Le texte intégral pris sur le site de l'ECOF administré par le P.Guy Barrandon :
http://orthodoxie.free.fr/
certains passages sont mis en gras par moi.
7 - DOCUMENTS CONCERNANT LES ENTRETIENS
AVEC LE SAINT SYNODE DE L'EGLISE DE ROUMANIE.
20 décembre 1986
I - Lettre du Conseil épiscopal de l'Eglise orthodoxe de France
A PROPOS DE L'ENTRETIEN DE SA BEATITUDE THEOCTIST,
PATRIARCHE DE ROUMANIE, AVEC MONSEIGNEUR GERMAIN DE SAINT-DENIS,
EN DATE DU 19 NOVEMBRE 1986
Le Conseil épiscopal informe tous les clercs et les fidèles de l'Eglise Catholique Orthodoxe de France des faits suivants, car il les juge graves pour l'avenir de notre Eglise.
LES FAITS
Notre évêque Mgr Germain, ayant été invité à prendre part à l'élection (9 novembre 1986) et aux cérémonies d'intronisation (16 novembre 1986) de Sa Béatitude Théoctist nouveau patriarche de Roumanie, a eu le privilège à Bucarest de s'entretenir avec ce dernier ainsi qu'avec deux membres du Synode permanent de l'Eglise de Roumanie.
Or, les nouvelles exigences formulées à cette occasion par le patriarche et les membres du Synode permanent remettent en cause les conventions signées en 1972 et tout particulièrement, en ce qui concerne :
- le nom de notre Eglise,
- le rite,
- la compétence territoriale
En ce qui concerne le nom de l'Eglise Catholique Orthodoxe de France, il est exigé de. supprimer le terme "EGLISE" pour le remplacer par celui de "DIOCESE" afin que nous ne prétendions plus être autre chose que le "DIOCESE CATHOLIQUE ORTHODOXE DE FRANCE DU PATRIARCAT DE ROUMANIE".
En ce qui concerne le rite, il est exigé que le RITE BYZANTIN soit officiellement célébré le dimanche dans toutes nos paroisses, ce qui sous-entend l'adoption et du calendrier et des ornements orientaux. La liturgie de saint Germain-de-Paris n'est pas interdite mais devient secondaire.
En ce qui concerne la compétence territoriale, il est interdit à l'évêque Germain d'accorder sa sollicitude à tous les occidentaux orthodoxes hors des frontières de la France.
Il est demandé à l'évêque Germain d'imposer ces mesures dans les plus brefs délais. Une visite en France du métropolite Nicolas du Banat, en février prochain, en serait l'échéance.
EVOLUTION DE NOS RELATIONS AVEC L'EGLISE DE ROUMANIE
Pour comprendre la situation présente, rappelons brièvement l'historique de nos relations avec l'Eglise orthodoxe de Roumanie.
En 1967, alors que notre Eglise était en quête d'un lien canonique avec une Eglise-sœur, l'évêque Jean de Saint-Denis rencontrait Sa Béatitude Justinien, patriarche de l'Eglise de Roumanie. Ce dernier, attentif à l'universalité de l'Eglise Orthodoxe et aux besoins de notre Eglise, demandait à l'évêque Jean de fournir au Saint-Synode roumain un dossier permettant de vérifier la canonicité de notre Eglise, tant dans la confession de la Foi à travers la vie ecclésiale, que dans la pratique liturgique et la vie spirituelle.
Le Saint-Synode de Roumanie, après avoir soigneusement étudié le dossier, a effectivement reconnu l'authenticité de la restauration de l'ancien rite des Gaules et, en 1972, a béni notre Eglise en l'accueillant au sein de la juridiction de l'Eglise orthodoxe de Roumanie.
Entre-temps, l'évêque Jean de bienheureuse mémoire est né au ciel (1970) mais l'Eglise de Roumanie consolidait sa décision en consacrant un nouvel évêque pour l'Eglise catholique orthodoxe de France, Mgr Germain, ceci en date du 11 juin 1972.
Or, dès 1974, le patriarche Justinien apportait des restrictions quant à l'interprétation à donner aux statuts signés en 1972. Cependant les choses sont restées en l'état, aussi bien durant le patriarcat de Sa Béatitude Justinien que de son successeur Sa Béatitude Justin et ce, jusqu'à la naissance au ciel de ce dernier le 31 juillet 1986.
Pour lever toute ambiguïté sur l'avenir des relations entre l'Eglise de Roumanie et l'Eglise catholique orthodoxe de France,
le Conseil épiscopal a cru bon d'écrire, le 4 octobre 1986, au Saint-Synode de Roumanie afin que soient redéfinis clairement les termes de nos statuts.
