Aïe aíe aíe naiveté quand tu nous tiens!
Ce document a été publié à l'issue de la réunion de l'Assemblée jubilaire de l'Eglise orthodoxe russe sur le dialogue oecuménique qui s'est tenue du
13 au 16 aôut 2000. La fermeté sur les principes énumérés s'explique comme une réponse-réaction à la Dominus Iesus publié par la Sacrée Congrégation Romaine pour la Doctrine de la Foi le
6 aôut 2000. On se souvient que les oecuménistes de tous bords s'étaient scandalisés de la déclaration romaine. En effet, dans ce document, le Cardinal Préfet dudit dicastère, Joseph Ratzinger, présente l'Eglise catholique romaine comme la véritable Eglise de Jésus Christ, semblant revenir ainsi à la conception eclesiologique exposée par Pie XII dans son encyclique
Mystici Corporis Christi et renier partant la notion de
subsistit in du Concile Vatican II, laquelle tel un talisman avait permit d'ouvrir la voie à l'oecuménisme-syncrétisme qui est une des caractéristiques de l'Eglise romaine post-conciliaire.
Voila, à mon avis, le sens d'un tel texte par Moscou. A noter que j'ai cru comprendre que cette interprétation n'est pas seulement mienne puisque qui sait lire entre les lignes comprendra que dans l'allocution qu'il fit au mini-Assise qui s'est tenu récemment à Aix la Chapelle en Allemagne, le Métropolite Kirill, patriarcabile le plus probable, a mis en relation le texte romain avec celui de Moscou expliquant l'exclusivisme de l'un par celui de l'autre mais que cela c'était sur le papier et que la réalité était autre i.e oecuménique dans le sens de la théorie des branches.
Par ailleurs, ce même Métropolite avait accordé un entretien au quotidien espagnol
El Mundo au temps des préparatifs de la guerre contre l'Irak. Il y parlait de l'Eglise catholique romaine et de l'Eglise orthodoxe comme de deux Eglises soeurs. Cette notion d'Eglise soeurs est à elle seule un démenti à l'exclusivité de l'Eglise orthodoxe en tant qu'Eglise de Jésus Christ. Historiquement la notion d'Eglises soeurs ne concerne que les Eglises orthodoxes.
Cela dit au sein du Patriarcat de Moscou il y a, ce me semble, deux positions: celle du Métropolite Kirill en faveur des deux poumons et celle ad es. de Vladika Onofri en faveur de l'identité de l'Eglise orthodoxe avec l'Eglise de Jésus Christ.
Voila qui explique, selon moi, pourquoi Moscou fait figure de Janus.
Mais de toute façon les Eglises canoniques orthodoxes, à de rares exceptions près (Patrarcat de Jérusalem, Eglise de Serbie etc), ne font que réagir aux initiatives romaines. C'est, je crois, ce que le Père Basile Sakkas reproche aux hiérarques orthodoxes.
Le maître du jeu c'est l'Eglise romaine et les Eglises orthodoxes ne font que suivre: le changement eclesiologique dans l'Eglise romaine a provoqué le changement eclesiologique dans les Eglises orthodoxes; au syncrétisme pan-religieux de l'Eglise romaine fait suite le syncrétisme pan-religieux des Eglises orthodoxes.
Donnons des exemples:
Que fit Alexis II après que Jean paul soit allé visiter la synagogue de Rome? Il alla, bien entendu, lui aussi, pour ne pas être en reste, visiter une synagogue et ce en dépit du canon de son Eglise qui déclare déposé qui poserait un tel acte. Il n'y a pas de Camberra sans Assise etc
Au sujet de la réception des convertis dans l'Eglise et de la très forte influence latine qu'a subi l'Eglise russe en cette matière, tout a été très bien résumé par le Père Placide Deseille aussi lui je cède la parole:
Dès le IIIe siècle, deux usages se trouvaient en présence dans l’Église pour la réception des hétérodoxes: la réception par l’imposition des mains (ou par la chrismation), et la réitération du rite baptismal déjà reçu dans l’hétérodoxie. Rome n’admettait que l’imposition des mains, et condamnait vigoureusement la réitération du baptême des hérétiques. Les Églises d’Afrique et d’Asie tenaient au contraire pour la seconde pratique, dont les plus fervents défenseurs étaient St Cyprien de Carthage et St Firmilien de Césarée. Ils insistaient sur le lien qui existe entre les sacrements et l’Église. Pour eux, un ministre qui s’écartait de la profession de foi de l’Église s’écartait en même temps de l’Église elle-même, et ne pouvait plus en détenir les sacrements authentiques.
A partir du Ive siècle, la doctrine romaine sur la validité des sacrements des hétérodoxes, soutenue par l’autorité, exceptionnelle dans tout l’Occident, de St Augustin, s’imposa à l’ensemble de l’Église latine, du moins en ce qui concerne le baptême, car la question de la validité des ordinations sacerdotales reçues dans l’hétérodoxie ne fut communément admise en Occident qu’au XIIIe siècle.
