Re: très sérieux matrimonial
				Publié : jeu. 20 juil. 2006 13:49
				par Claude le Liseur
				régis a écrit :Bonjour,
Je désire fonder une famille très nombreuse et Dieu sait si cela devient très rare en France. A cet effet, je recherche à travers l'Europe entière une jeune fille (qui soit si possible le plus proche possible de la Tradition de l'Eglise) afin de fonder cette famille.
(...)
Cher Régis, pourriez-vous préciser, s'il vous plaît, ce que cela veut dire, "qui soit si possible le plus proche possible de la Tradition de l'Eglise"? Que vous souhaitez si possible vous marier avec une jeune fille orthodoxe, mais que vous êtes aussi prêt à vous marier avec une hétérodoxe? Et dans ce cas, pourquoi poster cette annonce sur un forum orthodoxe? 
Parce qu'il me semble quand même que, soit on est dans l'Eglise, soit on n'y est pas. Soit on est orthodoxe, soit on ne l'est pas. On n'est pas plus ou moins proche, ou le plus proche possible, de l'Orthodoxie.
NB Nous ne sommes pas une agence matrimoniale et n'exerçons pas d'activité de courtage matrimonial au sens des art. 406a ss. du Code des obligations. Nous n'avons d'ailleurs aucune des autorisations prévues par l'Ordonnance du Conseil fédéral du 10 novembre 1999 sur l'activité à titre professionnel de mandataire visant à la conclusion d'un mariage ou à l'établissement d'un partenariat stable entre des personnes venant de l'étranger ou s'y rendant (RS 221.218.2), condition 
sine qua non, selon l'art. 406c al.1 CO, pour l'exercice d'une telle activité.
Par conséquent, pour nous conformer à la loi, nous avons supprimé les références que vous aviez données dans votre message.
Veuillez noter au passage que le forum n'a aucune activité commerciale, que son accès est totalement gratuit, que l'administrateur et les modérateurs ne perçoivent aucun dédommagement et que, bien qu'ayant en général des activités professionnelles absorbantes, ils prennent sur leur temps de loisir pour assurer la bonne marche du présent forum uniquement parce qu'ils estiment que l'existence de ce lieu de discussion et de diffusion de l'information est utile aux orthodoxes des pays francophones et aux orthodoxes francophones d'autres pays.
 
			 
			
				
				Publié : jeu. 03 août 2006 10:25
				par Kazan
				Pour tout commentaire, puis je suggérer à Régis de méditer ce texte:
AMOUR, MARIAGE ET SEXUALITÉ
  par père Jean Chryssavgis
  L'amour, le mariage et la sexualité nous concernent tous, car l'amour est la 
  vocation de chacun d'entre nous. En tant que chrétiens, nous croyons que c'est 
  par l'amour que la création tout entière a été faite. La source et la fin de 
  toute chose est l'amour, car la source et la fin de toute chose est Dieu, et 
  que Dieu est amour (1 Jn 4,8,16). Saint Jean Chrysostome décrit l'amour absolu 
  du Dieu incarné dans une homélie sur l'Évangile selon Matthieu : « Je suis un 
  père pour vous, dit le Christ et un frère, un époux et un foyer, un infirmier 
  et un vêtement, une racine et une pierre d'angle. Tout ce que vous pouvez 
  désirer, je le suis pour vous. Mon désir est que vous n'ayez aucun besoin quel 
  qu'il soit. Je vous servirai ; car je suis venu non pour être servi, mais pour 
  servir. Je suis un ami et un membre du corps et sa tête, un frère, une sœur et 
  une mère. Je suis tout pour vous. Il suffit de rester en communion avec moi. 
  Pour vous, j'ai été pauvre, pour vous j'ai été un pèlerin, pour vous j'ai été 
  sur la croix et dans le tombeau ».
  Même le mal dépend de l'amour. Si l'on en croit l'optimisme de certains Pères 
  de l'Église, personne ne commet d'acte mauvais sans croire que quelque chose 
  qu'il aime en résultera. Donc, l'amour est d'origine divine et de nature 
  sacrée.
  « L'amour est plus fort que la mort »
  Du point de vue humain, le concept d'amour ne peut aucunement être compris 
  d'une seule façon. Il évoque une multitude de sens et de dispositions d'esprit 
  : qu'on parle de « faire l'amour », ce qui peut signifier un acte physique 
  sans amour, ou de l'engagement profond d'un couple avancé en âge ; qu'il 
  s'agisse de motivations égoïstes ou de don désintéressé, de la douceur d'un 
  enfant qui tient la main de ses parents ou de l'intimité de deux amis qui se 
  donnent la main.