Lors de l'entrevue du patriarche Théoctist avec l'évêque Germain, en novembre dernier, la réponse apportée fut sans équivoque. Non seulement elle ne répond pas à l'attente de la lettre du Conseil épiscopal, mais elle formule des exigences qui dénient les actes signés en 1972.
CONSEQUENCES DES NOUVELLES EXIGENCES
Il est évident que ces nouvelles exigences dénaturent profondément la personnalité de notre Eglise et remettent en cause ses principes fondamentaux face à sa mission historique.
Si ces exigences devenaient effectives, nous devons comprendre que le départ de notre évêque serait inéluctable à double titre :
- parce que l'évêque Germain, ayant été sacré pour être évêque de l'Eglise catholique orthodoxe de France, jugera impossible d'accomplir sa mission au service d'une Eglise qui renie sa spécificité,
- parce qu'il laissera la place à un autre hiérarque qui sera mandaté pour la mise en application des nouvelles dispositions.
La situation est grave et appelle une résolution urgente étant donné que l'échéance probable est février 1987.
En conséquence, le Conseil épiscopal demande à l'ensemble du clergé et des fidèles de se prononcer à nouveau sur le Statut de notre Eglise (décisions réciproques prises entre l'Eglise orthodoxe de Roumanie et l'Eglise catholique orthodoxe de France, en 1972) et, plus précisément, sur les trois mesures imposées dernièrement par l'Eglise de Roumanie à travers notre Evéque, mesures décrites au début de cette lettre.
Le Conseil épiscopal réunira les documents ainsi fournis et enverra trois de ses membres en délégation auprès du Patriarche et du Saint-Synode permanent de l'Eglise de Roumanie, afin de leur remettre ces déclarations sur l'"Eglise catholique orthodoxe de France".
On espère de cette façon permettre à l'Eglise orthodoxe de Roumanie de renouveler la responsabilité des actes canoniques produits par elle en 1972, actes qui fondent l'autonomie de notre Eglise.
Le Conseil épiscopal
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21 septembre 1987
POUR MEMOIRE : Mgr Germain adresse au patriarche Théoctist la "Lettre ouverte" publiée en annexe page 248.
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7 octobre 1987
II - Documents de la Chancellerie du Saint-Synode de l'Eglise de Roumanie :
(adressés aux paroisses de l'Eglise catholique orthodoxe de France, aux autres Eglises orthodoxes et aux autres Eglises chrétiennes).
AU SUJET DE SON EXCELLENCE GERMAIN ET DE
L'EVECHE ORTHODOXE CATHOLIQUE DE FRANCE
Le 6 juin 1972, l'Eglise Orthodoxe Roumaine a décidé d'accorder assistance canonique à un diocèse orthodoxe de France siégeant à Paris, en vertu de la demande et de la "profession de foi" de celui-ci, présentées par écrit au Saint-Synode.
Par cet acte, l'Eglise Orthodoxe Roumaine a considéré recevoir ainsi sous sa juridiction une unité ecclésiastique ayant l'autonomie dont bénéficie tout diocèse, selon la tradition et les règles canoniques orthodoxes.
Mais, bientôt après, le chef de ce diocèse, Son Excellence l'Evêque Germain, a manifesté des tendances d'individualisation et de non-observation des réglements et des canons orthodoxes, de cette manière n'arrivant pas à s'intégrer dans l'orthodoxie oecuménique.
La situation créée a suscité de l'inquiétude et a entraîné de nombreuses discussions dans le cadre du Saint Synode de l'Eglise Orthodoxe Roumaine et du Synode Permanent, chaque fois lui étant recommandé d'observer les règles liturgiques et canoniques orthodoxes.
En vue d'une réglementation, depuis l'année 1974 la situation du diocèse a été analysée avec l'évêque Germain et les représentants de celui-ci, aboutissant à la conclusion d'un "Protocole" concernant le développement d'une activité correcte qui conduise à la communion avec les autres hiérarques orthodoxes de France et qui évite tout écart qui pourrait nuire à la bonne coexistence avec les autres Eglises chrétiennes de France et d'autres pays.
Quoique l'Evêque Germain et ses collaborateurs aient assuré qu'ils respecteront le Protocole conclu, par la suite ils ont fait preuve d'individualisation de la vie ecclésiastique et de
tendance à s'éloigner de la doctrine orthodoxe, créant ainsi une atmosphère de confusion et de suspicion, de nature à influencer de manière négative les rapports entre l'évêque, les prêtres et les fidèles, ainsi qu'avec les autres diocèses orthodoxes de France et d'autres pays.
