Début de la rubrique:Lun 19 Juil 2004 13:54
Geoffroy a écrit :Quelqu'un peut-il me dire un mot sur l'Eglise Russe Hors Frontière de Paris; cette juridiction m'intéresse au plus haut point...
On peut suppposer qu'il ne s'agit que d'une demande de simple renseignements
Mar 20 Juil 2004 19:34
Antoine a écrit :Qui est l'ERHF aujourd'hui suite à l'éclatement qu'elle a connue?
A cela vous répondez le Mar 20 Juil 2004 19:35
Aujourd'hui l'ERHF est celle de Mgr Lavre qui était d'ailleurs en visite à Moscou... Un groupe réduit de fidèles suit Mgr Vitaly
Bon on se dit que vous avez choisi votre camps dans cette fracture qui divise l'ERHF et que vous légitimez Mgr Lavre, tenant Vitaly et ses fidèles pour schismatiques. Je vous aurais sans doute mal compris puisque vous nous reprochez certaines insinuations qui vous auraient donc fait rapidement changer de bouillon .
Maintenant vous vous érigez en défenseur de Vitaly au sujet de propos inqualifiables et débordant de mépris. On se demande pourquoi...
Il y aura toujours des mots intraduisibles d'une langue à l'autre et c'est ce qui fait le charme de découvrir des expressions que l'on a pas dans sa propre langue pour cerner des situations et les conceptualiser avec plus de finesse. Essayez de traduire "Gemütlich" par exemple en Français.
Vitaly a raison d'insister donc sur le fait qu'un certains nombre d'expressions importantes de l'orthodoxie n'ont pas leur équivalent dans d'autre langues et notamment en français. Il faut une périphrase pour approcher le sens de ces mots. Mais justement ces périphrases sont également très importantes et je note au passage que ces périphrases sont également employés par les slavophiles eux mêmes pour expliciter ces mots qui débordent de richesseset demandent un enseignement complet pour pouvoir les dispenser. De là à en déduire monstrueusemlent que l'Europe ne peut pas accéder à l'orthodoxie c'est oublier trois choses importantes:
Premièrement la France par exemple était orthodoxe bien avant la Russie et bien avant l'invention du slavon. Le christianisme ne s'est pas propagé à partir du slavon et le slavon tout aussi respectable qu'il soit ne peut prétendre être la langue initiale du Christianisme en dehors de laquelle aucune vérité orthodoxe ne saurait être proclamée. Je ne savais pas que Jésus était Russe!
Deuxièmement il me semble que Vitaly -et Geoffroy qui s'en fait maintenant le défenseur- oublient un peu vite la pentecôte au cours de laquelle les apôtres s'exprimaient dans leur langue (sans doute l'araméen)et furent compris par tous les auditeurs qui s'étonnaient de les comprendre dans leurs propres langues. Je ne vois pas là de la part de l'Esprit Saint un mépris pour une langue quelconque bien aucontraire, ni une déclaration attestant que seul l'araméen serait susceptible de véhiculer la Vérité Chrétienne.
Troisièmement: Il est curieux de lire que Vitaly lie la possession des dons à une langue donnée
("Et il en est ainsi précisément parce qu'ils n'ont pas les dons eux-mêmes"). alors que l'ERHF a largement contribué à légitimer l'Ecof, non seulement dans sa langue mais aussi dans son invention d'une liturgie en français. Sans doute il n'y a pas que les mots qui ont dépassé sa pensée , les actes aussi...
Lisons plutôt l'excellente allocution prononcée par notre Evêque de "la slavonisante rue Daru", Mgr Gabriel, au congrès de syndesmos je crois. C'est la première que j'entends enfin un évêque dire publiquement ce qu'il pense à tous ceux qui militent pour une liturgie en slavon dont ils comprennent à peine 5%...et surtout que
la parole de Dieu est quelqu'un ce que semble avoir vite oublié Vitaly.