  Les êtres humains sont faits pour s'aimer et se regarder l'un l'autre. 
  L'expérience de l'amour est celle du ciel et de la vie ; l'absence d'amour est 
  enfer et mort. Saint Macaire d'Égypte, pour évoquer sa vision de l'enfer, 
  parlait de deux personnes liées dos-à-dos, qui jamais, de toute éternité, ne 
  pourraient se voir face à face. L'amour brise les chaînes de la solitude ; il 
  fait s'écrouler les murs de l'égoïsme. Nous ne sommes jamais plus puissants 
  que quand nous sommes, par amour, vulnérables. L'amour chasse la peur ; il est 
  plus fort que la mort (cf. Ct 8,6). Dire à quelqu'un : « Je t'aime », c'est 
  faire une déclaration métaphysique ; c'est comme dire : « Tu ne mourras jamais 
  ! »
  Conscients de cette intensité de l'amour, les Pères de l'Église ne craignent 
  pas de le comparer à l'éros ou à la passion. Denys l'Aréopagite décrit Dieu 
  comme un « fou de l'amour », ardent protecteur de sa création. L'amour est si 
  puissant, qu'une seule expression vraie de cet amour révèle une ouverture qui 
  transfigure le monde entier. Regarder dans les yeux une autre personne avec 
  amour, c'est voir l'âme du monde entier, c'est voir l'image même de Dieu.
  Un tel amour est un don de Dieu. Mais il demande également qu'on le cultive et 
  qu'on y travaille dur. L'amour a besoin de temps et de finesse, de 
  responsabilité et de respect. C'est un acte qui implique que l'on croît 
  soi-même pour combler l'autre, sans cesse. Au soir de la vie, nous serons 
  jugés uniquement sur le critère de l'amour. Cet amour est plus que de simples 
  sentiments. C'est une décision et un engagement. Si vous voulez aimer, vous 
  devez créer cet amour et non pas attendre que votre époux ou votre épouse vous 
  l'apporte. Dans l'amour et le mariage, Dieu nous présente une merveilleuse 
  occasion de renaître, d'atteindre la maturité. C'est en effet un grand mystère 
  (Ép 5,32). La vie est le grand mystère – le grand mystère à vivre, et à vivre 
  en abondance. Et si nous travaillons à cet amour, si nous cultivons l'amour, 
  si nous baissons la garde de notre méfiance, si nous luttons pour entrer en 
  relation, nous remarquerons peu à peu que le monde tout entier change et que 
  le monde entier est beau. En réalité, bien sûr, c'est nous qui aurons changé, 
  c'est nous qui verrons les mêmes choses avec d'autres yeux.
  
Aspect physique et aspect spirituel
  Les auteurs chrétiens ont, dès les origines, été mal à l'aise vis-à-vis de 
  l'amour physique ou sexuel. L'amour physique est un peu considéré comme une 
  forme dégradée de l'amour. Certains auteurs affirment que le célibat est 
  supérieur à l'amour vécu dans le mariage ; d'autres avancent que le seul but 
  de l'amour physique est la procréation. L'aspect physique, la sexualité, ont 
  été dégradés, regardés comme impurs. Ils sont considérés comme quelque chose 
  d'avilissant et de honteux ; on est habité par la peur et la culpabilité. La 
  sexualité est liée aux formes les plus basses de la vie, elle est assimilée 
  aux désirs impurs et aux instincts animaux.
  La figure de saint Augustin et sa théologie ont modelé la réflexion sur ce 
  sujet en Occident, et ce jusqu'à aujourd'hui. Il en résulte une schizophrénie 
  innée dans cette sphère de notre vie, la plus intime et la plus personnelle. 
  Pour Augustin, la sexualité est une conséquence de notre chute. Ève résulte de 
  ce qu'Adam a fait défaut à Dieu ; la femme n'est pas créée à l'image de Dieu, 
  mais en tant qu'instrument de l'homme. Pourtant saint Paul avait clairement 
  dit qu'en devenant une seule chair (1 Co 6,16), l'homme et la femme 
  symbolisent l'union du Christ et de l'Église. En tout cas, le Christ n'a 
  jamais assimilé le péché au corps, mais aux actes que l'on commet dans son 
  cœur (Mt 15,18-19). Pour les chrétiens, « la chair est la charnière du salut » 
  (Tertullien). Aussi, quel dommage que le christianisme – en tant que religion 
  du corps et de la chair, religion de l'Incarnation – ait ainsi marqué le corps 
  humain d'une cicatrice permanente !