Dans ce contexte, le Patriarcat Roumain invite Son Excellence l'Evêque Germain et les représentants du clergé et des fidèles de l'Evêché Orthodoxe Catholique de France, en vue de clarifier la situation où l'on est arrivé et de l'intégration de son chef et de son clergé dans les règlements canoniques.
CHANCELLERIE DU SAINT SYNODE
N.B. Cette circulaire fait état de ce que : "Son Excellence l'Evêque Germain (..) n'arrive pas à s'intégrer dans l'Orthodoxie œcuménique ; ce qui "nuit à la bonne coexistence... ; et elle justifie cette situation par des "tendances d'individualisation" de l’Evêque. Comme, de l'ensemble de ce texte, transparaissait manifestement la méconnaissance de l'ordonnance édictée en 1975 parle Patriarche Demetrios interdisant toute relation avec l'Evêque Germain, ce demier prit la liberté d'en informer le Synode roumain qui, en effet, n'en avait pas eu connaissance, et qui demanda que lui soit envoyée une photocopie de ce document.
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16 octobre 1987
III - Lettre de Monseigneur Germain (en commentaire au texte précédent).
AUX CLERCS ET AUX PAROISSES DE
L'EGLISE CATHOLIQUE ORTHODOXE DE FRANCE
Mes clercs et fidèles bien-aimés,
Vous avez reçu, ou vous allez peut-être recevoir prochainement, un texte intitulé : "AU SUJET DE L'EVEQUE GERMAIN ET DE l’EVECHE ORTHODOXE CATHOLIQUE DE FRANCE" texte publié et diffusé par la Chancellerie du Saint-Synode de l'Eglise Roumaine[1].
Vous comprendrez facilement, à la lecture de ce document, l'embarras réciproque ainsi créé entre notre Patriarcat et nous-mêmes quant au statut ecclésiastique et canonique de notre Eglise. Ce statut est-il remis en cause, doit-il être aménagé et comment cela pourrait-il se faire ? Autant de questions que ce document, transmis également aux autres Eglises orthodoxes et aux autres Eglises chrétiennes, ne laisse pas facilement percevoir.
Empli d'émotion et d'inquiétude devant une initiative synodale que rien ne me permettait d'attendre sous une telle forme, je demande à notre Patriarche Théoctist ce qu'il convient de penser et de faire maintenant. Je vous ferai part, dès que possible, de la réponse et des entretiens entre Sa Béatitude le Patriarche et nous-mêmes sur ce sujet.
En attendant ce temps je vous prie de garder la paix, la confiance dans l'Eglise et de vous souvenir que nous avons donné à notre Patriarche, au mois de février dernier, avec notre foi, tout précision sur notre personnalité ecclésiastique, sur notre ardeur à la promouvoir sans préjudice pour quiconque et sur notre fidélité à l'Eglise de Roumanie qui bénit avec cœur et vérité, en 1972, notre Eglise sur son chemin.
Il semble, à travers les lignes du texte invoqué, que la Chancellerie du Saint-Synode soit mal informée sur nos relations réciproques et qu'elle soit aussi sollicitée pour suspecter notre foi et notre vie d'Eglise par quelques uns des autres diocèses orthodoxes en France et par leurs correspondants dans d'autres pays d'Occident.
Je veux croire pour le moment que la seule question posée soit celle de la personnalité de notre Eglise. Je crois que cette personnalité continue, comme elle le fait depuis cinquante ans, de promouvoir une ecclésiologie à laquelle les héritiers de l'Église d'Orient ne sont pas tous habitués.
Je vous prie tous, en conséquence, de prier ardemment la Très Sainte et Divine Trinité et tous nos fondateurs et précurseurs, particulièrement les Saints Evêques, Archevêque et Patriarches : Jean de Saint-Denis, Jean de San-Francisco, Serge de Moscou, Justinien et Justin de Roumanie, pour que les yeux et les cœurs de nos frères orthodoxes s'ouvrent à cette cause qui est la nôtre et que les patriarches précédemment nommés ont unanimement appelé :
"L'EGLISE ORTHODOXE D'OCCIDENT'
En vous bénissant, je fais appel à votre fidélité, à celle qui vous engendra à la foi et à la vie orthodoxes.
X Germain
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7 novembre 1987
IV - Déclaration de l'Assemblée Générale Extraordinaire de l'Église Catholique Orthodoxe de France
A SA BEATITUDE LE PATRIARCHE THEOCTIST ET
AU SAINT-SYNODE DE L’EGLISE DE ROUMANIE.
