Histoires vécues

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Antoine
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Histoires vécues

Message par Antoine »

Date : 07.05 22h51
auteur : Catherine


Profession de foi précoce ?

C'était en 1970. Mon mari et moi étions de plus en plus agacés par les
messes "petit papa Noël" ou "far-west" d'après Vatican II, et, séduits par
la belle liturgie de rite oriental d'une paroisse uniate d'Ukrainiens en
Angleterre où nous habitions à l'époque, nous commencions à la
fréquenter. Nous ne comprenions pas très bien les offices en slavon,
mais assez pour comprendre qu'ils ne suivaient pas le même calendrier
que nous. Toutes les fêtes étaient décalées de 13 jours par rapport aux
nôtres.
Le prêtre nous apprend qu'ils étaient restés fidèles au "calendrier julien",
en retard sur le grégorien. Qu'à cela ne tienne ! Les offices kto nous
étaient devenus franchement insupportables à entendre.
J'attendais alors notre deuxième enfant, et pendant ma grossesse, je lui
chantonnais les belles mélodies slavonnes que j'apprenais petit à petit.
Le docteur avait dit que l'enfant devrait naître le 27 juillet (selon le
calendrier civil). Le 27 juillet, c'est la Saint-Pantéléimon. Bon — me
disais-je, je ne connais pas ce saint, mais je vais chercher et lire sa vie.
Ce qui fut fait.
Le 27 juillet arrivé, aucun signe. J'attends 1, 2, 3, 4 jours, une semaine,
toujours rien. 9, 10, 11 jours, toujours rien. Le 12e jour, un samedi 8 août,
je téléphone à la clinique.
— Il ne faut pas trop attendre, — me dit-on — venez le lundi 10 août, à 8
heures du matin, on va provoquer l'accouchement.
Je raccroche, pas très rassurée. L'idée de provoquer artificiellement les
contractions ne me plaît pas trop, mais tant pis; ils doivent avoir
l'habitude, je leur fais confiance.
Or, la veille du jour prévu, le dimanche 9 août, plus exactement le 27
juillet (la Saint-Pantéléimon selon le calendrier julien), vers 5 heures et
demie du matin, je suis réveillée par des contractions bien naturelles.
Nous arrivons à la clinique vers 7 heures et demie. Mon mari me laisse à
la salle d'attente aux soins d'une sage-femme et s'en retourne pour
arriver à l'heure à la divine Liturgie.
— Prie pour moi. — lui-dis-je.
Les sages-femmes, dont une noire, font très bien leur travail, je suis
détendue, je somnole même un peu, malgré les douleurs. Je
m'assoupis carrément entre deux contractions. Il me semble avoir dormi
plusieurs heures quand je me réveille en sursaut et vois les murs de la
clinique bouger. La table d'accouchement tremble sous moi… Un
tremblement de terre… Tout de suite après, Judith naît. Je m'assoupis de
nouveau, d'épuisement cette fois, pendant que la sage-femme noire fait
la toilette du nouveau-né.
Elle m'apporte la petite toute proprette. Un nouveau-né aux yeux
grand-ouverts. Je n'ai jamais vu cela. En Hongrie, on dit que les enfants
qui naissent les yeux ouverts deviendront ou bien des peintres ou bien
des spirituels. Cela se comprend. Quelque chose à voir avec la
sensibilité à la lumière, sans doute.
Les sages-femmes et infirmières en font leur joie et la promènent
partout pour montrer à tout le monde "leur" nouveau-né qui a l'air de fixer
son regard profond sur quelque chose devant lui, et qui "en naissant a fait
trembler la terre sous la clinique", comme elles le disent.
Elle est "baptisée" chez les uniates. Les années passent. Elle a 5 ans
quand nous rejoignons l'Église orthodoxe grecque officielle, 10 lorsque
nous sommes enfin baptisés orthodoxes chez les "matthéistes", et 19
lorsqu'elle entre au monastère "matthéiste" dont l'église principale est
construite sur les reliques de Saint-Pantéléimon. Elle qui est née le jour
de la Saint-Pantaléimon selon le clendrier julien au lieu de celui selon le
calendrier civil, aurait-elle fait tôt, avant ses parents et aussi jeune, sa
profession de foi de "vieux-calendariste" ?
Dernière modification par Antoine le ven. 08 août 2003 11:35, modifié 1 fois.
Antoine
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Message par Antoine »

Date : 08.05 00h14
Ecrire à l'auteur : Olia


Imaginez la situation d'un mariage mixte où l'épouse est chrétienne orthodoxe et
l'époux n'est ni baptisé, ni croyant (à ma connaissance). Qui plus est, le mari
est d'une confession de facto purement « sociologique » et non chrétienne.
Certains vont me dire que c'est une situation hérétique... Сe n'est pas
tout : le mari porte un nom d'origine biblique, systématiquement perçu comme un
prénom manifestement non chrétien.

Au moment du mariage, des « orthodoxes » se moquent encore d'une façon très peu
sympathique ( je passe ...) de son prénom dont elles n'aiment ni la consonance,
ni l'« origine » - d'une façon consciente ou inconsciente, d'ailleurs, elles
ignorent sa véritable origine historique.

Moins d'un an après le mariage, son fils (son premier enfant), naît le jour même
où, selon l'ancien calendrier (celui de l'Eglise-mère de la femme), nous
célébrons la mémoire d'un saint du même nom; un saint qui n'est même pas un de
nos « saint ancêtres » bibliques, mais un saint de la Nouvelle Alliance, un
martyr chrétien d'Orient dont je n'ai trouvé aucun homonyme mentionné dans le
calendrier orthodoxe.

La mémoire de ce saint évêque-martyr n'est célébrée que deux fois par an et le
prénom est... rare. Une « « coïncidence » qui me paraît bien curieuse.
L'histoire, toute récente, date du XXI siècle.
Antoine
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Message par Antoine »

Date : 08.05 11h15
Ecrire à l'auteur : Catherine


Chère Olia, merci pour étoffer cette rubrique, que je n'ai jamais voulu
monopoliser (et c'est une litote).
L'histoire que vous racontez est très intéressante.
Ces coïncidences ne sont jamais anodines. Pourriez-vous nous révéler
le nom du saint en question ?
J'ai remarqué que bien souvent, les gens — même de pieux fidèles —
des pays traditionnellement orthodoxes ne connaissent pas les noms
des justes de l'Ancien Testament. En Grèce, sans aller jusqu'à s'en
moquer, ils ont toujours été plongés dans l'embarras en entendant les
noms de deux mes filles : Judith et Noémi. La première, qui connaissait
bien l'histoire de sa sainte protectrice, en était toujours désolée, jusqu'au
jour où, ayant eu l'occasion de dire son nom à un prêtre, elle a vu celui-ci
faire de la main le geste de sectionner le cou et lui dire : "Tu le feras à
Holophernes".
Et c'est ce qu'elle fait, depuis 14 ans qu'elle est au monastère, mais sous
le nom de sœur Ignatia (son protecteur étant saint Ignace le Théophore,
évêque d'Antioche)
Antoine
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une histoire d'icône

Message par Antoine »

Date : 09.05 14h20
auteur : Éliazar


Chères Catherine et Olga,
Puisqu'il n'y a pas de monopole pour cette rubrique d'histoires vécues, puis-je
y aller de la mienne ? C'est une histoire d'icône, mais armez-vous de patience,
car elle est longue : un demi siècle entre le début et la fin.

J'avais été un catholique moyen, jadis ; et catholique pour trois raisons
principales :

1° Parce que ma nourrice avait refusé de me prendre en charge si je n'étais pas
baptisé, et que mes parents agnostiques avaient bien été obligés de céder à
cette lubie de Niçoise italienne, en haussant les épaules de pitié devant un tel
fanatisme ; je l'appelai donc Marraine jusqu'à sa mort, vu que son mari était
devenu mon Parrain, pour ce curieux Baptême .
2° Parce que cette même nourrice m'avait ensuite poussé avec insistance à faire
ma « première communion » - à l'âge habituel de douze ans, et sans aucun
catéchisme kto plus sérieux que le Notre Père et le Je vous salue Marie appris
par cœur, et le Credo lu en chœur sur une feuille de papier pendant la cérémonie
épiscopale – sans quoi elle ne me ferait pas le cadeau prévu : une montre ou un
pantalon long, à choisir…
3° Parce qu'après une longue période d'athéisme (neuf ans, entre mes quinze et
mes vingt-quatre ans) j'avais été converti sous l'effet d'un énorme choc, à la
suite de huit jours de Prière du Cœur – que j'avais « essayée » très
sérieusement, mais plutôt par une sorte de pari que par confiance, encore moins
par conviction : une conversion-roulette russe en quelque sorte !

Mais après une deuxième longue période de refroidissement religieux (cette fois,
elle avait duré 19 ans !), j'étais passé de la prière perpétuelle du début (et
d'une pratique kto assez « activiste ») à un état qui était juste avant
l'athéisme pu et simple : je croyais encore que Dieu existait, mais cela ne me
concernait plus, personnellement. J'avais d'autres sujets plus importants en
tête : ma situation, mes succès galants, l'amour des beaux livres et l'éducation
de mes enfants.