  Ce dont il est ici question, ce n'est pas d'arriver à accepter un consensus 
  avec le corps ou la sexualité, mais de reconnaître leur lien crucial avec les 
  aspects les plus profonds de la nature humaine. La sexualité n'est pas 
  accidentelle ; elle est véritablement essentielle à notre réalité. L'amour 
  sexuel et physique appartiennent au mystère de notre être. Cela ne veut pas 
  dire que sexualité et spiritualité soient la même chose. Mais il y a cependant 
  une correspondance intime entre les deux. Le déni de l'une a son reflet dans 
  la dégradation de l'autre. Sans sexualité, il n'y a pas de beauté ; sans 
  beauté, il n'y a pas d'âme ; et sans âme, il n'y a pas de Dieu. Homme et femme 
  il les créa (Gn 1,27). C'est ce qui nous est dit immédiatement après la 
  création d'Adam et Ève à l'image et à la ressemblance de Dieu. Pour les Pères 
  orientaux, sans Ève, Adam est incomplet. « La femme est faite en pleine 
  communion avec l'homme : partageant chacun de ses plaisirs, de ses joies, 
  chaque bonne chose, chaque chagrin, chaque douleur » (saint Basile le Grand), 
  « partageant avec lui la grâce divine elle-même » (Clément d'Alexandrie). 
  Écrivant exactement à la même époque que saint Augustin d'Hippone, saint Jean 
  Chrysostome revendique que « l'amour sexuel n'est pas humain ; il est 
  d'origine divine ».
  
Icône ou idole
  Certes, il est difficile pour quelqu'un de prendre conscience de la sexualité 
  (de son corps) sans prendre conscience de la sexualité (des corps) des autres. 
  Et ainsi, dans l'union du mariage, l'homme et la femme s'offrent l'un et 
  l'autre à l'image de Dieu dans l'autre personne. Cela n'est pas sans lien avec 
  la rencontre qui se produit dans le cas de l'icône. L'iconographie implique un 
  art. Le mariage, de la même façon implique un art. L'amour n'est pas 
  simplement un acte ; il est art. Le but de cet art de l'amour – comme dans 
  l'iconographie – est de se transfigurer l'un l'autre, de se voir l'un l'autre 
  comme la manifestation du divin Bien-aimé. S'il y a place pour les icônes dans 
  l'Église, il y a place également pour le mariage et l'amour sexuel.
  Le corps et l'amour sexuel sont semblables à une icône qui ouvre à la beauté 
  divine et à l'amour divin : « Bénie est la personne qui est arrivée à un amour 
  et à un désir de Dieu semblables à ceux d'un amant fou pour la bien-aimée, 
  générant le feu par le feu, l'éros par l'éros, la passion par la passion, le 
  désir par le désir » (saint Jean Climaque). Voir l'autre comme icône, c'est 
  voir le monde par les yeux de Dieu. C'est abolir la distance entre ce monde et 
  le monde à venir ; c'est parler, sur cette terre et à cette époque-ci, le 
  langage du ciel et du temps à venir ; c'est révéler la dimension sacramentelle 
  de l'amour. Selon une parole apocryphe de Jésus : « Le Royaume des cieux est 
  rendu manifeste quand deux personnes s'aiment ». L'icône nous apprend un autre 
  mode de communication, au-delà du mot écrit ou parlé. On nous apprend non pas 
  à regarder les icônes, mais à regarder à travers elles. De même, nous sommes 
  appelés à pénétrer la surface de la personne que nous aimons, et à révéler la 
  profondeur sacrée qu'elle recèle.