Statutairement convoquée par son Président Monseigneur Germain de Saint-Denis et le Conseil Episcopal, l'Assemblée Générale Extraordinaire de l'Eglise Catholique Orthodoxe de France s'est réunie le samedi 7 novembre 1987, à 14 heures, en l'Eglise-Cathédrale Saint-Irénée, 96 boulevard Auguste Blanqui 75013 PARIS. A l'Ordre du Jour:
- Information et discussion du texte diffusé par la Chancellerie du Saint-Synode du Patriarcat de Roumanie le 7 octobre 1987 et intitulé : "AU SUJET DE SON EXCELLENCE GERMAIN ET DE L'EVECHE ORTHODOXE CATHOLIQUE DE FRANCE".
- Réponse à apporter par l'E.C.O.F. à ce texte.
- Vote des décisions prises.
Rassemblée autour de l'Evêque Germain, l'Assemblée a examiné les implications ecclésiales du texte cité dans l'Ordre du Jour.
Etant donné la gravité des termes du texte de la Chancellerie de l'Eglise de Roumanie, l'Assemblée doit maintenant se prononcer. Elle le fait, tout d'abord, en proclamant sa fidélité à son Evêque, Monseigneur Germain.
L'Assemblée assure Sa Béatitude le Patriarche Théoctist de son profond respect et de son attachement filial, de son désir sincère et véritable de conserver la sainte bénédiction de l'Eglise de Roumanie. Elle formule l'ardent espoir que Sa Béatitude le Patriarche Théoctist et le Saint-Synode accepteront avec une paternelle sollicitude, de l'aider à clarifier la situation pour trouver la paix avec les autres frères orthodoxes.
L'Assemblée dans une attitude filiale, présente à Sa Béatitude quatre réflexions :
1- La confession de la Foi et la Doctrine Orthodoxes demeurent au centre de la vie de l'E.C.O.F.
Si des maladresses d'expression dans des écrits et des erreurs de comportement ont pu prêter à mettre en doute la vérité et la solidité du dogme, l'Assemblée est prête à amender ce qui devrait être et demande conseil à Sa Béatitude dans ce domaine essentiel.
2 - L'Assemblée espère que les dispositions fondamentales des Statuts canoniques de 1972 demeurent inchangées dans l'esprit de Sa Béatitude. Elle suggère que certains éléments du protocole de 1974 servent de base au dialogue entre Sa Béatitude, le Saint-Synode et les représentants de l'E.C.O.F.,
afin de rechercher des aménagements pratiques devant faciliter la reconnaissance de l'E.C.O.F. par les autres éparchies orthodoxes en France et permettre d'entrer en communion avec celles-ci.
3 - L'Évêque Jean de Saint-Denis écrivait à Sa Béatitude le Patriarche Justinien, en date des 28 et 29 juin 1969, au nom de l'Assemblée Générale de l'E.C.O.F. :
"La renaissance de l'Orthodoxie en Occident, en France particulièrement, renaissance qui a derrière elle plus de quarante années de labeur, de lutte et de fidélité, présente un intérêt pour l'Orthodoxie tout entière. Elle restaure dans les temps présents l'ampleur de l'Orthodoxie des premiers siècles qui unissait l'Orient et l'Occident dans la même foi, les mêmes dogmes et la même ecclésiologie. L'Eglise de France est le messager de la richesse inépuisable de la tradition orthodoxe dans tous les milieux et tous les pays d'Occident. Vers elle se tournent les Orthodoxes occidentaux de l'étranger : Suisses, Allemands, Norvégiens, etc. conscients qu'elle seule peut apporter une solution à leur recherche angoissée.
(Cf. "Présence Orthodoxe", 3ème trimestre 1972, n° 19, page 17, 4ème alinéa)
L'Assemblée sait, cependant, que l'existence de clercs et de communautés en dépendance de l'Evêque Germain dans divers pays d'Occident crée des difficultés à l'Eglise de Roumanie avec les autres Eglises Orthodoxes représentées dans ces pays.
Pour préserver le principe de "communauté orthodoxe occidentale", l'Assemblée demande à Sa Béatitude le Patriarche Théoctist d'accepter que soit réexaminée, cas par cas, la situation de chacune des personnes et des communautés en question.
4 - L'Assemblée approuve que l'Evéque Germain, accompagné de représentants de son clergé et de ses fidèles, se rende à l'invitation qui lui est faite par Sa Béatitude e Patriarche Théoctist, dans le but de clarifier la situation et apporter la paix fraternelle au sein des communautés orthodoxes et des autres Eglises chrétiennes. La présente déclaration a été soumise au vote de l'Assemblée Générale et approuvée à l'unanimité des délégués présents, selon la liste de présence ci-jointe.
