autres quoique se rapportant à des profondeurs et des strates différentes.

Par exemple, il est clair que personne ne croit plus, dans la France du quotidien, à la sincérité (encore moins à l'efficacité) des "programmes idéologiques" mis en avant par les divers partis.

Mais lorsque Giorgos écrit :
...il me parait voir un certain air de gêne parmi les membres français du Forum quand le sujet de la monarchie est évoqué.
...j'aimerais lui rappeler que les citoyens de ce pays-ci n'ont que très rarement des opinions philosophiques claires, vis à vis de la monarchie. Alors qu'ils ont (mais pas tous, bien sûr) une petite idée de QUI serait le(ur) roi de France s'ils avaient la stupidité de rétablir la monarchie - héréditaire ou pas.

Notre Forum (et c'est son honneur) traite avec une grande hauteur de vue des sujets comme celui-ci - un sujet qui entre nous soit dit devient un peu cousin du Catoblepas, c'est à dire un animal tellement multiple qu'on ne sait plus très bien dans quelle espèce le situer.

Et le problème de la politique (la monarchie ou la démocratie, et leurs diverses formes, sont bien du domaine de la Cité, de la Polis) est que les citoyens en jugent davantage par ce qu'ils voient et par ce qu'ils touchent du doigt que par l'analyse des universaux ou par la confrontation des idéaux.

Or ils ont vu en quelques dizaines d'années tous les chefs politiques (et tous les partis qu'ils représentaient les ont suivis sans grandes protestations) renier froidement leurs convictions les plus affichées, et se renier les uns les autres, pour ensuite s'acoquiner les uns et les autres en marchant allègrement sur leurs grandes affirmations idéologiques de la veille - pour être les premiers "à la soupe" que servirait leur ennemi idéologique de la veille.

Les citoyens ne croient donc plus en la valeur de leurs votes, ni en celle de leur appartenance : même les syndicats trouvent de moins en moins d'adhérents. Quant aux grands Partis, ils sont tous d'accord pour faire un silence unanime sur leur nombre réel d'adhérents, c'est à dire de cotisants réguliers.

Mais n'en déplaise à ceux d'entre nous qui restent attachés à la notion de Patrie, je dois bien constater qu'il en est de même sur ce plan-là. Je fais partie d'une génération si lointaine que je me souviens encore des cours de civisme, et de patriotisme, donnés par notre instituteur. Mais quelques années plus tard, j'ai vu l'armée française prendre la clé des champs devant l'envahisseur allemand, et des corps d'armée entiers se rendre avec discipline, à pied et escortés de quelques rares soldats ennemis, dans les camps de prisonniers où on leur disait d'aller. Ils s'étaient laissés encercler sans même faire usage de leurs armes, et leurs état-majors n'avaient rien fait pour les mettre en état de défendre cette Patrie, ni même pour le leur demander... Il en est résulté la doctrine gaullienne d'une armée de métier, qui elle, au moins, avait quelques chances de faire son travail puisque payée pour cela - hors états d'âme.

Pour revenir à la belle phrase de Jean-Louis Palierne que j'ai mise en exergue de ma réflexion (un peu goguenarde, je l'avoue) je ne crois pas qu'elle doive être limitée à la seule "liquidation de la Révolution Française".

De même que De Gaulle imaginait mal le peuple français prendre les armes à l'avenir pour défendre le sol sacré de la Patrie, j''imagine mal le dernier carré de monarchistes français se faire tuer pour le Comte de Paris avec autant d'héroïsme que les Suisses en eurent pour défendre Louis XVI.

La seule question qui m'interpelle VRAIMENT serait plutôt : Combien de chrétiens sincères se feront-ils tuer pour protéger leur Évêque ?
< Demeurons dans la Joie. Prions sans cesse. Rendons grâce en tout... N'éteignons pas l'Esprit ! >
Jean-Louis Palierne
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Message par Jean-Louis Palierne »

Dans un élan prophétique, Éliazar aperçoit dans l’allusion que j’ai faite au désenchantement actuel des Français
comme dans la plupart des citations bibliques, une cascade de sens voisins superposés, qui s'éclairent les uns les autres quoique se rapportant à des profondeurs et des strates différentes.
Je remercie Éliazar des multiples niveaux d’exégèse où il place l’analyse de mes propos, mais je n’avais pas l’intention de placer ici une critique des intentions et des faiblesses des hommes politiques. C’est pourquoi je crois que le présent désenchantement ne peut se ramener à ce niveau, par exemple lorsque Éliazar écrit :
Or ils ont vu en quelques dizaines d'années tous les chefs politiques (et tous les partis qu'ils représentaient les ont suivis sans grandes protestations) renier froidement leurs convictions les plus affichées, et se renier les uns les autres, pour ensuite s'acoquiner les uns et les autres en marchant allègrement sur leurs grandes affirmations idéologiques de la veille - pour être les premiers "à la soupe" que servirait leur ennemi idéologique de la veille.
Il me semble tout au contraire que le désenchantement politique actuel porte plus sur le poids des idéologies politiques dans l’action des dirigeants. Ler dirigeants des partis croient encore trop à leurs programmes.