Conclusion naturelle de cette longue glissade, ma femme avait fini par me
mettre à la porte, je ne voyais plus mes enfants que de loin en loin, et puis
…un nouvel amour chassant les précédents, je m'étais embarqué dans une nouvelle
vie de couple et nous attendions notre premier enfant. Ma compagne venait d'une
famille catégoriquement catholique, avec un oncle frère profès dans un ordre
enseignant et sa tante préférée dans un couvent de religieuses. Mais, quoique
élevée dans un collège kto, et servant tous les matins la messe de l'aumônier du
collège (en Hollande, les filles pouvaient être enfants de chœur comme les
garçons), sa « foi du charbonnier » ne l'avait jamais empêchée de croire dur
comme fer que le Père avait un corps, et un corps bien complet , de type
indubitablement masculin, sinon le Fils qu'Il avait eu de Marie n'aurait pas pu
être engendré-non-créé… Mystères insondables de la catéchèse des jeunes enterre
vaticane !

Cela me faisait sourire : pour un Niçois, tout « homme du Nord » est une sorte
de bon sauvage, genre Homme de Cros-Magnon mais avec complet, cravate,
chaussures et voiture en plus. Mais cela ne me gênait guère. Elle, de son côté,
était très féministe : certaine que son premier enfant ne pourrait être qu'une
fille, nous lui cherchions un nom approprié. Nous étions finalement tombés
d'accord pour celui de Sophie - elle à cause de sa propre Marraine qui portait
ce nom, moi à cause de la Sophia des Hellènes : Nice ayant été fondée par les
Grecs, comme on sait.
Sa naissance était prévue entre Noël et Nouvel-An. J'étais donc en voyage quand
on m'annonça que notre Sophie était née à l'improviste, le 16 décembre ! Je
revins, nous fêtâmes notre premier Noël à trois, et quelques mois plus tard,
Sophie fut baptisée à la Basilique du Monastère des Bénédictins de St-Benoît
sur Loire - où sont les reliques du grand saint Benoît, et où l'on chantait
encore le grégorien.

Quelques années passèrent encore, je revins à la Foi, mais profondément dégoûté
du catholicisme vatican, j'étais entré dans une paroisse melkite (quelque temps
plus tard je découvris que c'était là aussi une paroisse soumise au Vatican –
mais c'est une autre histoire). Poursuivant ma quête de l'Église, la vraie, je
m'orientais peu à peu vers l'orthodoxie, sans encore me décider vraiment à faire
le pas. En « tournant autour » (comme beaucoup de contemporains : via le chant
liturgique et l'art byzantino-slave) je commençais à m'intéresser aux Icônes et
décidai d'en offrir une à ma fille.
En face de la Rue Daru, dans la boutique d'un marchand d'icônes et autres
objets de culte (photos encadrées d'argent des généraux du Tsar, entre autres),
je demandai un jour s'il avait une icône de sainte Sophie de Moscou. Il me
proposa celle de la sainte martyre Sophie – celle dont les trois filles
s'appellent Foi, Espérance et Charité. Je dus longuement lui expliquer que ce
n'était pas celle-là que je voulais, mais « l'autre », celle de la sainte Sophie
de Moscou, représentée en buste avec un lourd manteau brodé et une tiare de
fourrure (surmontée d'une croix) sur la tête. Il m'assura qu'une telle sainte
Sophie n'existait pas chez les orthodoxes ; il avait bien entendu parler d'un
culte bizarre, la Sophiologie, mais c'était sûrement une secte.
Il eut été plus simple d'aller demander à un prêtre russe, en traversant la rue
Daru, mais comme je n'étais pas orthodoxe, je me fiais à mon marchand, puisqu'il
était Russe – et Tsariste, c'est à dire deux fois Russe ! Cependant, têtu comme
un mulet de chez moi, je n'en démordais pas ; je me souvenais parfaitement de
cette icône, que j'avais bien vue, et vénérée, quand j'étais enfant. Pendant
l'année de préparation à la Communion Solennelle, j'avais promis à ma Marraine
d'aller à la Messe tous les dimanches, mais j'y allais … à la Cathédrale Russe
Saint-Nicolas : déjà petit garçon, les offices kto ne parlaient pas à mon cœur,
et l'orgue m'assourdissait.
Au cours d'un de mes voyages, étant pour quelques jours à Nice, j'allai
communier en douce à la Cathédrale Russe ; un dominicain de mes amis m'avait en
effet affirmé qu'une décision commune du Vatican et du Patriarcat Orthodoxe
(entendez : celui de Constantinople) autorisait l'inter communion ! Plus tard,
je demandai à un vieux prêtre (qui avait déjà été au service de la Cathédrale
avant la guerre) où avait bien pu passer cette icône, que je ne voyais plus
nulle part. Il m'assura qu'il ne l'avait jamais vue, ni dans la Cathédrale, ni
dans les réserves – et comme le marchand parisien, supputa que je m'étais sans
doute trompé.
De retour à Paris, j'allai directement chez mon marchand (Russe, Tsariste et
ignare) et lui demandai de se renseigner en Russie. Il sortit son grand
catalogue (tout en russe, hélas…) et après l'avoir soigneusement feuilleté,
secoua la tête avec fatalité : si le Patriarcat de Moscou (où il se fournissait)
ne vendait aucune icône de cette « sainte Sophie de Moscou », je devais me
rendre à l'évidence, et acheter la vraie : la sienne ! Tant pis, je préférai
repartir bredouille, une fois de plus.
Entrant des années plus tard dans sa boutique pour toute autre chose, je
tombai « par le plus grand des hasards » au milieu d'une conversation animée -
autour d'une sorte de barine en col de fourrure, fraîchement arrivé de New-York,
un conférencier russe connu, m'expliqua-t-on. Comme je relatais ma sempiternelle
quête, sans cesse infructueuse, cet homme bien informé nous expliqua qu'il
existait bien en effet une sainte Sophie « de Moscou » (ainsi nommée parce
qu'elle avait été Tsarine, avait été répudiée, et avait prononcé ses vœux à
Moscou) mais qu'elle figurait dans les synaxaires sous le nom de « sainte Sophie
de Souzdal » – étant morte en odeur de sainteté au monastère de Souzdal où les
Tsars mettaient en général au frais leurs épouses (ou les femmes de haute
lignée) dont ils voulaient débarrasser le Kremlin.
Il fut alors décidé de commander l'icône qui figurait sous cet autre nom dans
le catalogue du Patriarcat, mais sans reproduction, hélas : impossible de savoir
de quoi elle aurait l'air. Après une bonne année d'attente, je pus enfin offrir
l'icône de sa sainte patronne à ma fille : cette année-là, mon bébé commençait
déjà ses études de droit !
Dans tous ses détails, l'icône qui venait d'arriver était exactement telle que
je l'avais en mémoire, et que je l'avais décrite tant de fois à des orthodoxes…
qui ne la reconnaissaient jamais !

Tout ceci est banal : ce n'est qu'un des multiples aspects du parcours du
combattant imposé aux pauvres occidentaux qui veulent retrouver leur antique Foi
orthodoxe - jetée aux oubliettes depuis plus de mille ans.
…Ce qui l'était moins, par contre, c'est que la fête de sainte Sophie de
Souzdal tombait le 16 décembre. Le jour de la naissance « inattendue » de ma
fille.
… Et aussi, accessoirement, que je n'aie jamais pu retrouver l'origine de la
connaissance visuelle si précise que j'avais de cette icône (et de cette sainte)
dont personne autour de moi n'avait jamais entendu parler.

Lorsque j'avais commencé mes recherches, et a fortiori lors de la naissance de
Sophie, j'ignorais l'existence d'un autre calendrier que le grégorien – et du
reste nous ne nous attendions nullement à ce que l'enfant naisse dix jours plus
tôt. Ce n'est que lorsque parut l'édition française du Synaxaire des éditions «
To Perivoli Tis Panaghias » de Thessalonique que je découvris enfin sa sainte
patronne, sous son nom de sainte Sophie de Moscou, mais avec une minuscule
notice de neuf lignes qui garantissait enfin son existence historique, et
l'orthodoxie de sa vénération !
Antoine
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Message par Antoine »

Date : 09.05 16h34
auteur : Olia


Très sincèrement, votre histoire, liée à la mémoire de sainte princesse Sophie,
me surprend d'autant plus qu'elle suit celle que je connais depuis peu et qui me
laissait pour le moins perplexe. En plus, dans le cas de "mon" histoire, le nom
de ce saint martyr d'Orient est rarissime et plutôt méconnu des chrétiens. Quant
à Sophie de Souzdal, elle est également peu connue en tant que sainte. Pourtant,
ceci n'est pas une historiette, mais une histoire :

Tropaire à saint Sophie de Souzdal, ton 4

En évidence parée de la beauté du Très-Haut, / tu entrepris le labeur des jeûnes,
ô Sophie très-semblable à Dieu, / et devins héritière du Royaume des Cieux ; /
tu entra dans le Palais Céleste, pour la félicité de voir la beauté du Christ, /
prie-Le donc afin que la ville (Souzdal) soit sauvée / des attaques païennes et
des luttes intestines / et accorde à nos âme de grands bienfaits.

Selon le prince Kourbsky, elle était une sainte martyre « très-semblable à Dieu
», « innocente et sainte » . Des manuscrits en parlent comme de « la sainte
princesse et moniale Sophie, la juste », qui a vécu au monastère ... de la
Protection, la thaumaturge.

Il s'agit de l'épouse du tsar Vassili (Ioannovitch), rejetée par ce dernier et
ce, probablement pour des raisons très pragmatiques (pourtant c'est lui qui
avait choisie sa fiancée). Il s'agit, paraît-il, du premier divorce
manifestement abusif et injuste de toute l'histoire des tsars russes.