En Orient au contraire, grâce surtout à l’influence de St Basile, l’ecclésiologie et la théologie sacramentaire de St Cyprien ne cessèrent jamais d’être considérées comme plus conformes à la tradition et à l’esprit de l’Église que la doctrine de St Augustin. La réception des hétérodoxes par le baptême restait la norme idéale (acribie); cependant, tenant compte de la pratique des Églises où l’on reconnaissait le baptême des hétérodoxes qui ne niaient pas les fondements mêmes de la foi (la doctrine trinitaire), on acceptait, quand des raisons d’économie (c’est-à-dire de condescendance envers la faiblesse humaine) le demandaient, de les recevoir par l’imposition des mains ou la chrismation.
Le principal fondement canonique de la non-reconnaissance en acribie des sacrements des hétérodoxes est le 46e canon apostolique, qui déclare: «L’évêque, le prêtre ou le diacre qui a reconnu le baptême ou l’oblation des hérétiques, nous prescrivons qu’il soit déposé.» Ces canons apostoliques, confirmés par le Vie concile œcuménique (in Trullo), constituent la base du droit canonique orthodoxe. La pratique de l’économie dans certains cas s’autorise du canon! de St Basile le Grand.
A une époque tardive (XVIIe siècle), l’Église orthodoxe russe subit une très forte influence latine, et se rallia partiellement à la thèse augustinienne. Elle décida alors de recevoir les catholiques dans l’Orthodoxie seulement par la confession et une profession de foi. Du point de vue de la théologie orthodoxe traditionnelle, ceci ne peut être admis que comme un recours très large au principe de l’économie.
Le principe d'économie par l'influence latine: de là la réception de Wladimir Guettée dans l'Eglise russe en tant que prêtre sans ré-ordination préalable.
Maintenant, je me souviens que ce qui avait sucité ma première intervention sur l'ancien forum était justement le problème de la succession apostolique chez les latins. Car si jusqu'au Concile Vatican II, l'Eglise romaine a maintenu le rite patristique du sacrement de l'ordre lequel est conservé dans tous ses degrés dans le Pontificale Romanum, ce n'est plus le cas depuis la réforme liturgique des années 60 qui je le rappelle a affecté TOUS les sacrements alors que la constitution Sacro sanctum concilium de Vatican II ne demandait qu'une réforme de la Messe.
J'aime à citer ces propos de Mgr Batiffol:
Le Pontifical est le livre liturgique le plus magnifique que nous possédions. Il nous vient en droite ligne de l'antiquité chrétienne sans avoir subi les restaurations du Missel, du Bréviaire; il est tout entier un témoin des vieux âges.
(Mgr Pierre Batiffol. Préface pour
Les Etapes du Sacerdoce par René Duboscq, p.s.s.).
C'est pour cela que Paul VI, et sa commission liturgique post-concilaire emmené par l'hotentot Bugnini, ont changé le rite tant au niveau sacerdotal qu'au niveau épiscopal. Il s'agit d'une
création nouvelle faite dans la perspective de fusionner à terme les ordinaux VII et anglicans. Bref, les principes qui ont présidés à la réforme que fit Mgr Cranmer lors de la séparation de l'Eglise d'Angleterre de la communion romaine, se retrouvent dans la réforme de Paul VI et cela pose de très graves problèmes en termes de validité du nouveau rite romain.
Paul VI a beau écrire dans sa constitution apostolique
Pontificalis Romani qui publie les nouveaux rites d'ordination que:
...on a jugé bon de recourir, parmi les sources anciennes, à la prière consécratoire qu'on trouve dans le document appelé Tradition apostolique d'Hippolyte de Rome, écrit au début du troisième siècle, et qui, pour une grande partie, est encore en usage dans la liturgie de l'odination chez les Coptes et les Syriens occidentaux
en réalité le texte d'Hippolyte n'a presque rien en commun avec les rites orientaux et
dans aucun des rites orientaux on ne trouve, s'agissant du degré de l'épiscopat, les mots que Paul VI donne pour essentiels, en particulier l'expression esprit directeur (spiritum principalem).