  En fait, le thème de la procréation est directement lié à cette notion 
  d'icône. À moins que l'amour conjugal n'ouvre le couple au-delà de lui-même, à 
  moins que la relation des deux dans le mariage ne reflète la relation de la 
  Trinité, à moins que l'amour du couple ne s'élargisse d'une façon ou d'une 
  autre, l'amour conjugal, l'icône qu'il est appelé à être, se réduit à une 
  simple idole. Le couple qui s'aime est en tout temps appelé à avancer au-delà 
  du reflet mutuel de l'un dans l'autre ; un miroir n'est pas une icône, mais le 
  reflet de soi-même. Le couple est appelé à devenir une icône de l'Église, une 
  « Église en miniature ». Les dimensions de l'Église révèlent les dimensions du 
  couple marié. De même que nous croyons « en l'Église une, sainte, catholique 
  et apostolique », le couple lui aussi devrait refléter cette même unité, 
  sainteté, plénitude et apostolicité. Cela est important, car l'Église refuse 
  les représentations idéalisées ou romantiques de la vie mariée et de la 
  famille. Ainsi, le couple doit « avoir une progéniture » ; l'amour doit « 
  porter des fruits !. Le paradoxe est là : le couple doit avoir des enfants, 
  même s'il ne peut avoir d'enfants.
  
Monachisme et mariage
  Certains Pères de l'Église ont interprété les épîtres de saint Paul comme 
  l'affirmation implicite de la supériorité du monachisme sur le mariage (cf. 1 
  Co 7,8-9). Cependant « si l'on accorde les honneurs à la virginité, il ne 
  s'ensuit pas que le mariage est déshonoré » (saint Grégoire le Théologien). 
  Saint Macaire d'Egypte s'exclame : « En vérité, il n'y a ni vierge, ni 
  personne mariée, ni moine, ni laïc ; mais Dieu donne son Saint Esprit à tous, 
  selon les intentions de chacun ». La version syriaque de ce même texte dit : « 
  En vérité, la virginité n'est rien en soi, pas plus que le mariage, ou la vie 
  monastique, ou la vie dans le monde... »
  La pureté intérieure est toujours possible, indépendamment des circonstances 
  extérieures. Saint Syméon le Nouveau Théologien est inflexible sur ce point : 
  /Beaucoup considèrent la voie monastique comme la plus bénie. En ce qui me 
  concerne, cependant, je ne voudrais placer aucune voie plus haut que les 
  autres, ni louer l'une en dépréciant l'autre. Mais en chaque situation, c'est 
  la vie vécue pour Dieu et selon Dieu qui est entièrement bénie ». Comme nous 
  l'avons vu, dans une relation d'amour, l'autre personne devient le centre 
  d'attraction. Le but est toujours un mouvement vers l'extérieur et au-delà de 
  soi-même. La perspective est toujours le Royaume des cieux. Les moines et 
  moniales ont traditionnellement compris cette vérité au même degré que les 
  couples mariés. Ainsi les Pères ascètes nous apprennent que l'amour n'est 
  jamais satisfait ; il est seulement accompli. L'amour n'est pas un acte de 
  satisfaction, mais de don total. L'amour sexuel est pour la gloire de Dieu, 
  non pour la satisfaction égoïste de l'homme.
  L'amour véritable ne peut avoir d'accomplissement ultime sans la chasteté. 
  Dans L'échelle du Paradis, saint Jean Climaque place la pureté (degré 29) 
  immédiatement avant l'amour (degré 30). Le monachisme n'est donc pas 
  abstention de l'amour sexuel. Il est une autre manifestation de cet amour. Le 
  monachisme ne peut jamais être une extinction ou une diminution de la réponse 
  humaine la plus vitale à la vie. Il y a un élément d'ascétisme dans le 
  mariage, une épuration de l'amour, exactement comme il y a une dimension 
  d'amour dans le monachisme, une passion pour Dieu. Dans la tradition 
  monastique, les passions sont traitées différemment ; elles sont dépassées par 
  des passions plus grandes. Une seule expérience forte d'amour passionné nous 
  fera avancer beaucoup plus loin dans la vie spirituelle que le combat 
  ascétique le plus ardu. Une seule flamme de pur amour suffit pour allumer un 
  feu cosmique et transformer le monde entier. L'amour n'est pas un problème 
  physique ou matériel. Il n'est pas en premier lieu une affaire sexuelle. Il ne 
  devrait pas être craint comme un tabou, mais reçu comme un mystère sacré ; il 
  ne devrait jamais être dissimulé comme un secret, mais révélé comme un 
  sacrement.