Solomonia, qui deviendra saint Sophie, n'a pas d'enfants et elle est donc
victime d'une injustice condamnée par tous les Patriarches œcuméniques ; le
Patriarche Marc de Jérusalem prédit même qu'un « enfant cruel » sera issu du
second mariage du tsar, un « enfant cruel » qui emplira toute la Russie de sang
et d'horreurs (ce qui s'est réalisé avec la naissance d'Ivan le Terrible en
1530. Le second fils du tsar Vassili était un enfant retardé ou « simple
d'esprit »).

A l'époque, des personnalités faisant partie de la « crème » de la société russe
Sophie (y compris le métropolite Varlaam, saint Maxime le Grec, etc.) ont
défendu l' « innocente et malheureuse » princesse Solomonia, la future sainte
Sophie, mais sans succès. La métropolite Varlaam fut même rétrogradé de sa
chaire de métropolite et isolé dans un monastère pour la première fois
également au cours de l'histoire de la Russie. Saint Maxime fut interdit de
célébration et incarcéré. D'autres durent subir les conséquences de leur
intervention.

La princesse fut donc obligée de devenir moniale au monastère de la Nativité à
Moscou ; ensuite, elle fut transférée au monastère de la Protection, à Souzdal.
Croyante et humble depuis son jeune âge, la princesse était en fait restée la
même. Elle appréciait peu le faste de la cour et préférait s'entretenir avec des
moniales et des femmes qui réalisaient des pèlerinages, écouter leurs récits.
Une fois forcée à rester au monastère, elle y mena une vie ascétique et porta sa
croix avec calme et humilité. Sainte Sophie acquit l'amour et le respect de
toute la communauté monastique. Plus tard, des miracles furent accomplis sur le
lieu où elle reposait après sa mort. Comme il est dit, Dieu n'est pas dans la
puissance, mais dans la Vérité.
Antoine
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Message par Antoine »

Date : 09.05 17h19
auteur : lecteur Claude


En ce qui concerne Ivan le Terrible, j'ai lu il y a quelques temps sur le site
Religioscope de Jean-François Mayer que le patriarche de Moscou a récemment
exprimé son inquiétude à propos d'un groupe qui réclame ... la canonisation
d'Ivan le Terrible!
Ce groupe a déjà peint une ou des icônes de ce tsar. Le patriarche a fait
remarquer qu'une Eglise qui mettrait sur pied d'égalité un bourreau et des
innocents n'aurait aucune crédibilité.
Il paraît que ce groupe (ou un autre?) réclame aussi la canonisation de
Raspoutine, et que certains commencent à faire courir la rumeur que Staline
aurait été un moine secret (!).
Antoine
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Message par Antoine »

Date : 09.05 18h06
auteur : Éliazar


Chère Olia,
Comme vous ne nous révélez toujours pas le nom rarissime de ce saint
mystérieux dont vous aviez précédemment parlé, il me serait bien mal-venu de
répondre à votre post sur ce thème.
Par contre, je vous remercie pour le tropaire de sainte Sophie de Souzdal, que
je vais joindre à mon tout petit dossier la concernant.
D'autres renseignements (historiques, cette fois, et non liturgiques) que j'ai
pu glaner à son sujet, il ressort que le tsar de Moscovie Vassili III l'avait
répudiée pour épouser une sienne maîtresse, une princesse polonaise, Hélène
Glinska, arrivée à Moscou en 1507 et que les boyards (Solomonia était la fille
de l'une des plus influentes familles, les Sabourov)) soupçonnaient n'avoir été
envoyée que pour affaiblir la défense de la Moscovie (et de l'orthodoxie ?)
contre les entreprises des Polonais catholiques, justement.
Pour répudier Solomonia, il fallait un motif. Le tsar avait en effet choisi la
stérilité, préparant cette répudiation dès 1510 par des ambassades auprès de
Constantinople et même des présents somptuaires faits aux monastères du Mont
Athos – et faisant de somptueuses constructions au monastère de l'Intercession,
à Souzdal. Il semblerait que c'est en apprenant qu'elle était enfin enceinte
que le tsar et sa maîtresse aient décidé d'accélérer sa disgrâce – avant que
cela devienne visible.
D'où, entre autres, les mauvais traitements qui lui auraient été infligés par
le métropolite Daniel chargé de lui faire « choisir le voile » et « renoncer à
son mariage stérile » - après une enquête particulièrement odieuse, selon les
chroniques du temps. Elle aurait même été fouettée assez sauvagement en pleine
cathédrale, et n'aurait prononcé ses vœux que contrainte et forcée, après des
protestations publiques accusant formellement le tsar..
Mais ensuite, ce que j'ai lu confirme vos renseignements : résignée (et sans
aucun doute… plus prudente (car les tsars de ce temps n'hésitaient guère devant
des moyens plus expéditifs encore que le monastère pour se débarrasser des
gêneurs) elle serait devenue un modèle de moniale.
Sous toute réserve (je vous livre le résumé d'une étude russe de Nicolas
Voronine sur Souzdal), elle aurait accouché au monastère même d'un fils baptisé
sous le nom de Georges, ce qui aurait été tenu secret pour ne pas l'exposer au
poignard des sbires du Kremlin proche, et l'enfant serait mort quelques années
plus tard et aurait été enterré près de sa mère. Des travaux de restauration des
bâtiments de Souzdal auraient obligé à rouvrir sa tombe (lieu de fréquents et
fervents pèlerinages en effet) et on y aurait bien trouvé deux cercueils, celui
de la sainte et un autre plus petit… qui s'est révélé empli de chiffons et d'une
poupée, et sans aucun ossement.
L'auteur de ces recherches en concluait que cela aurait pu justifier la
croyance populaire (attestée par une complainte populaire dans le nord de la
Russie) selon laquelle le fils de Solomonia-Sophie, c'est à dire le véritable
héritier du trône (à la place d'Yvan le Terrible) aurait été enlevé du monastère
après sa naissance et élevé loin de Moscou jusqu'à ce qu'il soit en âge de
reconquérir sa tiare. Il se serait dans ce cas agi d'un de ces « véritables
prétendants » qui furent à l'origine de plusieurs soulèvements dans l'histoire
de Russie – un peu comme le Dauphin « évadé du Temple », pour les Chouans sous
la Révolution Française, dont le mystère reprit vie avec l'affaire Naundorff
après la Restauration.

Mais bien sûr, seuls l'ouverture du double cercueil et la présence des
ossements dans l'un et des chiffons dans l'autre ont fait l'objet d'un compte-
rendu officiel de ces fouilles archéologiques. Le reste ne pouvait être que
conjectures – et du reste n'intéresserait que médiocrement la vénération
orthodoxe de sainte Sophie : il ne manque pas d'autres princesses ou reines
victimes d'abus comparables sur tout le continent, et au cours des siècles - ou
dont les enfants ont été enlevés (ou assassinés) pour raison d'état ; mais
toutes ne sont pas mortes saintes, et surtout, toutes n'ont pas vu leur tombeau
vénéré par des foules populaires pendant de longs siècles, en dépit d'un silence
persistant des milieux officiels.
Antoine
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Inscription : mer. 18 juin 2003 22:05

Message par Antoine »

Date : 14.05 02h45
Ecrire à l'auteur : Olia


Merci Eliazar.

En ce qui concerne la jeune et belle Hélène Glinska, les historiens russe
pensent en général qu'elle était "cruelle", "intelligente" et très douée en tant
que femme d'Etat. J'ai par ailleurs de sérieux doutes quant à la réalité de sa
mission pro-polonaise ou pro-catholique.

En revanche, la naissance de l'"enfant cruel", Ivan le Terrible, qui allait de
facto devenir un bourreau, est une conséquence tout à fait logique de la cruauté,
de l'injustice, de la peur et d'un orgeuil démesuré, en bref, du péché humain.
[--- pour ce qui est des histoires sur les groupuscules qui évoqueraient la
possibilité d'une canonisation des bourreaux, c'est du domaine du délire mental
ou du canular médiatisé, et ce, peut-être d'une façon mal intentionnée :) ; un
sujet indigne d'un Foorum orthodoxe ; car vous savez, on parle aussi beaucoup
des OVNIs, des sectes, etc., etc. »:) ; il faut le chercher, vraiment, pour
s'abreuver de ce genre de poison :))) ---]

Il n'y aucun doute en ce qui concerne la cruauté du tsar Ivan le Terrible, qui
était aussi une personne complètement déséquilibrée : nous connaissons
l'histoire de ses « intentions punitives » lorsqu'il est venu à Pskov. Le saint
fol-pour-le-Christ Nicolas « Sallos » lui a proposé de la viande crue ; or
c'était le temps du Carême. Lorsque le tsar expliqua son refus par l'observance
du carême, saint Nicolas lui dit carrément « toi, tu manges de la chair humaine
» (!) Le Bienheureux Basile (un autre Fol-pour-le Christ) de Moscou aurait
prédit la mort prématurée du fils aîné d'Ivan le Terrible effectivement, le
tsar l'a tué lui-même (accidentellement, il faut le croire) lors d'une querelle.

Pour ce qui est de l'l'histoire de Solomonia/sainte Sophie de Souzdal, la
"nouvelle" concernant la naissance d'un enfant n'était peut-être qu'une rumeur
populaire qui soulignait en quelque sorte l'injustice commise par son époux (en
fait, Solomonia avait vécu avec lui pendant près de 20 ans). Je crois que
l'essentiel, en ce qui concerne sainte Sophie, est exprimé dans ce tropaire et
d'autres prières semblables.