Certifié conforme pour valoir ce que de droit
Le Président de l'E.C.O.F.
X GERMAIN
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14/18 mars 1988
V - Compte-rendu de réunion
PROCèS-VERBAL OFFICIEL DES DISCUSSIONS TENUES A BUCAREST
REDIGé PAR LE SECRéTAIRE DU SAINT-SYNODE DE ROUMANIE.
Comme on le sait, le 6 juin 1972, le Saint Synode de l'Eglise Orthodoxe Roumaine a reçu sous sa juridiction canonique, à la suite de demandes instantes et de longues discussions, "Le Diocèse Catholique Orthodoxe Français"[2] Le 11 juin de la même année a eu lieu le sacre épiscopal et l'installation en tant qu'évêque de Mgr Germain Hardy, conformément aux règlements canoniques orthodoxes.
Conscients de la responsabilité qui revient, par ailleurs, à toute Eglise, l'Eglise Orthodoxe Roumaine a fait en sorte que ce diocèse puisse recevoir une réglementation canonique.
Par sa décision, le Saint-Synode de l'Eglise Orthodoxe Roumaine entendait recevoir sous sa juridiction un diocèse doté de l'autonomie administrative dont bénéficie tout diocèse selon la tradition canonique dans le cadre d'une Eglise, celui-ci s'engageant à observer soigneusement la doctrine et la discipline orthodoxes.
Devant la difficulté pour le diocèse d'assumer ses engagements et de s'intégrer totalement dans les règles canoniques, le Patriarcat Roumain s'est vu obligé de rendre public un document intitulé : "La position du Patriarcat Roumain à l'égard de l'Evêché Orthodoxe Catholique de France et de son dirigeant, l'Evêque Germain" et de l'envoyer à Mgr Germain et aux prêtres de son diocèse. Maintenant, selon la décision du Synode Permanent du 18 février 1988, la Commission synodale de l'Eglise Orthodoxe Roumaine, formée par : Mgr Nicolae, le Métropolite du Banat; Mgr l'Archevêque Antim de Tomis et du Bas-Danube : Mgr l'Archevêque Adrian de l'Europe Centrale et Occidentale ; Mgr l'Evêque Nifon Ploiesteanul, Vicaire Patriarcal, le Secrétaire du Saint Synode, s'est réunie au Palais du Saint Synode du Monastère Antim de Bucarest, du 14 au 18 mars 1988, pour analyser la situation avec la délégation de l'Evêché Orthodoxe Catholique de France, formée par : Mgr l'Evêque Germain de Saint-Denis, les PP. Maxime Jourdant et Marc-Antoine Costa de Beauregard, et M. le Dr Ghassan Azar ;
Les discussions ont suivi cet ordre du jour
1- Les liturgies byzantines traditionnelles et la liturgie du rite adopté par l'Evêché Orthodoxe Catholique de France.
2 - Le problème du respect des normes canoniques et traditionnelles concernant les prétentions de l'Evêché Orthodoxe Catholique de France d'étendre sa juridiction en dehors de la France (organisation de paroisses, fondation de monastères, ordinations ecclésiales).
3 - La prétention de se nommer "l'Eglise Catholique Orthodoxe de France" et non "l'Evêché Orthodoxe Catholique de France" et ses implications ecclésiologiques. (Référence au Protocole de 1974 et aux documents postérieurs à l'entrée sous la juridiction du Patriarcat Roumain).
4 - Les raisons pour lesquelles n'ont pas été respectés les engagements assumés lors de l'entrée sous la juridiction du Patriarcat.
5 Aspects liés aux conceptions personnelles de l'Evêque Germain en matière de théologie et d'orientation pratique.
6 - Qu'est-ce qui a été fait par l'Evéché Orthodoxe Catholique de France pour entrer dans la communion des Eglises Orthodoxes ?
Suite aux discussions avec Mgr l'Evêque Germain et avec les membres de la délégation, ceux-ci s'engagent :
1. Quant aux problèmes de la vie liturgique du diocèse, à l'avenir:
-
Nous nous engageons à célébrer en règle générale au moins un Dimanche par mois les Saintes Liturgies Orthodoxes byzantines traditionnelles.
-
Nous chercherons à nous harmoniser avec les autres communautés orthodoxes en France en ce qui concerne le texte de la Sainte Liturgie byzantine.
- Nous renonçons définitivement à la "Synaxe diaconale"[3]
- Nous suivons les principes du sanctoral dans le calendrier orthodoxe.
-
Nous respectons les règles canoniques orthodoxes concernant la confession et la sainte communion.