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La Parole de Dieu et la prédication dans l'Eglise
Par Mgr Gabriel de Comane
Si nous demandons à un protestant comment savoir quelque chose sur Dieu, il répondra: en lisant la Bible. Le principe de « sola scriptura » est saint et inviolable. Si nous posons la même question à un catholique, la réponse sera : par l'Ecriture et la Tradition, et l'unique norme de la tradition est le magistère. Mais nous, orthodoxes, nous répondons: tout ce que l'on entend à l'église, donc ce qui y est lu, ce qui y est chanté et ce qui est prié, tout cela est «la Parole de Dieu ». Mais la Parole de Dieu n'est pas quelque chose, mais quelqu'un : c'est le Verbe qui était au commencement, qui est tourné vers Dieu et qui est Dieu. Ce Verbe résonne dans le langage des hommes et ce Verbe s'est fait chair ; c'est ainsi que nous pouvons l'entendre et le voir. Parce que dans le Verbe de Dieu repose le souffle de Dieu: le Saint Esprit.
Le Saint Esprit inspire les prophètes et quand ils ouvrent la bouche c'est la Parole, le Verbe de Dieu qui vient au monde dans le langage des hommes.
Le Saint Esprit recouvre la Vierge et quand elle enfante, c'est le Verbe, le Fils unique de Dieu devenu homme qui sort d'elle.
A la Pentecôte, le Saint Esprit descend comme des langues de feu sur les disciples craintifs, et alors ils n'ont plus peur mais s'élancent dehors et proclament la Parole de Dieu dans le monde comme Evangile de la Résurrection, et en même temps commence l'administration des mystères, le baptême, l'eucharistie, et les autres sacrements. Et quand, à la prière du prêtre, le Saint Esprit descend sur nous et sur les dons, le pain et le vin, ils deviennent pour nous le Corps et le Sang du Verbe de Dieu, sacrifié pour notre salut. Et quand nous les recevons en nous, Il demeure en nous et nous en Lui.
C'est uniquement sur cette toile de fond qu'il peut être question de la Parole de Dieu: cela présuppose que Dieu nous parle, et que nous L'écoutions. La Parole de Dieu ne peut résonner que dans le cadre de la prière et de l'adoration, et avec toute notre raison, tout notre cœur et toutes nos forces dirigées sur Dieu : c'est cela le cadre pour le culte de l'Eglise.
La parole humaine est un son avec un sens. L'on ne peut user des termes « parler» et «entendre et écouter » que si celui qui parle le fait dans une langue que celui qui écoute peut comprendre. C'est pour cette raison qu'il y a des prophètes par qui Dieu même parle dans la langue des hommes, afin que nous Le comprenions. Le Verbe de Dieu veut être entendu par nous, mais aussi compris, loué, accepté et suivi. Le culte chrétien est « logikè latreia » ?adoration raisonnable, exprimée en paroles. La conclusion qui en découle ne laisse aucun doute :
un culte célébré dans une langue que les croyants ne comprennent pas, n'est pas un «culte raisonnable », c'est en premier lieu tout simplement idiot; tout aussi idiot que si demain je parlais de ce week-end à mon voisin en sanscrit. Il se dirait, et avec raison, que «ce pauvre évêque est devenu tout à fait fou ». Mais il y a encore plus grave. Parce que si je parle à mon voisin en sanscrit, il ne perdra que mon bavardage ; il pourra bien y survivre.
Mais si l'Eglise s'adresse aux croyants de façon incompréhensible (même si c'est le langage des anges, dit St Paul), alors ceux-ci sont privés de la Parole de Dieu - et ils n'y survivront peut-être pas, car la Parole de Dieu est nécessaire pour notre salut. Un tel culte et une telle prédication de la Parole de Dieu dans une langue incompréhensible est un culte de sons magiques, qui sont supposés avoir un effet « ex sonore sonato », de la pure résonances des sons. Et cela c'est le paganisme.