Enfin, les trois récits (concernant saint Pantéléimon, le saint martyr de Perse
dont je vous ai parlé (...) ou sainte Sophie de Souzdal) me surprennent. Sans
parler d'autres « coïncidences », p.ex. le fait que l'empereur russe Nicolas II
(un « strastoterpets », plus qu'un martyr ; celui « qui a enduré les souffrances
») est né le jour même de la mémoire du juste Job...
Antoine
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Témoignage de la haine du tordu contre l'Église du Christ

Message par Antoine »

Date : 15.05 20h52
Ecrire à l'auteur : Catherine


Témoignage de la haine du tordu contre l'Église du Christ

Le hiéromoine orthodoxe dont la voiture était tombée en panne près de
notre maison et que nous avons hébergé pour le temps de la réparation,
ne m'était connu que par ouï-dire.
Deux ans plus tôt, mon mari qui était allé, sur le conseil de notre médecin
limousin, avec deux de nos filles, âgées de 9 et de 6 ans, en cure d'eau
dans les Pyrénées, l'avait rencontré à Clara, près de Prades. Nous étions
alors sous la juridiction du patriarche de Constantinople.
Mon mari m'avait renseignée alors par téléphone de cette rencontre avec
un moine "un peu schismatique" — comme il le disait. Je ne savais pas
très bien ce que cela voulait dire. J'écoutais attentivement son récit sans y
comprendre grand-chose, puis, sans que je m'en rende compte, les
mots suivants sont sortis de ma bouche, comme malgré moi : "C'est avec
lui qu'il faut aller". J'en étais tout étonnée moi-même, car je ne
connaissais pas le moine en question et de plus, je n'avais jamais pris
aucune initiative en matière de foi, je n'avais jamais fait que suivre mon
mari, faisant confiance à ses connaissances religieuses et à ses
qualités d'historien et de chercheur. Revenu de ce voyage, il annonçait
avec enthousiasme qu'il voulait se faire moine et tous nos amis l'ayant
pris au sérieux essayaient désespérément de le dissuader : "Mais tu es
fou, tu as une femme et cinq enfants dont un nouveau-né, tu n'as pas le
droit de les quitter !"
Il a fini par se calmer, puis a fait venir d'Amérique un calendrier orthodoxe
en anglais, un calendrier julien, pour imiter, tant soit peu, la façon de vivre
du moine "un peu schismatique".
Mais on n'avait plus reparlé du moine qu'il avait rencontré. Celui-ci nous
avait envoyé, entre-temps, deux cartes postales, une des État-Unis, une
de Grèce et a téléphoné une fois pour demander de nos nouvelles.
Comme ma mère venait de quitter ce monde, j'en ai profité pour lui
demander ses prières pour l'âme de celle-ci.
Et le voilà maintenant, six mois après le coup de téléphone, ce moine "un
peu schismatique", visiteur inattendu, dans notre maison.
C'est un homme étrange. Une mince silhouette noire. Il ne dit
pratiquement rien, mais son silence n'est pas du tout gênant, au
contraire, il est apaisant, agréable, reposant. Parfois, il sort de la maison,
semble se renseigner, d'après la position du soleil, de l'heure qu'il est,
pour disparaître discrètement dans la chambre d'amis où nous l'avons
installé. Quand il monte à l'étage, ses pieds semblent ne pas toucher les
marches de l'escalier en bois, d'ordinaire grinçantes : il arrive en haut en
un clin d'œil et sans faire le moindre bruit.
Il n'a aucune apparence de quelqu'un du monde, il ne cherche pas le
contact, mais dès que l'on a envie de lui parler, il se trouve, comme par
miracle, près de nous, disponible et affable, mais gardant toujours, le
plus possible, son mutisme.
La première chose que je remarque, moi qui ai grandi dans un milieu
d'intellectuels et d'artistes, c'est qu'il ne ressemble aucunement à ces
gens-là, que j'admirais souvent, étant jeune, pour leur faconde, leur
charme, leur propension d'enseigner et de séduire.
Lui ne fait aucun effort dans ce sens : ni pour nous charmer, ni pour nous
distraire et même pas pour nous instruire. Je suis frappée de voir que,
contrairement à ces gens du milieu de ma jeunesse et contrairement à
tous les gens du monde sans exception ("Mundus universus exercet
histrioniam" — disaient les Latins), il ne pense pas du tout à afficher une
apparence quelconque : sage expérimenté et enfant innocent à la fois, le
"puer senex" du Christ des icônes, il reste toujours "nature" et égal à
lui-même. Je suis surtout sensible au fait qu'il est pareil dedans et
dehors. Pas la moindre trace de désir de plaire, ou de changer sa
contenance quand il s'apprête, comme à regret, à prononcer quelques
mots, et il ne dit jamais que le strict nécessaire.
Je suis en train de regarder le calendrier que mon mari avait fait venir de
chez les RHF d'Amérique, pour voir ce que nous allons bien pouvoir
manger ce jour-là, lorsqu'il vient me rejoindre dans la cuisine.
— Vous suivez déjà le calendrier de l'Église… — constate-t-il.
(Mon mari nous avait en effet imposé le calendrier julien et les règles du
jeûne canoniques alors que nous fréquentions encore, selon nos rares
possibilités, une paroisse lointaine néo-calendariste, où cela ne se
faisait pas. Venus du papisme en passant par l'uniatisme, nous y avions
été reçus par le simple reniement des erreurs papistes.)
— Oui, mais je ne comprends pas pourquoi. Quelle importance ? Ce
n'est pas une question de calendrier… qui change réellement la vie d'un
chrétien. Il y a tant de choses plus importantes que cela. — dis-je en
soupirant, pendant que je pense à toutes mes mauvaises habitudes que
je devrais corriger et qui me pèsent.
Il ne se met pas en peine (ou en devoir) d'en dire le moindre mot, ni du
calendrier, ni du jeûne, ni des choses importantes. Il n'a pas envie de
faire une conférence, ni de me convaincre ni d'expliquer quoi que ce soit
sur ces sujets, mais va droit à l'essentiel :
— Vous êtes schismatiques, vous n'avez pas la Grâce.
— Nous n'avons pas la Grâce ? (N'ayant jamais étudié la théologie, je
n'avais pas la moindre idée de ce que cela voulait dire, mais sa phrase,
prononcée comme un diagnostic médical, m'a fait comprendre aussitôt et
avec force qu'il nous était absolument vital d'avoir la Grâce.) Et qu'est-ce
qu'il faut faire pour avoir la Grâce ?
— Il faut être baptisé.
— Alors, je veux être baptisée.
— Comme l'eunuque ? Tout de suite ? — demande le père avec un
sourire, un peu étonné lui-même de la rapidité de ma réaction.
— Oui, dès que possible.
La décision en a été prise de cette façon, en un éclair. Aucun problème,
aucun besoin d'explications élaborées, c'était simple, clair et net.
L'évidence m'avait frappée en plein cœur, sans l'ombre d'un doute.
Mais pour la réalisation pratique, il fallait attendre. Il fallait que mon mari
le veuille aussi, que le hiéromoine ait le temps de revenir d'un long
voyage et de tout préparer pour le baptême d'une famille de sept
personnes dans la chapelle de son ermitage.
Cela s'est passé il y a exactement 23 ans, au mois de février. La date de
notre baptême a été fixée pour le samedi saint.
J'ai décidé d'arrêter de fumer pendant ce carême, mais je me préparais
au baptême et à Pâques surtout par la prière, les lectures spirituelles,
dans la joie simple d'un enfant qui attend une grande surprise pour sa
fête prochaine.
Vers le milieu du carême, le père nous téléphone pour demander si nous
étions toujours décidés de nous faire baptiser.
Interloquée, je réponds :
— Mais bien sûr, pourquoi ?
— Parce qu'il arrive que le diable mette le bâton dans les roues.
— Le diable ? Comment ?
— C'est logique, non ?
— Mais il ne le peut pas !
— Si vous ne le laissez pas faire, non.
Je n'avais pas l'impression d'avoir eu à résister à une volonté contraire
quelconque. Tout était on ne peut plus clair pour moi. Je ne m'étais posé
aucune question, ni théologique, ni psychologique, ni matérielle. Aucune.
Je suis Sagittaire. Un Sagittaire vise le soleil avec son arc, et ne voit pas
les obstacles.
Je n'avais même pas pensé peser le pour et le contre. Et je ne pouvais
pas voir que ce diable, auquel je ne croyais à l'époque qu'à 90 %, et qui
ne me faisait rien, suggérait déjà des pensées contraires à certains
membres de ma famille.
Cependant, ils ne manifestaient pas non plus de résistance au projet du
baptême, et, la veille du grand jour arrivée, nous sommes tous partis en
voiture, pour être baptisés, mariés et passer les fêtes de Pâques à
l'ermitage.
Nous avions toujours voyagé avec nos enfants. Il fallait aller voir tous les
ans la famille plus grande, en Hongrie, en Angleterre. Des milliers de km
ne nous rebutaient pas.
Ce voyage — il n'y avait pas encore d'autoroute sur ce parcours — devait
durer 10 heures, de Limoges à Perpignan (?600 km). Ce n'est rien à
côté des distances que nous avions l'habitude de parcourir avec enfants,
équipement de camping, biberons, couches à jeter, cadeaux etc. à travers
l'Europe. Nous devrions y arriver avant la tombée de la nuit, même si
nous ne partons pas aux aurores.
À peine avions-nous quitté notre maison que la voiture est tombée en
panne ; pas de garage dans la proximité, mon mari ne trouve pas la
cause de la panne. Nous essayons d'arrêter une voiture, impossible. On
attend une bonne demie-heure, puis la voiture redémarre comme si de
rien n'était.
Excellent, on continue.
Sur les routes tortueuses du Limousin, deux de nos filles, sujettes au
mal de transport, se trouvent plus mal que jamais et n'ont pas le temps
de le dire. Conséquences "désastreuses" qui nous obligent à nous
arrêter pour les laver, changer tous leurs vêtements et ceux d'un de leurs
frères, nettoyer la banquette et le sol de la voiture, etc.
On redémarre. La voiture a toujours une odeur un peu âcre, mais tant pis.
Tout va bien pendant 300 km, quand une voiture venant derrière nous veut
nous doubler, mais trop tard : il en vient une en face, et, la première
n'ayant plus la place pour se rabattre, heurte de plein fouet la nôtre.
Pas trop de dégâts, grâce à Dieu; on s'arrange sans dispute, constat
amiable etc.
Mais nous sommes tous secoués : on s'arrête, pour nous ressaisir, dans
une brasserie, où on mange et boit un peu car midi est bien passé.
Jusqu'à Perpignan, pas de problème, mais il fait déjà noir quand nous y
arrivons. Dû aux routes pleines de virages de la campagne
roussillonnaise, le même incident qu'en Limousin se reproduit, mais
cette fois, quatre de nos enfants en sont victimes. Trop tard pour les
changer entièrement : le père nous attend depuis des heures, et, après
l'avoir vu, nous devrons encore redescendre à Prades à l'hôtel. On
débarbouille les enfants tant bien que mal et nous arrivons sur le sentier
de terre menant au col d'où il faudra monter à pied. La veille, il a
beaucoup plu, les roues glissent, patinent… on n'y arrivera jamais… Tout
le monde est fatigué, énervé, les derniers virages ont incommodé toute la
famille du conducteur.
Mais enfin, nous laissons la voiture au col et montons à pied. J'examine
l'état des enfants : c'est supportable. Moi-même, je tiens à peine debout.
C'est encore mon mari qui est le plus frais.
Nous frappons et entrons dans la cuisine de l'ermitage : le père est là,
toujours égal à lui-même. Il nous fait asseoir autour de la table en
silence.
— Père, excusez-nous d'être en retard : nous n'avons jamais fait un
voyage comme celui-ci, de notre vie. —
Il sourit comme quelqu'un qui sait pour sûr que cela ne pouvait pas en
être autrement et qui s'y attendait. (Je ne comprendrai que plus tard que
c'est grâce à ses prières que nous étions arrivés sains et saufs.)
Il sort cueillir un peu de thym et de lavande sauvages, nous en fait une
tisane, et tout le monde se trouve réconforté aussitôt. On voit, à la lueur
d'une lampe à pétrole, que la couleur revient sur les joues des enfants.
Après avoir discuté du programme du lendemain, nous descendons à
l'hôtel.
Le lendemain matin, après une bonne nuit et un petit déjeuner agréable
au calme, nous sommes frais, propres et bien reposés pour remonter
dans la montagne.
Pas d'incident. Nos parrains, marraines et des amis sont déjà là-haut et
nous attendent : les préparatifs commencent.
Comme il n'y a pas d'eau courante à l'ermitage, le père, pour remplir le
baptistère, se sert d'un très long tuyau d'arrosage, qui rejoint, plus loin,
une source naturelle cachée dans les rochers, au-dessus de la chapelle.
L'eau commence à arriver et a à peine rempli le fond du baptistère
lorsqu'elle s'arrête de couler.
Après une seconde de réflexion, le père dit :
— Il doit y avoir un diable.
La présence du diable, auquel, après notre voyage épique, je crois déjà à
99 %, me paraît pourtant devoir être interprétée de façon symbolique, et
quand je vois le père sortir, je pense qu'il va vérifier si le tuyau n'est pas
bouché par quelques cailloux ou feuilles mortes. Je le suis pour en avoir
le cœur net.
Or, il jette un coup d'œil rapide sur le tuyau, son regard s'arrête à un point
précis le temps d'un soupir, puis il sourit et fait le signe de la croix dans
cette direction.
Au même instant, on entend la voix de ma marraine, restée près du
baptistère :
— ça y est, ça vient.
Je vous épargne le reste de l'histoire. Tout de suite après le baptême, le
malin a tout fait pour bouleverser la paix et l'entente familiales et
n'arrêtera de nous embêter pendant longtemps.
Seulement, depuis quelques années, il semble avoir de moins en moins
de force, et se laisse démasquer plus vite, lui qui sème la zizanie chez
les orthodoxes et qui voudrait surtout nous laisser croire que ce n'est pas
lui, notre ennemi, mais notre frère, et qui jubile surtout lorsqu'on ne croit
pas à son existence et qu'on accuse ce dernier de nos malheurs.
Antoine
Messages : 1782
Inscription : mer. 18 juin 2003 22:05