- Nous demandons périodiquement le Saint Chrême au Patriarcat Roumain, comme expression de notre dépendance juridictionnelle à l'égard de l'Eglise Orthodoxe Roumaine ; il sera utilisé lors du sacrement du baptême, pour la consécration des nouvelles églises, etc.
- Nous intensifierons nos relations avec l'Eglise Orthodoxe Roumaine, invitant des hiérarques, des professeurs de théologie, des prêtres, des moines, afin d'approfondir l'enseignement et les pratiques authentiques de la vie orthodoxe.
- Au moins une fois par année, l'Evêque se présentera au Patriarcat Roumain pour analyser la situation de la vie religieuse de son Diocèse.
2. En ce qui concerne les problèmes d'outre canonique de notre Diocèse, nous nous engageons à ce qui suit :
- L'organisation de toute paroisse en dehors des frontières françaises sera présentée à l'approbation du Saint-Synode de l'Eglise Orthodoxe Roumaine.
- Quant aux paroisses déjà formées à l'extérieur de la France, leur situation sera soumise au Saint-Synode de l'Eglise Orthodoxe Roumaine en vue d'une analyse et de la prise d'une décision.
- Le problème général d'organisation des nouvelles paroisses, celui de la formation et de l'ordination des prêtres et des diacres et celui de la discipline ecclésiastique feront l'objet de l'élaboration d'un règlement qui sera présenté à l'approbation du Saint Synode, dans un délai de six mois.
- On soumettra, à l'avenir, à Sa Béatitude le Patriarche de Roumanie et au Saint Synode de l'Eglise Orthodoxe Roumaine tout problème canonique, dogmatique, cultuel ou concernant les règles de la vie orthodoxe, qui dépasse la compétence de l'Evêque.
3. Concernant le problème de l'appellation du Diocèse nous nous engageons à ce qui suit :
-
Tenant compte de la situation réelle actuelle, notre Diocèse sera appelé "Evêché Orthodoxe Catholique de France sous la juridiction du Patriarcat de Roumanie". En tant que tel, ce diocèse est tenu de respecter les règles canoniques et il jouit de l'autonomie administrative propre à un diocèse, conformément à la tradition orthodoxe.
4. Quant à l'observation des engagements pris dès l'entre sous la juridiction du Patriarcat Roumain, nous déclarons ce qui suit :
-
Malgré notre bonne volonté et notre bonne foi, malgré nos efforts et certains progrès réels, nous n'avons pas pu tenir complètement nos engagements. Ceci était dû à notre faiblesse et à notre jeunesse : nous avons eu simultanément à croître organiquement comme orthodoxes et à rencontrer le monde d'aujourd'hui.
- Nous espérons que nos nouveaux efforts nous permettront de dépasser ce stade et de tenir nos engagements en parvenant à la pleine communion avec les différentes communautés orthodoxes en France.
5. Suite aux observations faites dans le passé à propos des conceptions personnelles de Mgr l'Evêque Germain en matière de théologie, et de ses prétendues implications dans telle ou telle association extra-ecclésiale (ésotériques, occultistes etc.) on a analysé tous les aspects du problème.
Mgr l'Evêque Germain a présenté les explications suivantes :
-
Je réaffirme mon plein attachement à l'enseignement de la foi et à la pratique orthodoxes. Je suis déterminé à procéder de façon à infirmer dans toute la mesure du possible les accusations à mon encontre tant par mes actes que par nos publications. Je veillerai au contenu des éditions et des revues pour qu'elles contiennent les thèmes de la pensée orthodoxe traditionnelle ayant en vue leur orientation vers les préoccupations de l'Orthodoxie contemporaine. J'encouragerai par tous les moyens dont je dispose le clergé et les fidèles dans cette voie.
6.
Concernant les relations avec les autres communautés orthodoxes : nous sommes conscients du fait que par certaines de nos erreurs nous n'avons pas réussi jusqu'à présent à convaincre tous nos frères de notre Orthodoxie.
- Nous assurons à nouveau aujourd'hui le Saint Synode de l'Eglise Orthodoxe Roumaine de notre pleine adhésion à la doctrine et à la pratique orthodoxes.
Nous demandons à nos frères orthodoxes de ne plus nous rejeter, d'accepter de parler avec nous et de travailler ensemble, afin que nous puissions jouir d'une pleine communion avec eux et voir notre Evêque siéger au sein du Comité inter-épiscopal orthodoxe de France. Nous espérons, qu'en nous tenant à ce qui vient d'être dit, nous aboutirons à ce but béni par Dieu.
Ce document sera publié et soumis au Saint Synode qui jugera de son application.
(Suivent le signatures des quatre évêques roumains et des quatre délégués français).