À ce propos je voudrais corriger une étourderie qui m’a échappée dans mon précédent message (d'ailleurs farci de coquilles), où j’avais écrit
je crois que Giorgos a raison de placer la religion au niveau de la création esthétique, et non au niveau de l’éthique.
Je n’attribuais pas une telle ânerie à Giorgos, mais je voulais écrire : «… de placer la politique non au niveau de l’éthique…»

C’est qu’en effet à mon sens le critère de choix d’un bon dirigeant politique est qu’il inspire suffisammenr de confiance aux citoyens pour qu’ils acceptent de mobiliser leurs énergies dans un effort commun. Au lieu de cela nous voyons les hommes politiques d’aujourd’hui se battre pour faire croire qu’ils luttent pour un meilleur “vivre ensemble”, pour “l’égalité des chances”, pour la “tolérance”, pour “les droits de l’homme”, pour la lutte contre l’exclusion etc. Ces mots d’ordre ne suscitent aucunement l’enthousiasme des électeurs (pas plus d’ailleurs que naguère la réduction de la durée du travail).

À mon avis ces idoles creuses auxquelles les hommes politiques n’osent pas toucher sont les derniers échos, très lointains, de la philosophie des Lumières et de la Révolution française. C’est en ce sens que j’ai dit que nous avons liquidé la Révolution française. Mais nos “élites” politiques, intellectuelles et médiatiques ne s’en sont pas encore rendu compte. Elles sont encore sous le règne du politiquement correct.

À mon avis tout cela n’a rien à voir avec un débat entre monarchie et démocratie. Je prétends que l’Église devrait pouvoir bénir tout gouvernant qui a obtenu la confiance des électeurs et reçu légitimement le pouvoir exécutif. C’est ce que l’Église russe a fait en bénissant naguère Eltsine, puis récemment Putine, et c’est ce qu’elle fera un jour en bénissant leurs successeur. C’est reconnaître le mandat du ciel, tout en se souvenant que ce type de mandats est éphémère, car soumis aux aléas de l’histoire de l’homme.

Bien que je sois né dans la seule ville de France qui possède une “Place Louis XVI ”, au centre de laquelle s’élève la seule statue publique du roi guillotiné, je continue à croire que l’adoption du principe héréditaire n’a fait que compliquer inutilement la vie politique de l’Occident.
Jean-Louis Palierne
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J-Gabriel
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A Claude le Liseur, à tous

Message par J-Gabriel »

En cherchant sur le forum tout ce qui était relatif à "Constantinien" (parce que je n’aime pas le terme) et je suis tombé sur cela :
Claude le Liseur, à la première page, le Jeu 07 Juil 2005 21:53, a écrit : Il est d'usage dans l'Eglise de commémorer le chef de l'Etat lors de la liturgie, même s'il n'est pas orthodoxe (sauf que l'on ne commémore par leur prénom que les chefs d'Etat orthodoxes).
Vous connaissez des églises où cet usage est respecté ? Personnellement je ne l'avais jamais remaqué, ici et ailleurs. Par contre dans notre église nous avons un siège pour le roi de Roumanie et un autre pour la reine.

(ne voyez aucune ironie, c’est de la curiosité…)
Claude le Liseur
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Re: A Claude le Liseur, à tous

Message par Claude le Liseur »

J-Gabriel a écrit :En cherchant sur le forum tout ce qui était relatif à "Constantinien" (parce que je n’aime pas le terme) et je suis tombé sur cela :
Claude le Liseur, à la première page, le Jeu 07 Juil 2005 21:53, a écrit : Il est d'usage dans l'Eglise de commémorer le chef de l'Etat lors de la liturgie, même s'il n'est pas orthodoxe (sauf que l'on ne commémore par leur prénom que les chefs d'Etat orthodoxes).
Vous connaissez des églises où cet usage est respecté ? Personnellement je ne l'avais jamais remaqué, ici et ailleurs. Par contre dans notre église nous avons un siège pour le roi de Roumanie et un autre pour la reine.

(ne voyez aucune ironie, c’est de la curiosité…)
Dans l'immense pagaïe qu'est l'Orthodoxie en Europe occidentale, la paroisse roumaine des Saints-Archanges, rue Jean-de-Beauvais à Paris, était la seule paroisse à ma connaissance - du moins tant qu'elle a dépendu du synode russe hors frontières; je ne sais pas ce qu'il en est advenu par la suite - à se conformer à l'usage et à commémorer à chaque liturgie "les autorités de la République française".
Anne Geneviève
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Message par Anne Geneviève »