La jeune Spartiate au monastère de Kératéa.

Message par Antoine »

Date : 22.05 10h52
Ecrire à l'auteur : Catherine


La jeune Spartiate au monastère de Kératéa.

Évidemment, on est orthodoxe ou on ne l'est pas (dixit Éliazar avec
raison). Mais, oublie-t-il qu'au début de l'Église, il suffisait d'appeler ses
membres simplement "chrétiens" ? et qu'aujourd'hui des quantités de
croyances erronées se réclament du nom du Christ, de la Vérité incarnée
? Que, à mesure que des hérésies de tout bord usurpèrent ce nom,
l'Église fut contrainte de se doter d'autres noms distinctifs tout en restant
elle-même ? Que les ariens se disaient "catholiques", de même que les
papistes continuent à s'appeler ainsi malgré le schisme de 1054, alors
qu'ils ne le sont pas et que c'est à cause de cette usurpation du nom que
l'Église véritable s'appelle ORTHODOXE ? (N'est-elle pas, au sens strict
du terme, la seule Église chrétienne, la seule catholique cependant ?)
Que le malin continue à brouiller les pistes et qu'il devient de plus en plus
difficile de s'y reconnaître humainement, et c'est la cause de nouvelles
appellations ? Mais oui, IL FAUT contrôler l'appellation, avec minutie et
droiture, recourir aussi à la prière sincère et ardente, car Dieu ne ment
pas dans sa réponse.
L'historiette suivante montre bien que dans la vie des membres de
l'Église orthodoxe véritable, la question est résolue, le doute n'effleure
même pas les esprits.
Je vous la livre telle que je l'ai vécue lors d'un de mes séjours en Grèce.
Bonne méditation !

La jeune Spartiate au monastère de Kératéa.

J'étais hébergée au monastère dans une chambre à 4 lits, mais j'y étais
seule. On m'a dit que le lendemain j'aurais une petite camarade de
chambre.
Elle est arrivée en effet de Sparte, avec deux sacs de voyage : une jeune
Grecque de 20 ans.
Elle donne l'impression de quelqu'un d'un peu timide par ses gestes un
peu pressés et décousus lorsqu'elle ouvre ses bagages, mais son
regard est mûr, profond et décidé. La taille menue et d'apparence fragile,
son visage enfantin lui donne presque une allure d'écolière.
C'était l'heure des vêpres et nous sommes montées ensemble à l'office
chez l'archevêque. Une des sœurs a demandé à la jeune fille de faire
l'encensement au moment des psaumes kekragaires. J'ai vu qu'elle
s'était fait expliquer assez longuement l'usage de l'encensoir, ce dont j'ai
déduit qu'elle n'y était pas habituée, peut-être n'était-elle pas orthodoxe
depuis très longtemps.
Comme elle parlait assez bien l'anglais, après les vêpres nous nous
sommes mises à discuter dans notre chambre.
— Depuis quand êtes-vous orthodoxe ?—
— Depuis deux ans. —
— Et vos parents ne sont pas orthodoxes ?
— Ma mère oui. Mon père non. Mon père ne sait pas que je suis
orthodoxe. Je suis venue ici en cachette.
— Votre père, il est quoi ?
— Il est nouveau-calendariste et ne laisse pas ma mère aller à l'église. À
Sparte, nous n'avons pas d'églises orthodoxes. Les
nouveau-calendaristes nous les ont toutes prises. Il faut aller à 200 km et
ma mère ne peut pas. Moi, je fais mes études à Larissa, alors je peux
faire un détour pour aller à l'église à l'insu de mon père. Je viens parfois
ici au monastère, mais aussi en cachette. Je pars la nuit, quand ils
dorment tous.
(Je remémore en un éclair deux de mes enfants qui faisaient la même
chose pour aller… en discothèque).
— Comment êtes-vous devenue orthodoxe ?
— Mes grand-parents le sont. Ils m'ont toujours beaucoup émue par leur
piété. Ils m'ont raconté l'évangile, toutes les luttes des orthodoxes, leur
martyre etc. et j'avais envie de les connaître.
— Vous avez des frères et sœurs ?
— Oui, deux frères et une sœur.
— Ils sont orthodoxes ?
— Non, nouveau-calendaristes, tous. Ma sœur dit qu'elle n'est pas prête
pour devenir orthodoxe, mais elle sait que je le suis et ne dit rien. Mes
frères seraient très en colère s'ils le savaient, de même que mon père.
Quand j'aurai fini mes études, et j'aurai commencé à travailler, je le leur
dirai.
Antoine
Messages : 1782
Inscription : mer. 18 juin 2003 22:05

DIEU APPARAÎT DANS LA SIMPLICITÉ !

Message par Antoine »

Date : 11.06 02h12
auteur : Catherine


DIEU APPARAÎT DANS LA SIMPLICITÉ !