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23 avril 1988
VI - Lettre de l'Evêque Germain (en commentaire au texte précédent)
AUX CLERCS ET AUX FIDELES DE
L'EGLISE CATHOLIQUE ORTHODOXE DE FRANCE
Entre le 13 et le 19 mars 1988, une délégation, formée de deux clercs - lespèresMaxime Jourdant et Marc-Antoine Costa de Beauregard - et d'un laïc - le docteur Ghassan Azar - m'a accompagné à Bucarest auprès de Sa Béatitude notre patriarche Théoctist.
Invités pour examiner la vie de notre diocèse, sa relation avec l'Église de Roumanie et ses rapports avec les autres Eglises orthodoxes, nous avons été reçus par une Commission épiscopale bénie à cette intention par le patriarche. Cette Commission de quatre membres comportait le métropolite Nicolas du Banat, l'un de mes consécrateurs, l'archevêque Antim de Tomis, qui connut Monseigneur Jean, et le reçut au temps du patriarche Justinien, l'archevêque Adrien, notre père et frère roumain de Paris, et Monseigneur Nifon, secrétaire du Saint-Synode.
Après trois jours d'entretiens, entre la fête de Saint Benoît, au calendrier oriental, et la fête de saint Patrick, au calendrier occidental, on convint de produire et de signer le "Compte-rendu" des séances qui vous est communiqué, fidèlement, avec cette lettre. Le patriarche voulut bien nous recevoir pour mettre un terme à ces travaux, pour nous bénir, et pour nous recommander de nous conformer filialement à l'esprit du texte avant même sa soumission au Saint-Synode.
Connaissant votre attachement à la Foi et votre amour de l'Eglise orthodoxe, et conscient de la valeur de nos décisions réciproques pour la fortification de notre vie quotidienne et pour l'éducation de nos rapports avec les autres communautés orthodoxes, particulièrement en France, je vous fais le commentaire que voici :
La Commission épiscopale roumaine, avec la bénédiction du patriarche, a entendu placer le débat dans la perspective de l'existence quotidienne et des événements concrets. On a délibérément laissé de côté une discussion théologique et la question générale de l'ecclésiologie, sachant que nous sommes tous en accord sur ces sujets, accord qui a permis au Saint-Synode roumain de nous recevoir, en 1972, sous sa juridiction canonique.
Six chapitres ont été proposés à la discussion :
1. Le chapitre liturgique ;
2. Notre ordonnance canonique en France et à l'étranger ;
3. L'appellation ou "le nom" pour désigner notre Eglise ;
4. L'évaluation des engagements pris en 1972 et leur observation ;
5. Les accusations produites contre la doctrine et les actes de l'évêque ;
6. Notre faculté de convaincre ou non de notre orthodoxie les autres communautés orthodoxes en France.
Sans qu'il soit touché à nos Statuts canoniques et juridiques, pour stabiliser notre vie intérieure, pour en appeler à la bienveillance des autres Eglises orthodoxes, en gardant intacte notre action missionnaire en Occident chrétien, nous avons décidé d'accepter les propositions de la Commission synodale relatives à ces chapitres, et de les mettre en application avec bonne foi.
Nos engagements principaux se présentent ainsi :
1- Dans nos paroisses adultes et capables, c'est-à-dire celles qui ont dépassé le stade de la simple communauté de foi et de prière pour une trentaine de personnes, on célébrera la Liturgie byzantine, non seulement certains jours de férie, mais le dimanche une fois par mois.
Cette disposition, déjà largement appliquée, ne s'appliquera pas obligatoirement aux Temps préparatoires (Carêmes) de Noël et de Pâques, puisqu'en ces temps l'ancien rite des Gaules procure des textes et des offices exceptionnellement riches et aptes à communiquer la vie des Mystères, fruit de la tradition antique.
2 - On constituera une sorte de Code canonique interne, un règlement, pour préciser l'organisation des paroisses, la formation et le cadre de l'organisation des clercs, et les points utiles de la discipline ecclésiastique. Je note qu'un tel travail est commencé depuis quelque temps par notre Commission canonique.
Quant aux organisations paroissiales à l'étranger, certaines datant de plus de quarante années, on les gardera avec soin, et on examinera leur avenir, cas par cas, avec le Saint-Synode. Si une ordination ou l'organisation d'une paroisse devaient être faite à l'étranger, il conviendrait de les soumettre auparavant à l'approbation synodale.