Erreur, Claude, puisque ma paroisse (Saint Jean de San Francisco, à Asnières, patriarcat de Serbie) le fait aussi, mais ajoute les prénoms, ce qui ne devrait pas être si je comprends bien.
"Viens, Lumière sans crépuscule, viens, Esprit Saint qui veut sauver tous..."
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Anne Geneviève a écrit :Erreur, Claude, puisque ma paroisse (Saint Jean de San Francisco, à Asnières, patriarcat de Serbie) le fait aussi, mais ajoute les prénoms, ce qui ne devrait pas être si je comprends bien.
A ce qu'il me semble, l'usage correct devrait être de commémorer à la liturgie "le président de la République française" ou "les autorités de la République française" mais pas "le président Nicolas". En tout cas, on m'a toujours appris qu'il ne fallait pas dire le prénom du chef de l'Etat s'il n'est pas orthodoxe. J'ai encore le souvenir très précis d'un groupe de vieux-catholiques texans qui, s'étant placé sous l'autorité d'un évêque orthodoxe vieux-calendariste allemand résidant en Italie, avaient supprimé la commémoration du président des Etats-Unis d'Amérique par son prénom et avaient indiqué dans une communication que, pour respecter l'usage orthodoxe, ils commémoreraient désormais à la liturgie "le président des Etats-Unis" sans plus ajouter son prénom.

Rien n'empêche, bien sûr, de garder les prières pour les descendants des anciens souverains, pour les chefs des maisons royales ou impériales, les prétendants et dynastes, même déchus du pouvoir. (J'ai quand même assisté, une fois dans ma vie, à une célébration pontificale orthodoxe où, mais dans le cadre des matines et non pas de la liturgie elle-même, on a dit les prières pour "celui qui est le vrai roi de France", afin de prier pour le chef de la maison légitime sans se perdre dans des querelles de personnes). Mais il ne s'agirait que d'une faculté, tandis que ce devrait être en principe une obligation de commémorer les autorités actuelles.)
Emmanuel
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Message par Emmanuel »

L’usage le plus répandu en France il me semble est de prier laconiquement « pour notre pays et ceux qui le gouvernent » sans plus de précisions.
C’est ce qui se fait dans ma paroisse. Nous avions eu il y a 3 ou 4 ans la visite d’un prêtre américain de l’OCA. Invité à concélébrer, il mentionna lors de la grande entrée « le pwésident Djack Chiwac » ce qui m’avait fait sursauter, peu habitué à entendre spécifier nommément des dirigeants, non-orthodoxes de surcroît. Ayant eu l’occasion de voyager au Texas depuis, j’ai pu constater que ce n’était pas la pratique courante de l’OCA où j’ai entendu prier pour « our nation, its President, the civil authorities and the armed forces », ce qui est plus correct.

Je suis allé plusieurs fois ces derniers mois à la paroisse roumaine logée dans la crypte de l'église Saint Sulpice à Paris, on y mentionne, outre « ceux qui nous gouvernent », le roi Michel de Roumanie.
Claude le Liseur
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Message par Claude le Liseur »

Emmanuel a écrit :L’usage le plus répandu en France il me semble est de prier laconiquement « pour notre pays et ceux qui le gouvernent » sans plus de précisions.
C’est ce qui se fait dans ma paroisse. Nous avions eu il y a 3 ou 4 ans la visite d’un prêtre américain de l’OCA. Invité à concélébrer, il mentionna lors de la grande entrée « le pwésident Djack Chiwac » ce qui m’avait fait sursauter, peu habitué à entendre spécifier nommément des dirigeants, non-orthodoxes de surcroît. Ayant eu l’occasion de voyager au Texas depuis, j’ai pu constater que ce n’était pas la pratique courante de l’OCA où j’ai entendu prier pour « our nation, its President, the civil authorities and the armed forces », ce qui est plus correct.

Je suis allé plusieurs fois ces derniers mois à la paroisse roumaine logée dans la crypte de l'église Saint Sulpice à Paris, on y mentionne, outre « ceux qui nous gouvernent », le roi Michel de Roumanie.
Merci de votre témoignage. La pratique courante de l'OCA, telle que vous la décrivez, me semble en effet correcte.

C'est ici le lieu de rappeler que l'ordo prévoit des prières pour l'armée lors de la divine Liturgie. On se souvient de l'anecdote célèbre lors de la guerre russo-japonaise de 1904-1905 et du modus vivendi que saint Nicolas (Kassatkine), évêque de Tokyo, avait instauré: les paroisses sous son autorité priaient pour l'armée japonaise, puisqu'il s'agissait de l'armée du pays, et lui-même priait dans son intimité pour l'armée russe, puisqu'il s'agissait de l'armée de son pays d'origine.

Pour l'anecdote, la pratique que vous décrivez à propos de la paroisse roumaine de la crypte de Saint-Sulpice était aussi celle de la paroisse roumaine "libre" des Saints-Archanges à l'époque où elle dépendait du synode russe hors frontières. La paroisse des Saints-Archanges commémorait à la fois les autorités de la République française (règle qu'elle fut la seule à respecter pendant une longue période) et le roi Michel de Roumanie, ce qui était une manière fort honorable d'assumer l'exil en remerciant le pays d'accueil et en gardant la mémoire du pays d'origine. Cette commémoration du roi Michel valut d'ailleurs à l'église roumaine de Paris une durable vindicte de la part des autorités communistes roumaines et de leur représentation diplomatique en France.

Un prêtre russe m'avait dit qu'il y avait au moins une paroisse en Belgique qui respectait la règle et commémorait le roi des Belges.
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