  Le monachisme, comme le mariage, est un sacrement d'amour. Le monachisme, 
  comme le mariage, est un sacrement du Royaume. La vraie dimension des deux est 
  eschatologique. Ainsi l'amour est plus grand que la prière même, il est, en 
  effet, prière. Car l'amour est ce qui définit la nature humaine. Les moines 
  comme les couples mariés doivent les uns comme les autres continuellement 
  lutter pour être ce qu'ils sont appelés à être – rester dans l'enchantement de 
  la flamme vivante de l'amour divin. Comme nous l'avons dit précédemment, 
  l'amour est un don d'en haut ainsi que quelque chose vers quoi on doit tendre 
  ; c'est un point de départ ainsi qu'un aboutissement. L'alpha et l'oméga de la 
  vie sont la première et la dernière lettre du mot grec signifiant « j'aime » 
  (agapaô). Cela est vrai pour un moine ou une moniale, comme pour un époux ou 
  une épouse.
 
 Le sacrement du mariage
  Tout sacrement est une transcendance de la division et de l'aliénation. Dans 
  le cas du mariage, chaque personne, chacun des conjoints est appelé à devenir 
  conscient de la présence divine dans l'autre. Tous deux, mari et femme, 
  doivent percer le rideau de la distance et du mensonge. Quand cela se produit, 
  l'union conjugale est plus forte que la mort, ne pouvant « être rompue par 
  personne ». Dans cette relation, le masculin n'est jamais exclusivement le 
  pôle actif, et le féminin n'est jamais exclusivement le pôle passif. Le 
  fondement de toute relation sacramentelle est que l'homme et la femme sont 
  complémentaires : il y a une mutualité de don et de réception, une rencontre 
  de réciprocité. Aucun des deux ne doit considérer l'autre comme un moyen 
  visant une fin, quelque exaltée ou spirituelle qu'elle puisse être. Aucun des 
  deux ne doit utiliser cette relation pour quelque but que ce soit où l'autre 
  ne serait pas pleinement et personnellement impliqué comme partenaire et 
  participant actif et coopérant.
  Cela signifie que les partenaires ne devraient pas chercher l'accomplissement 
  par l'autre de leur propre existence, ou une dépendance l'un de l'autre. Je ne 
  peux pas tenir mon époux ou épouse pour responsable de mon vide personnel. À 
  tout moment, j'ai besoin de découvrir la complétude de mon vide en Dieu : 
  c'est Dieu qui me fait savoir que je suis aimé ; c'est Dieu qui me donne le 
  pouvoir d'aimer l'autre. Ici, à nouveau, nous rencontrons le « caractère 
  monastique » de la relation conjugale. Le mariage n'est pas une solution 
  magique aux problèmes de l'existence. Comment pourrait-il y avoir un mariage 
  qui soit à la hauteur de telles attentes ? Est-il étonnant que des mariages 
  échouent, quand on nous dit aujourd'hui que notre partenaire est notre « 
  seconde moitié », quand nous sommes moins que des personnes entières dans le 
  sacrement ? L'amour personnel implique une pleine dignité et une pleine 
  identité, sans diminution aucune de l'autre personne. L'intégralité et 
  l'intégrité de la personne sont indispensables pour un mariage sain. Et 
  l'intégralité présuppose sincérité, et non amabilité. L'amour est un acte de 
  foi aussi bien qu'un acte de fidélité. Mentir, rompre, dire un peu moins que 
  la vérité, est toujours une tentation.
  Cela veut dire que si l'on veut qu'il y ait de l'intimité dans l'amour, il 
  faut qu'existe aussi la possibilité du conflit. Dans les mariages où il n'y a 
  pas de conflit, il n'y a pas, en général, – ou il risque de ne pas y avoir – 
  de sincérité. Dans la société, et même dans l'Église, on nous apprend à être 
  gentils. C'est comme apprendre à être insincères. Et alors, nous sommes 
  tristes ou en colère, mais nous sourions ; nous disons des choses que nous ne 
  pensons pas. Alors que ce qui n'est pas discuté ouvertement demeure irrésolu 
  et cause des dommages dans la vie de nos enfants. Nous devons être sincères 
  sur nos échecs, ouverts à propos de notre sentiment de vide. Ces choses-là 
  sont une partie inestimable de nos relations. Voilà pourquoi le mariage est 
  autant une affaire de séparation que d'union ; une affaire de détachement 
  autant que d'attachement. Un poème de Khalil Gibran, intitulé « Mariage », 
  souligne ce paradoxe de l'état de séparation et de proximité en amour :
  Vous êtes nés ensemble, et ensemble vous serez à jamais.
  Vous serez ensemble quand les ailes blanches 
  de la mort éparpilleront vos jours. 