J'aime beaucoup cette histoire vraie

Histoire d'un homme simple

Un ancien dit : "Me trouvant quelque temps au
désert de la Thébaïde, afin
de profiter un peu des paroles des saints
hommes qui y demeuraient,
j'écoutais avec beaucoup d'intérêt les
enseignements salutaires de ces
hommes vraiment célestes, pour les garder
dans ma mémoire. Parmi
ceux qui racontaient, il se trouvait un ancien
célèbre par sa vie très
vertueuse, duquel j'appris l'histoire ci-dessous.
Voici donc ce qu'il disait:
'Un ermite très réputé pour sa vertu passa par
hasard par ici, et
beaucoup coururent à lui pour leur profit
spirituel, et surtout pour
confesser leurs péchés. Parmi ceux qui allaient
à ce saint, il se trouva
aussi un homme très simple et innocent. Il était
berger de métier, et
depuis son enfance il avait grandi dans le
désert, ne sachant rien d'autre
que paître les moutons.
Le saint se mit à l'examiner spirituellement
scrutant le fond de son cœur,
pour voir s'il avait quelque défaut à corriger.
L'ayant donc examiné selon
la règle, considérant un par un tous les péchés
mortels, ainsi que les
péchés pardonnables, il vit que cet homme, était
non seulement étranger
à tous ceux-ci, mais, ne savait même pas ce
que voulait dire "pécher."
Alors, il glorifia Dieu pour la bonne disposition
du berger, et lui dit:
— Jusqu'ici, c'est bien mon enfant, mais dis-
moi, pourquoi es-tu venu à
moi, pécheur et misérable?
— J'ai entendu, vénérable père, répondit-il, que
tu enseignes aux
hommes quel chemin prendre pour être sauvé.
Donc je suis venu moi
aussi te demander de m'indiquer quel chemin je
dois prendre afin que
j'aboutisse au paradis.
— Mon enfant, si tu veux être sauvé, veille à
toujours garder la voie droite,
et tu iras au paradis.
En entendant ces paroles, simple et innocent
qu'il l'était, le bon berger
ne pensait pas que le père spirituel lui avait dit
de garder le droit chemin,
à savoir la voie de la vertu et des bonnes
œuvres, mais croyait qu'il lui
conseillait de bien examiner les chemins en
sortant de l'église, et de voir
quel est le chemin le plus droit, le prendre et ne
suivre que celui-là pour
être conduit ainsi au paradis. Ayant donc quitté
l'ancien, le bienheureux
berger sortit; et examinant attentivement tous
les chemins, ici et là, à
droite et à gauche, il choisit celui qui lui
paraissait le plus droit, et se mit

en route, ayant l'espoir d'arriver au paradis avec
l'aide de Dieu.
Ainsi, marchant à jeûn pendant trois jours, il
aboutit enfin à un
monastère, où vivaient des moines très
vertueux. Il s'approcha donc de la
porte et le portier lui demanda: 'D'où viens-tu, et
que cherches-tu-?' Le
berger lui raconta en détail ce qui le concernait:
que son père spirituel lui
avait dit de suivre le droit chemin afin d'être
sauvé, pour ainsi arriver au
paradis; que lui, poussé par son désir, s'était
mis en route en suivant le
chemin droit qui l'avait amené jusque-là. À ces
paroles, ne sachant pas
que c'était par grande simplicité d'esprit que le
berger parlait ainsi, le
portier cru qu'il était sot, fou et hors de sens, et
que c'était à cause de
cela qu'il prononçait de telles paroles. Il
l'interrogea donc une deuxième
et troisième fois et, recevant de lui la même
réponse, il tenta de le
chasser. Celui-ci ne se mit pas en colère, mais
patienta. Le portier
l'annonça donc à l'higoumène qui ordonna de
l'amener à l'intérieur afin
qu'il voie qui était cet homme et ce qu'il
demandait. Le portier le prit alors
avec lui et l'amena à l'higoumène qui lui
demanda pourquoi il était venu
jusque-là. Il lui répondit comme plus haut, à
savoir qu'ayant le désir d'être
sauvé et d'arriver vite au paradis, il trouva un
ascète très expérimenté,
reçut de lui le conseil de garder la voie droite, le
suivit jusqu'à ce que
Dieu aidant, elle le conduisit là, au monastère, et
qu'il n'avait soif que de
son salut.
À ces paroles, l'higoumène comprit l'innocence
de cet homme, son
intégrité et sa droiture, le reçut avec joie comme
envoyé de Dieu, et, le
faisant moine, lui donna la charge d'entretenir et
d'orner l'église. Celui-ci
obéit avec joie, accepta la charge du soin de
l'église et accomplit son
devoir avec empressement.
Un jour l'higoumène alla le trouver là où il
nettoyait l'église, et lui
conseilla de faire son travail avec soin, afin qu'il
reçoive de Dieu sa
récompense et arrive rapidement au paradis
qu'il désirait tant. Il fit alors
une métanie à l'higoumène et lui dit: 'je te
remercie, maître saint, de me
donner des conseils pour mon salut; cependant
j'ai une question à te
poser: qui est celui-ci, qui se tient là-haut,
comme attaché, qui ne peut
pas descendre et qui n'a même pas mangé
depuis trois jours que je
suis entré à l'église?' Il disait cela, ne sachant
pas que c'était le Christ
représenté sur la croix selon la coutume; d'où,
encore plus émerveillé de
la simplicité de l'homme, l'higoumène lui dit en
plaisantant: 'Celui que tu
vois là-haut, je l'avais chargé de balayer avant
toi, et parce qu'il ne
balayait pas bien je l'ai puni à se tenir là-haut
comme tu le vois. Donc
prends bien garde à ne pas subir toi aussi le
même sort.'
En entendant cela, l'homme vraiment béni,
garda momentanément le
silence et ne dit rien à l'higoumène; mais le soir,
ayant pris du cellier sa
part de nourriture, il entra dans l'église et s'y
enferma; ensuite, dès que
les moines furent couchés, croyant aux paroles
de l'higoumène qui lui
avait dit en plaisantant que le Maître Christ était
serviteur de l'église et
qu'Il l'avait puni à se tenir là-haut pour ne pas
avoir servi habilement et
nettoyé avec soin, cet homme simple le prit en
compassion et se tint
au-dessous, et s'exclama en lui disant:
— Descends, frère, qu'on mange ensemble!
Alors, le doux et humble Seigneur qui demeure
dans les hommes
simples, ayant aimé la simplicité de cet homme,
ô miracle, lui répondit:
— Je crains de descendre, frère, de peur que
l'higoumène l'apprenne et
te maltraite à cause de moi.
Celui-ci lui répéta:
— Descends sans crainte maintenant. Tous
dorment. Moi j'ai verrouillé
les portes et personne ne nous dérange;
seulement descends, car je te
plains de rester à jeûn voilà maintenant trois
jours, et Dieu en est témoin,
je ne mange pas non plus si tu ne descends
pas.
Il vit alors Celui qui était représenté, descendre
de la croix, et ils
s'assirent, mangeant ensemble, et discutèrent
joyeusement.
Cela se reproduisant ainsi tous les jours, on
l'entendit une fois discuter
avec un homme dans l'église, et, étonnés de
cela, les moines se
demandèrent ce qui se passait, sachant bien
qu'à cette heure personne
d'autre n'entrait là, car tous dormaient. Ils y
allèrent souvent et frappèrent
la porte pour voir qui parlait avec lui, mais dès
qu'ils frappaient, ils
n'entendaient plus rien. L'homme simple voyait
le Christ se lever en hâte
de la table, remonter et se tenir à nouveau
immobile sur la croix. Alors il
ouvrait la porte de l'église et les moines une fois
entrés, ne voyaient que
le sacristain. Ils lui demandaient avec qui il
parlait puisque les
discussions s'entendaient de l'extérieur; mais il
affirmait qu'il n'y avait
personne, sinon lui tout seul, d'où les moines,
étonnés de l'étrangeté,
s'en retournaient.
Enfin, après de nombreux jours, puisqu'ils
entendaient toujours des
conversations dans l'église, ils chargèrent un
frère que le sacristain
aimait beaucoup, de lui demander discrètement
de lui dire la vérité, et de
lui promettre avec serment de ne le dire à
personne. Ce frère y alla et
supplia tellement le sacristain que finalement
celui-ci lui révéla son
secret, à savoir que le Maître Christ, qu'il croyait
être là par ordre de
l'higoumène, descendait quand il l'appelait pour
manger avec lui en
cachette. Il ajouta aussi ceci: que le Christ lui
promettait, pour la bonté
qu'il avait de Lui offrir à manger chaque jour, de
le prendre avec Lui à sa
maison, de lui faire un festin merveilleux et si
doux qu'il ne l'oublierait
jamais, lui assurant qu'Il avait un Père très riche
et très bon.
À ces paroles, le moine ami de l'homme simple
frissonna de tout son
corps devant la faveur dont le Seigneur l'avait
gratifié, et courut raconter
l'affaire à l'higoumène dans tous les détails.
Celui-ci aussi s'émerveilla à
ce récit prodigieux. Il avait beaucoup de respect
pour cet homme si
simple, et il l'appela aussitôt, afin d'entendre
aussi de sa bouche, le récit
de cette vision si merveilleuse et agréable.
Cependant, l'homme simple,
tout d'abord se justifia, disant que son ami l'avait
calomnié en disant des
choses que lui n'avait ni vu ni entendu. Il fit cela,
car il avait toujours en
lui
la crainte de mettre l'higoumène en colère
contre Celui qui mangeait et
parlait avec lui, il craignait qu'il le punît encore
plus sévèrement. Mais
comme l'higoumène l'encourageait et le suppliait
de lui dire toute la
vérité, il lui raconta tout en détail, et lui
demanda, en plus, la permission
d'aller au festin de son Père. Alors, l'higoumène
le bénit et le laissa aller
avec joie, seulement s'il consentait à l'inviter lui
aussi au festin. Donc, le
simple répondit qu'il le prierait beaucoup de
l'accepter aussi.
C'est ainsi qu'il retourna à l'église, et, à la
tombée de la nuit, il prit
selon
son habitude sa part de nourriture. Ayant bien
fermé la porte, il invita de
nouveau le Christ à descendre et manger avec
lui. Pendant qu'ils
mangeaient au moment où le Christ lui parlait
des biens dont il allait jouir
dans la maison de son Père, l'homme simple se
souvint aussi de
l'higoumène; il lui demanda alors s'Il voulait bien
prendre aussi avec
eux l'higoumène à ce festin. Alors le Christ lui
répondit: que l'higoumène
n'était même pas digne de manger les miettes
qui tombaient de cette
table-là, et de ne plus Le déranger pour ce sujet,
car cela ne pouvait
jamais se faire.
Dès l'aube, l'higoumène attendait avec
beaucoup d'impatience, pour
savoir si le Maître Christ acceptait de le faire
reposer avec ses saints. Et
apprenant de l'homme simple qu'il n'était pas
digne de jouir d'une telle
allégresse, il fut rempli d'amertume et pris d'une
grande peine de cœur.
Mais connaissant l'immense océan de la
compassion de Dieu, et
sachant qu'Il fait la volonté de ses serviteurs,
surtout des plus simples et
innocents, il se jeta aux pieds de l'homme
simple et le supplia en
larmes, disant:
— Mon enfant, prie l'Ami de l'homme de ne pas
me dédaigner, pécheur
et indigne, mais qu'Il se penche et me prenne en
pitié, que je vienne moi
aussi avec toi à ce festin céleste. Supplie et
force l'Inviolable de me
pardonner, car je sais qu'Il ne te désobéira pas,
grâce à la simplicité de
l'intégrité de ton âme bienheureuse.'
Poussé par ces paroles, et par d'autres encore,
l'homme simple le
quitta. Le soir donc, quand ils s'assirent pour
manger, il reparla au Christ
de l'higoumène. Et le Seigneur lui répondit:
— Frère, je t'ai dit qu'il n'est pas digne, à cause
de son intempérance; ne
t'en occupe pas.'
Alors l'homme simple dit au Seigneur:
— Tu as raison de dire que l'higoumène n'est
pas digne, mais pour le
repas et le pain dont il m'a nourri ? Et il T'a
nourri toi aussi tant de jours,
pendant lesquels tu serais mort de faim: ne
l'acceptes-Tu pas-au moins
pour ces bienfaits ?'
Alors, voyant la pureté et la bonté de cet
homme, et souriant à ses
paroles, le Seigneur dit:
— À cause de ton amour, et seulement à cause
de cela, afin de ne pas
t'attrister, puisque tu prends tant de peine pour
le prochain, dis-lui de se
corriger, et dans huit jours, vous viendrez
ensemble à la joie préparée.'
Ainsi, étant sorti, il annonça le joyeux message
et l'ordre à l'higoumène,
à savoir que le Très-Bon l'acceptait et qu'il
devait se préparer à aller avec
lui.
Quelle fut la joie de l'higoumène à cet instant-là !
ll se corrigea, se
confessa, se repentit sincèrement. Huit jours
plus tard, ayant communié
aux divins Mystères, l'higoumène s'endormit
dans le Seigneur après une
petite maladie. L'homme simple quant à lui, à
l'endroit où il conversait
avec son Bien-aimé, rendit sa sainte âme au
cours du repas. Ainsi ils
passèrent à cette joie indicible des justes.
Puisse Dieu nous l'accorder à
nous aussi par sa Bonté et son Amour de
l'homme! Amen."
Antoine
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Inscription : mer. 18 juin 2003 22:05