3 - La dénomination pratique de l'Eglise sera maintenant celle de son organisation concrète de diocèse unique. Il y a lieu d'écrire ainsi :
"
Evêché catholique orthodoxe de France
dans la juridiction du patriarcat de Roumanie"
Cette dénomination ne fait pas de nous une diocèse roumain, ni un évêché de l'Eglise de Roumanie. Elle limite volontairement l'espace ecclésiastique afin d'en appeler auprès des autres organisations ecclésiastiques orthodoxes en France, et de discuter avec elles, de notre foi en général et de l'Eglise orthodoxe en Occident en particulier.
On comprendra peut-être combien cette disposition nous crucifie. Elle propose, en tous cas, de forger la personnalité de l'Eglise, par le dépouillement auquel elle oblige, et de proposer, en même temps, sa réalité à la charité des autres Eglises orthodoxes.
Cette problématique - celle de l'universalité de l'Eglise orthodoxe - est extrême à notre époque. Nous avons accepté d'y faire valoir notre part de responsabilité dans la décision précédente. Je vous demande à tous de vivre et de prier, en sorte que notre Dieu nous procure, avec cet acte, la fécondité escomptée.
4
- Certains engagements pris aux origines avec l'Eglise roumaine, tels que la fréquence de la célébration de la Liturgie byzantine, n'ont pu être entièrement respectés.
On a constaté notre bonne foi en ce domaine et, par ailleurs, l'impact de la situation religieuse et morale du monde contemporain dans lequel nous sommes apparus, et dans lequel nous grandissons. Cette situation morale et religieuse, héritée de plusieurs siècles de civilisation et de culture, nous contraint à des attitudes et actes missionnaires qui nous interdisent l'acquisition du profil commun et habitudinaire des Eglises orthodoxes. Ceci provoque des réflexes hostiles, bien que superficiels, d'autres communautés orthodoxes en France ou à l'étranger.
Nous sommes convenus d'en discuter avec ceux qui sont concernés.
5 - La doctrine et les actes de l'évêque ne sont pas mis en cause par l'épiscopat roumain. On a pris acte des accusations produites en ce domaine, discernant le but fréquent de ces allégations : "Chassez le pasteur, et le troupeau sera dispersé !"
Il est cependant un domaine important où une initiative peut être prise : celui des revues et publications. La Commission épiscopale a recommandé à l'évêque de veiller à la croissance de ces instruments privilégiés à la catéchèse orthodoxe.
6 - L'Eglise roumaine a vivement souhaité, et souhaite toujours, que l'évêque soit admis auprès du Comité inter-épiscopal orthodoxe en France,
et que nos clercs et fidèles soient admis sans réticence, lorsque l'occasion s'en présente, à la vie sacramentelle des communautés dépendant du patriarcat œcuménique en France.
On peut et on veut croire que ce sont certaines de nos erreurs qui ont empêché de réaliser cette communion, et non pas la tradition canonique de l'Eglise grecque. Aussi présentons-nous la pétition finale du compte-rendu (ci-joint) auprès de l'Eglise roumaine et auprès des évêques du Comité inter-épiscopal orthodoxe en France et de leurs communautés, ce qui fait la conclusion de ma "Lettre ouverte en commentaire d'un document publié en juin 1979 par la revue SOP", à savoir :
"Puissent ces lignes servir à la paix, à l'union en esprit et en vérité, et ouvrir aussi un nouveau dialogue entre orthodoxes capables de se supporter fraternellement. Nous demandons instamment à nos amis alarmés de trouver eux-mêmes un peu de bienveillance et de sollicitude pour s'honorer de charité, c'est-à-dire pour voir que nous existons, au-delà et en-deça de nos qualités et de nos défauts. Car, comme eux, nous avons reçu la pensée du Christ."
Je prie tous nos clercs et nos fidèles d'apprécier, à travers le compte -rendu et à travers cette lettre, la tâche sacrée que nous avons librement acceptée. Je garde une immense reconnaissance à l'Eglise de Roumanie, en la personne de ses évêques, particulièrement des patriarches Justinien et Justin qui ont prophétiquement vu l'Orthodoxie occidentale,
et je communique ce document aux fins de la charité aux autres Eglises orthodoxes et à leurs organes d'information, afin qu'il soit clair que nous entendons faire de nos accords avec notre Eglise protectrice l'échelle qui nous permettra de déborder la muraille de l'hostilité et de l'indifférence pour gagner les cœurs, s'il est possible.
En vérité, le Christ est ressuscité !
X Germain
[1]. Document du 7 octobre 1987, qui précède.
[2]. Dans tous les documents de juin 1972, il est question d'Église catholique orthodoxe de France et non de "Diocèse catholique orthodoxe français".
[3]. Office de Vêpres ou Laudes présidé par un diacre qui distribue les Dons présanctifiés (dans le cas où il n'y a pas de prêtre pour célébrer la liturgie eucharistique).