  Oui, vous serez ensemble dans la mémoire silencieuse de Dieu. 
  Mais qu'il y ait des espaces dans votre unité. 
  Laissez les vents des cieux danser entre vous. 
  Aimez vous l'un l'autre,
  mais ne faites pas de l'amour un lien. 
  Qu'il soit plutôt une mer mouvante entre les rivages de vos âmes. 
  Emplissez l'un l'autre vos coupes, 
  mais ne buvez pas à une seule coupe. 
  Donnez à l'autre de votre pain, 
  mais ne vous nourrissez pas de la même miche. 
  Dansez et chantez ensemble et réjouissez-vous,
   mais que chacun permette à l'autre d'être seul.
  Comme les cordes d'un luth sont seules, 
  bien qu'elles frémissent à la même musique. 
  Donnez votre cœur, 
  mais sans le mettre sous la garde l'un de l'autre. 
  Car seul l'orchestre de la vie peut contenir vos cœurs.
  Et tenez-vous debout ensemble, 
  mais pas trop près ensemble. 
  Car les piliers des temples sont distants l'un de l'autre.
  Et le chêne et le cyprès ne poussent pas 
  dans l'ombre l'un de l'autre."
  
Sexualité et sacramentalité
  Pour devenir une union sacramentelle complète, l'amour entre un homme et une 
  femme doit embrasser tous les aspects de leur vie – chaque niveau et chaque 
  potentialité de leur être. Cela inclut l'aspect physique, spirituel, 
  émotionnel, intellectuel de la nature humaine. S'il n'en est pas ainsi, la 
  relation reste inconsommée et inachevée, ni sacrée, ni sacramentelle ; elle 
  devient aussi bien handicapante que frustrante.
  Cela nous fait mieux comprendre combien il y a peu de mariages – même parmi 
  ceux qui ont été bénis par l'Église – qui soient en fait sacramentels. Cela 
  indique aussi la liaison entre le mariage et la déification, vers laquelle 
  nous sommes tous appelés à évoluer. Ce serait là ma définition de la « 
  sexualité » : vrai achèvement et consommation à tous les niveaux – 
  accomplissement aussi rare que la théosis elle-même, bien qu'aussi noble en 
  tant que tâche et vocation.
  Si l'un des partenaires se développe (sur un plan ou sur un autre) au-delà de 
  l'autre ou sur un autre rythme, ce niveau non consommé ou qui n'a pas trouvé 
  de réponse chez l'autre, cette partie restée sans complémentarité, non 
  réalisée, aura toujours tendance à chercher à s'exprimer sous une autre forme 
  ; elle sera incapable de fonctionner normalement et pleinement à l'intérieur 
  du mariage. Si l'intégrité et la totalité sont les conditions cruciales d'une 
  relation sacramentelle, il en va finalement de même pour la continuité et 
  l'engagement. La capacité de se transformer l'un l'autre demande que l'on s'y 
  consacre, avec patience, jusqu'à ce que les angles aigus des rocs durcis de la 
  relation soient adoucis, jusqu'à ce qu'un champ magnétique soit construit à 
  tous les niveaux. Alors chaque niveau, l'un après l'autre, se déploie et agit 
  l'un sur l'autre, et libère des potentialités qui ne sont rien moins que 
  divines. Dans ce contexte, la fidélité dans la relation est un reflet de la 
  propre nature de Dieu, longanime et plein de miséricorde.
  En dernière analyse, ni le mari ni la femme ne s'approprie ce que l'autre 
  offre. Au contraire, chacun l'offre en retour – en même temps que son propre 
  être – à la source de toute vie, à Dieu, que chacun de nous vient contempler, 
  et rencontrer, et aimer dans l'autre, exactement comme nous le faisons dans la 
  liturgie eucharistique. L'homme et la femme deviennent le pain et le vin de 
  l'eucharistie. Alors l'amour sacramentel devient bénédiction, conférée par le 
  Créateur à deux créatures qui ont parcouru le même cours de la vie à travers 
  les obstacles ou joies auxquels il a pu les amener. Et c'est ainsi qu'ils 
  entreront, transfigurés, dans le Royaume de Dieu.
  Première publication dans Souroge, 
  revue du diocèse du patriarcat de Moscou
  en Grande-Bretagne. Traduit de l’anglais 
  par le Service orthodoxe de presse
  SOP no. 275, février 2003.