Discernement

Message par Antoine »

Auteur: Catherine

Discernement
A propos de l'abba Agathon, on disait que des moines
vinrent le trouver,
ayant entendu parler de son grand discernement. Voulant
éprouver s'il se
mettait en colère, ils lui dirent : «Est-ce toi cet Agathon,
que l'on dit être
fornicateur et orgueilleux ?» — «Oui, c'est bien vrai»,
répondit-il. Ils
reprirent : «Es-tu cet Agathon qui raconte sans cesse des
niaiseries et
qui parle mal d'autrui ?» — «C'est moi», ils dirent encore:
«Est-ce toi,
Agathon l'hérétique?» Mais lui répondit : — «Je ne suis
pas hérétique.»
Ils lui demandèrent alors: «Dis-nous pourquoi tu as
accepté tout ce dont
nous t'accablions, mais tu as refusé ce dernier grief.» Il
répondit : — «Les
premières accusations, je me les fais à moi-même, car
cela est utile à
mon âme. Mais l'hérésie, c'est la séparation avec Dieu. Or,
je ne veux pas
être séparé de Dieu.» À ces mots, ils admirèrent son
discernement et
s'en retournèrent édifiés.

Et Catherine préfère aussi être accusée de tous les
péchés, mais pas
d'hérésie.
Antoine
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Distinction des sexes

Message par Antoine »

Date : 10.06 17h20
auteur : Catherine


Distinction des sexes

Ce n'est pas une historiette, mais une petite réflexion
d'orthodoxe
introduite par une historiette plus longuette.

Un soir, il y a plus de 30 ans déjà, je me trouvais chez
ma sœur dans leur
bel appartement de Buda, partie résidentielle de la
capitale sur la rive
droite du Danube, en Hongrie.
La profession de ma sœur l'oblige à partir pour son
travail le plus souvent
le soir. Elle est actrice de théâtre.
Cette fois-ci, comme elle était un peu en retard et
qu'elle venait juste de
mettre au lit sa fille cadette, Esther, elle m'a demandé
de baigner et de
coucher l'aînée, Barbara, ce que je lui ai promis
volontiers.
Ce soir-là, mes propres enfants, accompagnés de mon
mari, étaient en
visite chez leurs grands-parents, à Pest (rive gauche).
J'étais donc libre,
et ravie de m'occuper de mes nièces.
Barbara a exactement le même âge que ma fille aînée,
Miriam, elles sont
nées le même jour, l'une à Budapest, l'autre à Poitiers.
L'épisode que je raconte a eu lieu en été 1972; elles
avaient alors 5 ans
toutes les deux.
La petite Barbara était en train de se déshabiller dans la
salle de bain. Je
l'y ai rejointe après avoir dit au revoir à sa mère qui
partait, pressée.
La baignoire était déjà remplie de la bonne eau pure,
attiédie, provenant
de la source thermale de l'île Sainte-Marguerite qui
s'étale au milieu du
Danube, source bénie qui alimente deux ou trois
piscines au cœur de
Budapest et assure même l'eau chaude et le chauffage
central de
plusieurs quartiers situés aux deux bords immédiats du
fleuve.
La fillette, nue, dégoulinant d'eau, ses cheveux très
blonds coupés à la
garçonnet, est plantée au milieu de la baignoire.
Debout, bien en face de
moi, elle attend d'être savonnée par mes soins.
Pendant que je m'y apprête, elle me dit avec un sourire
espiègle :
—Tata Kati, si je sortais maintenant comme ça dans la
rue…
Je suis sur le point de lui dire que ce ne serait peut-être
pas parmi ses
meilleures idées, mais elle poursuit en un éclat de rire :
…personne ne saurait si je suis une fille ou un garçon.

Ma cervelle s'arrête une seconde, déroutée : est-ce une
plaisanterie pour
me tester ? ou vraiment… ?
Mais oui, bien sûr, je comprends : c'est l'innocence
totale d'une petite fille
qui n'a jamais vu quelqu'un de l'autre sexe
complètement déshabillé. Ses
cinq ans d'expérience d'enfant dans une société encore
relativement
pudique (n'oublions pas, c'était encore avant la chute
du mur de Berlin !)
lui font croire, en toute simplicité, que c'est uniquement
la façon de
s'habiller qui distingue les deux sexes.
Je n'étais pas encore orthodoxe à cette époque. Je
n'attribuais aucune
importance au fait que ma Miriam savait déjà, pour
l'avoir vu de ses
propres yeux, ce qui distinguait en réalité le corps d'une
fille de celui d'un
garçon. Et je sais, encore aujourd'hui, qu'elle n'en était
pas moins pure et
innocente.
Huit ans plus tard, je suis devenue orthodoxe…