Quant à la
Tradition apostolique d'Hippolyte, il s'agit d'un document composite d'origine douteuse et au sujet duquel il n'y a aucun témoignage qui permettrait d'affirmer qu'il aie servi pour consacrer un évêque catholique (=orthodoxe en ce temps). Voici ce qu'en dit Burton Scott Easton in
The Apostolic Tradition of Hippolytus, Arenon Books, Angleterre, 1962:
A l'exception de petits fragments, on n'a jamais retrouvé l'original grec de la Tradition apostolique. En général, on peut se fier au texte latin, mais il est incomplet. La seule autre version primitive, la sahidique, est, elle aussi, incomplète, et les résultats de la capacité moyenne de son traducteur ont été rendus encore plus confus par la transcription qui en a été faite. Le texte arabe est un texte secondaire présentant peu de choses que le sahidique ne contient pas. La seule version presque complète, l'éthiopienne, est tertiaire; elle est sujette à caution. Ces quatre versions présupposent un original commun grec, dans lequel deux textes différents ont été fondus en un seul. Les autres sources, les Constitutions, le Testament et les Canons, sont de franches révisions, dans lesquelles l'original n'est pas reconnaissable quand il n'est pas contredit. Dans ces conditions, il est manifestement impossible de restituer le texte avec exactitude.
Bref, il me semble périlleux, pour ne pas dire témeraire, de baser son rite de consécration épsicopale, celui qui confère la succession apostolique, sur un tel texte!
Surtout si l'on sait dans quelles circonstances il a été rédigé:
Hippolyte naquit vers 160 et on pense qu'il fut un disciple de saint Irénée. Il devint prêtre sous le pape Zéphirin. Des divergences doctrinales avec le pape l'obligèrent à quitter Rome. A la mort de Zéphirin, quand Calixte lui succéda sur le Trône de Lin, "Hippolyte, dans son ambition déçue, fonda une communauté schismatique" (Dom Poulet,
Histoire du Christianisme, fasc. I, p. 124). C'est alors qu'il écrivit sa
Tradition apostolique,
vraisemblablement pour avoir un pontifical à l'usage de la secte dont il était devenu "pape". Plus tard, sous la persecution de l'empereur Maximin, Hippolyte fut envoyé dans les mines de Sardaigne avec le pape d'alors, Pontien. Là, avant de subir le martyr en comapgnie du pape (septembre 325), il se réconcilia avec l'Eglise; il fut canonisé en même temps que Pontien.
Cette réforme romaine du sacrement de l'ordre est très grave. C'est pourquoi j'avais voulu tirer la sonnette d'alarme en en faisant mention dans mon premier post sur l'ancien forum. Il est plus que temps que les autorités compétentes des Eglises orthodoxes se penchent sur ces nouveaux rites presbyteral et épiscopal et les examinent avec sérenité avant de dire que l'Eglise romaine possède la succession apostolique. Elle la possédait jusqu'à la réforme liturgique de Paul VI. L'a possède t'elle toujours? Rien n'est moins sûr. D'autant plus que, à supposer que le rite soit valide en soi, vu le peu de respect des normes dont font preuve grand nombre d'évêques latins post Vatican II et vu leur peu de foi dans les sacrements de l'Eglise, il est très possible que dans son application concrète elle soit souvent invalide.
De même les auorités compétentes orthodoxes devraient urgemment analyser les rites anglicans. En effet, si demain les Eglises orthodoxes acceptent des convertis romains et anglicans, ayant déjà rang sacerdotal ou épiscopal, par simple économie alors c'est la succession apostolique en leur sein qui sera mise en danger. En effet un évêque ça fait des p'tits: prêtres et évêques. Un évêque sans succession apostolique rend caduque toute sa chaîne, cela a des conséquences incalculables.
On sait que désormais, du fait de son engagement oecuménique, le baptême de toutes les dénominations chrétiennes est considéré comme valide par Constantinople et ce en dépit des très grands abus constatés tant dans l'Eglise romaine que dans les communautés protestantes. Il y a là un très grand danger auquel les responsables othodoxes oécuménistes exposent leurs propres Eglises et dont ils se rendent responsables devant Dieu.
Par ailleurs, ce n'est pas rendre un service de charité aux hétérodoxes que de les conforter dans leurs pratiques abusives (baptême par aspersion, plus d'exorcismes, pose de l'eau sur le crâne et non sur le front, baptême par une pastoresse ou une pretresse, utilisation d'un autre élément que l'eau etc).
On sait qu'on utilise
le principe d'economie dans plusieurs Eglises orthodoxes officielles comme un talisman oecuménique.
C'est la clef pour la fusion sacramentelle tant désirée par certains oecuménistes.
Mais cela peut t'il se faire au détriment de la Vérité?
Vu le manque de sérieux et de foi constaté au sein de l'Eglise romaine, de la communion anglicane et de certaines communautés protestantes recourir à leur égard à lla circonspection et utiliser le principe d'acribie dans le cas des convertis me semble PLUS QUE JAMAIS nécessaire.
URL du compte-rendu en anglais mais très GRAPHIQUE de la réunion inter-religieuse d'Aix la Chapelle (perpsective lefebvriste) ci-dessous:
http://www.novusordowatch.org/aachen.htm
http://www.novusordowatch.org/aachen2.htm
URL du discours en anglais du Métropolite Kirill à cette occasion:
http://www.russian-orthodox-church.org.ru/ne309091.htm