"L'homme et sa femme étaient tous deux nus, et ils n'en
avaient point
honte…"
La honte de la nudité nous est venue après la chute.
C'est la conscience
du péché qui a fait coudre à nos premiers parents des
ceintures de
feuilles de figuier.
Chez les enfants, cette conscience se développe plus
ou moins tôt (entre
3 et 6 ans suivant leur maturité), et, avant qu'elle ne
devienne une source
de trouble et de souffrance, elle doit être éclairée par
une éducation
chrétienne à la vertu.
Évidemment, la nudité corporelle n'est pas le péché en
soi. Quand Adam
voulait se cacher du Regard de Dieu, c'était de son état
déchu en général
qu'il avait honte, de sa nudité spirituelle et non pas
simplement de son
corps nu.
Notre honte de nous-mêmes, de notre état déchu,
s'atténue à la mesure
de notre purification. Un exemple de pureté est celle
des fols-en-Christ,
dont certains se promenaient complètement nus sans
avoir honte. Par un
renversement des valeurs du monde où on affiche un
masque de vertu
pour camoufler le péché, les fols-en-Christ montraient
leur nudité pour
cacher leur sainteté.
On me dira qu'il y a des saints dans les camps nudistes.
Je dirai que la
conscience du péché peut être anesthésiée, mais ce
n'est pas cela,
l'innocence.
Non, nous chrétiens, nous devons nous habiller de telle
façon que notre
habillement, tout en couvrant notre nudité, montre la
distinction des
sexes.
Et l'Église, dans son discernement divin, prescrit
traditionnellement cette
distinction dans l'habillement. Ce n'est pas du tout par
souci des
apparences (l'habit ne fait pas le moine!): mais tout est
symbole, tout est
"dogme", c'est-à-dire enseignement, dans l'orthodoxie.
Il n'est pas étonnant que saint Nil le Myrovlite (XVIIe s.)
mentionne dans
sa prophétie concernant notre temps : "L'aspect des
personnes
changera et il sera impossible de distinguer les
hommes des femmes à
cause de leur insouciance à s'habiller et à se coiffer."
La distinction dans l'habillement nous rappelle à la fois
que Dieu nous a
créés homme et femme, que nous ne sommes pas
innocents, et que la
pudeur s'impose comme condition sine qua non du
progrès spirituel.
La petite Barbara en avait même une idée exclusive, en
toute innocence,
sans avoir eu d'éducation chrétienne.
"Kinder und Narre sagen das Wahre" (ou : die Wahrheit
?) — comme le
disait ma grand-mère (si je me souviens bien du
proverbe. Si qn le sait…
qu'il me le dise, s.v.p.)
Antoine
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Saint Euphrosynos le Cuisinier

Message par Antoine »

Date : 17.06 12h59
auteur : Catherine


Saint Euphrosynos le Cuisinier
fêté le 11 septembre

Il était issu de parents illettrés. Tout en restant séculier, il
devint
serviteur
de moines. Ceux-ci le tenaient en grand mépris et tout le
monde riait de
lui ; il se donnait beaucoup de mal à la cuisine.
Dans le monastère il y avait un prêtre agréable à Dieu, qui
priait le
Seigneur de lui révéler sensiblement les biens
qu'Euphrosynos préparait
à ceux qui aiment Dieu. Une nuit donc, il se vit au paradis où
il contempla
ébloui un extraordinaire spectacle. Au centre, il voyait
Euphrosynos, le
cuisinier, considérant les biens du paradis. Il s'approcha de
lui et le
questionna: "Est-ce ici le paradis ?" Euphrosynos dit:"Oui,
c'est la maison
des élus de Dieu et moi, grâce à sa grande Miséricorde, j'ai
été placé ici
afin d'en vivre. " Le prêtre : "Qu'est-ce que tu fais ici, en ce
paradis?"
Euphrosynos répondit: "Je possède tout ce que tu vois ici et
je me réjouis
de leur sensation." Le prêtre: "Peux-tu me donner l'un de
ces biens?"
—"Si tu le veux, tu peux en recevoir grâce à la bonté de
Dieu." Alors le
prêtre montra avec la main des pommes et en demanda. Et
Euphrosynos
en cueillit une, la donna au prêtre et dit: "Selon ta demande,
reçois et
considère!"
Au moment où la simandre fut frappée pour l'office de
Matines, le prêtre
se réveilla et prit la vision pour un songe. Mais regardant à
côté de lui, il
vit
les pommes; leur parfum était très doux.
Quand il rencontra Euphrosynos à la synaxe, il voulut qu'il
lui dise où il
était cette nuit. Et Euphrosynos: "Excuse-moi, père, j'étais là
où tu m'as
trouvé". Le prêtre: "Alors je t'adjure de manifester les
grandeurs de Dieu.
Ne peux-tu pas dire la vérité?" Alors l'humble Euphrosynos
dit: "C'est
parce que tu cherchais à con-templer sensiblement les
biens pro-mis
aux élus dans le paradis de Dieu que tu m'y as trouvé. Le
Seigneur a
voulu t'informer par mon intermédiaire, moi qui ne suis qu'un
pauvre
serviteur, d'une façon paradoxale." Et le prêtre: "Qu'est-ce
que tu m'as
donné, père, dans le paradis?"
— Euphrosynos: "Des pommes mûres que tu as déposées
sur ton lit.
Mais père, excuse-moi, je ne suis qu'un ver et pas un
homme."
Après que le prêtre eut raconté aux autres frères la vision, le
grand
Euphrosynos prit la fuite. On ne sut jamais où il alla.
Plusieurs malades
furent guéris en mangeant de ces pommes venues du
paradis de Dieu.
Antoine
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Inscription : mer. 18 juin 2003 22:05

Un père christophore

Message par Antoine »

Date : 07.06 01h08
auteur : Catherine



Un père christophore

Un catéchumène ex-kto (nommons-le B.) venait à notre église
cinq ou six
fois l'an. Il habitait à 300 km de là; il était marié, mais sa
femme ne venait
jamais avec lui.
B. interrogeait souvent une de nos fidèles (du nom de L.), qui
vivait seule,
sur des questions de foi et ils se sont mis à correspondre. Or,
à la suite
de ces échanges épistolaires, ils sont tombés
(platoniquement) très
amoureux l'un de l'autre.
L. s'en étant confessée, le prêtre lui a interdit d'écrire
désormais à B. Mais
il a continué à écrire et elle à lire ses lettres, à répondre et à
souffrir.
Alors le prêtre lui a dit de ne même pas lire les lettres qu'elle
recevrait.
Elle ne s'en sentait pas capable, mais a promis au prêtre de
ne plus
même ouvrir les lettres en question.
Fortifiée par la prière et la communion, elle a réussi à jeter la
lettre
suivante sans l'ouvrir, mais cela ne l'empêchait pas de
continuer à
penser à B.
Alors, elle a dit au prêtre : "Père, vous me demandez
l'impossible :
comment faire pour ne pas aimer quand on AIME ? Cela ne
se
commande pas."
Le prêtre a eu un léger mouvement d'impatience : "Je te l'ai
déjà dit, ce
n'est pas ça, l'amour, c'est une passion. Une passion, c'est
toujours
égoïste."
Mais les souvenirs de leurs échanges ne cessaient de lui
revenir en
mémoire, et elle pensait à sa souffrance à lui qui n'avait plus
de
nouvelles d'elle.
Elle a dit au prêtre : "Père, je ne peux pas m'empêcher de
penser à B. Et
je ne vois pas en quoi c'est égoïste : je ne pense plus du tout
à moi, mais
à sa souffrance à lui. Je supporte très mal la pensée qu'il
souffre."
Le prêtre : "Et penses-tu aussi à la souffrance de sa femme,
si elle savait
que son mari en "aime" une autre ?"
L. : "Euh… non".
Le prêtre : "Alors, tu vois bien ton égoïsme ?"
Ce disant, il s'est retiré pour faire sa prière personnelle.
À l'heure des Complies, L. en face de l'icône de la Toute-
Sainte, sentait
comme des reproches émanant du doux regard de celle-ci, et
ne pouvait
plus penser qu'à la souffrance de la femme de B. Elle
rougissait de honte
comme si elle était en face de cette femme.
Peu après, L. a demandé au prêtre : "Père, vous avez prié
pour moi tout à
l'heure ?"
Le prêtre, en souriant : "Pourquoi, ça ne va pas ?"
L. : "Si au contraire, cela va mieux. Je ne souffre plus. Merci.
Je peux
même penser à B. avec sérénité. Et je regrette tout à cause
de sa
femme."
Mais après cela, L. a passé une nuit où elle revoyait B.
constamment en
rêve, et de façon si vivide qu'elle croyait que c'était réel. Elle
s'est
réveillée
en sanglotant.
Après les Matines, elle a revu le prêtre, pour lui dire :
"Je comprends, père, que je suis égoïste. Et pourtant, je
continue à
l'aimer, je ne peux pas l'oublier… "
Le prêtre : "Il est naturel qu'un homme et une femme
s'attirent. Il est
normal que l'on aime ce qui est beau : la nature, la poésie, la
belle
musique… Mais c'est naturel. L'amour spirituel, c'est autre
chose."
L. : "C'est comment alors ?"
Le prêtre : "Purifie-toi et tu verras la différence."
Cette réponse lapidaire était un programme. L. s'est aperçue
que jusque
là, non seulement elle n'avait pas pensé lutter contre cette
passion, mais
au contraire, elle s'y était abandonnée avec plaisir, même
quand cela la
faisait souffrir.
Tout en en souffrant toujours, elle s'est mise à lutter par la
prière de
Jésus, sérieusement, mais tenta encore un dernier assaut,
cette fois-ci à
l'encontre du Christ :
— Seigneur, Tu comprends, Toi, ou serais-Tu aussi cruel que
le père ?
Toi qui sais ce qu'est l'amour… enfin, Tu ne sais pas ce
qu'est une
passion…
Et le Christ lui a répondu :
— Mais je sais ce qu'est l a P a s s i o n. Et je l'ai soufferte par
amour
pour vous.
— Je le sais, Seigneur. Mais alors, c'est quoi, l'amour ?
Et le Christ de lui "répéter" mot à mot ce que le prêtre lui avait
dit :
— Purifie-toi et tu verras la différence.
Après cela, confirmée de la parole inspirée du prêtre, elle a su
ne pas
ouvrir les lettres suivantes.
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